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“Jean Dewasne” Antisculptures
à la Galerie Nathalie Obadia - Bourg-Tibourg, Paris

du 12 septembre au 31 octobre 2013



www.galerie-obadia.com

 

 

© Anne-Frédérique Fer, le 12 septembre 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/ et 3/  Jean Dewasne, Dans l'atelier de Jean Dewasne. ©Jean Dewasne. Courtesy Galerie Nathalie Obadia, Paris-Bruxelles.
2/  portrait de Jean Dewasne, ©Jean Dewasne. Courtesy Galerie Nathalie Obadia, Paris-Bruxelles.

 


texte de Audrey Parvais, rédactrice pour FranceFineArt

 

Dans l’ancien atelier de Jean Dewasne, devenu un de ses trois espaces d’exposition, la Galerie Nathalie Obadia présente douze œuvres inédites de cet artiste profondément moderne. Ce lieu empreint de puissance symbolique permet de redécouvrir le travail singulier de cet adepte de la peinture géométrique.

Expérimentateur et précurseur
Premier lauréat du prix Kandinsky en 1946, membre du comité fondateur du Salon des Réalités Nouvelles la même année, militant pour le rayonnement de l’art abstrait aux côtés, entre autres, de Hans Hartung dont il occupe le siège à l’Académie des Beaux Arts à partir de 1991, Jean Dewasne représente en effet une figure majeure de l’abstraction. Celui qui se voyait d’abord comme un chercheur, un chimiste de la couleur, n’a eu de cesse d’explorer des procédés artistiques inédits. Désireux de s’éloigner de la peinture traditionnelle, il se tourne très tôt vers les techniques de l’industrie. Les classiques plâtre et peinture à l’huile sont ainsi rapidement remplacés par le Ripolin ou l’émail à froid, et tôle et carrosseries de voitures deviennent ses supports de prédilection. Sur ces surfaces planes et ces volumes bombés ou anguleux, il travaille aussi bien l’alchimie des couleurs que l’emboîtement des formes. Car l’art de Jean Dewasne constamment les lie dans un rapport de consubstantialité, les unes s’avérant indissociables des autres.

L’art géométrique
À cet égard, les douze œuvres présentées ici constituent de parfaites illustrations  des expérimentations de l’artiste. Mélanges débridés de cercles, de triangles et de lignes courbes et droites, les sept peintures se construisent sur des effets de fausse symétrie, où les rouges et bleus, d’une incroyable netteté, contribuent à faire ressortir les motifs dispersés sur les panneaux (Topologie 3, 1970). Mais la correspondance s’établit aussi d’une œuvre à l’autre par le biais de la reprise de schémas et de formes similaires qui, dans leur agencement pourtant bouleversé, s’instaurent comme tout autant de leitmotivs (Isle Bleue, Isle pour toit, Isle des espoirs, 1971-1972).  Des ces folles compositions chromatiques, s’impose progressivement une sensation de mouvement continuel, tel celui produit par les rouages complexes d’une machine. Quant aux trois Antisculptures, elles permettent à Jean Dewasne de jouer un peu plus encore avec la géométrie de ses supports, des châssis de voitures. Loin de se soumettre aux lignes imposées par ces volumes atypiques, il les souligne et les brise en prolongeant ou interrompant ses propres traits de peinture colorée. Les trous des carrosseries, autres formes, autres types de composition, deviennent alors des vides pleins de possibilités, qui se remplissent de teintes chaque fois différentes selon l’angle du regard. Où la géométrie, dans son étonnante exubérance, rencontre la rutilante lumière des couleurs.

Audrey Parvais

 


extrait du communiqué de presse :

 

La Galerie Nathalie Obadia est très heureuse de présenter ANTISCULPTURES de Jean Dewasne. En s’installant au 18, rue du Bourg-Tibourg à Paris, en février 2013, la galerie a souhaité rendre hommage à ce grand artiste français du XXème siècle qui occupa cet atelier pendant près de 20 ans jusqu’à son décès en 1999. À cette occasion, une sélection d’Antisculptures encore jamais montrées en galerie seront exposées pour la première fois au public.


