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“Photos trouvées” Photographies d’amateurs du 20 ème siècle
à la Maison de la Photographie Robert Doisneau, Gentilly

du 24 octobre 2014 au 25 janvier 2015



www.maisondelaphotographie-robertdoisneau.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage, le 23 octobre 2014.

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1/  2/  3/  Photos Trouvées, © collections particulières.

 


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Interview de Michaël Houlette, directeur de la Maison de la Photographie Robert Doisneau,
par Anne-Frédérique Fer, à Gentilly, le 23 octobre 2014, durée 14'32". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaires d’exposition : Michel Frizot et Cédric de Veigy



Photos Trouvées est né de l'envie de partager un étonnement face à la vivacité photographique qui se donne à voir dans les images d'amateurs du 20 ème siècle. Il s'agit d'une invitation à s'affranchir de la prétendue banalité de ces photographies pour mieux reconsidérer la singularité et l'imprévisibilité de chacune d'entre elles. Réalisée à partir de tirages et de négatifs glanés sur les marchés aux puces, l'exposition se compose d'une centaine d'épreuves originales et d'une soixantaine d’agrandissements numériques qui reprennent le matériau et prolongent la curiosité du livre Photo trouvée. Photographies d’amateurs rassemblées par Michel Frizot et Cédric de Veigy (Phaidon, 2006) avec les deux auteurs comme commissaires.

Présenter une sélection de ces photographies dans leur format originel permet de restituer la délicatesse de regard propre à des images qui étaient avant tout destinées à tenir dans la main, à se glisser dans un portefeuille, à apparaître dans l'écrin d'un album ou d'un cadre ; chacun peut ainsi reprendre contact avec la matérialité et la précision d'un support qui invite avant tout à l'intériorisation de ces visions. Anodines et étrangères au premier abord, ces images de petites dimensions regorgent pourtant de détails, d'élans et de dispositions qui retiennent l'attention avant de laisser le regard songeur.

Oser agrandir ces photographies bien au-delà de leur habituelle modestie permet d'accéder à une perception plus fouillée et plus gourmande des dimensions humaines et photographiques de ces images. Loin de prétendre proposer un échantillon représentatif des standards de la production amateur, ces agrandissements donnent à ressentir l'écart entre ce que l’amateur a voulu photographier et ce qui lui est restitué par la surface photosensible.

En effet, le filtre de la photographie ne se juxtapose pas exactement à l'attention portée par le photographe. Souvent l'image retourne un résultat décevant par rapport au souvenir de la scène photographiée : ici des visages aimés se perdent dans l'opacité d'une sous exposition, là des horizons familiers se noient dans le flou d'une mise au point décalée ; ici une lumière d'ambiance est exagérément contrastée par le rendu du tirage, là un cadrage à main levée escamote un regard amical. Il arrive aussi que la sensibilité de l'appareil excède la vision et la mémoire de l'amateur et lui tende la précision d'un détail ou d'un arrière-plan inaperçus : les arabesques imperceptibles à l'oeil nu de gestes fugitifs, l'irruption de rapprochements imprévisibles ou la permanence de circonstances oubliées. Ainsi, comme la mémoire, la photographie semble se manifester en procédant par enfouissements, par déformations ou par débordements.

Ce dépassement des intentions du photographe par les spécificités de l’appareil se manifeste avec une rare acuité dans la pratique amateur, sans se réduire à des accidents ou des ratages. Les images inspirées ou maladroites qui composent l'exposition laissent chacune percevoir ces réductions ou ces excédents d'indices lumineux qui structurent la scène photographiée et s'accordent avec plus ou moins de bonheur aux attentes des auteurs et protagonistes de l'image. Elles distillent une forme d'improvisation face à ce qui ne se subordonne pas entièrement aux désirs et le spectacle de ces aléas convoque en nous des émotions enfouies qui dépassent de beaucoup les seules considérations photographiques. Ces images réveillent les dispositions sensorielles les plus familières de notre vie « d'amateur », plus spontanément qu'une esthétique académique et calculée.

La grâce du photographe amateur consiste à montrer comment l'intimité et la pratique de la photographie se rejoignent parfois dans un même consentement à la latence. L’amateur parvient parfois, sans même s'en apercevoir, à retenir dans ses photographies ce qui rend les choses indomptables. Mieux, il nous montre comment exposer l'intimité à la lumière du jour.