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“Mois de la photo” 18ème édition
à Paris

novembre 2014



www.mep-fr.org/mois-de-la-photo/mdlp2014

 

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Légendes de gauche à droite :
1/  Eugène de Biver, Marie-Louise, vers 1900, Fonds Biver, Don Asseline. ©Collection SFP. Pour l’exposition Sans nom / sans abri de Anonyme, Eugène Biver, Louise Nurse à la Société Française de Photographie, Paris 2ème / dans le cadre de la thématique Anonymes et amateurs célèbres.
2/  Philippe Guionie, Georgie, 2012. © Philippe Guionie / Polka Galerie.
Pour l’exposition Swimming in the Black Sea de Philippe Guionie au Salon du Panthéon, Paris 5ème / dans le cadre de la thématique Photographie méditerranéenne.
3/  Dolorès Marat, La femme au sac à main, Charles-de-Gaulle Étoile, 1987, tirage Fresson en quadrichromie.
©Dolorès Marat / Collection Maison Européenne de la Photographie, Paris.
Pour l’exposition Paris Champ & Hors Champ à la Galerie des bibliothèques de la Ville de Paris, 4ème / dans le cadre de la thématique Au coeur de l’intime.

 


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Interview de Jean-Luc Monterosso,
directeur de la Maison européenne de la Photographie et commissaire général du Mois de la Photo à Paris,

par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 29 octobre 2014, durée 11'07". © FranceFineArt.

 


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Interview de Valérie Fougeirol,
déléguée artistique du Mois de la Photo à Paris de la thématique "Anonymes et amateurs célèbres",

par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 3 novembre 2014, durée 22'55". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire général, Jean-Luc Monterosso, directeur de la Maison européenne de la Photographie

Les thématiques retenues pour l’édition 2014 sont :
- La photographie méditerranéenne (Déléguées artistiques : Giovanna Calvenzi et Laura Serani)
- Anonymes et amateurs célèbres (Déléguée artistique : Valérie Fougeirol)
- Au cœur de l’intime (Délégué artistique : Jean-Louis Pinte)




Le miroir d'une société par Jean-Luc Monterosso, Commissaire général

Quatre délégués ont orchestré les trois grands thèmes de ce Mois de la Photo : Giovanna Calvenzi et Laura Serani pour la photographie méditerranéenne, Valérie Fougeirol pour les photographes anonymes et amateurs célèbres, et Jean-Louis Pinte pour les expositions au cœur de l'intime.

Trois thèmes qui traversent et irriguent la création photographique contemporaine.

La méditerranée, dont l'actualité brûlante nous donne à voir chaque jour son lot d'images tragiques, mais qui fut et reste encore le berceau de notre civilisation. Du journalisme au récit de voyage, en passant par la recherche des origines, le photographe documente, interroge, réfléchit et illustre une réalité politique et sociale souvent complexe.

Ce sont les amateurs et les anonymes qui produisent la majorité des images diffusées aujourd'hui dans le monde. Du traditionnel album de famille aux réseaux sociaux, cette production façonne l’univers du visuel d'où émerge de temps à autre une personnalité inattendue : cinéaste, peintre ou écrivain.

Enfin, l'intime, dont on ne répétera jamais assez qu'il constitue un ultime enjeu dans un monde où la sphère du privé se dissout peu à peu dans une toile de plus en plus envahissante.

L'édition 2014 du Mois de la Photo répond ainsi à travers une centaine d'expositions et d’événements aux interrogations d'une société en perte de repères.




Photographie méditerranéenne par Giovanna Calvenzi et Laura Serani

Méditerranée. Le Mare Nostrum des Romains fut pendant des siècles le berceau de certaines des plus anciennes civilisations du monde occidental. « La sagesse ancienne enseignait que notre mer arrive là où pousse l’olivier » écrit l’essayiste yougoslave Predrag Matvejevi´c, dessinant ainsi une éventuelle géographie poétique. Langues, cultures, religions, chansons, parfums, coutumes et habitudes s’y croisent. La Méditerranée est tour à tour destination touristique, théâtre de tragédies annoncées, route de migrations. Face à la multitude des cultures qui y cohabitent, à la complexité des réalités sociales et politiques des pays qui s'y reflètent, la photographie représente un instrument décisif pour réfléchir, documenter, dénoncer ou perpétuer la mémoire. Tous les langages, toutes les grammaires, toutes les techniques deviennent possibles. La structure incisive du photojournalisme pour témoigner, à plusieurs voix, de la crise profonde qui affecte la Grèce ; le langage documentaire, théorisé par Walker Evans, pour raconter l'histoire des côtes françaises, ou de la ville de Thessalonique ; ou encore, le mythe d'Ulysse et de son odyssée itinérante, revisitée sous le prisme du smartphone ; la vidéo pour évoquer les souvenirs de famille et recueillir les témoignages de ceux qui ont été contraints à l'exil.