Né en 1921 à Lille, Jean Dewasne s’engage très tôt dans l’Abstraction et participe en 1946 à la création du Salon des Réalités Nouvelles dont il sera le premier lauréat du Prix Kandinsky avec Jean Deyrolle. Il en démissionnera en 1949 puis participera au développement de l’art d’avant-garde en co-fondant avec Edgar Pillet en 1950 l’ Atelier d’Art Abstrait à Montparnasse qui polarisa l’attention des artistes et intellectuels au sortir de la guerre et qui bénéficia très vite d’un rayonnement international. Sa première rétrospective a lieu à la Kunsthalle de Berne en 1966. Ses recherches font également l’objet d’une reconnaissance active en France qui le mènent à participer au pavillon national de la Biennale de Venise en 1968 avec Arman, Piotr Kowalski et Nicolas Schoffer. Il participe ensuite en 1972 à la célèbre exposition Douze ans d’Art Contemporain en France et conçoit la couleur bleue du Centre Pompidou (qu’il désignera ensuite comme la plus grande de ses Antisculptures). Il sera élu en 1991 membre de l’Académie des Beaux-Arts au fauteuil de Hans Hartung.


Attiré par les méthodes et les mediums de production industrielle, Jean Dewasne va en tirer des lignes de forces rigoureuses et extrêmement précises pour sa pratique artistique, qui ira toujours de pair avec un engagement théorique et un système de réflexion conscient. Il a laissé de nombreux écrits témoignant de son vif intérêt pour la philosophie ou les mathématiques (en particulier pour les espaces topologiques), en sus de ses compétences formatrices dans les domaines de l’architecture, des beaux-arts ou de la musique.
Le terme Antisculptures désigne les oeuvres de Jean Dewasne combinant la pratique de la peinture et de la sculpture, élaborées à partir de l’application d’un système qui favorise les aplats sur des carrosseries, supports inusables par excellence (chassis de voitures ou de camions). Sont au coeur de ses préoccupations esthétiques : la technicité industrielle de la peinture et des supports (peinture glycérophtalique, Ripolin, laques, émail à froid, Isorel, surfaces métalliques), la manipulation des espaces colorés pré-définis pour trouver l’agencement complexe où la couleur atteindra son point paroxystique, la primeur de l’utilisation du procédé de peinture au pistolet, la non-planéité des ces squelettes manufacturés qu’il désosse et l’expérimentation du détournement d’objet. La Galerie Nathalie Obadia présente quatre Tableaux, trois Antisculptures (Cerveaux-mâles), et deux Ronde-Bosses (Antisculptures murales, également appelées Capots).

À ce jour, 11 Antisculptures de Jean Dewasne sont présentes dans les collections publiques françaises.
Fort de cet intérêt pour le monde industriel, Jean Dewasne s’est également attaché à produire de oeuvres de très grands formats, travaillant à la diffusion de la couleur dans les environnements urbains en collaboration avec des commanditaires français et internationaux (Les Murales de la Grande Arche de La Défense font près de 15.000 mètres carrés, deux oeuvres de 110 mètres de long pour le métro de Hanovre, ou quatre oeuvres murales de 10 mètres de long pour Renault, par exemple). À travers ces signes architecturaux, Jean Dewasne a contribué à redéfinir la place du projet artistique local dans la cité et dans la ville.
À sa mort, son oeuvre et ses archives ont fait l’objet d’une très généreuse donation au profit des Musées de France, qui a été repartie dans de nombreuses institutions publiques (Centre Pompidou, Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris, MAC/VAL) et notamment dans les musées de la région Nord, d’où l’artiste était originaire (Musée Matisse - Le Cateau-Cambrésis, Musée des Beaux-Arts de Cambrai, LAAC de Dunkerque). Digne représentant de l’un des courants majeurs du XXème siècle, l’Abstraction géométrique, Jean Dewasne propose ici une oeuvre qui a contribué à l’évolution de cet art alors nouveau et dont la puissante modernité couplée à la contemporanéité de sa pratique, sont encore aujourd’hui éloquentes.