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“Anri Sala : Ravel Ravel Unravel” Biennale de Venise 2013, 55e édition
à Venise

du 1er juin au 24 novembre 2013



www.pavillonfrancais.com

 

 

© Gilles Kraemer, vernissage presse, pavillon français, "Anri Sala : Ravel Ravel Unravel", le 31 mai 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Anri Sala, RAVEL RAVEL, 2013. Projection vidéo HD sur deux écrans, couleur, son multi-canal, durée : 20 min. 45 sec. chacun / HD video projection on 2 screens, colour, sound: multichannel, duration: 20 min. 45 sec. each. Courtesy Galerie Chantal Crousel, Paris ; Marian Goodman Gallery, New York ; Hauser & Wirth, Zurich/Londres. ©Anri Sala.
2/  Anri Sala, © Julien Mignot / Eté 80
3/  Anri Sala, UNRAVEL, 201. Projection vidéo HD, couleur, sur deux écrans présentés dans deux espaces distincts. Son : discrete 2.0 (première projection) et discrete 4.0 surround (deuxième projection). Durée : respectivement 6' 10" et 20' 45" / HD video projection, colour, on 2 screens in 2 separate spaces. Sound: discrete 2.0 (first projection) and discrete 4.0 surround (second projection). Duration: 6' 10" and 20' 45" respectively. Courtesy Galerie Chantal Crousel, Paris ; Marian Goodman Gallery, New York ; Hauser & Wirth, Zurich/Londres ; kurimanzutto, Mexico City. ©Anri Sala.

 


texte de Gilles Kraemer, rédacteur pour FranceFineArt

 

En 2011, Chance de Christian Boltanski occupait le Pavillon français traitant, dans un défilement ininterrompu de visages de tous âges, du hasard, de la chance et de la malchance. L'année 2013 célébrant le 50e anniversaire de l'amitié franco-allemande (traité de l'Élysée), ces deux pays ont choisi d'échanger leurs pavillons nationaux qui se font face dans les Giardini. Les artistes invités par l'Allemagne, dans le Pavillon français sont Ai Weiwei, Romuald Karmakar, Santu Mofokeng et Dayanita Singh. Dans le Pavillon allemand, Anri Sala (né en 1974 à Tirana) a conçu quatre vidéos présentées dans les trois espaces de ce beau et imposant bâtiment.

Une œuvre visuelle et sonore qui se mérite : ne fallait-il pas patienter, une heure trente, lors des pluvieuses journées presse de la fin mai pour... enfin entrer. Et accéder à cette « œuvre complexe et poétique » comme le souligne Christine Macel, commissaire de l'exposition et entendre « le Concerto en ré majeur pour la main gauche de Ravel écrit pour l'absence d'une main et qui se joue d'une autre main » comme le définit ce vidéaste vivant entre Paris et Berlin. Le pianiste viennois Paul Wittgenstein, amputé du bras droit pendant la Première guerre mondiale, passera commande de concertos pour piano conçus pour lui auprès des compositeurs Korngold, Hindemith, Strauss, Schmidt et Prokofiev. Le français Maurice Ravel lui écrira en 1929 ce Concerto, achevé en 1930 et joué pour la première fois en 1931.

Dans les deux salles entourant l'immense chambre sourde, dans laquelle sont projetés simultanément Ravel Ravel deux films spécifiques au Concerto, sont diffusés sous le titre unique Unravel les deux films présentant la Dj Chloé Thévenin mixant les deux interprétations du Concerto. Dans la première salle, la caméra se centre sur le visage de Chloé, en gros plan, de face ou de profil. Du mixage de cette musique, elle tire des accents de contemporanéité avec quelques nuances japonaises n'existant nullement dans l'œuvre initiale, avec des temps de longs silences correspondant à des instants de réflexion et de maturation. Visuellement, elle s'interroge, réfléchit, ne se complaisant pas à un simple mixage mais à une création, aboutissant à une œuvre nouvelle. Des notes luxuriantes de Ravel, elle extrait une musique minimaliste de 6' 25''.

La gigantesque salle centrale, espace sans écho ou anéchoïque, propice à une écoute attentive des spectateurs - immergés dans une presque obscurité, enveloppés par la musique énergique et rythmée – accueille l'audition du Concerto, enregistré avec l'Orchestre National de France, dirigé par Didier Benetti, interprété par les pianistes Louis Lortie et Jean-Efflam Bavouzet. Sur les deux écrans superposées et légèrement décalés, sont projetées les images des mains et des poignets immobiles, pendant ou jouant filmés en gros plan, des pianistes. Une sensation de poursuite musicale, comme si ces deux mains gauches faisaient la course. Décalage des tempi d'une même œuvre jouée selon deux sensibilités différentes, provoquant une légère distorsion du son dans cette audition de 20' 45''.

