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“Kollektsia !” Art contemporain en Urss et en Russie 1950-2000
au Centre Pompidou, Paris

du 14 septembre 2016 au 27 mars 2017 (prolongée jusqu’au 2 avril 2017)



www.centrepompidou.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage de Kollektsia +, le 27 février 2017 et présentation de l'exposition Kollektsia !, le 12 septembre 2016.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Oleg Kulik, De la série Je mords l’Amérique et l’Amérique me mord, 1997. Tirage photo noir et blanc, 158 x 125 cm. Don de Pierre-Christian Brochet.
2/  Pavel Pepperstein, Jeanne d’Arc, 2005. Acrylique et huile sur toile, 140 x 140 cm. Don de la Vladimir Potanin Foundation.
3/  Vladislav MamyshevMonroe, Valery Katsuba, Délestage de responsabilité, 2001. De la série Toute passion est folle et aveugle. Tirage gélatino-argentique, 91 x 63,5 cm. Don de la Vladimir Potanin Foundation.

 


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Interview de Nicolas Liucci-Goutnikov, co-commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 12 septembre 2016, durée 16'35". © FranceFineArt.

 


“Kollektsia !” Art contemporain en Urss et en Russie
une nouvelle donation de 100 oeuvres !

du 27 février au 2 avril 2017

1966_Kollektsia1966_Kollektsia1966_Kollektsia 4/  Orlov, Portrait de Pouchkine, 1982. Photomontage, 59x44 cm/ Don de Wladimir et Larissa Fudim.
5/  Blue Noses, L’ère de la pitié, 2005. C-print. Don des artistes.
6/  Vitaly Komar, Alexander Melamid, Catalogue de super-objets : super-confort pour super-personnes, 1976-1977. Epreuves photographiques. Don de la Galerie Ronald Feldman.

 

Le Centre Pompidou présente un parcours élargi de l’exposition « KOLLEKTSIA ! », enrichi de la centaine d’oeuvres offertes au musée national d’art moderne depuis septembre 2016 et montrées ici pour la première fois.

Réalisées grâce au soutien de la Vladimir Potanin Foundation, ces nouvelles salles d’exposition et ces nouvelles oeuvres éclairent d’autres aspects de l’art non officiel soviétique, tout en s’ouvrant plus largement à la création contemporaine. Le parcours KOLLEKTSIA+ témoigne de l’engagement du Centre Pompidou en faveur d’une meilleure représentation de cette scène artistique dont nombre des protagonistes vivent ou vécurent en France.

L’enthousiasme suscité par l’exposition KOLLEKTSIA ! auprès de donateurs de tous horizons a permis au musée national d’art moderne de poursuivre les acquisitions et d’ouvrir ce parcours enrichi. à partir du 27 février, la centaine de nouvelles acquisitions est présentée et articulée à l’ensemble inauguré en septembre dernier. Certains artistes des années soixante, dits « non conformistes », font leur entrée en collection grâce à la générosité d’Igor Tsukanov tout comme les projets utopiques des « architectes de papier » des années 1980, ou encore des œuvres d’artistes du mouvement Sots art. Mais c’est surtout à travers la performance que cet ensemble s’étoffe aujourd’hui, avec les oeuvres de Dmitri Prigov, Komar & Melamid, Oleg Kulik, Blue Noses, du collectif Chto Delat ou encore d’Andreï Kuzkin, récent jeune lauréat du Prix Kandinsky.

Le 27 février 2017, une table-ronde réunissant collectionneurs et mécènes, des visites guidées menées par les commissaires de l’exposition, des performances des artistes Yuri Albert et Andreï Kuzkin, et une master class du groupe Blue Noses seront proposées au public. Un programme riche et varié se déploiera tout au long de la semaine suivante, du 1er au 5 mars : projections de films documentaires, workshops et conférences. Il se conclura par une journée exceptionnelle consacrée à Dmitri Prigov, dimanche 5 mars, au cours de laquelle interviendra notamment Jean-Luc Nancy.

