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“Donation Guerlain” article 1130
au Centre Pompidou, Paris

du 16 octobre 2013 au 31 mars 2014



www.centrepompidou.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 14 octobre 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Marlene Dumas, The army is looking for the enemy, 1985. Collage de papier, encre et acrylique sur papier, 46,5 x 39,5 cm. © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Georges Meguerditchian / Dist .RMN-GP.
2/  Frédérique Loutz, Heirad, 2009. Encre, aquarelle et crayon de couleur sur papier, 170 x 199 cm. © Centre Pompidou, MNAM-CCI, André Morin / Dist .RMN-GP.
3/  Fabien Mérelle, Paul d’Aubervilliers, 2010. Encre sur papier, 28,2 x 21 cm. © Centre Pompidou, MNAM-CCI, André Morin / Dist .RMN-GP.

 

extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat
 : Jonas Storsve, conservateur au musée national d’art moderne, Galerie d’art graphique

Le Centre Pompidou consacre une exposition à l’exceptionnelle donation d’oeuvres sur papier généreusement consentie par Florence et Daniel Guerlain au Centre Pompidou en janvier 2012.

Dans les salles reconfigurées de la Galerie d’art graphique et la Galerie du musée, exceptionnellement réunies pour l’occasion, cette présentation inédite réunit quelques trois cents dessins choisis parmi l’ensemble de 1200 oeuvres que compte la donation Florence et Daniel Guerlain. Cette collection de référence pour l’art sur papier contemporain, réunie pour l’essentiel depuis 1990, rassemble plus de deux cents artistes d’une trentaine de nationalités différentes. L’entrée de ce riche et prestigieux ensemble de dessins dans les collections du Centre Pompidou a transformé profondément la physionomie de la Galerie d’art graphique du musée national d’art moderne et constitue pour lui un enrichissement historique.

L’exposition est conçue autour des oeuvres des quinze artistes nominés pour les cinq premiers prix de dessin de la fondation d’art contemporain Daniel et Florence Guerlain, initié par le couple de collectionneurs dès 2006. Ils sont tous représentés dans la donation par une ou, le plus souvent, plusieurs oeuvres. C’est ainsi que des ensembles ou des séries de dessins de Dove Allouche, Silvia Bächli, Marc Bauer, Sandra Vasquez de la Horra, Jean-Luc Verna, Jorinde Voigt, Amelie von Wulffen… côtoieront les grands formats de Frédérique Loutz et de Jorge Queiroz. Autour de ce noyau se déploieront l’ensemble exceptionnel de huit dessins de Nancy Spero de la série des Artaud Paintings (1968-69), un groupe de dessins de 2010 d’Anne-Marie Schneider et une série de Nedko Solakov, mais également des oeuvres isolées de Miquel Barcelo, Marlene Dumas, Shirley Jaffe, Richard Prince, ou Gerhard Richter. L’exposition reflétera également le parti pris volontairement international des collectionneurs qui ont très tôt su ouvrir leur collection aux artistes latino-américains (Guillermo Kuitka, Kcho, Carmen Perrin…), japonais (Leiko Ikemura et Yayoi Kusama), chinois (Huang Yong Ping, Guo Wei…), russes (Pavel Pepperstein, Georgy Litichevsky, Alexander Ponomarev…) ou encore originaires de l’Inde et du Pakistan (Rina Banerjee, Huma Bhabba, Atul Dodiya…), tout en laissant une place importante aux artistes français, très nombreux dans la donation.

Pour accompagner l’exposition, les Éditions du Centre Pompidou publient, sous la direction de Jonas Storsve, conservateur de la Galerie d’art graphique, un ambitieux catalogue qui réunira toutes les oeuvres de la donation Florence et Daniel Guerlain.



Extrait du catalogue - Collectionner avec passion et persévérance de Jonas Storsve