Dans la troisième salle, l'on redécouvre Chloé mixant les deux interprétation du Concerto dans des plans plus larges ou très rapprochés, avec en bande sonore le Concerto « réunifié » permettant aussi de voir que les séquences de cette création d'Unravel le furent filmées, ce printemps, dans la grande salle du Pavillon. Une œuvre exigeante et précise, autour du travail du geste, du corps et de la main, relevant d'une expérience visuelle et sensorielle, avec un déplacement physique du spectateur dans l'espace sonore. Cette écoute émotionnelle de la musique ravelienne est pur moment de poésie.

Anri Sala est représenté à Paris par la galerie Chantal Crousel.
Un catalogue bilingue franco-anglais est coédité par l'Institut français, Manuella éditions et le CNAP

 

Gilles Kraemer

 

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire : Christine Macel

 

Anri Sala représente la France à la 55e exposition internationale d’art de la Biennale de Venise. Le projet, pensé par Anri Sala pour les espaces du Pavillon allemand où il sera exceptionnellement présenté, s’intitule Ravel Ravel Unravel (2013).

 

Le projet par Christine Macel, commissaire du Pavillon français
Le projet conçu par Anri Sala pour le Pavillon français, pensé pour les espaces du Pavillon allemand où il sera exceptionnellement présenté, s’intitule Ravel Ravel Unravel (2013).

Un titre polysémique construit sur le verbe to ravel qui en anglais signifie “emmêler” et son contraire, to unravel, qui signifie “démêler”, entre lesquels a été inséré l’homographe de to ravel, Ravel, en référence au célèbre compositeur français Maurice Ravel, auteur en 1930 du Concerto en ré pour la main gauche, qui constitue ici le cœur du projet d’Anri Sala.
Dans l’espace central du Pavillon, une première œuvre, Ravel Ravel, consiste en deux films chacun centré sur la main gauche d’un célèbre pianiste : Louis Lortie d’une part et Jean-Efflam Bavouzet d’autre part, tous deux choisis par Anri Sala pour interpréter le Concerto, enregistrés à cette occasion avec l’Orchestre National de France.
Le cœur du projet d’Anri Sala réside dans l’interprétation d’une même musique par deux musiciens. L’artiste précise : “chaque film se concentre sur la chorégraphie de la main gauche s’appropriant l’intégralité du clavier, tandis que la main droite demeure immobile”.
Ces deux films sont projetés simultanément dans une chambre sourde, et générant, grâce à un travail de spatialisation sonore, la perception d’une “course” musicale due au décalage des temps. L’artiste poursuit : “Mon intention est de faire résonner un espace consécutif à l’écart temporel entre les deux performances. Il s’agit, dans un environnement destiné à annihiler la sensation d’espace (par la suppression des échos), de créer paradoxalement un espace ‘autre’ ”.

Dans les salles adjacentes, deux autres films sont présentés sous le titre unique Unravel. Chloé, un Dj, est filmée seule, mixant les deux interprétations du Concerto dans une tentative de les faire se rejoindre.
Dans ces films Anri Sala poursuit son travail sur l’espace et le son que sur le langage silencieux du corps. Il propose une expérience sur la différence et le même, dans une œuvre ambitieuse, qui pousse encore plus loin ses recherches de spatialisation sonore. L’œuvre fait autant appel à l’intellect qu’au corps du spectateur, générant une puissante expérience physique et émotionnelle, l’immergeant dans la musique.
Pour Anri Sala, les espaces du pavillon allemand s’avèrent riches en possibilités pour son travail sur le son et l’espace. Sans se focaliser sur l’histoire du bâtiment, l’artiste n’en est pas moins intéressé par les résonances particulières que celui-ci et son histoire donneront à son œuvre.

 

Un échange de pavillon avec l'Allemagne
Christine Macel, commissaire du pavillon français et Anri Sala ; Susanne Gaensheimer, commissaire du pavillon allemand et les artistes invités - le plasticien Ai Weiwei, les photographes indien Dayanita Singh et sud-africain Santu Mofokeng, ainsi que le réalisateur, scénariste et producteur franco-allemand Romuald Karmakar - ont décidé d’échanger les espaces des pavillons français et allemand à l’occasion de la biennale.

Le dialogue international joue aujourd’hui un rôle essentiel dans le monde de l’art, qui se caractérise bien plus par la perméabilité des sphères culturelles que par la rigidité des frontières nationales. Cet échange participe de cette vision d’une culture européenne commune, partie intégrante d’une communauté culturelle globale.
Pour célébrer le cinquantième anniversaire de l’amitié franco-allemende (Traité de l’Elysée), en 2013, la France et l’Allemagne ont choisi de témoigner de l’intensité et de l’excellence de leurs relations culturelles en échangeant leurs pavillons nationaux à l’occasion de l’Exposition internationale d’art – La Biennale de Venise.

http://www.labiennale.org/en/art/