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“Un grain de toute beauté” article 1778
au Palais de Tokyo, Paris

du 11 décembre 2015 au 10 janvier 2016



www.palaisdetokyo.com

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 10 décembre 2015.

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Légendes de gauche à droite :
1/  François Malingrëy, La regardeuse, 2015, huile sur toile 200 x 170 cm.
2/  Marion Bataillard, Swann, 2014, huile sur bois, 40 x 34 cm.
3/  Willem Boel, Sancho Don’t Care#01, 2015, 160 x 310 x 286 cm, technique mixte, photo artiste.

 


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Interview de Stéphane Corréard, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 10 décembre 2015, durée 11'58", © FranceFineArt.

 


texte de Sylvain Silleran, rédacteur pour FranceFineArt.

 

Un mois de gloire, c'est le temps de célébrité offert par le Palais de Tokyo aux quatre lauréats du 60éme Salon de Montrouge sous le commissariat de Stéphane Corréard. Voilà qui est plus généreux que le quart d'heure promis par Andy Warhol.

Une trame géométrique en pointillés, tissant un drapé ondulant comme une vague. Un motif régulier de caractères d'or sur un grand carré noir, enluminures sorties de leurs pages formant une bible graphique semi abstraite. Arthur Lambert peint des formules alchimiques, cherche à algébriser les secrets du vivant. Des cercles peints sur une photographie de forêt nous rappellent à travers notre plus ancienne cosmogonie quels sont les liens nous rattachant au spirituel. Sa peinture est un rythme chamanique, une pulsation de tambour nous reconnectant aux esprits.

Marion Bataillard travaille sur une certaine banalité du quotidien. "il fait beau", "maquillée", "la Notte" évoquent de longues journées ennuyeuses où l'artiste et ses amis voient leur égos se dissoudre dans la vacuité des heures qui défilent, identiques d'un jour à l'autre. Sa peinture marque le retour de la figuration académique dans le champ contemporain. Pourtant au-delà du soin apporté au réalisme, certains espaces sont volontairement laissés indéfinis. Murs et sols lisses, clavier d'ordinateur inexistant marquent une disparition de la matière qui s'efface face à la chair fortement sexualisée. Sur une table, un outil a été effacé par un coup de brosse rapide. La marque de sa présence distend encore plus le temps comme si hier et aujourd'hui étaient le même jour. Ce qui reste, c'est la femme, l'homme, le désir, et la répétition perpétuelle.

Dans un autre registre, François Malingrëy peuple ses grandes toiles de portraits réalistes. Ses sujets se tiennent debout, assis, gisent dans des prairies, des collines ou sur des dunes, évoquant dans leurs attitudes et interactions dramatisées des scènes bibliques. Les hommes torses nus, dans des teintes ocres et vertes, si ils évoquent une iconographie de l'héroïsme totalitaire, expriment un effarement désespéré. La référence religieuse devient apocalyptique, d'autant plus que ces personnages nous faisant face, c'est donc nous, spectateurs, qui semblons être à l'origine de cet accablement. Un homme atterré trône au bout du parcours. Cette sculpture terreuse, un homme se laissant aller à son désespoir, perdu dans un champ de blé, se dresse comme le totem dérisoire d'une religion à bout de souffle.

L'usine de Willem Boel est silencieuse. Des longs sacs de toile grise sont suspendus à une structure métallique de rails, de poutres, de grilles et d'escaliers. Toute cette machinerie immobile semble ne s'être figée qu'à l'instant ou nous avons pénétré l'espace pour nous en approcher. On ne peut s'empêcher de tendre le cou pour glisser un regard au fond de ces sacs, espérant qu'ils contiendraient un indice sur le sens de cet appareil productif absurde. Surgi de nos rêves ou cauchemars, organique malgré sa ferraille, cette usine a un petit quelque chose de troublant, de familier. Comme la reconstruction d'une mécanique intérieure, cette œuvre fait se rejoindre l'intime et l'étranger en un inconscient inavouable. La machine serait-elle donc en nous ?

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaire : Stéphane Corréard



Les Modules - Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent avec Marion Bataillard, Willem Boel, Arthur Lambert, François Malingrëy.