Venise et la Sicile, Israël et le Maroc, l’Algérie et l'Espagne, sont racontés par des auteurs qui ont su voyager dans les lieux, le temps, les souvenirs. Le prétexte géographique de la Méditerranée, ses frontières à la fois précises et précaires, l'histoire que racontent ses vestiges, les références littéraires, sont déclinés à travers des regards jeunes, et d’autres plus mûrs. La permanence des traditions, l’antagonisme des cultures, la richesse et la misère, les espoirs et les tragédies, s’entrelacent dans des projets cherchant à retracer les mémoires personnelles, l'aventure des migrations, le désir de « normalité » de peuples dont les rêves rappellent les codes et modèles de la bourgeoisie occidentale. Mais aussi les suggestions esthétiques faites par les villes et leur Histoire, ou la mémoire d’événements et de lieux que la photographie a pu préserver. Et enfin l'idée du voyage, intrinsèquement liée à la mer : partir à bord de monumentaux navires de croisière, ou de fragiles embarcations de migrants, par plaisir ou nécessité, pour rejoindre les villes de l'histoire, ou celles de l'espoir.




Anonymes et amateurs célèbres par Valérie Fougeirol

La photographie dissimule des trésors cachés, anonymes ou amateurs. Souvent modestes et uniques, ces images se dénichent et appellent simplement un nouveau regard. Leur présence intime et familière évoque des moments de vie.

La pratique photographique amateur, grâce à la maîtrise de l’instantané, permet l’apparition des premières photographies-souvenirs, et le portrait de studio s’installe dans les familles. L’amateur-photographe est aussi présent lors d’événements importants : pendant la Grande Guerre, à la Libération on encore aujourd’hui, les images amateurs circulent et sont publiées. Les événements marquants de la vie privée révèlent eux aussi quelques perles photographiques : l’album d’un amoureux ou encore l’archive d’ouvriers sportifs, apportent des regards personnels et intimes. Avec le développement du tourisme et des congés payés, le photographe du dimanche participe à la production d’images spontanées, parfois maladroites mais toujours attachantes, comme le montre la collecte de Michel Frizot, présentée à la Maison européenne de la Photographie, qui nous invite à les regarder pour les sortir de l’oubli.

Sauver de l’oubli des fonds anonymes ou des archives amateurs est une mission que la Société française de Photographie accomplit, se mobilisant pour accueillir, identifier et proposer des collaborations sur ces fonds. Anonymes ou amateurs, les artistes contemporains s’emparent de ces images et nous permettent de les redécouvrir. Stéphanie Solinas répertorie les Déserteurs du Père Lachaise, Miki Nitadori évoque la diaspora japonaise à Hawaï, et Romaric Tisserand interroge les négatifs d’un soldat portugais en Angola. Ou encore, des amateurs contemporains lors d’aventures personnelles – le périple initiatique de Mike Brodie ou les carnets de voyages de Matt Wilson – révèlent l’inspiration d’un récit, ou la grâce d’un autre temps.

La découverte de l’oeuvre cachée de l’homme célèbre est inattendue : cultivée chez le dramaturge Witkacy, inspirée chez l’artiste Carlos Cruz-Díez, complice pour l’acteur James Franco… ou révélée écriture poétique en images : née d’une réflexion sur la France partagée avec Marc Lathuillière et sa France masquée, ce sera un Before Landing pour Michel Houellebecq.




Au coeur de l’intime par Jean-Louis Pinte

Un rempart à la vulgarisation de soi.

L’époque est à la banalisation de l’image, à son dévoiement. Facebook en est le principal artisan, son manipulateur. Tous des artistes ? Non ! Selfies, portraits volés, insignifiance de tous les instants d’une banale existence, font croire à ceux qui font et diffusent ces images à une sorte d’intimité du regard et de la pensée, alors qu’il s’agit la plupart du temps d’une volonté d’exister à travers le narcissisme, l’égocentrisme voire le voyeurisme. Une chambre noire de fantasmes et de frustration. L’intime est tout autre. C’est d’abord un rempart à la vulgarisation de soi, c’est la volonté d’entretenir son propre mystère, c’est voiler ses désirs. Retenir ses émotions. Etre ce que l’on est.

Le photographe est un traqueur d’intime. Par le regard qu’il pose sur le monde, sur les gens, les objets, par sa volonté de témoigner, de transmettre l’instant vécu. Parfois cet intime lui échappe, et pourtant il est présent, sans qu’il le sache, fidèle à son propre mystère. D’autres fois il surgit, dans l’éclat d’une émotion trop vive, dans sa bouleversante violence, ou sa douceur extrême. L’intime est alors prisonnier de l’image, ou révélateur d’une rencontre impromptue entre deux regards.

L’intime, c’est abandonner ce que l’on connaît de soi, l’offrir aux autres. C’est se quitter. C’est donc comme témoin que le photographe se glisse dans l’intime, au coeur de ce qui fait la beauté de son regard. Ainsi Marianne Rosenstiehl, Richard Schroeder, Carole Bellaïche, Roberto Frankenberg, Jean-Robert Dantou, Roman Vishniac… une trentaine d’artistes pénètrent-ils au coeur de cet intime. Cet intime qui dévoile l’amour qu’ils ont pour leur art. Et les gens.