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“Dans l’atelier” l’artiste photographié d’Ingres à Jeff Koons
au Petit Palais, Paris

du 5 avril au 17 juillet 2016



www.petitpalais.paris.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 4 avril 2016.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Léon Gimpel, Chez le sculpteur (P. L. Hypersens ?), janvier 1911. Autochrome. Paris, Société Française de Photographie. © Collection Société française de Photographie, Paris/Léon Gimpel.
2/  Charles Matton, L’Atelier de Francis Bacon, 1986. Boîte (matériaux divers). Collection particulière. Photo Charles Matton © Adagp, Paris 2016.
3/  Edmond Bénard, Alexandre Cabanel dans son atelier à Paris, années 1880. Tirage sur papier albuminé. © Collections Roger Viollet / Roger-Viollet.

 


1857_atelier audio
Interview de Delphine Desveaux, co-commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 4 avril 2016, durée 9'32". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat :
Delphine Desveaux, directrice des Collections Roger-Viollet
Susana Gállego Cuesta, conservatrice de la collection photographique du Petit Palais
Françoise Reynaud, conservatrice en charge des collections photographiques du musée Carnavalet




Le Petit Palais propose avec cette exposition de pénétrer dans le monde secret des ateliers d’artistes : plus de 400 photographies mais également des peintures, sculptures et vidéos permettent de s’approcher au plus près du processus de création de l’artiste, depuis Ingres, en passant par Picasso, Matisse, Bourdelle, Zadkine, Brancusi, jusqu’à Joan Mitchell, Miquel Barceló ou encore Jeff Koons. Jamais une exposition n’a traité à grande échelle et de façon aussi spectaculaire de ce regard photographique sur l’atelier. Cette entrée dans l’atelier, grâce à la photographie, invite à un voyage dans l’esprit des créateurs.

Depuis les débuts de la photographie, les ateliers d’artistes fascinent les photographes. Qu’elle documente les intérieurs et tire les portraits des artistes en vogue, qu’elle s’intéresse au geste créateur ou qu’elle prenne l’atelier comme métaphore de la naissance des images, la photographie n’a de cesse depuis le XIXe siècle de pénétrer et d’explorer ces espaces où s’élabore l’oeuvre d’art. Photographier l’atelier est l’occasion d’approcher l’artiste à l’oeuvre, et de rendre palpable le processus de création, mais c’est aussi le prétexte à une réflexion sur la photographie elle-même à travers cette fascination pour les lieux de création.

Pour aborder ces différents aspects, le parcours de l’exposition suit trois grands thèmes : L’artiste en majesté, La vie dans l’atelier et Méditations photographiques.
Dès l’entrée de l’exposition, le public pénètre d’emblée dans l’intimité de la création. Tirages anciens et modernes, en noir et blanc ou en couleurs montrent comment la photographie célèbre l’Art et les artistes, mettant ainsi en valeur leur personnalité et valorisant leur puissance créatrice. Ici le public découvre les portraits mis en scène d’artistes de la fin du XIXe siècle jusqu’à des figures plus contemporaines comme Nicolas de Staël, Piet Mondrian, Joan Mitchell, ou encore Paul Rebeyrolle. Puis c’est la vie dans l’atelier qui est évoquée. Les photographes sont aussi les témoins privilégiés des activités et des rencontres qui y prennent place.

Bien sûr l’atelier, c’est le lieu même du geste créateur, mais aussi celui de l’apprentissage avec les cours collectifs, on y reçoit famille et amis, c’est également là que s’établit un face à face avec le modèle. Enfin en s’intéressant à l’atelier comme sujet, les photographes méditent également sur leur propre pratique. L’atelier n’a de cesse d’être une source d’inspiration pour ces photographes qui produisent des images empreintes de gravité et de poésie telles les photographies de Luigi Ghirri évoquant le temps suspendu dans l’atelier de Giorgio Morandi ou encore celles d’André Villers fixant à jamais les toiles de Picasso rangées dans son atelier ou sa palette sur une chaise en paille. L’exposition se termine sur une série de photographies qui hissent l’atelier au rang d’oeuvre d’art, en témoignent la savante accumulation de toiles, d’outils, d’objets en tous genres dans l’atelier de Francis Bacon ou encore l’agencement géométrique de socles et sculptures dans celui de Didier Vermeiren. L’atelier devient lui-même objet, le prolongement même de l’artiste.

Cette exposition bénéficie d’un dispositif interactif qui permet la réalisation d’une exposition virtuelle. Le public est invité à jouer les commissaires d’exposition en choisissant des oeuvres non retenues dans la sélection finale et qu’il aurait voulu voir présenter. Les photographies les plus appréciées feront l’objet d’une exposition virtuelle présentée sur le site : 
danslatelier.paris.fr




Le catalogue de l’exposition : Dans l’atelier. L’artiste photographié, d’Ingres à Jeff Koons aux éditions Paris Musées avec les essais de Sylvie Aubenas, Delphine Desveaux, Susana Gállego Cuesta, Françoise Reynaud et Kerstin Stremmel.

Les ateliers d’artistes fascinent les photographes. L’atelier est le lieu de toutes les passions et de toutes les interrogations. Les photographes y sont à leur aise : souvent peintres eux-mêmes au XIXe siècle, fréquentant les mêmes milieux que leurs collègues artistes, ils ont leurs entrées dans ces lieux qui, pour le grand public, restent auréolés de mystère. Qu’elle révèle les intérieurs et s’intéresse au geste créateur, qu’elle tire le portrait des artistes en vogue ou qu’elle prenne l’atelier comme métaphore de la naissance des images, la photographie n’a de cesse d’explorer ces espaces où s’élabore l’oeuvre d’art. Du XIXe siècle à nos jours, cet ouvrage propose d’approcher l’artiste à l’oeuvre, dans une tentative de rendre tangible le processus de création.




