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“Qui a peur des femmes photographes ?” 1839-1945
au Musée de l'Orangerie et au Musée d'Orsay, Paris

du 14 octobre 2015 au 24 janvier 2016



www.musee-orangerie.fr

www.musee-orsay.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 12 octobre 2015. Musée de l'Orangerie, puis musée d'Orsay.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Helen Messenger Murdoch (1862-1956), Enfants de Bishareen, Assouan, Egypte, 1914. Autochrome (sous forme de projection). Bradford, National Media Museum. © Royal Photographic Society / National Media Museum Science & Society Picture library.
2/  Ruth Bernhard (1905-2006), Embryo, 1934, tirage 1955-1960. Tirage argentique, 19,05 x 16,51 cm sans cadre. Keith de Lellis Gallery, New York. Reproduced with permission of the Ruth Bernhard Archive, Princeton University Art Museum. ©Trustees Princeton University. © Photo courtesy of the Keith de Lellis Gallery, New York.
3/  Alice Austen (1866-1952), Trude and I masked, short skirts (Trude et moi, masquées, en jupons), 6 août 1891. Négatif sur verre au gélatino-bromure d’argent (sous forme de tirage moderne). New York, Staten Island Historical Society. © Courtesy of Historic Richmond Town, Staten Island, New York.

 


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Interview de Thomas Galifot, commissaire de la 1ère partie, au musée de l'Orangerie
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 12 octobre 2015, durée 17'33", © FranceFineArt.

 


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Interview de Marie Robert, commissaire de la 2ème partie, au musée d'Orsay
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 12 octobre 2015, durée 16'09", © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat général :
Ulrich Pohlmann, conservateur en chef de la collection de photographies du Stadtmuseum, Munich
Commissariat scientifique :
Thomas Galifot, conservateur au musée d’Orsay, pour la 1ère partie 1839-1919
Marie Robert, conservatrice au musée d’Orsay, pour la 2ème partie 1918-1945

Cette exposition est organisée par les musées d’Orsay et de l’Orangerie, avec la participation exceptionnelle de la Library of Congress, Washington, D.C.




L’ambition première de l’exposition présentée au musée d’Orsay et au musée de l’Orangerie du 14 octobre 2015 au 24 janvier 2016, intitulée Qui a peur des femmes photographes ? est de rompre avec l’idée encore largement partagée selon laquelle la photographie, outil physico-chimique de reproduction, aurait été une simple affaire de technique et donc « d’hommes » : qu’elles aient été amateures des classes privilégiées ou, comme de plus en plus souvent à partir du tournant des XIXe et XXe siècle, véritables professionnelles de l’objectif, les femmes ont de fait joué, en tant qu’auteures, un rôle plus important dans l’histoire de ce moyen d’expression que dans celle de chacun des beaux-arts traditionnels. S’appuyant sur les nombreuses histoires de la photographie qui, depuis une quarantaine d’années, ont réévalué l’extraordinaire contribution des femmes au développement du médium, cette exposition est la première du « genre » en France.

Pour autant, l’heure n’est plus aujourd’hui à démontrer que certaines femmes ont, très tôt et dans tous les domaines d’application de la photographie, atteint un degré de maîtrise et d’accomplissement égal à celui des hommes. C’est pourquoi cette présentation se doit de n’être ni une histoire de la photographie retracée à travers une production exclusivement féminine, ni une histoire en images des femmes par les femmes, encore moins une mise en scène d’une « vision photographique féminine ». Il s’agira bien plutôt d’exposer la relation singulière et évolutive des femmes à la photographie, c’est-à-dire de donner à voir cette production dans ce qu’elle a pu avoir, selon les contextes historiques et socioculturels considérés, de caractéristique et/ou d’exceptionnel. De ce parti pris fort découle le champ spatio-temporel particulièrement ouvert que couvre la démonstration : de l’invention officielle du médium en 1839 jusqu’en 1945, le phénomène est appréhendé à travers ses manifestations aussi bien en Europe – essentiellement en France, Grande-Bretagne, Allemagne et Hongrie – qu’aux Etats-Unis.




1 ère partie : 1839-1919 – Musée de l’Orangerie

Mettant en valeur des recherches et des découvertes inédites, cette exposition et la publication qui l’accompagne sont les premières en France, non seulement à étudier la situation hexagonale au XIXe siècle, mais aussi à rassembler chefs-d’oeuvre connus et inconnus à même d’illustrer l’extraordinaire accomplissement atteint par les praticiennes dans la sphère anglo-saxonne. D’Anna Atkins, auteure du premier ouvrage illustré de photographies (1843-1853), à Frances Benjamin Johnston et Christina Broom, pionnières du photojournalisme américain et anglais, plus de 70 photographes seront réunies autour de figures d’artistes majeures telles Julia Margaret Cameron et Gertrude Käsebier. Que ces femmes aient oeuvré isolément ou pour certaines, déjà, dans une démarche collective, il s’agira de permettre au public d’aujourd’hui d’apprécier comment une tradition photographique longtemps marquée au sceau des normes du « féminin » s’est révélée, pour certaines auteures d’exception, comme une possible voie d’émancipation et de subversion.

