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“Festival photo Levallois” 7ème édition
à Levallois

du 10 octobre au 15 novembre 2014



www.photo-levallois.org

 

© Anne-Frédérique Fer, exposition Hôtel de Ville, le 9 octobre 2014.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Esther Teichmann, Fractal Scars, Salt Water and Tears, 2014.
2/  Sylvain Couzinet-Jacques, The Park, 2012.
3/  Larry Sultan et Mike Mandel, Two Guys from Van Nuys. Galerie Thomas Zander, Köln.

 


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Interview de Muriel Babandisha, assistante du directeur artistique Paul Frèches*,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 9 octobre 2014, durée 7'26". © FranceFineArt.

* Paul Frèche se trouvant en Chine et venant d'être nommé Attaché Culturel au Consulat de France de Shanghai - NDLR

 


extrait du communiqué de presse :

 

Direction artistique, Paul Frèches assisté de Muriel Babandisha



Depuis sa création en 2008 à l’initiative de la Ville de Levallois, le festival Photo Levallois soutient durablement la photographie contemporaine sous toutes ses formes. Encourageant la jeune création ainsi que les échanges avec les autres médiums, le festival se distingue par son ouverture aux évolutions de la photographie. Photographes reconnus internationalement, émergents ou encore photographes amateurs y sont représentés. Le festival rassemble les grands courants de la photographie contemporaine, afin d’en restituer la richesse et la pluralité, tout en affirmant un regard singulier sur la création contemporaine. Avec une programmation composée essentiellement de productions inédites et tournée vers l’international, Photo Levallois reste fidèle à sa volonté d’être accessible au plus grand nombre.


Les expositions

Cette année, les cinq expositions de Photo Levallois se déclinent sur trois lieux et privilégient la complémentarité.

L’exposition consacrée au duo d’artistes formé par Larry Sultan et Mike Mandel, le moment fort de l’édition 2014 de Photo Levallois, se déroulera dans les Salons d’Honneur de l’Hôtel de Ville. L’ensemble de la série Evidence, considérée comme précurseur d’une nouvelle pratique de la photographie conceptuelle et une sélection de la série d’affiches publicitaires ironiques et décalées Billboards, seront présentés.

C’est dans les jardins de l’Hôtel de Ville, que l’on trouvera les photographies de Lucas Blalock, jeune photographe américain qui se joue des codes de la photographie et crée des images débordant d’humour.

L’exposition des lauréats de la septième édition du Prix Photographique Ville de Levallois, Esther Teichmann, Sylvain Couzinet-Jacques et Stephanie Gudra, autre temps fort du festival, aura lieu à la galerie Municipale de l'Escale. Il s’agit du rendez-vous annuel de Photo Levallois avec la jeune création photographique internationale dans ce qu’elle a de plus novateur.

En 2011, la médiathèque Gustave Eiffel a été intégrée dans les lieux d’exposition du festival, les expositions qui y sont présentées s’orientent principalement vers les pratiques qui échappent à la photographie traditionnelles. Pour la septième édition de Photo Levallois, la médiathèque accueillera The Molem Collective, une installation d’Hana Miletic. qui invite le public à participer et promet de belles surprises.

Enfin, comme chaque année, le Photo - Club de Levallois complète ce programme, par une exposition collective thématique dans le péristyle de l'Hôtel de Ville.





Quelques expositions…


Au Salon d’honneur de l’Hôtel de Ville, du 10 octobre au 25 octobre :
Larry Sultan et Mike Mandel, Two Guys from Van Nuys


L'édition 2014 de Photo Levallois est marquée par la première exposition d'ampleur en France du duo d'artistes américains incontournables Larry Sultan et Mike Mandel. Depuis le milieu des années 1970, Larry Sultan (1946 - 2009) et Mike Mandel (né en 1950) ont contribué au dialogue entre la photographie et l'art conceptuel de façon magistrale. L'exposition présente deux ensembles majeurs qui ont marqué l'histoire de la photographie et dont l'influence n'a cessé de grandir au fil des ans: Evidence et Billboards.

Nés tous deux à Los Angeles, Larry et Mike font connaissance au début des années 1970 au San Francisco Institute for the Arts où ils étudient la photographie. Peu tournés vers le romantisme et l'esthétique bohème qui prévalent alors à San Francisco, ils sont également distants vis-à-vis de l'héritage de la photographie locale, incarnée par Ansel Adams, Edward Weston ou encore Imogen Cunningham. Leurs affinités vont plus à la culture populaire véhiculée par le cinéma et la dé-construction des mythes qui la sous-tendent. Dès lors, parmi leurs influences importantes, se dégage Robert Heinecken, fondateur du département de photographie de UCLA dans les années 1950 et infatigable explorateur des limites de la photographie, tant formelles qu'intellectuelles. On retrouve également Ed Ruscha, pilier de l'art conceptuel de Los Angeles, qui fit un usage abondant et radicalement novateur de la photographie, souvent au moyen de livres auto-édités, forme que reprendront Larry et Mike dès leurs débuts.

