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“Alber Elbaz / Lanvin” Manifeste
à la Maison Européenne de la Photographie, Paris

du 9 septembre au 31 octobre 2015



www.mep-fr.org

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 8 septembre 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Essayages Collection Lanvin Eté 2013. Photographie © Katy Reiss.
2/  Backstage Défilé Lanvin Hiver 2012. Les 10 ans. Photographie © But Sou Lai.
3/  Défilé Lanvin Hiver 2012. Les 10 ans. Photographie © But Sou Lai.

 


texte de Mireille Besnard, rédactrice pour FranceFineArt.

 

Une pièce aux murs noirs, une salle blanche et une autre, petite, grise, pour l'installation vidéo ; la couleur, elle, n'est symboliquement présente que par le rouge qui remplit intégralement les murs d'une des salles du premier étage de la MEP. Des agrandissements géants de photographies et de croquis, sur du papier affiche ou des bâches de 3 mètres ; des images souvent surex disparaissant dans un flou numérique sans grain : les choix formels et esthétiques d'Albert Elbaz et de son équipe sont à la fois simples et radicaux, efficaces et spectaculaires. On se sent absorbé par cet univers qui tente de transmettre la charge émotionnelle dans lequel évolue ce monde de la mode, balancé entre atelier et défilé. Dans la salle noire de cette exposition, sorte de backstages du défilé, des boîtes lumineuses envahissent l'espace diffusant des images de mannequins en noir et blanc, plus grands que nature. On pourrait se croire partie de cette foule effervescente presque chaotique, prise entre attente et déplacement. La salle rouge serait alors le temps sans pardon du défilé, moment paroxystique de la création du vêtement. Pas de volonté documentaire dans cette mise en scène, la photo, la vidéo sont là pour maintenir l'illusion des formes et des couleurs. Pourtant la salle blanche ouvre le temps de l'atelier, celui des recherches et des essais. On y voit comment les prises de vue quotidiennes des collaborateurs du couturier viennent marquer l'avènement progressif du vêtement, comment l'image photographique peut alors devenir un outil de travail, à la fois trompeur et rigoureux. Trompeur par la platitude qu'il instaure, rigoureux par le figement des formes, permettant le retour en arrière, la rétrospective et stimulant l'introspection, ouvrant sur la création.

C'est cependant un univers illusionniste que nous présente la maison Lanvin ici à la MEP et le magicien Elbaz s'entourant, de toutes sortes de créatifs, ne se refuse aucun des "trucs" qui pourraient installer la photographie dans la monumentalité et inscrire le spectacle dans l'art contemporain.

Mireille Besnard

 


extrait du communiqué de presse :

 

« À l’ère du numérique, nous vivons à travers nos écrans, à mettre en images le moment présent. Nous ne regardons plus, nous filmons. Nous n’écoutons plus, nous enregistrons. Et nous ne parlons plus, nous téléchargeons », affirme Alber Elbaz, directeur artistique de la maison Lanvin depuis 2001. Dans son studio, le couturier travaille autour du corps avec l’aide d’un mannequin et de son équipe. Tous s’adressent à lui par un simple « Alber », témoignage d’une affection discrète dosée d’une évidente complicité. Il écrit ses collections dans l’obscurité d’une pièce, à l’aide d’une page blanche et d’un feutre noir, pour mieux ressentir et exprimer en vêtement les désirs des femmes. Il guide les modélistes à chaque étape de construction apportant des solutions aux problèmes techniques rencontrés. Le rythme des collections s’emballe et chaque saison est un nouveau prétexte à d’autres recherches dans son laboratoire de création rue du Faubourg-Saint-Honoré.

Sa maîtrise de la couleur fait la joie des rédactrices et des clientes bien trop habituées à l’éternel duel noir et blanc. Ce qui ne l’empêche pas de jouer aussi sur ce registre ! Sa palette fait le bonheur des photographes qui composent intuitivement des images graphiques, ponctuées de pigments pixellisés d’émotions que dégagent des silhouettes.

Il n’a pas d’adresse email, n’utilise pas les réseaux sociaux et laisse à d’autres le soin de documenter son travail au moyen de la photographie ou des films. Une distance surprenante avec les innovations technologiques qui dictent aujourd’hui un grand nombre d’évolutions sociales. Le digital influence pourtant directement son design car l’image est aussi son métier.

La suprématie de l’image à présent le mène à intégrer une nouvelle dimension dans le regard qu’il porte à son travail. Quelques années auparavant, seuls ses yeux pouvaient être juges d’une robe justement réalisée. Aujourd’hui, l’écran plat est devenu un second critique parfois en déséquilibre avec la réalité : « ce qui est beau à l’écran n’est pas forcément beau ou confortable sur le corps ». La mode et le luxe sont sous la contrainte de l’image, inversant leur rapport de force sur ce vecteur de communication. Ce contexte nécessite une constante remise en question du créateur qui modèle ses collections en volume et non à plat. Alber prône pour Lanvin un monde moins carré et plus en rondeur, oublie l’écran quelques temps et remet l’humain au centre de l’attention. Comment transposer cette vision en trois dimensions pour une exposition d’images qui par essence n’en ont que deux ?

En laissant des témoins au regard avisé accompagnant Lanvin et Alber Elbaz depuis de nombreuses années, immortaliser des instants fugitifs de construction, de technicité, d’attention aux finitions, de détails des matières et de magie des défilés.

Orchestrée par Alber Elbaz avec l’aide de ses équipes, cette exposition plonge le visiteur dans l’intimité des essayages, l’émotion des défilés Lanvin et la beauté des créations. Une première dans l’histoire de la plus ancienne maison de couture parisienne toujours en activité. Cinq salles pensées comme des ambiances mettent en lumière le travail du créateur, non comme un monologue, mais dans un dialogue continu entre mode et photographie.

Plus de 350 clichés signés des photographes But Sou Lai, Mark Leibowitz, Katy Reiss, James Bort, Juliette Da Cunha et Alex Koo retranscrivent la passion du vêtement. Une installation vidéo rythmée par la voix du créateur et animée par trois projections à partir d’images backstage, réalisées par Jean-Christophe Moine, et de défilés, captées par Séraphin Ducellier, complète cette scénographie.

Il s’agit d’une exposition introspective, et non rétrospective, pour tenter une immersion dans la machine à rêves d’Alber Elbaz pour Lanvin. Construite comme une installation artistique, elle n’apporte pas de lecture définitive, laissant le visiteur libre d’atténuer son esprit pour ouvrir son coeur. Une invitation à regarder, écouter et parler, pour paraphraser la première citation du couturier. Serait-ce donc son manifeste ?

Charles-Henry Paradis


1563 Jeanne-Lanvin audio

Archives FranceFineArt.com :
Écoutez l’nterview de Sophie Grossiord, directrice scientifique de l'exposition “Jeanne Lanvin”
au Palais Galliera, musée de la Mode de la Ville de Paris
du 8 mars au 23 août 2015


http://www.francefineart.com/index.php/agenda/1671