Plus qu’un événement culturel, le Salon de Montrouge, organisé chaque année par la Ville de Montrouge, est une rampe de lancement pour la jeune création contemporaine. Sur les 60 artistes sélectionnés en 2015, les 4 lauréats désignés par un jury composé de personnalités de l’art contemporain, présidé cette année par le cinéaste Olivier Assayas, bénéficient comme tous les ans d’une exposition au Palais de Tokyo.

Willem Boel et Marion Bataillard (Grand Prix du Salon de Montrouge ex-aequo), Arthur Lambert (Prix Spécial du Jury du Salon de Montrouge) et François Malingrëy (Prix du Conseil Général des Hauts-de-Seine) sont ainsi invités par le Palais de Tokyo à participer aux Modules - Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent, l’occasion pour le public de découvrir l’évolution de leur travail.

Les Modules - Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent sont un laboratoire de créateurs dont les constructions sont offertes aux connaisseurs comme aux amateurs. Ce programme, véritable cœur d’activité, crée une atmosphère d’étonnement et de découverte permanente qui permet au public de partager la recherche continuelle des équipes du Palais de Tokyo en quête de nouveaux talents.




Cette exposition réunit les lauréats du 60e Salon de Montrouge qui s’est tenu du 5 mai au 3 juin derniers, choisis par un jury présidé par le cinéaste Olivier Assayas.

Rien ne les réunit a priori, sauf le hasard de cette glorification fugace, et à présent cette présentation collective, qui se risque à une mise en perspective « psychique » de leurs travaux. Le titre de l’exposition est d’ailleurs extrait de la chanson d’Alain Bashung Au Pavillon des Lauriers, d’après le nom du bâtiment hospitalier psychiatrique où il résidait parfois : « Je veux rester fou », y clame-t-il, et « je veille / Sur un grain de toute beauté ».

Dès l’entrée, le visiteur se trouve plongé dans le fracas du chaos mental orchestré par Willem Boel. En émergent les schémas métaphysiques d’Arthur Lambert. Dans une perspective démesurée, inspirée des tunnels décrits par les témoins de mort clinique, il aborde les visages familiers scrutés au pinceau par Marion Bataillard et François Malingrëy, puis les corps entiers pris dans les vastes compositions des mêmes.

« Référence à la folie ou non, veiller sur un grain de toute beauté m’est apparu comme une définition possible de cette insaisissable activité que demeure « faire de l’art », que Jean-François Lyotard entendait lui comme « faire des branchements de libido sur la couleur ». Je cite Bashung et Lyotard, mais la forme même de l’exposition doit plus à Giuseppe Tomasi di Lampedusa, qui s’attache dans Le Guépard à débusquer les « racines plus profondes dans un de ces motifs que nous appelons irrationnels parce que ensevelis sous des amas d'ignorance de nous-mêmes ». Comme celui-là, elle se développe dans l’espace et le temps en profondeur, vers un point aveugle, on la traverse en se retournant à demi, comme pour jeter un dernier oeil sur le monde qu’on laisse derrière soi ; on y progresse comme dans un travelling exagérément ralenti, elle forme en son entier un zoom arrière sophistiqué. Le grain du titre, ainsi, prend tous ses sens, psychiatrique, météorologique, épidermique comme pictural. »

Stéphane Corréard, commissaire.




Le Salon de Montrouge

Rendez-vous incontournable de la scène culturelle française, le Salon de Montrouge promeut et accompagne la création contemporaine dans toute sa diversité depuis 1955. Sur les 1500 m2 du Beffroi, à Montrouge, les oeuvres sélectionnées parmi toutes les disciplines sont révélées au public durant un mois chaque printemps. Photographies, sculptures, dessins, vidéos, projets numériques et installations se révèlent ainsi au grand public dans des modules d’exposition dédiés, permettant de découvrir un ensemble significatif et cohérent du travail de chaque artiste.

Evénement grand public et gratuit, le Salon de Montrouge propose un panorama complet en matière de création artistique. Grâce à une sélection à la fois accessible et exigeante, le Salon jette un véritable coup de projecteur sur la création émergente et accompagne pendant un an 60 artistes ayant un lien fort avec la France, sélectionnés parmi plus de 3000 candidatures.


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Archives FranceFineArt.com :
retour sur l'exposition de la 60 édition du Salon de Montrouge
avec les interviews de Stéphane Corréard, directeur artistique et Caroline Ebin, artiste exposante.

http://www.francefineart.com/index.php/agenda/14-agenda/agenda-news/1748-1619-montrouge-60eme-salon