Toutefois, c'est bien Marcel Duchamp qui est la figure tutélaire de l'ensemble Evidence, publié en 1977 par le duo, après deux ans d'un travail de recherche iconographique et de séquençage. Bénéficiaire d'une bourse prestigieuse (National Endowment for the Arts), Larry et Mike ont les moyens d'entreprendre une vaste collecte d'images conservées dans les archives de la police, des pompiers, de différentes agences gouvernementales de régulation, mais aussi des entreprises qui fabriquent alors les armes, les engins spatiaux et les technologies du futur. Les portes de ces forteresses s'ouvrent à eux contre toute attente, probablement grâce à la caution publique du financement de leurs recherches et les voici confrontés à d'innombrables photographies de documentation de ce qui se passe en Californie à ce moment là et qui préfigure le futur. Le langage pictural du pouvoir de l'époque en quelque sorte. Les images sont en noir et blanc, réalisées avec soin, selon les canons d'une photographie classique documentaire, dont la grammaire est déjà passée dans l'inconscient collectif.

Le geste fondateur d'Evidence est l'appropriation de ces images (un terme qui n'avait jusqu'alors jamais été utilisé dans le domaine de l'art) par les deux artistes, qui leur donnent une seconde vie en les privant de leur contexte initial et donc de leur fonction de document. Mises au service d'une narration non-linéaire et équivoque, elles deviennent absurdes et souvent hilarantes. En revendiquant le statut d'auteur de ces photographies qui sans eux seraient parties dans les poubelles de l'histoire, Larry et Mike créent un scandale et l'exposition au San Francisco Museum of Art qui suivra la publication du livre sera très controversée. On peut considérer Evidence comme un jalon de l'histoire de la photographie car c'est le premier travail qui se donne pour but de démonter le mythe de la véracité de l'image photographique. De fait, les photographies collectées par Larry et Mike en tant que documents deviennent des pures connotations. Pourtant, elles parlent indéniablement de ce qui se passait en Californie à cette époque, marquée par l'expansion économique, technologique et la relative accalmie sociale après la fin de la guerre du Vietnam.

Egalement portés par cette volonté de dé-construction du langage pictural et empreints du même humour ravageur, les Billboards sont initiés en 1973. L'ambition des deux artistes et de suscite rune prise de conscience par le grand public de la façon dont fonctionnent les affiches publicitaires, genre dominant de photographie à Los Angeles, où, comme disait Larry Sultan "la plupart des images que nous voyions étaient des images que nous n'avions pas choisi de voir. Ce sont les publicitaires qui nous ont donné la notion de qui nous étuvons censés devenir". Ces grandes affiches omniprésentes et autoritaires ont à ce point pénétré l'inconscient et forgé la perception de l'image photographique, qu'il est très difficile d'échapper à la sidération qu'elles provoquent. En 1975 Larry et Mike installent une première affiche de leur fabrication (c'est d'ailleurs une sérigraphie d'après une peinture et non pas une photographie), représentant trois oranges en train de brûler, accompagnées du slogan "burning oranges". C'est le début d'une série d'interventions qui durera jusqu'en 1989, avec quinze affiches différentes posées sur plus de quatre vingt dix sites, essentiellement en Californie. Là encore, la stratégie du détournement est à l'œuvre, puisque les Billboards délivrent des messages absurdes et anonymes, contrairement aux affiches qu'ils singent. Ce ne sont pas non plus des affiches d'artistes, ce qui rend leur statut encore plus incertain. En évitant tout didactisme, le duo tente de mettre au jour le fonctionnement de la publicité, en laissant le spectateur se faire sa propre opinion.

L'emblématique billboard We Make You Us écorche le programme des publicitaires avec la précision d'un coup de couteau dans un paravent.

C'est un grand honneur pour Photo Levallois de présenter cette exposition à l'occasion de sa septième édition. Après des monographies consacrées à Jan Groover et John Divola en 2012 et 2013, le festival continue de présenter des figures fondatrices des courants les plus pertinents de la photographie contemporaine, dont la visibilité en France est injustement marginale.



