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“Qu’est-ce que la photographie ?” article 1559
au Centre Pompidou, galerie de photographies, Paris

du 4 mars au 1er juin 2015



www.centrepompidou.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 3 mars 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Ugo Mulas, Verifica 2, L’operazione fotografica. Autoritratto per Lee Friedlander [Vérification 2, L’opération photographique. Autoportrait pour Lee Friedlander], 1970. © Ugo Mulas Heirs. All rights reserved. © Centre Pompidou, MNAM-CCI / Philippe Migeat / Dist.RMN-GP.
2/  Ugo Mulas, Verifica 7, Il laboratorio. Una mano sviluppa, l’altra fissa. A Sir John Frederick William Herschel [Vérification 7, Le laboratoire. Une main développe, l’autre fixe. À sir John Frederick William Herschel], 1972. © Ugo Mulas Heirs. All rights reserved. © Centre Pompidou, MNAM-CCI / Philippe Migeat / Dist.RMN-GP.
3/  Ugo Mulas, Verifica 13, Autoritratto con Nini [Vérification 13, Autoportrait avec Nini], 1972. © Ugo Mulas Heirs. All rights reserved. © Centre Pompidou, MNAM-CCI / Philippe Migeat / Dist.RMN-GP.

 


1559_photographie audio
Interview de Clément Chéroux, co-commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 3 mars 2015, durée 9'18". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat :
Clément Chéroux, conservateur, chef du cabinet de la photographie au musée national d’art moderne
Karolina Ziebinska-Lewandowska, conservatrice, cabinet de la photographie au musée national d’art moderne




Qu’est-ce que la photographie ? Depuis son invention, cette question n’a cessé d’être posée. En suivant ce fil rouge et une cinquantaine d’oeuvres emblématiques d’une trentaine d’artistes, l’exposition présentée propose une traversée inédite de l’histoire de la photographie moderne et contemporaine. Elle se tient dans un espace nouvellement ouvert au coeur du Centre Pompidou, la Galerie de photographies.

Puisée dans la riche collection du Centre Pompidou, qui compte près de 40 000 épreuves photographiques, une sélection d’oeuvres des années 1920 à aujourd’hui permet d’élargir le champ d’investigation. L’exposition montre comment, de façon chaque fois singulière, les artistes se sont évertués à interroger le même médium. Chacun a éprouvé la nécessité de se poser cette question et d’y répondre à travers une photographie ou une série d’images. Leurs propositions, très diverses, explorent les dimensions technique, essentialiste ou métaphorique. Pour certains, la photographie est simplement une envie de voir ; pour quelques-uns, elle se définit par son matériau, ses principes ou sa pratique ; pour d’autres enfin, la photographie est une subtile alchimie, un écart poétique, ou une formidable ressource. Ce questionnement s’est souvent fait plus intense dans des moments de mutation des pratiques et des techniques : industrialisation, démocratisation, reconnaissance artistique, passage au numérique.

Les artistes exposés : Joseph Beuys, Brassaï, Michel Campeau, Paul Citroen, Jean-Louis Garnell, Jochen Gerz, Douglas Gordon, Mariusz Hermanowicz, Mishka Henner, John Hilliard, André Kertész, Man Ray, Abelardo Morell, Robert Morris, Ugo Mulas, Giulio Paolini, Florence Paradeis, Timm Rautert, Józef Robakowski, Denis Roche, Jan Saudek, Patrick Tosani, Jeff Wall, James Welling

En complément, le catalogue de l'exposition Qu’est-ce que la photographie ?  avec les textes de Clément Chéroux et Karolina Ziebinska-Lewandowska est publié par les Éditions du Centre Pompidou / Éditions Xavier Barral




Le parcours de l’exposition

Des envies
Le désir de voir Paul Citroen
Une attirance pour la lumière Brassaï
Un théâtre d’ombres André Kertész
Un regard Nathan Lerner

Un matériau
De la gélatine James Welling
Des grains d’argent Giulio Paolini
Des promesses Man Ray
Une surface sensible Joseph Beuys

Des principes
Une insolation Denis Oppenheim
Une camera obscura Abelardo Morell
Une fixation Patrick Tosani

Une praxis
Un point de vue Denis Roche
Un cadre John Hilliard
Une profondeur Józef Robakowski
De l’automatisme Man Ray
Des surprises Mariusz Hermanowicz

Une alchimie
Une phase obscure Gaston Karquel
Une chose ou son contraire Timm Rautert
Une allégorie de la caverne Michel Campeau

Un écart
Ce qui demeure Jan Saudek
Des reflets Jeff Wall
Un surcroît d’aura Jochen Gerz
Une interprétation symbolique Douglas Gordon

