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“Zeng Fanzhi” article 1133
au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris

du 18 octobre 2013 au 16 février 2014



www.mam.paris.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 17 octobre 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Zeng Fanzhi, Hare, 2012, 400 x 400 cm (en 2 panneaux). Pinault Collection. © Zeng Fanzhi studio.
2/  Zeng Fanzhi, Bacon and Meat, 2008, 200 x 200 cm. Collection de l’artiste. © Zeng Fanzhi studio.
3/  Zeng Fanzhi, Untitled, 2012, 330 x 215 cm. Collection privée. © Zeng Fanzhi studio.

 


texte de Audrey Parvais, rédactrice pour FranceFineArt.

 

Le Musée d’Art Moderne consacre une rétrospective à l’œuvre de l’artiste chinois Zeng Fanzhi. Cette exposition révèle un artiste qui a su faire la synthèse entre arts chinois et occidental
.

Du rêve au cauchemar
Les premières toiles, monumentales dans tous les sens du terme, représentent des paysages aux teintes crépusculaires. À travers un enchevêtrement de branches noires et noueuses, l’on distingue un ciel sombre parfois traversé d’un éclair de lumière jaune ou rosée comme un coucher de soleil, ou piqueté des points blancs d’une paisible chute de neige (Untitled, 2012). Dans un feu d’artifice de couleurs paradoxalement douces (un profond vert émeraude, un délicat bleu cobalt), les animaux profitent de l’absence des êtres humains pour prendre possession de l’espace. De ces peintures à l’atmosphère énigmatique se dégage une poésie empreinte de mélancolie. Le changement qui s’opère alors dans les salles suivantes avec la série des masques n’en est que d’autant plus brutal. Place en effet aux figures humaines aux têtes et mains disproportionnées se détachant sur des fonds jaune criard ou bleu ciel. Le visage couvert de masques affichant des expressions de tristesse poignante ou de joie forcée tirant vers le grotesque, les pupilles en forme de croix, ces personnages mettent immédiatement mal à l’aise. Ce groupe qui rit, bouche grande ouverte, n’évoque pas le bonheur mais plutôt une angoissante et tragique hilarité (Mask Series no.3). Et plus on recule dans le temps, plus ce malaise s’accroît. Car quand les corps viennent à se dévoiler, ils s’offrent dans des tons rouge rosé où la chair nervurée s’apparente bientôt à de la viande pour composer un véritable morceau de cauchemar (Man and Meat, 1993).

Double influence
Dans ses œuvres, Zeng Fanzhi allie à un art profondément marqué par la culture chinoise des influences clairement occidentales. D’abord imprégnées d’éléments autobiographiques, ses toiles se distinguent par l’omniprésence du foulard rouge des Jeunes pionniers chinois enroulés autour des cous de ses personnages, souvent représentés dans des habits militaires. La figure de Mao investit parfois tout l’espace de la peinture, comme dans Tian’an Hen (2004) où son visage se dessine comme en surimpression sur la mythique Porte de la paix céleste. Les couleurs violentes rappellent alors la propagande communiste qui a bercé les jeunes années de l’artiste. Mais par contraste, l’influence de l’art occidental en devient d’autant plus évidente. Il reprend des compositions et des codes picturaux constituant désormais des références universelles. Il récrée, non sans une certaine ironie, La Cène qu’il intitule The Last Supper (2001). Ici, les disciples sont remplacés par ces mêmes personnages un peu difformes qui adoptent cependant les attitudes que ceux peints par De Vinci. Dans un décor d’une sobriété inquiétante, la nappe blanche est tachée de morceaux de pastèques rouges sang qui déstabilisent le spectateur par leur crudité et violence visuelle. Et que dire de ces couleurs vives et acides qui explosent dans la partie centrale de l’exposition et qui se rapprochent singulièrement du Pop Art. L’onirisme de ses dernières toiles apaisent alors l’œil et l’esprit, quand un gigantesque lapin replié sur lui-même évoque de manière flagrante le Lapin de Dürer (Hare, 2012), alors que ses paysages mélangent à la fois le style de l’estampe, dans l’esquisse des fines branches noires, à l’expressionnisme allemand.

Audrey Parvais

 


extrait du communiqué de presse :

 

Directeur, Fabrice Hergott 

Commissaire de l’exposition, François Michaud avec Marine Guyé


Le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris présente la première rétrospective française du peintre chinois Zeng Fanzhi. Aussi bien reconnu par les collectionneurs que par le milieu institutionnel, Zeng Fanzhi utilise depuis les années 1990 un langage original, marqué par son évidente filiation à l’art asiatique ainsi que par les nombreuses influences occidentales parvenues jusqu’à lui. C’est au travers de cette écriture totale que le regardeur se souvient de la tradition du paysage dans la peinture chinoise, tout autant qu’il pense à Warhol, Bacon, Balthus ou Pollock.

Cependant, l’oeuvre de Zeng Fanzhi peut difficilement être réduite à une assimilation de parangons traditionnels et modernistes. En ayant multiplié les styles et les thématiques, l’artiste fait preuve d’une volonté de recherche, tant picturale qu’intellectuelle, et d’une technique contrôlée. La confrontation à ces toiles laisse le spectateur seul face à une infinité, comme une étreinte dans le monde intérieur de l’artiste.

L’oeuvre de Zeng Fanzhi mélange histoire de la Chine et histoire personnelle. Ses souvenirs de jeunesse, lorsqu’il vivait près de l’hôpital de Wuhan, marque la première série de toiles qui représentent opérations, salles d’attente, viandes et corps dévêtus. D’autres toiles des années 2000 rappellent le passé politique de la Chine, comme Tian’An Men (2004) où l’on reconnaît Mao. Et si les tableaux appartenant aux Mask Series sont encore sous l’influence du Pop Art, les récents portraits et paysages s’approchent d’une abstraction plus sombre. Ces polyptyques gigantesques, barrés de ronces d’où fourmillent animaux et corps humains, sont d’un expressionnisme contenu qui se réfère à la peinture allemande et en particulier à celle de Dürer.

Cette exposition est l’occasion de découvrir l’ensemble de la carrière de Zeng Fanzhi, à travers un accrochage à rebours, d’une quarantaine de toiles et de sculptures de 2013 à 1990. À la suite de plusieurs expositions monographiques (The National Gallery for Foreign Art, Sofia, 2010 ; Rockbund Art Museum, Shanghai, 2010 ; Francisco Godia Foundation, Barcelone, 2009 ; Musée d’Art Moderne de Saint-Etienne Métropole, France, 2007), le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris propose une lecture de cet oeuvre conçue en étroite collaboration avec l’artiste.

Zeng Fanzhi est né en 1964 à Wuhan (Chine). Formé à l’Ecole des Beaux-Arts de sa ville natale, il découvre durant ces années d’enseignement l’art contemporain, chinois et occidental. Nourri par ces influences et soucieux de connaître un contexte plus effervescent, il part s’installer en 1993 à Pékin où il vit et travaille depuis.