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“Fredi Casco” La fascination des sirènes
à la Maison de l'Amérique latine, Paris

du 3 juin au 23 septembre 2014



www.mal217.org

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 2 juin 2014.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Fredi Casco, Sans titre, de la série Voluptas, 2006.
2/  Fredi Casco, Sans titre, de la série Le Retour des Sorciers, vol.1, 2005.
3/  Fredi Casco, Sans titre, de la série Opérations, exercices et cérémonies, 2010-2011.

 


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Interview de Albertine de Galbert, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 2 juin 2014, durée 10'11". © FranceFineArt.

 


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Interview de Fredi Casco,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 2 juin 2014, durée 12'28". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaire : Albertine de Galbert



La Maison de l’Amérique latine présente deux expositions autour de l’artiste paraguayen Fredi Casco (Asunción, 1967) : « La Fascination des Sirènes », une exposition monographique à caractère rétrospectif, et « Maîtres de l’Art Populaire et Indigène du Paraguay », un extrait de l’exposition d’art populaire paraguayen « Selección Texo » dont il a été commissaire en 2013 à Asunción, et dont les œuvres ont été choisies dans la collection de la Fondation Texo.

Cette mixité est à l’image de l’engagement de Fredi Casco : artiste, curateur, éditeur et réalisateur, il a aussi accompagné Ticio Escobar dans la création du premier Ministère de la Culture au Paraguay, et dans l’exercice de ses fonctions au sein du gouvernement de 2009 à 2012, avant le coup d’état parlementaire de 2012.




La fascination des sirènes - Fredi Casco

“L’essence de l’image est d’être toute dehors, sans intimité, et cependant plus inaccessible et mystérieuse que la pensée du for intérieur ; sans signification, mais appelant la profondeur de tout sens possible ; irrévélée et pourtant manifeste, ayant cette présence-absence qui fait l’attrait et la fascination des Sirènes.” Roland Barthes, La Chambre Claire, Ed. de l’Etoile, 1980.

L’œuvre de Fredi Casco traverse, et infiltre, l’Histoire et la Culture du Paraguay – ses répétitions, ses oublis, ses rituels, ses vieux démons et ses fantômes –, et en subvertit les représentations d’autorité.

La série Le Retour des Sorciers, développée en trois chapitres entre 2005 et 2012 fait ainsi référence à la dictature de Stroessner et ses mondanités (1954-1989), dont l’artiste a retrouvé au fil des années de nombreuses traces photographiques et documentaires dans des marchés aux puces d’Asunción. A partir de ces clichés, considérés si secondaires par les autorités paraguayennes qu’ils ont fini par atterrir dans la rue, l’artiste s’engage dans un processus d’infiltration formel et fictionnel. Il retouche les photographies en dédoublant certaines figures, ou en en affublant d’autres de masques à gaz. Ces images deviennent métastatiques, mais ces mutations sont si discrètes qu’on ne les perçoit pas au premier coup d’œil. Dans un second volume, il met en relation le roman de Graham Greene « Voyage avec ma tante », dans lequel apparaissent certaines descriptions de cette époque, avec les photographies trouvées. Dans un dernier volume enfin, il s’empare de l’histoire de Josef Mengele, criminel nazi réfugié au Paraguay et naturalisé en 1959. Il met en relation des photographies de fêtes traditionnelles autrichiennes, prises au Paraguay et elles aussi abandonnées au hasard des marchés aux puces, avec l’épisode de l’Hôtel Tirol, où Mengele s’était réfugié en 1966 sous le nom du Dr Fritz Fischer, et où il faillit être capturé par les services secrets israéliens.

Foto Zombie (nom d’un laboratoire photographique situé à Asunción dans les années 60), est une autre série d’œuvres développées en 2012 à partir de la même archive photographique, devenue au fil des années une véritable collection. L’artiste retourne certaines photographies et décalque au dos les contours des silhouettes des personnages représentés. Ces apparitions fantomatiques cohabitent avec les commentaires qui situent le contexte dans lequel a été prise la photographie (« Ambassade du Venezuela, 1950 », « visite de ministres du Cameroun, ambassadeur de France Pierre Népier », etc.). L’œuvre indique subtilement à quel point le caractère autoritaire du régime de Stroessner n’empêchait pas le pays de développer des relations diplomatiques avec le monde entier.

D’autres séries d’œuvres s’articulent autour de cette collection « d’objets (photographiques ou non) trouvés », comme Voluptas (2006, interventions sur des photographies de jeunes communiantes), Kiling (2011, collection de revues populaires hybridées avec certaines images des guides opérationnels de contre-guerilla édités par les États-Unis et utilisés à Fort Gulick au Panama dans la tristement célèbre « École des Amériques », créée pour soutenir les dictatures latino-américaines), Contact (travail en cours à partir de cartes de correspondance venant du monde entier, reçues par un passionné de radio amateur de 1955 à 1975), et Spectres (autre travail en cours de dessins sur des papiers administratifs anciens).

