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“À la recherche d’Albert-Kahn” Inventaire avant travaux
au musée Albert-Kahn, Boulogne-Billancourt

du 18 juin 2013 au 21 décembre 2014 (prolongation jusqu’au 30 juin 2016)



albert-kahn.hauts-de-seine.net

 

 

© Anne-Frédérique Fer, le 16 juillet 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Charles Winckelsen, L’opérateur Paul Castelnau à Ismaïlia, Egypte, 15 juin 1918. inv. A 15 907. © Musée Albert-Kahn – Département des Hauts-de-Seine.
2/  Georges Chevalier, Albert Kahn sur le balcon de sa banque, 102 rue de Richelieu, Paris, 1914. inv. I135. © Musée Albert-Kahn – Département des Hauts-de-Seine.
3/  Fernand Cuville, Vasque de la basilique San Zeno à Vérone, Italie, 16 mai 1918. inv A 71 243 X. © Musée Albert-Kahn – Département des Hauts-de-Seine.

 


1025 Albert-Kahn audio

Interview de Sophie Couëtoux, co-commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Boulogne-Billancourt, le 16 juillet 2013, durée 3'46". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaires : Marie Corneloup et Sophie Couëtoux

 

Le domaine boulonnais d’Albert Kahn (1860-1940), aujourd’hui propriété du Département des Hauts-de-Seine, reste fortement marqué par l’empreinte de son fondateur, énigmatique à bien des égards. Avant le chantier de rénovation du musée qui se déroulera de janvier 2015 à l’été 2017, écrivant ainsi une nouvelle page de son histoire, il semblait opportun de faire un point sur les connaissances accumulées au fil du temps sur l’homme et son oeuvre. Les recherches récentes et en cours permettent d’affiner l’image que nous en avons, mettant l’accent sur des points ignorés ou rapidement entrevus jusqu’alors. Cette exposition constitue une sorte d’inventaire avant travaux, préfigurant à grands traits le contenu du futur espace permanent du musée.

 

L’étrange Monsieur Kahn
Albert Kahn est né en Alsace au XIXe siècle et fait rapidement fortune en spéculant sur le marché de l’or et du diamant. En 1898, il fonde sa propre affaire, la banque Kahn. Malgré ce succès fulgurant, il ne saurait être réduit à ses talents de financier. C’était aussi un grand idéaliste et pacifiste, à l’esprit foisonnant, ayant toujours un projet en tête. Tout au long de sa vie, il emploiera son temps et son argent à la création de multiples fondations d’intérêt général. La plus connue reste les Archives de la Planète qui recensaient en photographies couleur et films noir et blanc les témoignages d’un monde en proie au changement. On connaît également bien sa passion pour son jardin, réunissant différentes scènes paysagères, de la forêt vosgienne, symbole de son enfance, au jardin japonais témoignant de ses affinités avec un pays où il séjourna à plusieurs reprises.

