contact rubrique Agenda Culturel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

“D’une rive, l’autre” Paysages et scènes des bords de l’eau, peintres anglais et français au XIXe siècle
à l’abbaye de Saint-Riquier – Baie de Somme

du 23 juin au 23 septembre 2013



www.ccr-abbaye-saint-riquier.fr/

994_une-rive994_une-rive994_une-rive

Légendes de gauche à droite :
1/  Léon Cogniet, Falaise et mer au bourg d'Ault, 1874, Musée des beaux-arts d'Orléans, Huile sur papier, 28x34 cm, © François Lauginie.
2/  Francis Tattegrain, Retour de pêche, 1878, Musée de Senlis, Peinture, 176,5x135,4 cm, © DR.
3/  Gustave Courbet, Le ruisseau du puits noir, vers 1865, © Toulouse, musée des Augustins – Daniel Martin, Peinture à l’huile, 80x100 cm.

 


texte de Audrey Parvais, rédactrice pour FranceFineArt

 

Ancien lieu de la connaissance et de la transmission du savoir, l’Abbaye de Saint-Riquier, dans la Baie de Somme, fait l’objet d’un vaste programme de réhabilitation. Abritant depuis peu un Centre culturel, elle a pour mission de soutenir la création artistique et organise entre autres événements une exposition de peinture, du 23 juin au 23 septembre 2013.

De la source à l’océan
L’eau, élément poétique par excellence et objet de fascination et d’inspiration pour tout artiste, est au centre de cette exposition qui réunit peintres anglais et français du XIXème siècle. Confrontation de deux visions, elle révèle surtout leur complémentarité dans les sujets choisis et dans les types de représentation, les artistes s’inspirant les uns des autres, échangeant, voire travaillant ensemble. Et l’on n’entend pas ici se contenter d’horizons marins et de mers déchaînées ; l’on célèbre l’eau sous toutes ses formes, de la rivière au cours serein telle que la dépeint John Linnell (River Kennet, near Newbury, 1815) aux vagues qui viennent se fracasser sur les falaises, en passant par les ports bruissant de vie et les mares bordées d’arbres. Peindre l’eau dans tous ses états, c’est aussi varier les scènes et les tons. Certes, les paysages sont nombreux, bucoliques quand ils représentent la riante campagne anglaise, plus sauvages dès que l’on gagne la côte, mais les peintres s’intéressent aussi aux rapports que l’homme entretient avec cet élément vital. Quand les pêcheurs se démènent sur leurs bateaux, les riches oisifs venus de l’intérieur des terres préfèrent, eux, les balades sur la plage. Les tableaux se font alors tout autant les illustrations des modes de vie et des usages de l’époque que les représentations sublimées de la nature.

Multiplicité des regards
Délaissant l’impressionnisme et ses grands maîtres, D’une rive, l’autre nous fait découvrir des peintres peu connus et qui ont pourtant profondément marqué les différents mouvements picturaux du XIXème siècle : naturalisme, pré-impressionnisme, et même pointillisme. Si les artistes s’emparent des mêmes sujets, des mêmes motifs, ils en donnent des interprétations incroyablement variées. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer le thème de la pêcheuse de crevettes tel qu’il est abordé par Chigot et Firmin-Girard. Si le premier choisit l’éclat et la lumière de couleurs vives, effaçant la dureté du travail pour en donner une image presque idyllique, le second opte pour une approche plus naturaliste, reproduisant fidèlement costume et outils dans des tons bruns et gris plus proches de la réalité. Les éléments topographiques, réels et facilement reconnaissables, peuvent devenir quant à eux le théâtre de scènes grandioses, sorties tout droit de l’imagination du peintre. Avec Laying Lobster Pots, St Michael’s Mount (1838), George Chambers livre une vision mythologique du Mont Saint Michel, qui semble émerger de la tourmente, déchirant les cieux tel le Mont Olympe, tandis que les marins luttent à ses pieds contre les vagues écumantes. Et si certaines peintures laissent rêveurs, évoquant de longues plages baignées de la lumière rougeoyante du soleil levant, d’autres happent complètement le spectateur et lui fait faire l’expérience du sublime si chère au romantisme, comme cette œuvre impressionnante de Francis Tattegrain (Retour de la pêche à Berck, 1878) où la mer agitée, envahissant la toile de ses bleus translucides, secoue un frêle voilier sous un ciel de plomb.

