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“Hugh Weiss” Le dernier voyage
au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris

du 12 février au 22 mai 2016



www.mam.paris.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 11 février 2016.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Hugh Weiss (1925-2007), Humpty Dumpty à la mer, 2005, 100 x 100 cm. © Hugh Weiss. Collection Musée d’Art moderne de la Ville de Paris.
2/  Hugh Weiss (1925-2007), Kafka Nous sommes tous coupables, 2007, 162 x 130 cm. © Hugh Weiss. Collection Musée d’Art moderne de la Ville de Paris.
3/  Hugh Weiss (1925-2007), Dinner Time, 2006, 92 x 73 cm. © Hugh Weiss. Collection Musée d’Art moderne de la Ville de Paris.

 


texte de Sylvain Silleran, rédacteur pour FranceFineArt.

 

Six toiles de Hugh Weiss, don de la veuve de l'artiste au musée d'Art Moderne de Paris, sont exposées avec une série de dessins sur papier. Ces travaux réalisés lors des dernières années de l'artiste présentent non pas un testament mais au contraire un dernier combat sous forme de voyage.

L'image de la barque et la figure de Charon, passeur des âmes au travers du Styx vers le domaine des morts annonce la finalité de ce dernier périple, une épopée se déroulant de toile en toile. Hugh Weiss se représente lui-même aux prises avec une horde continue de serpents, de poissons et monstres surgissant des profondeurs pour le dévorer. Petit à petit, l'esquif se lézarde, finit par se disloquer dangereusement. En même temps les personnages perdent progressivement leur humanité, deviennent difformes, têtes hérissées de membres et de tentacules. Le voyage s'achève dans une tombe, cocon protecteur où l'artiste étreint sa compagne à l'abri du chaos qui se déchaine tout autour.

Sur une table au centre de la pièce, des photos de l'artiste, des portraits de lui dessinés par une jeune Niki de Saint Phalle et surtout des carnets de dessins qu'il offrait chaque année à son épouse. Car l'œuvre de Weiss est marquée par l'amour qu'il lui porte. La figure des amants enlacés est un terme régulier de son langage iconographique. Il y a une touchante simplicité dans ces carnets, dans la répétition de la mention 'pour Sabine' sur leur couverture, une vulnérabilité courageuse que nous avons cessé d'écouter depuis longtemps.

14 dessins sur papier montrent une exploration plastique plus libre, plus spontanée. Les techniques sont diverses; acrylique, aquarelle, crayons se fondent jusqu'à ne devenir plus qu'une expression rageuse de tempête. Un bestiaire fantastique surgi des ténèbres lutte avec sauvagerie dans un dernier éclair de vie. Les couleurs sont des taches d'ocre, des éclaboussures sanglantes ou bien vibrent chaleureusement en jaunes orangés de flammes ou en roses liquides. L'homme tente de reprendre le dessus sur des poissons et monstres aux dents acérées mais sa lutte désespérée est sans issue, il finit dévoré jusqu'à ce que ces démons fassent partie intégrante de son corps.

Le combat d'un homme contre la maladie est un récit mystique, une vaine tentative de se distinguer du mal, de repousser ces forces alors qu'elles sont nées en soi, qu'elles sont partie intégrantes de la chair. La bataille physique, au fur et à mesure qu'elle déroule ses évènements telle une guerre, révèle sa véritable nature. Ce qui nous parle c'est l'aveu de souffrance, exacerbé à l'approche de la mort, mais qui porte l'universalité de l'expérience humaine. La douleur, la perte, le long et terrible chemin vers l'acceptation, voilà bien ce que Hugh Weiss nous montre avec une précieuse naïveté. Ces dessins sont ceux d'un artiste qui n'a pas perdu son innocence. Malgré les années d'évolution et de travail, il a gardé de cette capacité de vérité que nous offre un enfant avec ses feutres. C'est ce qui permet à ses mots si effrayants de nous atteindre.