Lorsque Daniel Guerlain acheta en 1980 un dessin de Ljuba, artiste aujourd’hui un peu oublié, mais à l’époque très visible dans les galeries de Saint-Germain-des-Prés, il ne pouvait guère imaginer qu’avec sa future épouse Florence, rencontrée quelques années plus tard, il allait réunir la plus importante collection privée de dessins contemporains en France. Si, au départ, Florence et Daniel Guerlain sont de simples « amateurs d’art », comme ils se qualifient eux-mêmes, c’est qu’ils n’ont pas encore été contaminés par la redoutable fièvre du collectionneur, maladie grave car incurable. Ce n’est qu’à partir du milieu des années 1990 que la collection commence à prendre la forme qu’elle va présenter dans les années 2000.[…] À l’époque, ils achètent aussi bien peintures, sculptures et photographies que dessins ; le seul domaine qui ne les intéresse pas vraiment est la vidéo et les nouveaux médias. En 2004, ils cessent l’activité d’organisation d’expositions thématiques qu’ils avaient entreprise dans leur fondation, créée en 1996 aux Mesnuls, et commencent à regarder le dessin plus attentivement. À ce moment, ils réfléchissent déjà à une action en faveur de ce médium et explorent plusieurs pistes, dont une en liaison avec l’Institut de France. Finalement, c’est au sein de leur propre fondation qu’ils créent en 2006 un prix de dessin, qui sera décerné une première fois en 2007 et qui en est maintenant à sa sixième édition. La collection d’oeuvres graphiques a entre temps pris de l’ampleur, et, avec la création du prix, ils décident de concentrer davantage leurs efforts sur celle-ci.

Une décision radicale, probablement difficile à prendre, mais qui démontre clairement la détermination de Florence et Daniel Guerlain, est la vente aux enchères de leur collection de photographies en octobre 2009 : près de cent photographies d’artistes allant de Jean-Marc Bustamante à Hiroshi Sugimoto en passant par Suzanne Lafont et Éric Poitevin sont dispersées à cette occasion. En revanche, ils veillent désormais à acheter systématiquement des oeuvres des trois artistes nominés chaque année par le comité de sélection de leur prix, composé de collectionneurs – dont eux-mêmes – et de conservateurs de musées spécialisés en art graphique. Par ailleurs, lors de voyages privés, ou avec la Société des Amis du musée national d’art moderne, notamment, nos mécènes se rendent dans des ateliers et visitent des expositions, et c’est ainsi que la collection s’enrichit.[…] Assez tôt, semble-t-il, Florence et Daniel Guerlain envisagent l’avenir de leur collection en lien avec le musée national d’art moderne, dont ils sont proches depuis longtemps. En 2010, Florence Guerlain déclare dans un entretien, à propos de leur collection : « L’avenir est déjà décidé. Elle sera attribuée à une institution. Mais nous ne voulons pas communiquer le nom de la structure qui en sera bénéficiaire car nous ne voulons pas être influencés à l’avenir dans nos achats.» Ce qui est d’abord envisagé comme un legs après leur disparition devient un projet de donation, après un voyage au Japon pendant lequel ils sont confrontés à un violent tremblement de terre. Cette expérience les incite à assurer la sauvegarde de leur collection de dessins de leur vivant, et les premiers contacts sont pris avec la direction du musée national d’art moderne. La donation (dans un premier temps sous réserve d’usufruit, rapidement levée) est présentée à la commission d’acquisition du 25 janvier 2012, et l’acte notarié est signé le 5 octobre de la même année. Pour la Galerie d’art graphique, qui conservait déjà quelque 17 000 dessins, c’est la plus importante donation de son histoire. Les 1 200 oeuvres qu’elle comprend ont, à une ou deux exceptions près, été réalisées par des artistes vivants et forment un panorama original et personnel de la création graphique d’aujourd’hui. Beaucoup d’artistes – plus de 75 – étaient auparavant absents de la collection du musée national d’art moderne et cette donation comble de véritables lacunes. La collection Guerlain est pourtant loin d’être encyclopédique : elle est faite de coups de coeur, de rencontres, de hasards, et c’est justement en cela qu’elle diffère d’une collection institutionnelle, et qu’elle prend toute sa signification. Elle relate une histoire qui est celle de ses créateurs, que nous pouvons suivre également dans leur proximité, au départ, avec telle ou telle galerie, parisienne ou étrangère, par la suite avec tel ou tel artiste. […] Derrière les chiffres (1 200 dessins, 201 artistes, 38 nationalités) se cache en réalité une histoire vivante de relations humaines, qui est un élément essentiel pour comprendre la collection.

La générosité joue également un rôle important : tel dessin provient d’une vente de charité, tel autre a été acheté lors de la toute première exposition d’un jeune artiste, avec la volonté de soutenir et de promouvoir son oeuvre. Nous sommes aux antipodes d’une collection institutionnelle, construite sur des analyses et des interrogations telles que : « Quel artiste nous fait-il défaut ? » « Quelle est la lacune à combler ? » « Que manque-t-il pour que le panorama de tel ou tel mouvement ou époque soit complet ? » Lorsque ces deux types de collections sont réunis, comme c’est le cas ici, et comme ce le fut naguère avec la donation de Daniel Cordier au musée national d’art moderne, il y a quelque 25 ans, on s’approche d’une situation idéale, car la passion privée s’associe alors à la réflexion institutionnelle.