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“Intervalles #1” exposition collective
à la galerie Le petit espace, Paris

du 28 mai au 28 juin 2015



www.lepetitespace.com

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 28 mai 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Jean-Jacques Calbayrac & Cyrille Chauvin, La Danse des Yōkai.
2/  Juliette-Andréa Elie, Fading Landscapes - La chair de nuit.
3/  Gabriela Lupu, Portes de Paris - Mère et fils.

 


1631_Intervalles audio
Interview de Gabriela Lupu, Ruth Peche, Jean-Jacques Calbayrac & Cyrille Chauvin,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 28 mai 2015, durée 19'15". © FranceFineArt.
(avec l'aimable traduction de Jean-Jacques Calbayrac pour Ruth Peche) (de gauche à droite Cyrille Chauvin, Jean-Jacques Calbayrac, Gabriela Lupu et Ruth Peche)

 


extrait du communiqué de presse :

 

Direction artistique : Carine Dolek
Direction : Olivier Placet




Avec Jean-Jacques Calbayrac & Cyrille Chauvin, Juliette-Andréa Elie, Ruth Peche, Lina Hashim, Gabriela Lupu et Haley Morris-Cafiero.


Première exposition collective de la galerie Le petit espace, Intervalles #1 est aussi l’exposition qui marquera le premier anniversaire de la galerie, qui ouvrait le 23 mai 2014 avec « The dwarf empire » de Sanne de Wilde.

En un an, nous avons pu installer une direction artistique qui préfère les questions aux réponses, et invite à la réflexion, à la mise en perspective, au pas de côté.

En faisant dialoguer les images de Jean-Jacques Calbayrac & Cyrille Chauvin, Ruth Peche, Juliette-Andréa Elie, Lina Hashim, Gabriela Lupu et Haley Morris-Cafiero, nous souhaitons inviter au voyage imaginaire, conceptuel, esthétique, vers l’autre et le monde.

« Des ailes, un autre appareil respiratoire, et qui nous permissent de traverser l’immensité, ne nous serviraient à rien, car, si nous allions dans Mars et dans Vénus en gardant les mêmes sens, ils revêtiraient du même aspect que les choses de la Terre tout ce que nous pourrions voir. Le seul véritable voyage, le seul bain de Jouvence, ce ne serait pas d’aller vers de nouveaux paysages, mais d’avoir d’autres yeux, de voir l’univers avec les yeux d’un autre, de cent autres, de voir les cent univers que chacun d’eux voit, que chacun d’eux est ; et cela, nous le pouvons avec un Elstir, avec un Vinteuil ; avec leurs pareils, nous volons vraiment d’étoiles en étoiles. »
Marcel Proust, La prisonnière, tome 2




La Danse des Yōkai de Jean-Jacques Calbayrac & Cyrille Chauvin

« La Danse des Yōkai mélange le visible à l'invisible, le réaliste au mystique à l'aide de différentes techniques. Les photos argentiques prises par Jean-Jacques lors de notre voyage sont la base ainsi que le support de notre travail. Cyrille a ensuite dessiné sur ces photographies des entités appelées Yokaï pour y raconter une nouvelle histoire plus mystique. Les Yokaï sont des fantômes, des légendes, qui ont été créés parfois il y a plusieurs centaines d'années. Ils font partie intégrante du patrimoine nippon et ont retrouvé une certaine place dans le coeur des japonais depuis que Shigeru Mizuki s'est mis à raconter des histoires à leur sujet sous forme de manga. Les écrits sur ces esprits peuvent parfois être rapprochés des Métamorphoses d'Ovide. On peut y voir un travail d'apprentissage car certains Yōkai donnent des leçons de vie. D'autres seront les héros d'histoires d'épouvante, mais souvent profondément ancrées dans un monde réaliste.