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

Directeur, Fabrice Hergott
Commissaire de l’exposition, Choghakate Kazarian




Suite à la présentation de fonds monographiques d’ateliers parisiens (Jean Dupuy, Claude Garache, Pierre Henry, Raymond Mason, Georges Noël, Niele Toroni), le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris a acquis un ensemble de six oeuvres de Hugh Weiss données par la veuve de l’artiste, la photographe Sabine Weiss. Ce don est présenté avec un ensemble d’oeuvres sur papier ainsi que des photographies de Sabine Weiss, des petits carnets de l’artiste et les tout premiers dessins de son amie Niki de Saint Phalle qu’il a initiée à la peinture dans les années 50.

Hugh Weiss (1925-2007), peintre américain installé à Paris dès 1948, épouse Sabine Weber en 1950 et reste dans la capitale toute sa vie. Cet artiste au parcours indépendant a participé à plusieurs expositions célèbres telles que « Mythologies quotidiennes II » au Musée d’Art moderne en 1977. Il a contribué au renouveau de la peinture figurative sous une forme libre, en dehors de toute tendance théorique ou de groupe. Son oeuvre est aujourd’hui présent dans de nombreux musées français et étrangers.

Le Musée d’Art moderne, qui avait acquis une oeuvre de l’artiste en 1981, a choisi aujourd’hui de mettre en lumière les dernières années de sa carrière.

Luttant contre la maladie qui l’emportera, Weiss connaît un renouveau vital dans sa peinture qui reprend les thèmes récurrents de son univers comme le voyage fluvial, Charon, la barque, l’autoportrait, la pieuvre, et autres animaux étranges, dans un souffle tragique et dramatique d’où n’est néanmoins pas absent l’humour léger de l’artiste face à l’imminence de la mort. C’est à une véritable traversée du Styx à laquelle nous invite Hugh Weiss devenu Charon.




À voir également dans les collections permanentes :
l’accrochage de Charlotte von Poehl, En série.

Commissaire de l’exposition Odile Burluraux.




À l’occasion de l’entrée dans la collection de l’oeuvre The Notepiece de Charlotte von Poehl, le Musée d’Art moderne de la Ville de Paris propose un accrochage autour de cette série de cent dix dessins réalisés en 2004 lors d’une résidence au Henry Moore Institute à Leeds. L’artiste y a étudié les écrits et les ouvrages consacrés aux artistes conceptuels Eva Hesse, Robert Smithson et Sol LeWitt. Les notes - citations et réflexions - illustrées de dessins et d’aquarelles sur des feuilles d’un carnet à dessins, sont ici présentées tel un journal de bord.

Charlotte von Poehl place au centre de son travail le temps, la répétition et la sérialité. Dans une activité quotidienne, elle revient sur ses motifs en ayant recours à des matériaux et des techniques ordinaires. Prendre des notes, dessiner, modeler participent d’une même pratique essentielle à sa démarche artistique. Chacune des oeuvres fait partie d’un processus en devenir et n’est qu’un fragment d’un projet plus ample.

Les Arrow Drawings (2004-2006) sont produits au crayon sur de grands papiers couverts d’un motif de flèches pointant dans toutes les directions, certaines repassées à l’encre ; chaque dessin est tracé à partir du modèle dans une vaine tentative de recopier à l’identique.

Les Harlequins Drawings débutés depuis 2011 combinent cinq nuances d’aquarelle, dont la couleur bleue, et sont conçues à partir d’un protocole et d’une grille de rectangles d’1 cm par 2.

Posés au sol selon un système géométrique, les Newtons, (2002-2015) petits cylindres en pâte à modeler de couleur, fabriqués manuellement par l’artiste, donnent aussi bien à voir le temps passé que l’énergie dépensée par le corps (un newton correspondant à la force qu’exerce une masse de 100 gr).

La vidéo Blue Maiden (2009) dresse le portrait de l’île mythique Blå Jungfrun, située dans la Baltique et devenue une réserve naturelle. Margareta Claesson, une ancienne habitante, raconte comment des pierres de l’île sont redéposées anonymement : en effet, une malédiction est supposée frapper ceux qui les prennent.