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“Hiramatsu” le bassin aux nymphéas. Hommage à Monet
au musée des impressionnismes, Giverny

du 13 juillet au 31 octobre 2013



www.mdig.fr

 

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse en présence de Hiramatsu Reiji, le 12 juillet 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Hiramatsu Reiji, Reflets de nuages dorés sur l’étang, 2011. Nihonga, 80,3x116,7 cm. Musée des impressionnismes Giverny, inv. MDIG 2013.1.16. ©Hiramatsu Reiji. © Musée des impressionnismes Giverny.
2/  Hiramatsu Reiji, Motifs de nymphéas – Divertissement, 2010. Nihonga, 72,7x100 cm. Musée des impressionnismes Giverny, inv. MDIG 2013.1.10. ©Hiramatsu Reiji. © Musée des impressionnismes Giverny.
3/  Hiramatsu Reiji, Normandie – Une saison de rêve (été), II, 2012. Nihonga, 112,1x162,1 cm. Musée des impressionnismes Giverny, inv. MDIG 2013.1.24. ©Hiramatsu Reiji. © Musée des impressionnismes Giverny.

 


texte de Sylvain Silleran, rédacteur pour FranceFineArt

 

Peignant selon la technique japonaise millénaire du nihonga, basée sur l'utilisation de pigments naturels, minéraux, nacre, colle animale, feuilles d'or et de métaux, Reiji Hiramatsu se réapproprie les traditions pour créer une peinture contemporaine. Les tableaux et paravents qu'il expose au musée des impressionnismes de Giverny sont une interprétation du travail de Monet et trouvent leur place dans la vivacité des échanges entre les mouvements picturaux de la France et du Japon du XIème siècle. Ils sont pourtant résolument modernes et constituent un véritable impressionnisme contemporain.

La stricte technique du nihonga, utilisation quasi mathématique de milliers de pigments (Hiramatsu  possède 2000 teintes) et la maîtrise de leurs combinaisons est un long et patient travail. Les œuvres issues de cette méditation sont d'une rigoureuse précision, tant dans leur composition que dans l'expression des couleurs. Les bleus profonds, dont les teintes varient subtilement vers le violet répondent à l'or. Les fleurs de nénuphars laissent éclater leur vibrante lumière sur l'eau sombre et calme d'un étang. Des rameaux de saule forment au premier plan un rideau léger et transparent comme un voile. Hiramatsu contemple l'immobilité du paysage et réussit à en saisir les mouvements insensibles, le bruissement presque imperceptible d'un souffle d'air, la vibration d'une pétale chauffée par la lumière, le vol d'un insecte et le bourdonnement de ses ailes.

Reprenant une tradition ludique de l'art traditionnel japonais, il place ici et là quelques petits animaux et insectes. Un oiseau qui s'envole, une libellule sur l'eau, une grenouille accrochée à un bâton sont autant de petits mots de l'artiste rappelant modestement son humilité face à l'œuvre de Monet. Ces touches discrètes dans le paysage sont comme des haïkus évoquant les saisons et la beauté que la nature exprime dans sa simplicité.

Si les tableaux sont peints avec une abondance de détails, si les traits en sont extrêmement fins, il s'en dégage une grande simplicité. La surface de l'étang recouverte de feuilles rouges et orangées évoquent l'automne. Les couleurs en sont si précises qu'elles expriment la texture des feuilles. Leur densité fait se superposer à l'image plane de l'eau celle des arbres d'où elles sont tombées. En s'approchant, on accède à un deuxième niveau de lecture, les feuilles apparaissent en plusieurs couches successives, de celle qui vient de tomber à celle qui s'est gorgée d'eau et commence à se décomposer.

Evocation du printemps, de sa lumière, pétales de cerisiers flottant marquant la brièveté de la floraison ou bien couleurs de l'hiver, neige tombant et brume glacée sur des eaux figées réussissent à réunir sur un seul tableau ce que tous nos sens perçoivent d'une saison. C'est en cela que Reiji Hiramatsu s'affirme comme un peintre impressionniste à part entière.

 

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat général :
Diego Candil, directeur général et Vanessa Lecomte, attachée de conservation, musée des impressionnismes Giverny
Commissariat scientifique :
Brigitte Koyama-Richard, docteur en littérature comparée et professeur à l'université Musashi de Tokyo

 

Dans le cadre de la seconde édition du festival Normandie Impressionniste consacrée au thème de l’eau, le musée des impressionnismes Giverny présente du 13 juillet au 31 octobre 2013 une exposition du peintre japonais né à Tokyo en 1941, Hiramatsu Reiji, intitulée « Hiramatsu, le bassin aux nymphéas. Hommage à Monet ». L’exposition réunit une trentaine d’œuvres de Hiramatsu Reiji, présentées pour la première fois en France et est complétée par une large sélection d’estampes japonaises de la collection de Claude Monet et d’oeuvres de Claude Monet de la prestigieuse collection du musée Marmottan Monet (Iris, Le Pont Japonais et quelques dessins rarement montrés) et du lycée Claude Monet à Paris (Nymphéas avec rameaux de saule).
Feuilles d’or, d’argent ou de platine, Hiramatsu Reiji utilise les pigments minéraux les plus précieux pour ses tableaux et paravents avec pour motif les nymphéas. Cet hommage de Hiramatsu à Monet est l’occasion de découvrir la peinture d’un grand artiste contemporain et de reconsidérer l’ampleur de l’influence de l’art japonais sur les peintres japonisants, en particulier sur le fervent collectionneur d’estampes que fut Claude Monet. Ces deux grands artistes se rejoignent dans leur quête absolue de la beauté et des jeux de lumière.