Le parcours de l’exposition

Introduction - Dans l’atelier

L’atelier d’artiste appartient à l’imaginaire collectif : sa verrière, son poêle, son bric-à-brac… font encore aujourd’hui rêver. Les ateliers contemporains se distinguent pourtant nettement des intérieurs encombrés de collections et de souvenirs d’Orient qu’affectionnaient les peintres du XIXe siècle. Pourquoi gardons-nous alors en mémoire cette image de l’intérieur de l’artiste ? Les photographes ont beaucoup contribué à la création et à l’entretien de cette chimère : dès les débuts de la photographie au milieu du XIXe siècle, ils documentent les lieux de la création, tirent le portrait des artistes en vogue et commercialisent des images au doux parfum de bohême. Une tradition visuelle naît ainsi, qui se perpétue encore aujourd’hui : Gautier Deblonde et Catherine Leutenegger sont à leur manière les héritiers d’Edmond Bénard. Pour autant, la fascination pour l’atelier ne va pas sans regard critique : lorsqu’un photographe pénètre dans l’atelier d’un artiste, aucun de ses gestes n’est innocent. Il saisit une réalité, qu’il transforme et recompose, proposant au public une vision plus ou moins idéalisée, plus ou moins intime et « vraie ». Notre exposition invite à prendre place derrière l’objectif, et à découvrir ces univers et leurs habitants avec l’oeil attentif d’un témoin privilégié.

Section I - L’artiste en majesté
La photographie d’atelier naît d’un désir partagé : celui de l’artiste, qui veut en général se montrer sous son meilleur jour, et celui du photographe, qui cherche à asseoir le prestige de son art tout en produisant des images à diffuser. De cette rencontre naissent des photographies à profusion, qui présentent souvent le lieu et son occupant, trônant dans son environnement de travail (ou ce que l’on suppose tel à la vue des indices offerts). Tous les artistes ne se mettent pas en scène de la même manière : les « crâneurs » affirmés côtoient les praticiens dignes, et même les timides trouvent leur place. Beaucoup moins représentées, les artistes femmes ont tout de même leur mince part de gloire : Rosa Bonheur et Louise Bourgeois prennent la pose avec la même assurance et le même regard acéré que n’importe lequel de leurs homologues masculins. L’artiste devient ainsi un sujet de collection et de curiosité publique : au XIXe siècle, les portraits « cartes de visite » des grands noms de la peinture et de la sculpture sont réunis dans d’épais albums ; au XXe siècle, le reportage prend la suite, documentant pour la presse les intérieurs d’atelier. Albert Harlingue, Denise Colomb, Gérard Rondeau… s’érigent en grands spécialistes du genre.

Section II - La vie dans l’atelier
Avant d’être un lieu de parade, l’atelier est un lieu de travail et de vie. Les photographes ont un accès privilégié à l’endroit même où se « cuisine » l’oeuvre d’art. Ils parcourent les lieux où se forment les futurs peintres et sculpteurs, ateliers collectifs et salles de cours, et s’approchent au plus près du geste créateur. Il est néanmoins difficile de représenter l’artiste au travail : jaloux de son intimité, il ne se laisse capturer que par l’objectif qu’il sent proche et bienveillant. Les photographies d’atelier les plus intenses ont souvent pour toile de fond l’amitié et le partage. Le monde entier s’invite sur les lieux de la création : collectionneurs, familiers, modèles, se côtoient dans un brouhaha qui contraste avec l’image traditionnelle de l’atelier comme lieu de recueillement et de repli sur soi. Friande de face à face, la photographie s’attarde longuement sur tous ces personnages-visiteurs. L’artiste et son modèle retiennent tout particulièrement l’attention des photographes : objet d’étude, le modèle (le plus souvent la modèle) est aussi un objet de fascination. Celui-ci devient même un sujet à part entière, nourrissant les recherches et les rêveries de nombreux photographes.

Section III - Méditations photographiques
Dans l’atelier, le photographe n’est pas seulement un intrus ou un invité discret et silencieux. Il prend le pouvoir en s’appropriant l’espace. Photographier l’atelier d’un autre suppose une réflexion sur sa propre pratique de faiseur d’images. Confronté au lieu où se font les oeuvres et à leur auteur, comment faire oeuvre à son tour ? En l’absence de l’artiste, le photographe fait parler les objets qui peuplent l’atelier. Les reproductions épinglées aux murs, les outils et rebuts divers dessinent comme un paysage mental. Surgit ainsi un portrait en creux de l’occupant des lieux : la photographie établit un dialogue avec les vivants et avec les morts. Les photographes rendent ainsi hommage à leurs prédécesseurs, à leurs collègues et amis. Lieu de mémoire, écrin des oeuvres, l’atelier s’offre à toutes les méditations : Constantin Brancusi et Antoine Bourdelle, sculpteurs devenus photographes, y construisent une oeuvre originale ; à la suite de Charles Winter, Joel-Peter Witkin y élabore un univers visuel. À la fin du XXe siècle, l’atelier devient le point de départ de démarches conceptuelles : il est l’objet d’une quête obsessionnelle et sert de caisse de résonnance aux recherches sur l’illusion. Tout au long de son histoire, la photographie a construit un objet symbolique, l’atelier d’artiste, qu’elle s’emploie désormais à déjouer et à manipuler à loisir.