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“Kanazawa” Aux sources d’une culture de samouraïs
à la Maison de la culture du Japon, Paris

du 2 octobre au 14 décembre 2013



www.mcjp.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 1er octobre 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Masque de jeune femme (Fushikizô), Epoque Edo (XVIIe siècle), Rouleau vertical, couleurs sur papier, Kanazawa Noh Museum.
2/  Bol à thé Goshômaru, XVVIIe siècle, Kanazawa Nakamura Memorial Museum.
3/  Costume de nô (nuihaku) à motif de chrysanthèmes, Ere Meji (XIXe siècle), Kanazawa Noh Museum.

 


texte de Sylvain Silleran, rédactrice pour FranceFineArt

 

Les œuvres présentées à La Maison de la Culture du Japon à Paris manifestent la diversité de l'activité artistique dans le fief de Kaga, qui s'est développée sous l'influence du clan Maeda à partir du XVIé siècle.

Une armure de samouraï marque la première étape de ce parcours, témoignant des guerres permanentes entre clans qui ravagent le Japon du XVIé siècle. L'art de l'époque s'exprime d'abord à travers les attributs des guerriers : armures, masques, sabres et bannières. L'armure de Maeda Toshimasa, seigneur de Kaga, laquée d'un noir épais et brillant, affiche le rang supérieur de son propriétaire. Son casque arbore des oreilles de lapin, dont l'agilité à bondir augure d'une élévation sociale et financière. Dans la salle suivante, une armure étincelante d'or, tissée de fils de soie, comporte sensiblement moins d'éléments protecteurs. Ayant perdu ses fonctions guerrières, elle supporte à présent un rôle d'apparat et les artisans y trouvent un champ d'expression plus riche pour leur talent.

Prisée par les samouraïs de haut rang, la cérémonie du thé prend de l'importance et favorise le développement de liens diplomatiques. Les instruments destinés à ce rituel accompagnent par leur style épuré la rigueur des gestes de ce cérémonial. Un vase simplement découpé dans un tronc de bambou, un bol à la courbe simple et précise ou un pot à thé atteignent un émouvant degré de perfection dans la finesse et l'exactitude de leur forme. L'ornementation n'est ici présente que sur les boites et coffrets tandis que la richesse de l'art du thé s'exprime dans un effacement de l'objet rendu humble face à la virtuosité du cérémonial et de son aboutissement, l'arôme de la boisson.

Le théâtre Nô, en établissant un lien entre le divin et le terrestre, élève l'expression théâtrale et musicale, et offre aux artisans un domaine propice à l'épanouissement de leurs dons. La variété des masques couvre tous les archétypes : femmes, vieillards, esprits, démons... mais également la dualité des personnages, la colère ou la jalousie. Les costumes composés de fines gazes s'ornent de denses broderies aux couleurs éclatantes. Leurs motifs nous surprennent par leur modernité, tant certains pourraient être l'œuvre d'un artiste contemporain. Ces kimonos, par leurs dessins, participent à la narration et sont identités, souvenirs et regrets

La grande habileté des artistes, d'abord motivée par les usages militaires ou rituels, s'impose dans tous les domaines du quotidien. Kimonos, éventails, vaisselle, paravents sont autant d'accomplissements techniques et esthétiques. Les Maeda ont, par leur grand intérêt pour les arts, fait de Kaga un pôle d'excellence dans tous les domaines de l'artisanat. Le travail du textile, du métal ou de la poterie va y surpasser ce qui se fait dans la capitale impériale et laisser une profonde empreinte dans l'histoire des arts du Japon.

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

Située en bordure de la mer du Japon, Kanazawa était la capitale du fief de Kaga. Ce fief, le plus grand du Japon, était depuis le milieu du XVIe siècle celui du puissant clan Maeda qui y encouragea l’épanouissement des arts. Les seigneurs Maeda favorisèrent le développement de la cérémonie du thé et du théâtre nô, éléments incontournables de la diplomatie entre guerriers, et accueillirent les plus grands maîtres artisans d’Edo (actuel Tôkyô) et de Kyôto. Alors que le Japon traversait une longue période de paix, les samouraïs de Kanazawa établirent avec succès leur propre culture, distincte de celle d’Edo, siège du gouvernement du shôgun. 