Cette vision unilatérale d’un grand philanthrope donne à Kahn un statut quasi iconique, gommant ses aspects les plus humains. Pourtant, les recherches actuelles concernant l’analyse de la vision du personnage révèlent que le banquier a déconcerté ses contemporains. Nombre de témoignages font état d’un homme à la personnalité complexe. Il est décrit tour à tour comme discret, excentrique, séduisant ou rustre.
Tous s’accordent à dire qu’il était « étrange » et qu’ il apparaissait comme un marginal. Paradoxalement, il a fait partie des courants de pensée et d’action de son époque et on peut le considérer comme un personnage emblématique du « siècle des philanthropes ».
Alors, comment Albert Kahn se positionnait-il dans la société de son temps ? Quel était le mode de vie de ce milliardaire ? Comment relier des fondations en apparence aussi éloignées qu’un inventaire de la planète en images, un comité de secours national et un laboratoire de biologie ?
Ce sont ces questions, entre autres, que pose cette nouvelle exposition organisée en deux grands volets se faisant écho, insistant sur la pluralité du personnage et de ses fondations : Portraits d’un homme / Portraits d’une oeuvre.
Le « paradoxe Albert Kahn » sera interrogé à travers un parcours basé sur une multiplicité de médias : tirages photographiques, films, reproduction d’archives ou encore témoignages. Les collections du musée y sont largement exploitées – avec un accent particulier mis sur les films –, tout comme des reproductions d’images ou de documents provenant d’autres fonds publics et privés.
L’exposition, qui présente une vingtaine de séquences, permet de questionner tour à tour de multiples facettes de ce personnage complexe, en livrant des clés d’interprétation sans toutefois chercher à imposer une vision unique. De la même façon, l’oeuvre du banquier philanthrope ouvre de vastes champs de réflexion sur le passé comme sur le présent. Chacun pourra s’enrichir selon sa propre sensibilité grâce aux découvertes faites lors de la visite de l’exposition. Le visiteur est invité à participer à une recherche in progress, sorte d’enquête inachevée, puisque la figure d’Albert Kahn est à ce jour encore difficilement saisissable.

 

Parcours de L’exposition

 

Portraits d’un homme
1 - Albert Kahn, un portrait mouvant (audiovisuel)

La vision d’Albert Kahn par ses contemporains est si contradictoire qu’elle dessine un portrait mouvant, où chaque trait esquissé semble gommer le précédent, mettant en exergue une personnalité complexe.
2 – Chronologie
Les dates clés de la vie du banquier sont mises en regard de dates historiques.
3 - Un enfant juif de la campagne alsacienne
Toute la ruralité juive alsacienne a imprégné la jeunesse de Kahn, natif de Marmoutier. Petit-fils et fils de marchand de bestiaux, il expérimente très tôt les transactions complexes avec crédit et observe l’art de la persuasion.
4 - Essor social et intellectuel
À son arrivée à Paris, il bénéficie de la solidarité communautaire juive, notamment chez les frères Goudchaux, banquiers. Il profite aussi du réseau intellectuel de ces derniers. Sa rencontre avec Henri Bergson en 1879 sera ensuite déterminante.

5 - Qui se cache derrière l’icône du banquier philanthrope ?
Des témoins relatent les comportements insolites d’Albert Kahn ; ses choix de vie détonnent avec sa fortune et son métier, mettant à mal les clichés sur l’existence attendue d’un millionnaire.
6 - Quel philanthrope ?
Kahn n’appartient pas au cercle des grandes familles juives où les alliances composent des réseaux philanthropiques. Il s’investit peu dans les multiples associations caritatives de la IIIe République, préférant porter lui-même son projet et lui donner une portée universelle.
7 - Comment faire la paix ?
À la fin du XIXe, les projets de « paix perpétuelle » se multiplient. Mais avec le premier conflit mondial, le pacifisme est mis à rude épreuve.
8 - Escapade technique : pourquoi des reproductions ?
Le coeur des collections du musée est impossible à montrer sous forme originale. Les films anciens, sur pellicule en nitrate de cellulose, sont très inflammables. Les autochromes font quant à elles partie des objets photographiques les plus fragiles. De plus, elles avaient vocation à être projetées, donc à être vues agrandies.
9 - Le domaine d’Albert Kahn à Boulogne : une Cité dans un jardin
Une maquette représente la propriété d’Albert Kahn vers 1930. L’animation qui la complète montre comment l’arrivée du banquier en 1892 a progressivement transformé l’îlot urbain.
10 - Une relation assidue avec le monde des sciences
Les sciences de l’homme, de la vie et de l’univers - de l’infiniment petit à l’infiniment grand - attirent particulièrement Kahn. Il est également sensible au courant qui cherche à intégrer l’étude des phénomènes paranormaux dans le champ de la science.
11 - Le cadre artistique d’Albert Kahn
Le banquier offre une image éloignée de celle du grand bourgeois collectionneur. S’il est proche d’amateurs d’art, il ne possède pas leur culture artistique. Il va néanmoins s’entourer de quelques pièces acquises à l’occasion de rencontres ou de relations amicales.
12 - Les pauses musicales du banquier
La musique est une de ses passions. Jeune homme, il prend des leçons de piano mais il sera plus mélomane que musicien. Son luxe consiste à faire jouer l’orchestre Colonne dans son jardin d’hiver pour lui seul ou quelques invités.
13 - L’art des jardins à Boulogne
Pendant 30 ans, Albert Kahn acquiert des parcelles près de sa villa. Il constitue ainsi une propriété de 4,2 hectares, où se côtoient plusieurs types de jardins selon le principe du parc à scènes théorisé par le paysagiste Édouard André, très en vogue à la fin du XIXe siècle.
14 - L’art des jardins au cap Martin
Au cap Martin, il est l’un des propriétaires les plus importants avec 13 hectares rassemblés de 1897 à 1925. Il fait bâtir par l’architecte danois Hans-Georg Tersling une majestueuse villa dominant la mer, entourée de jardins aux ambiances exotiques.

