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“le mur” la collection Antoine de Galbert
à la maison rouge, Paris

du 14 juin au 21 septembre 2014



www.lamaisonrouge.org

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 13 juin 2014.

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Projet le mur. © DR la maison rouge, 2014.

 


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Interview de Antoine de Galbert, fondateur de la maison rouge,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 13 juin 2014, durée 10'11". © FranceFineArt.

 


texte de Clémentine Randon-Tabas, rédactrice pour FranceFineArt.

 

Collectionner
Depuis son ouverture en 2000, la Maison rouge a exposé de nombreuses collections privées, nous faisant pénétrer à chaque fois dans l’intimité d’un collectionneur. Pour ses dix ans c’est donc Antoine de Galbert, fondateur de la Maison rouge, qui présente une très belle partie de sa collection, regroupant des œuvres d’art moderne et contemporain, glanées au cours de ces trente dernières années.

Antoine de Galbert l’avoue, s’il a réalisé cette exposition pour partager sa collection, c’est aussi, dans un esprit un peu freudien, pour se voir lui-même. Et pour cette rencontre avec son univers mental il n’a renié aucun de ses choix, présentant sans distinction ce qu’il a aimé et ce qu’il aime. Peut-être est-ce aussi, un peu à la manière de Walter Benjamin dans « je déballe ma bibliothèque », tout autant pour porter un regard sur l’acte de collectionner que sur la collection elle-même.

Qu’est-ce qu’une collection ? Qu’est-ce qui la motive ? Une tentative de maîtriser le monde ? Un acte créateur ? Est-ce un acte d’engagement ou s’agit-il d’un récit intime qui permet au collectionneur de se dévoiler à lui-même et aux autres ? Ou serait-ce tout cela à la fois ? Autant de questions qui sont soulevées par cet étonnant accrochage. A noter aussi que pour les dix ans de la Maison rouge chaque membre de l’équipe a sélectionné l’œuvre d’un artiste pour habiter les différentes cellules du vestibule, le sous-sol de la « maison », une sélection riche et surprenante.

Une démarche étonnante
Pour accrocher ses œuvres Antoine de Galbert s’est refusé à toute classification traditionnelle. Au contraire il a eu recours à un système informatique, attribuant aux œuvres un ordre aléatoire. Cela donne des rapprochements insolites, un peu à la manière d’un classement alphabétique dans une bibliothèque. Il y a là un refus de hiérarchisation des œuvres en fonction d’un système de valeur. Toutes ces œuvres se retrouvent ici sur un pied d’égalité, tout comme leurs auteurs. Ne sont-ils pas ou n’ont-ils pas tous été, comme le souligne le collectionneur, habités des mêmes questionnements ? Cela n’est pas sans rappeler Andy Warhol qui disait souhaiter parfois que ses tableaux aient les mêmes couleurs ou les mêmes dimensions, devenant ainsi interchangeables. Ce qui empêcherait un collectionneur de penser l’œuvre possédée meilleure que celle d’un autre.

Dans le même esprit, tout au long de l’exposition le spectateur peut découvrir un certain nombre d’œuvres de l’artiste Rutault. Ses Définition /méthode, des tableaux peints de la même couleur que le mur sur lequel ils sont accrochés, sont présentés sans cartels tout comme le reste des œuvres de la collection. Ainsi l’œuvre ne risque pas de devenir l’illustration du cartel. Le spectateur peut choisir de se référer aux bornes placées dans chaque salle, ou même à son i-phone ou son i-pad après avoir flashé un code lui permettant d’accéder aux informations. Il peut aussi choisir de se lancer sans aucune référence autre que ses propres connaissances préalables. Se laissant ainsi aller à la création de son propre parcours, détaché de toute autre considération que ses inclinations personnelles.

Clémentine Randon-Tabas

 


extrait du communiqué de presse :

 

À l’occasion de son 10eme anniversaire, la maison rouge présente du 14 juin au 21 septembre 2014, Le mur – collection Antoine de Galbert, onzième volet de la série d’expositions consacrées aux collections privées.



Plus de 1 200 œuvres de 800 artistes forment un long ruban d’environ 3 mètres de haut et deux cents mètres de long sur toutes les cimaises de la fondation.

Après dix expositions proposant des univers de collectionneurs variés, cette date anniversaire est l’occasion de montrer enfin largement la collection du fondateur et président de la maison rouge, Antoine de Galbert, une part d’intimité qui lui est chère et qu’il n’a jusqu’à présent que peu dévoilée. Mais à l’inverse des précédents projets autour de collections particulières, réalisés avec des commissaires qui ont fait des choix représentatifs dans de larges corpus d’oeuvres, l’accrochage imaginé par Antoine de Galbert comporte cette fois-ci une spécificité remarquable :

