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“Alex Seton” The journey
à la Galerie Paris-Beijing, Paris

du 10 septembre au 24 octobre 2015



www.galerieparisbeijing.com

 

© Anne-Frédérique Fer, visite de l'exposition, le 10 septembre 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Alex Seton, Life Vest (Emergency), 2014. Marbre Blanc, 100 x 18 x 4 cm. © Mark Pokorny (photographie).
2/  Alex Seton, Oilstone 01: Transparent, 2015. Marble Blanc de Carrare, acier inoxydable, huile de moteur, bâche en plastic, 42 x 48 x 100 cm, 45 kg. © Mark Pokorny (photographie).
3/  Alex Seton, A Paddle, 2014. Marbre Blanc et bois, 100 x 18 x 4 cm. © Mark Pokorny (photographie).

 


texte de Sylvain Silleran, rédacteur pour FranceFineArt.

 

C'est un voyage particulier que le sculpteur Alex Seton met en scène à la galerie Paris Beijing. Journey raconte la dangereuse traversée de l'océan par des migrants tentant de rejoindre une Australie à la politique migratoire fermée. Des objets d'une banalité familière: bâches, canots gonflables, moteur de bateau, boîte de conserve, sont sculptés dans un marbre d'un blanc fastueux.

Le matériau luxueux, empreint de noblesse, transforme cette traversée en une épopée classique, héroïque. Les différents instruments de la traversée deviennent des statues, comme autant de chapitres d'une nouvelle Odyssée.

Les objets de marbre sont posés sur des bâches de chantier bleues, palettes ou bac métalliques dont le fond brille d'une épaisseur d'huile de moteur, écrins tranchant par leur essence utilitaire et jetable. L'opposition est on ne peut plus tranchée entre la roche, d'une massivité absolue, et la légèreté, la souplesse textile des embarcations gonflables qui y sont sculptées. Les bateaux ne sont pas encore gonflés, ils sont présentés encore pliés, leurs fronces et ourlets détaillés dans un hyperréalisme troublant. Des petits éléments originaux de ces bateaux sont ajoutés ici et là: cordage de nylon et valve de gonflage. Un moteur de hors-bord tombé de son socle gît brisé au sol. Cet accident nous rappelle par les lignes de fractures irrégulières et les éclats éparpillés sa nature physique de roche, comme si ce n'était qu'une fois l'irréparable atteint que nous finissions par comprendre la véritable nature des choses.

Des petits riens soulignent la fragilité des migrants et des moyens dérisoires de leur traversée. Une boite de conserve est posée tel un bijou sur le coussin d'une bâche pliée. De l'eau tombe goutte à goutte dans un gobelet depuis une tente de fortune suspendue au-dessus, égrenant lentement le temps des petites ondulations qui viennent régulièrement en troubler la surface. Ce qui n'a plus de valeur chez nous se révèle être une ressource précieuse pour d'autres.

Une forme humaine est emmitouflée dans une bâche. Cette œuvre totalement contemporaine est en même temps un drapé classique dans ce qu'il y a de plus virtuose. La finesse de la toile rehaussée d'oeillets métalliques semble nier le matériau même de la sculpture tant il semble improbable d'atteindre un résultat si fin sans casser la pierre. La toile fraichement dépliée porte encore les marques des carrés de son pliage initial. Le personnage n'est pas représenté, les formes qu'épousent sa couverture en délimitent les contours, modèlent une posture. L'image emprunte au vocabulaire religieux, évoquant l'icône familière d'une vierge en prière.

Au fond de la galerie, le but du voyage se révèle être un décor de théâtre. Des troncs d'arbres sculptés sont plantés dans un seau posé sur une île de sable. Le feuillage est une silhouette découpée suspendue à des fils, que le vent d'un ventilateur fait doucement osciller. Un spot projette l'ombre de cet eldorado sur une bâche étendue comme un fond de studio photographique. L'aboutissement de ce long voyage résonne douloureusement, l'Australie (et l'Occident) se révèlent n'être que de cruels mirages. Nos promesses, gravées dans le marbre de nos chartes et de nos lois, ne sont pas tenues.

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

L’artiste australien Alex Seton explore les relations complexes entre forme et substance à travers des pratiques artistiques différentes, de la photographie à la sculpture et de la vidéo à l’installation. Véritable maître du taillage du marbre, c’est avec cette matière noble et imposante qu’il crée des formes inattendues et légères, à la fois ordinaires et hautement symboliques, pour aborder des sujets contemporains ou des thèmes d’actualité.

La Galerie Paris-Beijing est heureuse de présenter The Journey, son tout dernier projet encore inédit, portant sur la question des migrants demandeurs d’asile en Australie, comme en Europe. Il s’agit d’un ensemble d’installations et de sculptures en marbre de Carrare évoquant les voyages périlleux par la mer que des millions de personnes sont amenés à entreprendre pour fuir la guerre ou la famine. Un moteur de bateau, un canot pneumatique, un gilet de sauvetage, une rame, une ancre… le paradoxe entre le classicisme de la matière – le marbre – et la banalité des objets donne tout son poids à la question des migrants pour nous rappeler, au delà des débats politiques ou politisés, que des individus risquent chaque jour leur vie dans l’espoir d’un avenir meilleur.

The Journey déconstruit la structure traditionnelle du récit de voyage, mais en garde les éléments universels : la quête vers l’inconnu, l’aspiration envers de nouvelles chances, les épreuves et les tribulations du héro-voyageur sont revisitées à travers une séquence de sculptures en marbre et d’installations soigneusement présentées dans les espaces de la Galerie Paris-Beijing. La mise en scène de l’exposition accompagne le visiteur dans un parcours métaphorique à travers une « Odyssée » de peines et d’aspirations humaines.




Alex Seton est né en 1977 à Sidney, où il vit et travaille actuellement.
Son oeuvre a été exposée en Australie, en Asie, en Europe et aux Etats-Unis, dans des musées, des galeries et des foires d’art contemporain. Son oeuvre fait partie de collections prestigieuses, tant privées que publiques. Seton a commencé à aborder dans son oeuvre le thème de l’immigration en 2014, avec un installation monumentale présentée à la Art Gallery of South Australia dans le cadre de la Biennale Dark Heart de Adelaide : Someone died trying to have a life like mine.