Audrey Parvais

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire : Jean-Luc Maeso

 

Le Centre Culturel de l’Abbaye de Saint-Riquier – Baie de Somme présente du 23 juin au 23 septembre, l’exposition D’une rive, l’autre, paysages et scènes des bords de l’eau – Peintres anglais et français au XIXe siècle.
Elle se propose, d’une rive à l’autre, d’explorer deux visions du XIXe siècle, anglaise et française, des paysages de l’eau.
L’exposition présente plus d’une soixantaine de peintures parmi lesquelles des oeuvres de Gustave Courbet, Joseph William Turner, Francis Tattegrain, Auguste Delacroix, John Linnell, Samuel Bought ou James Webb…
Le « désir du rivage », mouvement qui prit son essor entre 1750 et 1840 en Europe occidentale, a influencé la peinture autant qu’il a été influencé par elle. Et l’on sait l’importance prise par la mer et le littoral dans la peinture française, notamment à la suite des maîtres aquarellistes que furent les artistes anglais, il y a plus d’un siècle. Des thèmes représentés par la peinture hollandaise au XVIIe siècle comme la mer quotidienne ou les pêcheurs, vont être repris, revivifiés, exaltés au XIXe siècle. Et cela, à la fois, sous l’influence des recherches menées par un groupe d’artistes en rupture d’académisme ; mais aussi par de nouvelles normes esthétiques : celles du Sublime et du Pittoresque avec des scènes de tempête, de houle, des représentations de sites comme celui du Mont-Saint-Michel ou ceux de la Baie de Somme…
L’intérêt manifesté à l’égard de « l’eau » en ses différents états et formes (lac, marais, mares, grenouillère…) dont témoignent les artistes sont autant d’hommages rendus à cet élément qui a si longtemps effrayé les populations.
La représentation sociale du rivage, avec ses scènes de plages, ses nuages littoraux, ses activités portuaires, ses pêcheurs ou ses ramasseurs de goémon et de crevettes, a largement inspiré des artistes comme Richard Bonington, J. M. William Turner, Karl Daubigny…
Le développement des chemins de fer, en rendant les côtes accessibles, a également eu une influence non négligeable sur ce goût pour le littoral et ses représentations.
Notre entrée sensible et sensuelle dans l’univers des peintres qui ont élu domicile et palette sur les pourtours de ce « Channel » qui relie depuis toujours plus qu’il ne sépare, se fera dans l’esprit du grand rêveur des éléments, Gaston Bachelard, qui écrivit notamment que « l’eau est le regard de la terre ».

 

 

Propos de l’exposition par Jean-Luc Maeso

 

D’une rive, l’autre illustre des échanges, des rencontres, des influences entre les artistes des deux rives*, à l’exemple de Turner, Bonington, Stanfield côtoyant Gudin, Huet… Elle met en scène les hommages rendus au paysage marin. La Baie de Somme fut « un paradis pour les peintres », Reeve, Braquaval, Cogniet…
Au coeur de cette exposition, le Paysage - paysages plutôt, dont la richesse, la diversité et les particularismes, seront déclinés tout au long d’un parcours mettant en lumière l’intérêt des artistes pour le littoral et sa représentation, leur art de la mise en résonance de l’eau, de la terre et du ciel.
On retrouve chez ces artistes la même fascination pour des lieux emblématiques comme par exemple le Mont Saint-Michel, les effets météorologiques, les bords de mer et les côtes qui les ont vus inventer la peinture de paysage en faisant fi des règles académiques. Là, les Français ont croisé les Anglais, maîtres en aquarelle.
Interface entre terre et mer, le littoral est un lieu de rencontre entre population laborieuse et citadins oisifs venus en visiteurs, peut-être pour acheter du poisson fraîchement pêché, ou jouir du paysage de la mer, des bateaux… Ces représentations picturales du rivage, avec ses scènes de plages, ses nuages littoraux, ses ciels tourmentés, ses activités portuaires, sont de vifs témoignages des habitudes séculaires et des coutumes, des divers mondes qui s’y côtoient.
Mais aussi géologie et topographie, sont ici réinterprétées par un imaginaire poétique, l’apanage des artistes inspirés.

*L’exposition permet de découvrir des oeuvres de :
Gaston Bonheur, Richard Parkes Bonington, Samuel Bough, Louis Braquaval, Adolphe-Félix Cals, Carolus-Duran, Henri Caron, Jules Désiré Caudron, George Chambers, Eugène Chigot, Léon Cogniet, Horace Raoul Colmaire, Louis Evrard Conrad de Kock, Gustave Courbet, E. William Cooke, Crépin, Karl Daubigny, Auguste Delacroix, Adrien Demont, Jules Dupré, Samuel Frère, François-Marie Firmin-Girard, Louis Francia, Nicolas Edward Gabe, Julien Gustave Gagliardini, Jean Antoine Théodore Gudin, Jean-Baptiste Antoine Guillemet, Hector Hanoteau, Paul Huet, Philippe-Auguste Jeanron, John Linnell, Maxime Maufra, Henry Moore, Alfred Mouillon, Charles Mozin, Fredéric Norie, G. Reeve, Georges Ricard-Cordingley, Paul Signac, Alfred Smith, W.-Clarkson Stanfield, Francis Tattegrain, Joseph Mallord William Turner, James Webb.