Cette exposition présente bien sûr des armures, sabres et casques de guerriers. Elle fera cependant la part belle aux arts liés à la cérémonie du thé (céramique, calligraphie…) ainsi qu’au théâtre nô avec de splendides masques et kimonos. Une vaste sélection de luxueuses pièces d’artisanat d’art (étoffes teintes, laques maki-e, pièces d’orfèvrerie, céramiques) sera également exposée.

Les Maeda, seigneurs du fief de Kaga, et leurs vassaux

Dans la seconde moitié du XVIe siècle, son soutien à Oda Nobunaga puis à Toyotomi Hideyoshi – les deux plus grands chefs de guerre de l’époque – valurent à Maeda Toshiie (1538-1599) l’attribution de domaines dans la province de Kaga. Il fut le premier des quatorze seigneurs qui se succédèrent à la tête du grand fief de Kaga. C’est en contrebas du château où il résidait que se développa la ville de Kanazawa, dont la population comptait de très nombreux vassaux, ainsi que des commerçants et des artisans. Avec plus de 100 000 habitants au début du XVIIIe siècle, elle était la quatrième ville du pays après Edo, Ôsaka et Kyôto. Cette section de l’exposition propose de découvrir des objets ayant appartenu au clan des Maeda ainsi qu’aux familles de leurs vassaux de haut rang.



Épanouissement de la culture à Kaga

La cérémonie du thé

C’est au XVIe siècle, alors que le Japon était en proie à des guerres incessantes, que la cérémonie du thé commença à être prisée des samouraïs de haut rang. Elle était pour les guerriers l’occasion de consolider les liens entre eux, de se préparer au combat et de se détendre. Certains seigneurs Maeda apprirent cet art auprès des célèbres maîtres de thé Sen no Rikyû et Kobori Enshû. D’autres constituèrent de magnifiques collections de bols en céramique, bouilloires et autres ustensiles pour la cérémonie du thé. C’est ainsi que Kanazawa devint un centre important du chadô, la voie du thé.  Des « objets d’exception » utilisés par le clan Maeda ainsi qu’une collection d’ustensiles réunis par leurs familles vassales sont ici présentés aux côtés d’objets pour des cérémonies du thé données en l’honneur d’invités importants. Enfin est reconstituée une pièce de thé intime où sont exposés des ustensiles au style « dépouillé » dit wabi.

Le monde du nô

Le nô, forme théâtrale créée à la fin du XIVe siècle, s’est développé sous la protection des shôguns et des guerriers de haut rang. Epuré à l’extrême, cet art mêle chant, danse et musique. Maeda Toshiie, premier seigneur de Kaga, se produisait en personne sur la scène du nô, sous l’influence du puissant Toyotomi Hideyoshi. Ses descendants furent eux aussi de grands amateurs de cet art. Ils apprenaient le nô dès leur plus jeune âge, engageaient des acteurs amateurs parmi les marchands et artisans de Kanazawa, organisaient des représentations pour des cérémonies officielles… Elément incontournable de la diplomatie entre guerriers, comme la cérémonie du thé, le nô devint à la mode parmi les membres du clan et les citadins puissants. Un aperçu du faste qui entoure le monde du nô est donné grâce à un riche éventail d’objets ayant appartenu au clan Maeda : costumes, masques, accessoires...

L’artisanat de Kaga

La fabrication des armures exigeait l’intervention de techniques artisanales de haut niveau : orfèvrerie, laque et textiles teints. Pour cette raison, les meilleurs artisans d’Edo et de Kyôto furent conviés à Kaga pour y transmettre leur savoir-faire. Les tisserands teinturiers de Kaga s’inspirèrent de la technique du yûzen importée de Kyôto pour créer leurs propres tissus à motifs colorés. Ils surpassèrent rapidement Kyôto dans la production d’excellence comme l’attestent les kimonos et rouleaux décoratifs ici exposés. De même, ce sont des artisans ciseleurs de Kyôto qui permirent le développement du damasquinage de Kaga, technique de travail du métal utilisée notamment pour orner les armures. Au milieu du XVIIe siècle, la technique de cuisson au four fut introduite dans le village de Kutani, non loin du fief de Kaga, par des potiers venus d’Arita, ville du Kyûshû réputée pour ses porcelaines polychromes : c’est là l’origine des céramiques colorées typiques de Kanazawa appelées ko-Kutani.Perpétuant cette tradition d’excellence, Kanazawa reste aujourd’hui encore une région d’une richesse exceptionnelle – même pour le Japon – en artisanat d’art.


À noter qu’une vingtaine d’oeuvres seront remplacées par des oeuvres similaires à partir du 5 novembre.