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“Franck Landron” Ex time
à la Maison de la Photographie Robert Doisneau, Gentilly

du 19 juin au 4 octobre 2015



www.maisondoisneau.agglo-valdebievre.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 18 juin 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Franck Landron, Pontoise, classe de 4ème, 1972. © Franck Landron.
2/  Franck Landron, Autoportrait, 1971. © Franck Landron.
3/  Franck Landron, Auvergne, 1973. © Franck Landron.

 


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Interview de Franck Landron,
par Anne-Frédérique Fer, à Gentilly, le 18 juin 2015, durée 18'06". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaire : Michaël Houlette, Directeur de la Maison de la Photographie Robert Doisneau



Il est question de mouvements perpétuels dans les images que Franck Landron collecte de sa vie. Photographe compulsif dès le début de son adolescence, il n’exclut aucun espace, aucun moment, ni aucune circonstance dans ce qui va vite devenir une addiction photographique. En quelques 200 épreuves, l’exposition « EX TIME » propose une exploration chronologique d’une vie intensément liée à l’image. Son oeuvre, inédite jusqu’à ce jour, est un constant va et vient entre des personnages, des thèmes et des lieux récurrents : la famille, le garage automobile paternel, la mécanique, la maison en Auvergne, les copains, les fêtes, les filles, le cinéma…

En 1971, Franck Landron a 13 ans. Ses parents lui offrent un reflex Canon FTQL. Il commence à mitrailler à la sauvette ses copains de collège « sans se faire chopper par les profs ». C’est donc par le jeu que commence cette prolixe et intime collection d’images. Au cours de ses premières années, il affine son langage photographique, son sens du cadrage, son goût pour l’expérimentation : ce sont les débuts instinctifs d’une vie personnelle et professionnelle vouée à la création et à la narration et dont la photographie sera à la fois le témoin et le moteur.

Des autoportraits ponctuent l’ensemble de cette traversée photographique qui commence en 1971 et ne s’arrêtera plus. On y voit Franck Landron grandir et mûrir parmi sa bande de copains. On partage avec lui ces amitiés fidèles et ces intenses moments de complicités, de transgressions aussi. L’effronterie des débuts est d’ailleurs bientôt doublée d’une jouissive révolte dans des clichés pris à la fin de son adolescence, pendant ses années d’études en école d’architecture.

L’humour et la fraîcheur sont aussi au coeur de ce corpus d’images. La photographie chez Franck Landron est un lieu de récréations, de défis et d’expérimentations joyeuses et frondeuses. Elle affiche aussi un goût pour l’iconoclasme loin des règles de composition classiques.

On pense évidemment à Jacques Henri Lartigue tant il est question de jeu, de mouvement, de curiosité : Les deux attitudes photographiques sont semblables. La pratique, chez l’un comme chez l’autre, est permanente mais étonnamment confidentielle. Elle est réservée à la sphère intime et à tous ceux qui gravitent dans l’entourage direct. L’idée d’en faire un réel métier, de se mettre au service d’une commande, est extravagante. Jacques Henri Lartigue était connu en tant que peintre. Il ne participe à sa première exposition photographique qu’à l’âge de 69 ans. Franck Landron, lui s’occupe de cinéma. Il n’a rien montré ou presque de son activité de photographe pendant près de 40 ans – le présent ouvrage, il faut le souligner, couvre essentiellement les premières années de son travail et ne dévoile qu’une infime part des images produites. Mais la comparaison s’arrête là car les deux hommes sont radicalement différents, leurs origines sociales, les époques et les mentalités tout autant. Franck Landron se moque bien de la retenue et de la bienséance : s’il photographie de nombreuses figures féminines, ce n’est pas tant pour les sublimer que pour les déshabiller. L’expérimentation flirte chez lui avec la transgression. Il sait depuis le début qu’il est libre de photographier tout ce qu’il désire, libre de photographier tout ce que, d’habitude, on ne regarde et ne retient pas. Michael Houlette, Franck Landron - EX TIME, ed. Contrejour, 2015

De cette période naît une très grande liberté : Franck ne s’interdit rien sur le fond ni sur la forme. Il appréhende progressivement l’image comme une expression en soi, sans nécessairement se chercher dans un style ou se rapprocher d’une « école ». Mais son approche de la réalité se fait de manière de plus en plus cinématographique. La construction de petites séquences saisies sur le vif préfigure en effet sa future orientation professionnelle vers le cinéma, la fiction et le documentaire.

L’exposition ne dévoile qu’une sélection dans un gigantesque corpus qui se compose aujourd’hui de près 300 000 images argentiques et numériques. Ce qui s’affirme néanmoins sous nos yeux, c’est l’élaboration d’une écriture photographique singulière. L’oeuvre révèle des constantes qui lui sont propres : le séquençage donc mais aussi un sens du cadre étonnamment libre qui accorde une place prépondérante au hors champ. Ainsi, les personnages photographiés par Franck Landron n’apparaissent que très partiellement, à la limite de son cadrage. Ils semblent même s’en extraire. Dans un mouvement inverse, c’est une main, un bras, un élément étranger qui entre à son tour dans l’image, en perturbe la lecture, lui donne vitalité, spontanéité et génère parfois un sentiment d’étrangeté.

En filigrane, une certaine gravité affleure. Cette légère et présente angoisse qui donne relief et épaisseur à ce bonheur photographié. Au fur et à mesure que se construit cet album, cette antichambre de l’oubli, la peur du temps qui passe, tout comme la fragilité de l’instant ou la gravité de l’enfance deviennent perceptibles. Les photographies de Franck Landron font naturellement écho à nos propres souvenirs : à cette époque vécue par certains d’entre nous, ici les années 70 et 80, mais plus généralement à nos propres expériences de vie. L’exposition et le livre « EX TIME » affirme l’empreinte du temps sur la surface photographique. Les négatifs, tout comme nos histoires, sont soumis à l’accident, à l’altération et au vieillissement. Certaines images ont donc été tirées en l’état, prouvant tout à la fois la volatilité d’une image et la fragilité d’une vie.

Dans « EX TIME », Franck Landron nous embarque dans la première partie de son histoire intime. Avec une maîtrise non démonstrative, acquise au fil de ces milliers de photographies, il semble nous dire, derrière un sourire caché, avec malgré tout une pointe de pessimisme : « On s’est bien marré quand même … » Prenons les paris que la suite de cette exploration en images nous réservera encore bien des surprises.




Le livre

Sous forme d’un carnet Moleskine, ce livre dévoile les premières années de l’oeuvre inédite de Franck Landron. Photographe précoce, libre dans son approche et curieux de l’image, celui-ci fait ses débuts dans les années 70. Avec l’appareil Canon reflex qu’il vient alors de recevoir, Franck Landron commence aussitôt par prendre en photo ce qui, d’habitude, n’est jamais ou rarement photographié : les jeux et les fêtes entre copains, les fous rires, les premiers baisers et les aventures sexuelles, les prises de risques, les moments d’errance et les doutes aussi. L’ouvrage propose une autobiographie visuelle, un récit scandé par des autoportraits de l’auteur à différentes périodes de sa vie qui sont les marques d’une individualité et d’un regard qui se construisent. Des images aux cadrages audacieux, à la matière rugueuse et vivante, s’affichent en doubles pages, sous forme de montages ou de séquences et produisent une dynamique qui évoque déjà le cinéma.

Éditions Contrejour - Textes de Michaël Houlette, directeur de la Maison Robert Doisneau, Christine Delory-Momberger et Julie Corteville.