Dans un registre plus personnel, Fredi Casco réalise en 2008 une série appelée Le Bonheur, où il rephotographie au flash ses photos de famille. Le sujet est mis à distance, métaphore du souvenir qui disparaît peu à peu. Cette série interroge la part du véritable dans nos mythologies personnelles, et par extension, dans l’Histoire.

Chaco Fantôme s’inscrit dans cette difficulté à discerner le vrai du faux, à élaborer des catégories. L’artiste a réalisé des photographies et un film dans la région du Chaco, lors de célébrations populaires. Une particularité cependant : toutes les images sont floues. Comme un pied de nez aux documents ethnographiques traditionnels, où notre désir d’exotisme est satisfait, ces images sont brouillées.

Dans cette exposition, ces groupes d’œuvres forment un tout, un archipel d’îlots d’Histoire, grands et petits, constitué ces dix dernières années, à travers lequel le spectateur devra naviguer à vue. Fredi Casco met à l’épreuve notre capacité à voir et à élaborer, il nous invite à tomber dans les pièges de la séduction des images, à nager avec les sirènes, puis à faire demi-tour et à rentrer chez nous, avec encore, en écho, leur chant dans les oreilles.

Cette exposition est sa première exposition individuelle en Europe. Un catalogue est édité à cette occasion. Avec la collaboration de l’ambassade du Paraguay en France.






Maîtres de l’Art Indigène et Populaire du Paraguay - Extraits de la Collection Texo


Curateur de la collection Texo (Asunción, Paraguay) : Fredi Casco
Curateurs de l’exposition : Fredi Casco et Albertine de Galbert




Les Artistes : Julia Isídrez, Clemente Juliuz, Blanca Noguera, Edil Trudis Noguera, Osvaldo Pitoe, Néstor Portillo, Virginia Yegros.

Depuis quelques années il est souvent question de la production esthétique des communautés indigènes et rurales. Faut-il la considérer comme de l’art? Pourquoi l’œuvre picturale d’un artiste urbain est-elle considérée comme tel presque invariablement ? Il y a une ligne de pensée, consolidée dans les textes de Ticio Escobar, qui défend un art différent. Un art qui ne correspond pas tout à fait au concept occidental de l’art, mais qui s’y intègre et revendique sa place dans l’univers esthétique. Depuis cette force qu’imposent le bois, la terre, les plumes, cette matière essentielle qui porte en elle le sens de toute une communauté, les artistes populaires et indigènes enracinent leur manière d’être au monde, une manière différente de concevoir ce qui est beau et pourquoi.

Pour l’exposition « Selección Texo » à Asunción, dont nous présentons un extrait, nous avons voulu nous concentrer sur cette extraordinaire production artistique, qui se développe en dehors du circuit urbain et qui est encore insuffisamment connue (et reconnue) : l’art produit dans quelques communautés indigènes et rurales du Paraguay. Pour développer notre recherche, nous nous sommes appuyés sur le travail réalisé depuis des décennies autour de ce précieux patrimoine culturel, par le biais de collections comme celles du Centro de Artes Visuales / Museo del Barro, du Museo etnográfico Andrés Barbero, du projet culturel de Verena Regher dans la communauté de Cayin ô Clim ou, plus récemment, le Centro Cultural del Lago. A partir de ces initiatives, et d’autres de même nature, d’éminents intellectuels, artistes et responsables culturels ont pu promouvoir l’art populaire et indigène, au moyen d’efforts considérables et d’un trop rare soutien public, malgré l’évidence des difficiles conditions de production et la précarité dans lesquelles se trouvent la majorité de ces artistes.

Selección Texo 2013 a aussi été le fruit de plusieurs mois de travail de terrain, durant lesquels nous avons voyagé dans plusieurs communautés situées aux quatre coins du pays, d’abord pour prendre contact, puis pour établir des relations de travail avec les artistes que nous avions sélectionnés. Pour cela, nous avons décidé de former une équipe pluridisciplinaire et avons invité Fernando Allen et Renate Costa, deux auteurs éminents dans les domaines de la photographie et de l’audiovisuel à nous accompagner et à documenter cette expérience.

Nous sommes conscients que cette sélection, loin d’être exhaustive se limite à quelques manifestations de l’art populaire et indigène. Entre autres limites, nous avons décidé de ne pas présenter d’œuvres d’artistes décédés, mais également tout ce qui touche au patrimoine immatériel, l’art communautaire ou cérémoniel. Cela est dû, d’une part, à l’extrême complexité de ces univers culturels, – les aborder nous aurait demandé des années de recherche -, d’autre part, nous pouvons dire que le programme des « Maitres populaires de l’art populaire et indigène du Paraguay » cherche principalement à montrer et promouvoir le travail de créateurs qui, sans couper les liens avec leurs propres traditions ont produit au cours de leur vie une œuvre personnelle et de grande valeur pour notre culture.

Fredi Casco

Avec le soutien de Texo et la collaboration de l’ambassade du Paraguay en France.