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“Emmanuelle Lainé” Le plaisir dans la confusion des frontières
à la Fondation d'entreprise Ricard, Paris

du 25 novembre 2014 au 10 janvier 2015



www.fondation-entreprise-ricard.com

 

© Anne-Frédérique Fer, 1er de l'exposition, le 25 novembre 2014.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Emmanuelle Lainé, Don't cheat me out of the fullness of my capacity! C-o-m-p-o-s-i-t-e, Bruxelles, 2014. © Emmanuelle Lainé.
2/  Emmanuelle Lainé, Everytime I encounter death, I think about you too. Atelier Shanta Rao, group show "22" , Biennale de Belleville. 2012. Crédit André Morin.
3/  Emmanuelle Lainé, Me donnerez-vous ce qu'il faut de sang pour tremper cet acier ? Six possibilities for a Sculpture, La Loge, Bruxelles. 2013. Credit: André Morin.

 


texte de Clémentine Randon-Tabas, rédactrice pour FranceFineArt.

 

La confusion des frontières
Durant trois semaines Emmanuelle Lainé a investi l’espace de la Fondation Ricard et en a fait son atelier. Aidée de divers professionnels ainsi que d’autres artistes, elle a élaboré cette exposition en mêlant objets du quotidien glanés ici et là ainsi que des productions faites sur place. Cette pratique de l’art in situ, qui apparaît dans les années soixante dix, remet en question les contraintes du lieu de création. Elle brouille les frontières entre lieu de création et lieu de diffusion, redonnant ainsi à l’artiste une place de choix dans la médiation de son travail. Sur les murs les photographies prises au cours de ces trois semaines réfléchissent l’espace dans des angles de vue improbables. L’espace s’allonge et on ne différencie plus ce qui appartient à la photographie et ce qui se trouve dans l’espace réel. Un nouvel espace est crée. Les frontières entre l’Image et la pièce sont brouillées, troublant le spectateur qui cherche à faire sens de ce qu’il voit. Frontières brouillées encore entre l’oeuvre et le visiteur. Celui-ci n’est pas simplement spectateur extérieur mais se retrouve plongé à l’intérieur de l’oeuvre elle-même.

L’objet en question
Les lieux ont un air de champs de bataille dévasté ou s’entremêlent dans un certain délabrement, débris de verre, terre, brosses, casques, soupières, sculptures élaborées sur place. Le regard du visiteur scanne l’espace et découvre les objets présentés sous un nouveau jour. Ceux-ci ayant perdu leur fonction première ne peuvent plus être appréhendés par leur usage ou par les associations d’idées qu’ils réveillent en nous. Le visiteur est invité à rentrer en contact avec ceux-ci d’une manière inhabituelle. Ils ne sont plus que texture, couleur, forme. Si parfois un objet se trouve disposé sur une table, les tables ne semblent cependant pas là pour faire office de tables et que dire de ces lunettes, de ces tournesols en plastique ou de ces petits ciseaux dorés. On s’enfonce dans les fauteuils pour mieux contempler ces espaces où l'on perd toute envie de poser un nom sur les objets. Notre perception aiguisée par la désorientation, on redécouvre ce que l’on ne regardait plus, dans une confusion des frontières jubilatoire.

Clémentine Randon-Tabas

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaire : Sophie von Olfers



Cette exposition personnelle est l’occasion, pour Emmanuelle Lainé, de revenir à Paris, un endroit familier, tout comme la Fondation d’entreprise Ricard qu’elle connaît pour y avoir déjà exposé. L’artiste y conçoit son projet, comme une situation de travail développée sur place. Sur une période de trois semaines, avec le concours d’une équipe aux talents multiples, elle transformera la Fondation en atelier, ainsi qu’en une vaste installation in situ déployée à travers les espaces d’exposition.

Lainé a pris pour habitude d’incorporer son environnement immédiat à sa pratique, tout d’abord en utilisant des objets appartenant aux institutions qui l’invitent, puis en sélectionnant d’autres éléments dans des lieux comme des supermarchés, ou des marchés d’occasion. Ces objets standardisés, issus du quotidien, permettent à Emmanuelle Lainé de construire un langage visuel singulier, sur un registre laissant pleinement apparaître l’accident et la coïncidence. Ainsi, l’artiste exprime une attention particulière pour la manière dont les choses prennent forme de manière inattendue et dénigre le contrôle méticuleux du résultat final.

La façon dont Emmanuelle Lainé arrange objets trouvés et éléments personnels, qu’elle combine avec de nouvelles pièces fabriquées in situ, révèle un lien profond avec la sculpture classique. Ce grand appareil de composition résonne également avec d’autres genres artistiques, comme la nature morte ou la peinture de paysage.

L’artiste emploie la photographie numérique de très haute définition afin de générer des effets d’espace particuliers. D’abord en archivant ce processus in situ de transformation de l’espace d’exposition en atelier, pour produire de grandes images photographiques à échelle 1; puis en installant à même les murs ces reproductions, telles des scènes augmentées. Laine crée ainsi un environnement optique complexe et très performatif qui génère une sensation de désorientation visuelle autant que de coalescence organique avec l’installation. Le titre de l’exposition, Le plaisir dans la confusion des frontières, affirme encore ce désir de continuité dans la perception.

Sophie von Olfers, octobre 2014.