C’est ainsi résolument en termes de périmètres et de stratégies (de reconnaissance, de conquête de nouveaux terrains d’expression et d’action, etc..) que le phénomène est abordé. Le parcours tend tout d’abord à faire comprendre comment la photographie a, dès le milieu du XIXe siècle, contribué à élever le niveau de sociabilité des femmes en favorisant leur insertion dans les espaces d’échanges que constituent les premiers réseaux professionnels et amateurs de la photographie. Parce que l’apprentissage technique puis la pratique elle-même du médium n’étaient réglementés par aucune structure comparable à celles qui, dans les domaines de la peinture ou de la sculpture, restreignaient considérablement l’accessibilité des femmes, nombre de celles-ci ont été ou se sont senties encouragées à embrasser le nouvel « art industriel». Amenées selon leurs classes sociales à y voir principalement une source inédite de débouchés commerciaux ou le moyen d’assouvir un désir de créativité personnelle, toutes ont considéré sa pratique comme une occasion d’exister indépendamment des obligations domestiques et familiales et de se penser, puis s’affirmer, en tant que sujets regardants.

Questionnant l’interpénétration entre théâtre du genre et théâtre photographique, l’exposition met ensuite en valeur la prédilection des photographes pour l’exploration des territoires du « féminin », particulièrement notable à partir des années 1860 dans les registres du portrait et de la fiction. Il s’agit ici notamment d’examiner en quoi les représentations féminines, celles du sentiment maternel ou du monde de l’enfance, ont pu se nourrir à la fois de cette expérience sensible et propre à leurs auteures, et des potentialités photographiques de l’intimité vécue avec les modèles.

En miroir, les enjeux de représentation auxquels les femmes se sont confrontées en abordant le terrain de la différence sexuelle sont naturellement soulevés : poser un regard sur l’époux, le père ou le grand homme, proposer une vision du couple, questionner les identités sexuelles ou la représentation du corps nu masculin et féminin… autant de démarches photographiques qui impliquent plus que jamais un positionnement vis-à-vis du regard masculin, qu’il s’agisse de celui du modèle photographié, celui véhiculé par des siècles d’iconographie ou celui des spectateurs et critiques contemporains.

Le parcours s’attache enfin à déployer une forme inédite de positionnement, celle qui se répand au tournant du siècle à travers un phénomène croissant d’intrusion et d’implication, en tant que photographes, des femmes dans la sphère publique. Soutenu par l’idéologie progressiste de la New Woman anglo-saxonne, celui-ci signe la conquête des territoires, jusqu’alors réservés aux hommes, de l’autre et du politique: praticiennes d’atelier mais aussi pionnières du reportage amateur ou professionnel, les photographes sont de plus en plus nombreuses à prendre part, à travers leurs images, à la question des minorités sociales ou ethniques, à celle de l’éducation, à la lutte pour les droits civiques des femmes ou à la représentation des événements de la Grande Guerre.




2 ème partie : 1918-1945 – Musée d’Orsay

Au lendemain du conflit, nombreuses sont les photographes femmes qui participent à la naissance de la photographie moderne et à l'effervescence créative qui caractérise la période de l'entre-deux-guerres. Elles contribuent activement à l'institutionnalisation du champ et accèdent ainsi à une forme de légitimité : organisation d'expositions, création d'écoles, constitution de réseaux d'apprentissage et d'entraide, direction de studios commerciaux, mise sur pied d'agences, prise en charge de l'histoire du médium par l'écriture d'articles et d'ouvrages pratiques et théoriques. Être photographe devient pour elles un métier aux multiples facettes et applications. L'interpénétration de ces pratiques, ainsi que la mobilité géographique à l'échelle internationale rendent désormais en grande partie caduques les formes académiques.

Si les femmes s'inscrivent dans une forme de continuité avec celles qui les ont précédées en pratiquant encore les genres qui leur ont été traditionnellement dévolus (portrait, botanique, théâtre de l'intime), elles subvertissent et transgressent de plus en plus les codes artistiques et sociaux, introduisant volontiers un regard critique et distancié sur leur statut inférieur et sur les relations de domination entre les sexes.

La mise à nu de son propre corps, le questionnement de soi, les jeux de masques et le brouillage des identités deviennent des sujets de prédilection. L’autoportrait, à la fois expérimentation esthétique, exploration des signes de la féminité et expression d'une appartenance professionnelle, manifeste l’émergence de la femme nouvelle. Par leur métier, les femmes photographes en sont l’incarnation type.

La première moitié du XXe siècle les voit aussi conquérir en masse les territoires de l'universel (masculin) : elles investissent désormais les genres réservés aux hommes (le nu et plus largement l'érotisme et la représentation des corps sexués), s'emparent de certains motifs de l'iconographie de la modernité (la machine, la vitesse, l'architecture industrielle), rivalisent avec les hommes en s'engouffrant dans les marchés émergents de l'image (reportage et journalisme, presse et illustration, mode et publicité). Munies de leur appareil, elles pénètrent le monde politique, vont sur le théâtre de la guerre, s'aventurent seules dans des contrées exotiques : leur statut de photographe leur permet ainsi d'investir des espaces jusque là peu fréquentés par les femmes, voire interdits à elles.

Aussi le parcours de la seconde partie de l’exposition est-il scandé par trois sections thématiques : Le détournement des codes (Imogen Cunningham, Madame Yevonde, Aenne Biermann, Lee Miller, Dora Maar, Helen Levitt), ; L’autoportrait et la mise en scène de soi (Claude Cahun, Marta Astfalck-Vietz, Marianne Brandt, Gertrud Arndt, Elisabeth Hase, Ilse Bing) ; La conquête des nouveaux marchés de l’image (Germaine Krull, Margaret Bourke-White, Tina Modotti, Barbara Morgan, Gerda Taro, Dorothea Lange, Lola Alvarez-Bravo, etc.).