Ce mélange de techniques et de vision nous emmène vers des histoires plutôt décalées et anachroniques cherchant à titiller l'imaginaire du spectateur. Tout cela vu par 2 gaijins au pays du soleil levant. » Jean-Jacques Calbayrac et Cyrille Chauvin


Deep entropy de Ruth Peche

« J’explore la relation entre les humains et leur environnement naturel, et comment cette relation affecte les deux parties, physiquement et émotionnellement. La préoccupation écologique est permanente dans mon travail, étant donné les effets que l’intervention humaine produit dans la nature. Dans ce projet, je me suis immergée dans un monde mystérieux, auquel nous ne pouvons accéder qu’en traversant une surface, pour pénétrer un environnement non destiné aux humains. Dans une tentative d’imitation de la nature, je travaille avec différents matériels artificiels (créés par l’homme) et je les ai photographiés dans un habitat marin et dans une piscine. Au-delà d’un jeu pour discerner le vrai du faux, c’est une invitation à se souvenir et à assumer la puissante tendance à l’entropie qui existe dans la nature. » Ruth Peche


Fading Landscapes de Juliette-Andréa Elie

« Le propos de la série « Fading Landscapes » est de rendre visible la perméabilité des paysages par les affects et les souvenirs du voyageur. Dans les photographies imprimées sur papier calque, un dessin embossé laisse flotter des formes fantomatiques et nébuleuses. Ces images diaphanes, où plusieurs paysages peuvent se superposer, questionnent le medium photographique pour révéler l’écoulement du temps, la labilité des mondes. »


Unlawful meetings /Rencontres illicites de Lina Hashim

Comme toutes les autres grandes religions, l’Islam cherche à régir les relations sexuelles des membres de la société via ses codes moraux. Et comme écrit dans le Coran, toute forme de comportement sexuel - relation, sexe oral ou toute action qui encourage l’activité sexuelle- est strictement interdit avant ou en dehors du mariage. Evidemment, cela n’empêche pas les musulmans d’avoir des « rencontres illicites », à la recherche de la romance ou la satisfaction de désirs mutuels.

Lina Hashim, photographe irakienne née au Koweït et qui a grandi au Danemark, enquête sur les rencontres secrètes des jeunes amants musulmans dans les parcs, cachés derrière les arbres, ou sous le couvert de la nuit sur les plages et les parkings. Utilisant des caméras à infra-rouge, des smartphones et des téléobjectifs, elle immortalise les couples au coeur de leur intimité dans ces lieux pourtant très publics de Suède et du Danemark.

« Ceux qui viennent d’un background musulman suivent des règles strictes qui se fondent avec leur personnalité, de façon que le véritable moi est rarement décelable. Le personnage public et la vie privée sont deux territoires distincts, créant des paradoxes dans le quotidien qui mènent à une forme de schizophrénie culturelle. » Lina Hashim

« Unlawful meetings » reflète la tension entre les sphères publiques et privées, qui se manifeste plus profondément dans les vies de ces jeunes musulmans que dans celles de leurs semblables non-musulmans. Elle repose sur l’invisibilité dont ces amants jouissent en public ; en général, les passants ferment discrètement les yeux sur l’intimité qu’ils se construisent dans les ombres et les voitures garées, la nuit.

Dans son projet à long terme, initié par la vue du mot « CAR » écrit par Nicolai Howalt sur le tableau noir de la classe, elle adopte la distance professionnelle d’un anthropologiste menant une étude de terrain, en parallèle d’une inévitable conscience de la surveillance et du voyeurisme, qui rappelle le travail de Kohei Yoshiyuki. Dans l’acte photographique encore, nous trouvons les deux terrains de la distance et de la proximité, imbriqués d’une façon telle que beaucoup en trouveront l’ambiguïté dérangeante.

Lina Hashim assure l’anonymat de ses sujets, et du fait la légalité de sa documentation de leurs actes, en ôtant toute couleur et ne montrant jamais plus de 25% des traits de leurs visages. Toutefois, ce qui ne peut être dissimulé, c’est leur passion qui, selon un des jeunes qu’elle a interviewé, est d’autant accentuée qu’elle est rare et secrète.