 

L’hommage de Hiramatsu à Claude Monet
L’art japonais n’a pas été sans influencer Claude Monet comme l’atteste sa collection d’estampes japonaises que l’on peut aujourd’hui admirer à Giverny (La collection de la fondation Claude Monet compte plus de 231 estampes de l’époque d’Edo, d’Hiroshige, à Utamaro en passant par Hokusai). En 1883, Monet s’installe à Giverny dans la maison du Pressoir, où il résidera jusqu’à sa mort en 1926. Il a l’occasion pour la première fois de dessiner les contours de son jardin, dont l’élaboration durera plus de vingt ans, de 1883 à 1904. Il transforme le verger, appelé Clos normand, en jardin enclos de fleurs. Puis en 1893, il achète une parcelle en contrebas de sa propriété et entreprend d’y aménager un jardin d’eau, auquel il adjoint un pont japonais. À partir de 1915, Monet se consacre aux Grandes Décorations destinés à l’Orangerie.
En 1994, le peintre Hiramatsu Reiji visite Paris pour la première fois à l’occasion de l’exposition personnelle que lui consacre la galerie JAL. Il visite le jardin de Monet à Giverny et découvre les Grandes Décorations à l’Orangerie. Hiramatsu eut l’impression de se trouver face à des paravents ou des panneaux décoratifs japonais. Ému et bouleversé par la beauté de cette oeuvre, il décide de partir sur les traces de Monet, à la recherche de sa pensée et de son art. Il se rend en France à plusieurs reprises et effectue de longs séjours à Giverny où il exécute sans relâche des croquis du bassin aux nymphéas.
J’ai été profondément étonné en découvrant l’oeuvre immense qu’est la série des Nymphéas. Je me suis alors mis à étudier avec ardeur le japonisme, avec le regard d’un peintre de nihonga qui part pour un voyage vers l’impressionnisme et le japonisme. Pour moi qui adore les fleurs, la Normandie fut une région de rêve. Je me suis souvent rendu vers la mer en suivant la Seine. Le but de mon voyage était d’aller à la recherche du japonisme dans le jardin de Monet à Giverny et d’observer les reflets sur l’eau du bassin des nymphéas. J’ai tenté de comprendre l’attirance qu’avait éprouvée Monet pour le japonisme depuis sa jeunesse, ainsi que le regard qu’il portait sur les choses. C’est avec liberté et avec un sentiment ludique que j’ai peint les nymphéas chers au goût japonisant de Monet 1.
L’exposition montre que tout comme les estampes japonaises furent pour les impressionnistes une façon d’introduire une nouvelle philosophie de l’espace et de la lumière, les toiles de Monet représentent une source d’inspiration créatrice pour Hiramatsu Reiji

Si j’ai bien emprunté comme motif le bassin de Monet, les nymphéas, les cerisiers, les libellules, l’espace et l’univers de l’oeuvre elle-même sont à la fois l’Occident et l’Orient : il s’agit d’un immense espace qui va au-delà de l’univers et qui fut une tentative de sublimation du moi 2.

 

 

La collection d’estampes japonaises de Claude Monet
Les estampes japonaises ukiyo-e fascinent par leur beauté, la somptuosité des couleurs, la délicatesse des gaufrages ou des micas d’or, d’argent et de bronze. On les associe souvent à la célèbre Grande vague de Hokusai, aux paysages colorés de Hiroshige ou aux délicates beautés féminines d’Utamaro. Elles furent élevées au rang d’oeuvres d’art, au XIXe siècle, par les japonisants. Pourtant, lorsqu’elles furent créées, à l’époque d’Edo (1603-1868), elles n’avaient guère qu’une visée publicitaire, médiatique ou ludique. L’exposition présente exceptionnellement vingt-sept estampes de la collection du maître français et conservées à la fondation Claude Monet de Giverny. La première estampe créée d’après une oeuvre du peintre Hiramatsu selon la technique traditionnelle de l’époque d’Edo par le Centre Adachi (The Adachi Institute of Woodcut Prints) est présentée dans l’exposition.

 

Le nihonga
Hiramatsu, le bassin aux nymphéas. Hommage à Monet réunira plus d’une vingtaine de tableaux peints selon la technique traditionnelle du nihonga, qui allient tradition et modernité. Le nihonga est une technique de peinture millénaire qui pénètre au Japon par le biais de la Chine et de la Corée. Le mot nihonga signifie littéralement peinture japonaise, un terme qui fut créé à la fin du XIXe siècle, afin de distinguer la peinture japonaise traditionnelle, de la peinture à l’huile à l’occidentale, yôga, qui était alors très prisée. Aujourd’hui, le nihonga se réfère à la peinture japonaise qui utilise essentiellement des pigments naturels, des minéraux, de la nacre de différents coquillages, de l’encre de Chine, de l’eau, du nikawa (colle animale), des feuilles d’or.

Cette exposition sera également l’occasion de présenter des œuvres récentes d’Hiramatsu, jamais exposées, qui viendront enrichir la collection du musée des impressionnismes Giverny.

 

 

1 Hiramatsu Reiji, Suiren Japonisme II (Nymphéas Japonisme II), Tokyo, Bijutsu Nenkansha, 2002, p. 12, traduit en francais in Brigitte Koyama-Richard, La magie des estampes japonaises, Paris, Hermann, 2003, p. 176-177.
2 Hiramatsu Reiji & Hiroshi Senju, Nihonga kara sekai e (Regard du nihonga vers le monde), Tokyo, Bijutsu Nenkansha, 2002, p. 34 traduit en francais in Brigitte Koyama-Richard, La magie des estampes japonaises, Paris, Hermann, 2003, p.177.