En complément, un groupe d’amis russes a été constitué au sein de la Société des amis du musée national d’art moderne, qui contribuera à l’acquisition de nouvelles oeuvres.

De plus, le Centre Pompidou lance au début de cette année un projet de recherche triennal, « Russie XXe siècle », avec le soutien de la Vladimir Potanin Foundation. Se tiendront, un mercredi par mois, des conférences « Chroniques russes » qui porteront à la fois sur la période moderne et contemporaine, toutes disciplines confondues. Textes, essais et articles d’artistes, de critiques et de théoriciens de l’art soviétique et russe, moderne et contemporain, seront traduits et publiés. La communauté des artistes non conformistes russes, émigrés en France à partir des années 1970, fera enfin l’objet d’une attention particulière, notamment à travers la production d’archives vivantes et d’une publication.

 


 

texte de Mireille Besnard, rédactrice pour FranceFineArt.

 

Quand Pompidou pratique l’art-diplomatie.

En accueillant ce don exceptionnel de 250 oeuvres russo-soviétiques, en ouvrant ses portes en direction du géant eurasien plus de 35 ans après l’exposition Paris-Moscou (1979), le Centre Pompidou s’adonne à nouveau à la diplomatie par les arts. L’événement est déjà remarquable pour la valeur artistique et marchande des œuvres qui rejoignent les collections nationales françaises. Il l’est encore pour l’étendue et la particularité de la période couverte (dégel khrouchtchévien, stagnation brejnévienne et explosion de la Perestroïka et chute de l’URSS), ainsi que pour le nombre d’artistes (65) et de donateurs (40) concernés.

Grâce à un imbroglio combinant désir et curiosité d’esthètes, volonté politique, propension au rayonnement culturel de puissants oligarques et -bien entendu- souhait des artistes, c’est un pan entier de l’art poststalinien qui sort du cercle des initiés pour arriver à la connaissance des acteurs culturels et du public. À l’heure de conflits graves comme ceux se déroulant sur les territoires de l’Ukraine et de la Syrie, ce don prend, bien au-delà de la portée culturelle et muséale que l’on perçoit bien, une valeur politique dans ce contexte de refroidissement et de sanctions mutuels. Cette initiative qui, si elle peut rappeler les tentatives d’un Giscard d’Estaing pour garder certaines portes ouvertes à l’Est au moment de l’invasion soviétique de l’Afghanistan (1979) et de la répression en Pologne (1981), peut aussi se comprendre comme une tentative d’un musée pour maintenir une politique d’acquisition dans un contexte de réductions budgétaires et de chute drastique des fréquentations touristiques dans une France visée par des attentats terroristes.

Qui aurait pu croire qu’un jour le Carré noir de Malevitch (titre également du documentaire sur l’art non-officiel soviétique (1988) d’Olga Sviblova, initiatrice de ce projet Kollektsia) puissent servir, à travers ses héritiers, d’agent puissant d’une diplomatie informelle ? Pourtant le rideau de fer a disparu depuis longtemps, mais peu nombreux ont été les artistes russes à pouvoir accéder à une notoriété internationale durable. Déception d’un Occident qui n’y pu voir que sa propre image déformée (conceptualisme moscovite et le sots-art, action collective) ? Difficulté à s’ouvrir à des expériences très ancrées dans une réalité soviétique inédite dans l’histoire mondiale, empreinte d’absurdités et de blocages aussi violents que loufoques (Mukhomory, Necrorealisty) ?

Pourtant, toutes ces tentatives pour rester connecter aux capitales occidentales et à leurs pratiques expérimentales étaient finalement des vrais actes politiques risqués. Ils pouvaient conduire à l’exclusion, la privation de liberté, l’enfermement en hôpital psychiatrique ou encore à l’exil. La présentation de la collection au 4e étage du Centre Pompidou permet un petit peu de saisir les inventions, les débrouillardises et ruses que des artistes et toute une société ont dû déployer pour déjouer les contraintes et repousser les risques encourus. Et, finalement toutes ces coïncidences formelles Est/Ouest relèveraient peut-être moins du plagiat que d’un désir effréné pour rester dans la communauté artistique mondiale et assumer ensemble l’héritage des avant-gardes en dépit des frontières politiques. Cette nouvelle collection d’art russe scelle ce mouvement d’ensemble extraterritorial.