Pour Lina Hashim, qui se décrit comme une musulmane croyante non pratiquante, le projet l’a faite revisiter les préceptes de sa foi, tels qu’ils figurent dans des textes écrits en des temps si fondamentalement différents d’aujourd’hui. Convaincue que l’interdiction du sexe avant le mariage a été écrite pour protéger les femmes et leur progéniture, elle souhaite soulever le débat autour de ce sujet, si tant est que les hommes et femmes modernes ne peuvent pas trouver d’autres possibilités – en termes de santé, de loi, de sécurité financière pour eux et leurs enfants- de prendre soi d’eux mêmes.
Texte extrait du site de la photographe.


Wait Watchers de Haley Morris-Cafiero

« Pour ma série « Wait Watchers », je pose mon appareil dans un lieu public très fréquenté et prends des centaines d’images pendant que j’effectue des actions banales de tous les jours et que les gens passent autour de moi. J’examine ensuite les images pour voir si certains des passants ont des expressions critiques ou interrogatives sur le visage ou via leur langage corporel. Je considère que mes photographies sont des expériences sociales, et je voyage dans le monde entier pour m’efforcer de photographier les réactions de différents groupes de passants.
Je recherche des lieux où la lumière est belle, qui me permettent une composition intéressante et, si possible, où je peux mettre en scène une situation qui réfère à un idéal de beauté féminine et à des rôles sociaux. J’installe l’appareil sur un trépied, un banc ou avec la complicité d’un assistant, à la vue de tous les passants scruteurs, règle le focus et l’exposition et prends des centaines d’images. Les images capturent les regardeurs dans une moment à la Cartier - Bresson, une microseconde où l’obturateur, la scène, mes actions et leur langage corporel s’alignent et s’offrent au viseur. Bien que je ne sache pas ce qu’ils pensent, celui qui me scrute a l’air visiblement perturbé que je me trouve face à lui. » Haley Morris-Cafiero


Portes de Paris de Gabriela Lupu

« Gabriela Lupu a non photographié un camp rom, en préférant reconstituer les images plutôt que de les prendre sur le vif. Réduits au plus simple appareil de la représentation, les roms redeviennent des gens comme les autres, nous laissant nous refléter dans nos clichés. » Carine Dolek

« Gabriela Lupu transforme la réalité dans la documentation dessinée, dans l’observation écrite, et par le biais d’une nouvelle plasticité dans la photographie. Elle a visité une communauté rom, afin de documenter leur quotidien avec des dessins exécutés sur place. C’est un travail artistique, qui est basé autant sur la documentation que sur l’imagination. Ce qui intéresse Gabriela Lupu, ce sont d’abord les détails, les petites gestes humains ou la position des objets qui entourent les individus. Elle renonce à une classification scientifique/statistique - les observations ne concernent pas les particularités d’une communauté marginalisée, mais les particularités de cette cabane, de cette famille. Gabriela Lupu redonne vie à ses observations, en créant des objets en papier, des petites marionnettes qui rappellent les mobiles d’Alexander Calder, mais aussi les bronzes d’Alberto Giacometti ou le théâtre d’ombres chinois. L’artiste les place sur la scène de son « théâtre » personnel, afin de créer des photographies monochromes. Elle arrive à une généralisation en dirigeant son regard vers des objets qui ne sont pas « exotiques », ne se limitent pas à une situation précise, mais qui sont typiques pour chaque société humaine. On y trouve une manifestation du caractère général, qui met en question les jugements, les discriminations. Les objets en soi référencent les mêmes besoins partout. Ce qui se trouve au coeur du travail de Gabriela Lupu, c’est la réduction à la normalité, qui montre la banalité et l’insignifiance des stéréotypes. » Christian Hain, critique d’art.