À la galerie de l'Escale, du 17 octobre - 15 novembre :
Prix Photographique Ville de Levallois 2014


Lauréate : Esther Teichmann
Mentions Spéciales : Stephanie Gudra, Sylvain Couzinet-Jacques

Le jury du Prix Photographique de la Ville de Levallois 2014, qui s’est réuni le 3 juin, a décerné son prix à Esther Teichmann (Allemagne, 1980) pour son travail Fractal Scars, Salt Water and Tears. Il a été sélectionné parmi 168 dossiers en provenance de 31 pays. Le Prix consiste en une bourse de 10 000 euros ainsi qu’une exposition produite dans le cadre de la septième édition du festival, qui se tiendra du 10 octobre au 15 novembre 2014, à la galerie de l'Escale. Le Jury a par ailleurs décidé d’attribuer une mention spéciale à deux autres artistes, Stephanie Gudra (Allemagne, 1981) et Sylvain Couzinet-Jacques (France, 1983) leur offrant ainsi la production d’une exposition. Il était composé cette année de :
- Joshua Chuang, conservateur en chef, Center of Creative Photography, Tucson, Arizona.
- Lucy Conticello, directrice de la photographie, M Le Magazine du Monde, Paris.
- Stéphane Decreps, adjoint au maire chargé de la culture, ville de Levallois.
- Aron Mörel, éditeur, Mörel Books, Londres.
- Joël Riff, Curieux, chronique Curiosité, Paris.


Lauréate : Esther Teichmann, Fractal Scars, Salt Water and Tears

Lauréate du Prix photographique Ville de Levallois 2014, Esther Teichmann convie le spectateur dans un monde hors du temps, composé de tableaux oniriques d'une nature resplendissante et peuplé de personnages anonymes qui semblent revêtir des formes diverses, ici incarnés, là statufiés.

L'artiste utilise des techniques variées qu'elle mêle de façon originale et audacieuse. La photographie en premier lieu, qui est le médium central de ce travail, décliné sous des formes anciennes ou contemporaines, qui ajoutent au trouble de la temporalité. Les tirages couleur d'une grande netteté sont comme détournés de l'esthétique contemporaine à laquelle ils renvoient généralement, dès lors qu'ils côtoient d'autres images photographiques moins "transparentes" dans lesquelles l'intervention de l'artiste se fait plus manifeste, comme des cyanotypes ou des tirages argentiques colorisés. La peinture occupe également une place importante, l'artiste l'utilisant notamment pour accentuer le caractère imaginaire de cet univers. La vidéo et l'écriture apportent une trame narrative en pointillé, tandis que les sculptures disposés dans la pièce font écho aux images et matérialisent les fantasmes.

On pénètre instantanément dans ces images majestueuses et sensuelles, parcourant ces paysages sublimes ou allant à la rencontre des femmes et des enfants qui les rêvent plus qu'ils ne les habitent. Le regard glisse sur les parois de ces grottes, elles aussi des mondes à part entière, vibrant de couleurs irréelles et abritant des mystères insondables. A travers cet ensemble éludant sans cesse toute conclusion ou résolution, Esther Teichmann élabore une méditation sur le désir et ses métamorphoses incessantes. Comme par contamination, la force symbolique de Fractal Scars, Salt Water and Tears suscite le désir de celui qui regarde et l'amène à se questionner sur son désir.

Esther Teichmann est née en 1980. De nationalité allemande et américaine, elle est obtient en 2011 son PhD de photographie au Royal College of Arts à Londres, ou elle enseigne depuis 2013. Fractal Scars, Salt Water and Tears a fait l'objet d'une publication par l'artiste en 2014 (selfpublishehappy, Londres)


Mention Spéciale : Sylvain Couzinet-Jacques

C'est d'abord la peinture qui attiré Sylvain Couzinet-Jacques, au sortir d'une adolescence marquée par l'esprit punk et la soif de liberté. Après une étape dans un grand atelier en Bourgogne, suivie d'une fringale de voyages, c'est à l'école des Beaux-Arts de Marseille qu'il se tourne vers la photographie.

Par leur format conséquent et leurs couleurs sophistiquées, ses photographies évoquent subtilement la main d'un peintre. Ses pièces arborent le plus souvent une grande exigence formelle qui n'est pas exempte de séduction, tandis que son propos porte sur des aspects sombres mais essentiels du monde contemporain comme la surveillance généralisée et l'emprise des marchés sur les individus et les Etats. Ainsi, la série "Standard and Poors", initiée en 2010 constitue une exploration des conséquences de la crise financière espagnole, envisagée principalement sous l'aspect d'un marché immobilier effondré et d'une culture des loisirs de masse à l'américaine dont la greffe n'a pas pris.

