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“Hiroshi Sugimoto” Révolution
à l’espace Van Gogh, les Rencontres Photographie, Arles

du 1er juillet au 22 septembre 2013



www.rencontres-arles.com

 

 

© Anne-Frédérique Fer, Arles, le 1er juillet 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Hiroshi Sugimoto, Revolution 008, mer des Caraïbes, Yucatan, 1990. © Rencontres Arles.
2/  Hiroshi Sugimoto, Couleur Polarisée 032, 2010. © Rencontres Arles.

 


texte de Mireille Besnard, rédactrice pour FranceFineArt

 

Neuf panoramiques verticaux de grands formats (117x239 cm) se dressent, tels des stèles, sur les parois de cette salle longiforme de l’Espace Van Gogh. Sur chacune de ces images d’Hiroshi Sugimoto, on distingue une bande noire, une autre grise. Elles sont partagées par une ligne droite verticale plus ou moins prononcée.  Ici, et là une tâche, des trainées ou trouées lumineuses. L’espace d’exposition, maintenu dans la pénombre, évoque presque le déambulatoire d’une église. Les panoramiques montés sur caisse américaine à fond blanc rappellent quelque peu des vitraux. Dressés comme des stèles, ils ne manquent pas d’évoquer les sept toiles qu’a peintes Geneviève Asse en hommage au poète breton Victor Segalen ; un travail exposé aujourd’hui à Beaubourg. Un rapprochement peut-être pas si osé, s’il on songe à la fascination qu’exercent les paysages marins tant sur Asse que sur Sugimoto. Alors, Révolution serait-il un monument funéraire ? Aucun propos de l’artiste japonais ne permettrait aujourd’hui de l’affirmer.

Il s’agit bien, en revanche, de paysages marins, issus du travail de Seascapes des années 80-90 lorsque l’artiste parcourait les mers à la recherche d’un paysage que les premiers humains auraient pu voir, une sorte d’image immémoriale. Nocturnes, à l’inverse des images montrées auparavant, ces clichés révèlent le mouvement de la lune et des astres dans le ciel et son reflet sur la mer sur une durée de prise de vue pouvant aller jusqu’à trois heures. Restés inédits jusqu’à la fin 2012 et leur exposition au Brandhorst à Munich, Sugimoto en propose aujourd’hui une lecture inhabituelle, déroutante pour plus d’un. En retournant l’image, en renversant l’horizon  à 90°, l’artiste appelle à une révolution copernicienne, dont il ne révèle pourtant pas vraiment la teneur. Il semblerait s’agir non seulement d’accepter de penser autrement mais aussi de bouleverser la posture millénaire qu’a aujourd’hui l’homme sur terre.

Il est possible bien sûr de refuser la proposition de l’artiste, de rester gouverné par les lois de la pesanteur, les pieds rivés à la terre.  Pour beaucoup d’entre nous, en effet,  lors de la déambulation, la tête se tord immanquablement pour retrouver la vision originelle du paysage. La présence d’ailleurs de deux clichés initiaux aux extrémités de la salle, nous y invite presque. Ne serait-ce pas, alors, rejeter, consciemment ou pas, la possibilité de l’abstraction pour le médium photographique ?  Ou même, la possibilité de se dégager de notre enveloppe terrestre et de continuer à voir ? Somme toute, ceci n’est qu’une image, semble dire par ce geste de renversement, Hiroshi Sugimoto.

 

Mireille Besnard

 


extrait du communiqué de presse :

 

Révolution
« Longtemps, j’ai aimé grimper sur des falaises et observer l’horizon, là où la mer rencontre le ciel. L’horizon n’est pas une ligne droite, mais un segment d’un grand arc. Un jour, alors que je me trouvais seul au sommet d’une île isolée dans des mers lointaines, l’horizon englobait tout mon champ de vision et j’ai eu un court instant l’impression de flotter au dessus d’un vide incommensurable. […] Dans mes rêves d’enfant, je flottais souvent dans les airs. Parfois, je quittais mon corps pour l’observer pendant mon sommeil, depuis un point en hauteur près du plafond. Comme une projection astrale, peut-être, un moi éveillé coexistait simultanément avec un moi endormi. Même adulte, je m’imagine souvent lévitant dans les airs. Faut-il voir là la source de mon inspiration artistique ? […] j’ai le sentiment que nous abordons une époque où la religion et l’art vont une fois de plus jeter le doute sur la science, ou alors une époque où les choses admises dans un contexte scientifique vont devoir s’incliner face au jugement religieux. À la fin du printemps 1982, je me trouvais sur un promontoire en Terre-Neuve à admirer un superbe coucher de soleil qui coïncidait avec l’ascension d’une pleine lune dans le ciel oriental. […] Pour la première fois depuis des années, je me sentais dépassé par une expérience extrasensorielle. J’étais à des lieues de la surface de la terre, et j’observais la Lune suspendue au-dessus de la mer, tandis qu’un autre moi – un point minuscule – demeurait envoûté sur place. »
Extrait du texte de Hiroshi Sugimoto.

 

Hiroshi Sugimoto, né en 1948 à Tokyo. Vit et travaille à Tokyo et New York.
www.sugimotohiroshi.com

 

Exposition produite par l’artiste en collaboration avec le Musée Brandhorst/Bayerische Staatsgemäldesammlungen, Munich et les Rencontres d’Arles. Exposition réalisée avec le soutien de la Fondation du Japon.

A voir également :
Hiroshi Sugimoto, Couleurs de l’ombre à l’église Saint-Blaise
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En 2012, pour sa troisième édition d’oeuvre d’art sur soie, Hermès a fait appel à l’artiste japonais Hiroshi Sugimoto, après Hommage au carré de Josef Albers en 2008, puis Photos-souvenirs au carré de Daniel Buren en 2010. 20 polaroïds ont été sélectionnés par Hiroshi Sugimoto et Pierre-Alexis Dumas pour être retranscrits sur soie : une édition limitée de 20 carrés édités en 7 exemplaires, soit 140 carrés de 140 cm x 140 cm. La démarche d’Hiroshi Sugimoto explore sans cesse les ressources des savoir-faire séculaires pour établir un dialogue inventif entre l’histoire, une tradition, une pratique et une expression contemporaine qui fait pleinement écho avec la philosophie d’Hermès. C’est cette évidence qui a conduit Pierre-Alexis Dumas, directeur artistique d’Hermès, à solliciter l’acuité de son regard pour cette troisième édition du carré d’artiste.
Exposition organisée avec le soutien d’Hermès et de la Fondation du Japon.