 

Portraits d’une œuvre
15 - Autour du Monde

Les bourses instaurées en 1898 par Kahn visent une élite enseignante (de jeunes agrégés). Elles ont pour but de les éloigner des études livresques pour leur ouvrir les yeux sur la réalité du monde. La société Autour du Monde prend place à Boulogne en 1906. Son but l’inscrit dans la constellation d’associations oeuvrant pour la paix par le droit et cherche à attirer tout ce que la planète compte d’influent, dans toutes les sphères d’activité.
16 - Archives de la Planète
Il s’agit de l’enregistrement, à l’aide du film et de la photographie, des traces de l’activité humaine sur le globe. En 1912, Jean Brunhes en devient le directeur scientifique. Au final, c’est une minuscule poignée d’opérateurs qui a pour mission d’archiver la planète.
17 - Secours national
Ce comité, créé dès la déclaration de guerre en août 1914 pour aider les populations civiles, recueille des fonds afin de les répartir entre les associations caritatives. Des personnalités très dissemblables par leur origine, leur confession et leurs opinions y participent.

18 - Comité national d’études sociales et politiques
Fondé en 1916, il organise et publie des exposés-débats. Des revues de presse internationales sont conçues avec la participation de Kahn lui-même. Les sujets choisis sont fonction de l’actualité et permettent d’éclairer l’élite dirigeante française sur l’état du monde.
19 - Centres de documentation sociale

Conscient que la société contemporaine n’est pas assez étudiée, le mécène veut combler un manque : la prise en compte des réalités économiques et sociales dans les ressources documentaires destinées aux chercheurs.
20 - Hygiène sociale et médecine préventive
Les questions d’hygiène publique prédominent dans les séances du Comité national d’études sociales et politiques à la fin des années 1920. En 1929, le premier centre français de médecine préventive ouvre à l’université de Strasbourg, grâce au financement d’Albert Kahn.
21 - Laboratoire de biologie
En 1927, il accueille dans sa propriété de Boulogne le Dr Jean Comandon, biologiste et spécialiste de microcinématographie. Il propose à ce pionnier du cinéma scientifique un projet d’enregistrement des « phénomènes de la vie ».
22 - Centrale de recoordination / Au-delà de la paix, quels fils rouges ?
Sous l’appellation « Centrale de recoordination », le banquier lègue à l’université de Paris l’ensemble de ses fondations. La mission de cette Centrale n’est rien moins que de recoordonner la planète, bouleversée par l’accélération des progrès techniques. La paix a souvent été présentée comme moteur des actions du philanthrope. Pourtant, le fil directeur reliant toutes les fondations peut être trouvé ailleurs : un intérêt pour la vie en général, à travers toutes ses dimensions.