Les pinceaux remisés au placard, il semble bel et bien que la photographie est devenue son terrain de jeu, et l'esprit libertaire est toujours là : il s'agit de jouer avec les règles et les limitations du médium, et l'emmener vers des horizons nouveaux en le conjuguant avec d'autres formes. Ainsi, pour Photo Levallois, il a conçu une installation spécifique dans laquelle des piles de papier sérigraphié dialoguent avec des photographies dans la veine de ses travaux précédents. Le choix n'a rien d'arbitraire, puisque le papier utilisé pour constituer cette sculpture pauvre est un papier sensible à la chaleur, le même que celui sur lequel sont imprimés les relevés de transaction des distributeurs de billets.

Outre l'allusion à la technique photographique (l'analogie entre la photo-sensibilité et la sensibilité à la chaleur), cet emploi (ou plutôt ce contre-emploi) appuie ironiquement sur une brèche ouverte du système capitaliste, en détournant un de ses fétiches, lequel se trouve comme vidé de sa substance symbolique. En arrière-plan de ces piles de papier, les photographies de grand format ont été prises durant l'été 2014 à Benidorm, ville défigurée qui symbolise les excès du marché immobilier durant les années précédant la crise financière de 2008. Les tirages noir et blanc sont comme rehaussés d'un verre teinté aux couleurs irréelles.

Sylvain semble nous dire "Non, vous ne rêvez pas. A moins que..."

Sylvain Couzinet-Jacques est né en 1983. Diplômé de l'école des beaux-Arts de Marseille et de l'ENSP d'Arles, il vit à Paris. Son travail a été montré récemment au BAL, à la galerie Jeune Création et au Salon de Montrouge.


Mention Spéciale : Stephanie Gudra

Avec une méthode rigoureuse servie par une grande inventivité, Stephanie Gudra prend la photographie à la racine. Il est question de lumière, d'enregistrement, de procédé, de répétition, de matériel, de transparence et d'illusion, dans un continuum d'images qui semblent compléter, argument après argument, un programme ambitieux d'exploration et de mise en forme du médium photographique.

L'une de ses stratégies prépondérante consiste à fondre dans un tout l'image photographique et les éléments techniques qui permettent son apparition. Ainsi, la lentille de l'objectif, le dépoli du viseur, le plan film, le diaphragme, ou encore l'écran sont tour à tour sujets de ses photographies, soumis à un glissement formel qui en fait des abstractions, au même titre que l'intention de l'artiste. La cohérence de la démarche est en cela remarquable : il s'agit bel et bien d'une pratique conceptuelle, dont les résultats visuels sont également des concepts autant que des images. Depuis le début du XXième siècle, de nombreux artistes se sont confrontés à cette démarche réflexive sur le médium, qu'il s'agisse d'Alfred Stieglitz avec ses équivalents, de Laszlo Mohol-Nagy avec ses photogrammes, et plus proche de nous, James Welling ou encore Waleed Beshty. Mais cette volonté de figurer dans l'image les moyens techniques qui la sous-tendent évoquent particulièrement le travail de Christopher Williams, professeur de photographie à la Kunstakademie de Düsseldorff. Cependant à la différence de celui-ci qui insiste sur la description et la narration des procédures photographiques et des structures socio-économiques en arrière plan, Stephanie Gudra prend fermement le parti de l'abstraction et de la poésie. En effet, loin d'être de froids descriptifs du médium et de l'acte photographique, les œuvres de Stephanie sont des concepts mis en forme de façon presque allégorique, irrigués de mystères qui renvoient à l'astronomie, la magie et toutes sortes de chemins à l'horizon insondable.

Très sûre du point de vue de la technique, l'artiste conjugue admirablement l'usage classique de l'appareil et la pratique du photogramme, prolongeant à sa façon le dialogue ininterrompu de ces deux branches historiques de la photographie. Au vu de ses photographies réalisées depuis 2009, on attend avec sérénité le développement d'un travail dont la pertinence semble s'affirmer avec le temps.

Stephanie Gudra est née en 1981 en Allemagne. Après des études de philosophie, philologie et linguistique à l'université de Münster, elle poursuit sa formation par un mastère en arts plastiques dans la même ville. Résidant aujourd'hui à Berlin, elle expose régulièrement et Allemagne. Son travail est montré pour la première fois en France à l'occasion de Photo Levallois 2014.