« L’idée de cette exposition est née de l’observation quotidienne de ma bibliothèque, où le classement alphabétique des monographies crée d’invraisemblables voisinages. Jean Dubuffet cohabite avec Marcel Duchamp sur le même rayonnage. Cette arche de Noé me donne la sensation que tous les artistes naviguent sur le même fleuve pour les mêmes raisons, comme le remarque Christian Boltanski : « Que ce soit Aloïse, moi ou un artiste du 16e siècle, ce sont les mêmes questions qui sont posées : la mort, la recherche de la beauté, la nature, le sexe… Les sujets en art sont très limités. Seuls les mots et les vocabulaires diffèrent (…)». La bibliothèque est tout à la fois archive de la collection, souvenirs visuels d’un long voyage et musée imaginaire du collectionneur. […] Délaissant l’idée déjà explorée par certains commissaires d’expositions, d’un accrochage par ordre alphabétique, j’ai choisi de présenter l’essentiel des œuvres de ma collection, s’accrochant au mur, à l’aide d’un logiciel renseigné seulement par leurs formats (encadrées) et leurs numéros d’inventaires. Ce travail a été confié à un informaticien qui a utilisé la méthode dite de Monte Carlo, bien connue des mathématiciens, qui vise à calculer une valeur numérique en utilisant des procédés aléatoires, c’est-à-dire des techniques probabilistes. L’appellation de cette formule fait allusion aux jeux de hasard pratiqués dans les casinos.

Les oeuvres sont accrochées sans distinctions de forme, de taille, de médium, d’histoire, de valeur commerciale ou de notoriété des artistes. Pour garder un minimum de cohérence, seules les oeuvres d’art moderne et contemporain de la collection y figurent. Toutes ont été créées par des artistes d’âge, de sexe ou de nationalité divers. Sans doute auraient-ils souhaité voir leurs œuvres installées dans des conditions parfaites, sur un mur blanc, à une hauteur idéale, relativement éloignées de celles de leurs confrères. Que tous me pardonnent cet accrochage qui peut sembler irrespectueux. Je souhaite aussi que les commissaires d’expositions, que je respecte et avec qui la maison rouge travaille très souvent, ne voient pas dans ce mur une remise en cause de leur légitimité, ou encore moins une quelconque critique de ma part.

Il reste à savoir, car j’écris ces lignes avant de voir le résultat, si notre public pourra vraiment regarder et appréhender ces oeuvres. Comme dans la vie quotidienne, « l’irregardable » attise de toute façon le désir de regarder. » (Antoine de Galbert, in Le Mur, éd. Fage, catalogue de l’exposition)



Cette exposition ne présente pas la totalité de la collection d’Antoine de Galbert dans la mesure où en sont exclues les installations, les sculptures, les vidéos, l’art primitif ou l’art plus ancien. Elle ne donnera donc au visiteur qu’une image partielle de la collection. Le Mur sera plutôt l’occasion de soulever un certain nombre de questions liées à l’acte-même de collectionner, d’accrocher, de stocker, de montrer les oeuvres… C’est aussi un portrait diachronique d’un collectionneur, qui dévoile ses choix et ses goûts, sans rien renier de ce qu’il aime ou a aimé. La sélection est finalement déléguée au visiteur, qui devra inventer son propre parcours, en s’appuyant à son tour sur son regard, sa curiosité, ses goûts…

Ce dévoilement atypique prolonge à sa manière la présentation des oeuvres d’Antoine de Galbert dans l’exposition inaugurale de la fondation, L’intime, le collectionneur derrière la porte, où des oeuvres de son vestibule, accrochées à touchetouche, accueillaient les premiers visiteurs de la maison rouge.

Pour apporter une dimension supplémentaire de jeu au projet, Antoine de Galbert a invité Claude Rutault à réagir à cet accrochage aléatoire. L’artiste, dont la peinture est toujours en relation étroite avec les murs sur lesquels elle s’expose, a proposé d’actualiser pour la première fois la dé-finition/ méthode collection 23, apparitions, 2012, qui consiste à disséminer dans le parcours de l’exposition d’une collection des toiles de formes et de dimensions variées peintes de la même couleur que le mur sur lequel elles sont accrochées.

Sera également présentée la déf-inition/méthode diptyque/rutault 2011, entrée dans la collection Antoine de Galbert il y a quelques mois, sous forme d’échange. La toile d’Eugène Leroy qu’il possède est associée à une toile de Rutault de mêmes dimensions, peinte de la même couleur que le mur.



autour de l’exposition

Tout au long de l’exposition, divers intervenants, artistes, historiens d’art, conservateurs seront invités à donner leur point de vue et à proposer leur parcours dans les oeuvres du Mur lors de visites guidées.

Un catalogue sera publié dans la collection privées, chez Fage éditions. Il comprendra un leporello de 11 mètres reproduisant la totalité de l’accrochage du Mur, ainsi qu’un texte d’Antoine de Galbert, un entretien entre Anaël Pigeat et Antoine de Galbert et un article de Sophie Delpeux, historienne de l’art, sur les accrochages défiant les « règles » de l’exposition.

Un documentaire réalisé par Alyssa Verbizh et produit par Terra Luna, sera présenté en septembre. Il retracera tous les moments forts de la préparation de l’exposition avec une interview d’Antoine de Galbert.