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“Régis Perray” L’abbaye fleurie
à l’abbaye de Maubuisson, Saint-Ouen l’Aumône (95)

du 4 octobre 2015 au 26 juin 2016 (prolongée jusqu’au 18 septembre 2016)



www.valdoise.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, visite presse avec Régis Perray, le 2 octobre 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Assiette du Jardin fleuri de Régis Perray, Aynsley, Est, 1775.
2/  Régis Perray, Eglise Notre-Dame-du-Bon-Port, Nantes.
3/  Régis Perray, Le jardin fleuri, installation. © Conseil general duVal d'Oise - photo: Catherine Brossais.

 


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Interview de Régis Perray,
par Anne-Frédérique Fer, à l’abbaye de Maubuisson, le 2 octobre 2015, durée 14'31". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaire : Isabelle Gabach, Directrice de l’abbaye de Maubuisson



Le Département du Val d’Oise invite l’artiste Régis Perray à l’abbaye de Maubuisson, site d’art contemporain, du 4 octobre 2015 au 26 juin 2016.

Présent sur la scène de l’art contemporain depuis plus de quinze ans, Régis Perray (né en 1970 à Nantes) a toujours aimé travailler la question des lieux. Sa pratique de l’in situ fait désormais référence. Cet artiste refuse de se définir tant il utilise tous les moyens à sa disposition pour interroger les lieux d’exposition. Il aime à observer et sonder les espaces où il est invité pour créer des actions, des installations et des sculptures. Ces dernières sont parfois activées par les visiteurs telle que Tourner en rond, la piste à patiner, sculpture marquetée de fleurs, présentée en salle du parloir autour de la colonne centrale, qui sera entretenue et lustrée par le public à l’aide de patins en laine et feutre.

À l’instar de cette sculpture, Régis Perray présente dans les salles abbatiales un ensemble de six oeuvres ayant pour lien et liant le motif floral. Ce dernier constitue le fil rouge de cette exposition comme élément de décoration (vaisselle peinte à la main, fleurs découpées dans du papier peint, azulejos, fleurs marquetées ou sculptées) et comme élément évocateur du monde féminin en hommage aux anciennes occupantes de cette prestigieuse abbaye royale cistercienne.

Le caractère féminin de l’oeuvre de Régis Perray est très prégnant ; parfois il se veut sensuel (vidéo Acariciar Lisboa, antichambre), parfois délicat dans l’action de prendre soin : du parquet de Tourner en rond, la piste à patiner (salle du parloir), des assiettes méticuleusement lavées (salle des religieuses), des gravats subtilement décorés (anciennes latrines).

Dans cette ancienne abbaye aujourd’hui dirigée par une équipe essentiellement féminine, Régis Perray parle ici de son amour des femmes mais également, en filigrane, de sa dévotion à sainte Marie. Rappelons qu’au moment de sa consécration, en 1244, l’abbaye de Maubuisson fut désignée comme toutes les abbayes cisterciennes sous le vocable de « Notre-Dame-la-Royale » qui depuis la réforme de saint Bernard, étaient sous la protection de la Vierge, reine du Ciel.

La foi de cet artiste rejoint les autres thèmes abordés dans cette exposition que sont la méditation et le recueillement : rendre hommage aux religieuses défuntes, marcher autour de la colonne jusqu’à apaiser son esprit, se promener dans le jardin, lieu de contemplation millénaire, se sentir humble devant les vieux murs de Lisbonne, prier – peut-être – devant l’Arbre de Vie. La foi selon Régis Perray n’est pas dogmatique, elle trouve une expression universelle dans cet ancien lieu sacré, ouvert aujourd’hui à la multiplicité des croyances et des interprétations. Ainsi, la répétition du geste devient rituel : collectionner les assiettes, les laver, tourner en rond sur la patinoire, caresser 113 murs à Lisbonne. Cette façon de travailler – rythmée, rigoureuse, cohérente – est propre à l’artiste. Chaque action s’inscrit dans le temps et l’espace. Comme il bâtirait une maison, il construit le projet de toute une vie. Il procède à la construction d’un ensemble réfléchi, et consolide ce tout pierre après pierre, pierre par pierre.

Ces ensembles, ces collections constituent une pratique qui traverse son oeuvre depuis de nombreuses années, lui permettant de transcender les matériaux du quotidien. L’installation Le jardin fleuri qui rassemble plus de 9000 assiettes chinées par l’artiste et placées à même le sol pour composer un jardin à la française en est un bel exemple.

Ces pièces, pour la plupart inédites et pensées pour les espaces de Maubuisson, sont aussi un écho à l’histoire et à la matérialité de ce lieu. Maubuisson représente pour lui un territoire de recherche et d’expériences physiques. Il explore des gestuelles précises, adaptées aux lieux, aux matériaux, aux objets, pour en extraire des fragments d’histoires. Dans la salle du Chapitre, ancien lieu d’inhumation, il présente vingt coffrages en bois brut ornés de fleurs en marqueterie, évoquant les tombes des moniales (Les Cisterciennes). Ici, le sol est le lieu des morts : celui où sont enterrés les défunts. Avec Régis Perray, le visiteur a les pieds sur terre : il ne peut ignorer qu’il marche sur des morts quand il déambule en salle du Chapitre. Le sol est aussi une surface à soigner, à patiner, à sublimer, comme pour ne pas oublier d’où l’on vient, s’ancrer solidement, prendre racine (Tourner en rond, la piste à patiner, salle du parloir). Le sol est le lieu de la renaissance : on peut y faire pousser des fleurs (Le jardin fleuri, salle des religieuses).

L’exposition de Régis Perray est empreinte d’une générosité propre à son auteur. Elle soigne les blessures en déposant une fleur sur la tombe des cisterciennes (évoquant par extension tous les êtres chers perdus). Elle réconcilie avec le corps en nous engageant tout entier sur la patinoire. Elle fait entrer dans notre intérieur la couleur, la diversité et la beauté des fleurs. Elle rappelle la douceur des caresses sur la peau. Elle fait renaître la vie sur les ruines et offre une vision poétique pour le futur de l’abbaye en proposant la construction d’une chapelle.

Chaque oeuvre est un don : Régis Perray partage avec le visiteur, ici une fleur, ici un tour de patinoire, ici une pensée pour les morts, ici une caresse. Quand l’art rencontre le coeur, c’est là toute la force de l’oeuvre de Régis Perray.