Des ressources
Des supports de diffusion Jean-Louis Garnell
Une réduction du monde Florence Paradeis
Des clefs pour comprendre Man Ray
Une énigme insoluble Robert Morris

Des vérifications
Une manière de faire la vérité Ugo Mulas
Des réponses innombrables Mishka Henner




Introduction

Cette exposition se tient dans un espace nouvellement ouvert au coeur du Centre Pompidou, la Galerie de photographies. Dans un cheminement à travers les 20 et 21e siècles, elle réunit une cinquantaine d’oeuvres d’artistes tels que Brassaï, André Kertész, Man Ray, Jeff Wall ou encore Ugo Mulas et Mishka Henner. Toutes ont en commun de poser la même question : qu’est-ce que la photographie ?

Après des années d’expériences, les photographes présentés ici éprouvé la nécessité de s’interroger sur leurs pratiques et ont proposé une forme de synthèse de leur art. Parfois, ils expriment leur démarche par des mots. Mulas, auquel est dédié le dernier espace de l’exposition, écrit par exemple : « Mon intention était de comprendre le sens des opérations que je n’ai jamais cessé d’accomplir, parfois jusqu’à cent fois par jour pendant des années, sans jamais les interroger pour elles-mêmes, en dehors de leur fonction utilitaire ». Parfois, ce sont les oeuvres seules qui témoignent de ces réflexions. Les propositions sont dans tous les cas très variées et nuancées, explorant les dimensions technique, essentialiste ou métaphorique.

Chacune des huit sections de l’exposition, et chacune des oeuvres au sein de ces sections, sont autant de réponses différentes à la question initiale : pour certains, la photographie est simplement une envie de voir ; pour quelques-uns, elle se définit par son matériau, ses principes ou sa praxis ; pour d’autres enfin, la photographie est une subtile alchimie, un écart poétique, ou une formidable ressource.


Des photographies qui parlent d’elles-mêmes

Depuis la naissance de la photographie en 1839, la question de savoir qu’est-ce que la photographie n’a cessé d’être posée par les photographes, les artistes, les historiens et les théoriciens : ils ont tenté de déterminer ses qualités et ses singularités, notamment au regard des autres arts. Du 19e au 21e siècle, l’interrogation sur la nature intrinsèque du médium a cependant connu des périodes de plus grande intensité qui correspondent, à chaque fois, à des moments de profonde mutation des pratiques photographiques : industrialisation, démocratisation, reconnaissance artistique, changement des modes opératoires et, plus récemment, passage au numérique. Puisque la réflexion sur l’ontologie de la photographie – sur son essence – semble être historiquement liée à l’évolution de ses usages, c’est précisément en termes de pratique et non de théorie qu’il convient aujourd’hui de poser à nouveau la question.

La trentaine d’artistes exposés ici ont en effet choisi de répondre à ce questionnement fondamental non par des théories et des manifestes, mais à travers une ou plusieurs photographies. Dans ces oeuvres, ils cherchent à montrer de quoi la photographie est constituée et à comprendre le métier qu’ils pratiquent. Certains dissèquent les outils et les matériaux de la photographie : ils donnent à voir la chambre noire, l’optique, la lumière, la gélatine ou le papier sensible, qui, pour eux, déterminent la spécificité du médium (Abelardo Morell, Józef Robakowski, Brassaï, James Welling, Giulio Paolini). Pour d’autres, ce sont les nouvelles pratiques induites par ce matériel qui distinguent la photographie des autres arts : l’acuité du regard du photographe se révèle alors dans les points de vue novateurs, les cadrages subversifs ou les prises de vue saisies au hasard (Denis Roche, John Hilliard, Man Ray). La photographie se définit aussi dans sa relation au réel. Tantôt louée pour sa précision documentaire, tantôt appréciée pour la distance critique à laquelle elle engage, elle est aussi support à une poétisation de notre rapport au monde (Jan Saudek, Jeff Wall, Robert Morris). Le médium photographique est aujourd’hui surtout considéré dans son statut relationnel : les artistes soulignent l’impact du regardeur dans la construction de l’image et de ses significations, ainsi que ses composantes sociales et politiques (Man Ray, Douglas Gordon, Jeff Wall).

La diversité conceptuelle autant que formelle de ces propositions démontre que l’enjeu n’est évidemment pas de formuler une réponse unique à la question initiale, mais plutôt de délimiter un champ d’investigation. Ainsi, derrière un titre qui fait mine de s’inscrire dans la tradition des définitions définitives de la photographie, l’exposition propose exactement le contraire : elle est en somme résolument anti-ontologique.