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“Esthétiques de l’Amour” Sibérie extrême-orientale
au musée du quai Branly, Paris

du 3 novembre 2015 au 17 janvier 2016



www.quaibranly.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 2 novembre 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Étui à briquet à volutes. Fin du XIXe siècle-début du XXe siècle. Peau d’esturgeon de Sakhaline. 9 x 10 x 5,5 cm, 65 g. Pays: Amour (région de l'). Continent: Asie. Ethnie: Nivkh (population). © musée du quai Branly, photo Claude Germain.
2/  Corbeille à décor polychrome. Seconde moitié du XIXe siècle. Ecorce de bouleau. 21 x 18 x 16 cm, 205 g. Pays: Amour (région de l'). Ethnie: Nanaï.. © musée du quai Branly, photo Claude Germain. Restauration réalisée grâce au mécénat de Vacheron Constantin.
3/  Manteau féminin de fête. Robe d'apparat de femme, Seconde moitié du XIXe siècle. Peau de saumon du Pacifique, peau de carpe de l’Amour, cuivre. 110 x 150 x 25 cm, 1089 g. Pays: Amour (bassin de l'). Continent: Asie. Ethnie: Nivkh (population). © musée du quai Branly, photo Claude Germain.

 


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Interview de Daria Cevoli, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 2 novembre 2015, durée 12'27". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire de l’exposition :
Daria Cevoli est ethnologue, responsable de collections Asie au musée du quai Branly.




ESTHÉTIQUES DE L’AMOUR, Sibérie extrême-orientale est la première grande exposition à valoriser la dimension esthétique exceptionnelle de l’art décoratif des peuples du bassin du fleuve Amour, de Sakhaline et de l’île d’Hokkaïdo.

Fleurons des collections asiatiques du musée du quai Branly, les oeuvres anciennes collectées dans ces régions lointaines à la fin du 19e siècle et au début du 20e siècle, relevant du domaine de l’interaction entre le monde des hommes, la nature sauvage et le monde des esprits, suscitent encore aujourd’hui une fascination particulière.

Entre « oeuvres design » et « haute couture », plus de 100 oeuvres mystérieuses et fragiles à la fois révèlent le dialogue subtil que ces peuples de chasseurs-pêcheurs entretiennent avec la nature. Manteaux de protection en peaux de poisson, sacs et accessoires inédits en écorces, peaux d’écailles, fourrures duveteuses, oeuvres rituelles en labyrinthes de volutes et spirales, ces oeuvres sont réunies dans une scénographie contemporaine sublimant les lignes, les couleurs, les textures d’un art décoratif sensuel et raffiné propre à inspirer les designers les plus contemporains.




Des peuples du poisson

Il existe de part et d’autre de l’océan Pacifique Nord une véritable « culture du saumon », qui transcende les frontières géographiques, et caractérise les peuples de pêcheurs qui vivent au rythme des migrations saisonnières de ces poissons d’eaux froides, source de vie. Pour ces populations qui, sur le continent asiatique, vivent sur les rives des grands fleuves, rivières, lacs de Sibérie extrême-orientale et en bord de mer, le saumon est la principale source de vie et de prospérité. La pêche au saumon est un élément culturel identitaire fort, structurant pour ces populations minoritaires, autrefois considérées par les Chinois comme les lointains « Tatars-Peaux de poisson ».

Ce trait culturel identitaire majeur permet de relier diverses populations de chasseurs-pêcheurs de la région, le long du fleuve Amour, jusqu’aux îles d’Hokkaïdo et de Sakhaline. Nivkh, Aïnous, Nanaïs, Oroks… tous ayant indubitablement des caractéristiques spécifiques, mais les mêmes pratiques de chasse et de pêche aux salmonidés, et une matrice animiste structurant leur relation respectueuse avec le milieu naturel et les êtres visibles et invisibles qui l’habitent.


S’habiller de nature, une histoire de peaux

Traditionnellement, les peuples de l’Amour confectionnaient leurs habits avec les matériaux issus de diverses espèces végétales ou animales. La peau des poissons était le matériau de choix pour la fabrication de bottes, de sacs et de grands manteaux. Matières auxquelles pouvaient s’ajouter les fibres d’écorce tissées, les fourrures, les plumes. La magie des couturières révélait en formes et couleurs le réseau complexe de relations entre les hommes et la nature.

Les manteaux en peaux de poisson rapportés dans les collections occidentales par les voyageurs-explorateurs du 19e siècle sont très rares et suscitent un grand intérêt par la finesse et la complexité de la technique traditionnelle de travail des diverses peaux pour confectionner le vêtement et l'orner de décorations complexes. Le musée du quai Branly conserve un ensemble de six manteaux de qualité exceptionnelle.


Des oeuvres porteuses de sens, au design intemporel

A côté des vêtements, les accessoires de couture et de fabrication des oeuvres, toujours finement décorés et conjuguant une dimension symbolique et une charge rituelle méconnue, illustrent la dimension spirituelle liée à la fabrication de ces vêtements, corps des hommes et armures d’esprits. D’autres oeuvres en écorce de bouleau ornées des caractéristiques motifs en volutes sont associées au rituel de l’ours et aux esprits aquatiques. Ils plongent le visiteur dans un mystérieux labyrinthe de volutes, écailles et spirales richement illustré et documenté.

Parce que l’esthétique contemporaine, dans une dimension de développement durable, est toujours plus en résonnance avec la nature et sensible à la redécouverte de matériaux naturels, ces créations uniques en peaux animales et végétales nous parlent par l’émotion. Le détail du geste sur la matière, le dialogue subtil avec le milieu naturel et d’un savoir raffiné qu’elles mettent en jeu, surprennent et fascinent.

Les formes, les textures et les matières questionnent notre rapport à l’objet et à la matérialité, relativisant nos catégories et frontières et ouvrant le regard à un savoir lointain.


Une restauration « au millimètre »

Les matériaux organiques que sont les peaux de poissons et les écorces formées, structurellement très fragiles, présentent des contraintes de conservation très spécifiques. Les altérations subies au cours du temps par les vêtements en peaux de poissons et les oeuvres en écorce, entravaient leur lisibilité et rendaient périlleuse toute manipulation. Le projet de conservation-restauration réalisé à l’occasion de l’exposition ESTHÉTIQUES DE L’AMOUR, Sibérie extrême-orientale, a été piloté par Daria Cevoli, commissaire de l’exposition et responsable des collections, sur la base d’un protocole scientifique élaboré sur la base de nouvelles connaissances ethnographiques sur les matériaux utilisés pour la confection des oeuvres et surtout la signification culturelle de chaque détail.

Ce savoir a permis de mener des interventions ciblées et cohérentes dans le but de sauvegarder cette collection rare et spectaculaire. Grâce à la mise en oeuvre de techniques novatrices, ces oeuvres ont retrouvé leur splendeur. L’élaboration d’un protocole de mesures de conservation préventive permettra d’assurer la conservation de ces oeuvres uniques sur le long terme, en présentation et en réserve.