En favorisant cette vision de l’histoire et en optant pour des oeuvres venant peut-être trop bien compléter les collections actuelles du musée, il se pourrait que la direction du Centre promeuve un rapprochement culturel nécessaire, mais quelque peu biaisé. D’aucun regretteront une sélection trop centrée sur les sphères moscovites, faisant une place modeste à Leningrad. D’autres déploreront l’absence totale (à l’exception de l’Ukraine) des autres républiques socialistes d’alors. Si cette vision d’une Russie slave occidentalisée permet de percevoir la vitalité et les combativité des élites russes, elle nous prive de l’appréhension des complexités que traversent ce colosse en équilibre sur deux continents, balancé sans cesse entre amour et désamour. A moins que cette initiative ne soit qu’un premier pas du Centre Pompidou dans une politique d’échanges artistiques et culturels qui ne ferait que commencer. Alors on parlerait d’un premier pas nécessaire, solide et prometteur.

Mireille Besnard

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat :
Commissaire russe, Olga Sviblova, directrice du Multimedia Art Museum, Moscou
Commissaire français, Nicolas Liucci-Goutnikov, conservateur, Musée national d’art moderne




À partir du 14 septembre 2016, le Centre Pompidou expose l’extraordinaire don de plus de deux cent cinquante oeuvres soviétiques et russes contemporaines réunies avec le soutien,exceptionnel de la Vladimir Potanin Foundation. Cet ensemble d’oeuvres a pu être offert au Musée national d’art moderne grâce à la générosité de la Vladimir Potanin Foundation, des collectionneurs, des artistes et leurs familles. Inscrit dans une année 2016 placée sous le signe d’un hommage aux donateurs de tous horizons, ce projet rappelle l’importance cruciale de ces gestes engagés pour le développement des institutions patrimoniales. L’ensemble ainsi constitué, composé d’oeuvres d’artistes majeurs, offre un panorama, sans prétention à l’exhaustivité, de quelques quarante années d’art contemporain en URSS puis en Russie, à travers les principaux mouvements qui les ont sillonnées.

La présentation donne à voir la richesse d’un art né en marge du cadre officiel. Dès la fin des années 1950, les artistes « non conformistes », à l’instar de Francisco Infante, Vladimir Yakovlev ou Yuri Zlotnikov, stimulés par les expositions internationales permises par la politique khrouchtchévienne de « dégel », renouent avec les pratiques esthétiques des avant-gardes russes, elles-mêmes sources d’inspiration pour tant d’artistes occidentaux. Ils cherchent à inventer leur propre langage plastique. En 1962, la fermeture par Khrouchtchev de la salle non conformiste incluse dans la fameuse exposition du Manège (Moscou), bannit pour plusieurs années de l’espace public toute expression artistique contraire à la doctrine du réalisme socialiste qui, à partir des années 1930, a mis fin aux expérimentations modernes en URSS.

Les années 1970 voient l’émergence de deux mouvements aux frontières poreuses. L’École conceptualiste moscovite prend une ampleur déterminante sous l’impulsion d’Ilya Kabakov de Viktor Pivovarov, de Rimma et Valéry Gerlovin, suivis d’Andreï Monastyrsky et de Dmitri Prigov. Accordant une place prépondérante au langage, travaillant à la croisée de la poésie, de la performance et des arts visuels, ces artistes proposent dans la Moscou de la « Stagnation » un art conceptuel reflétant la primauté de la littérature dans la culture russe. Une seconde génération d’artistes rejoint la communauté conceptualiste à la fin des années 1970, comme le groupe Mukhomor, Yuri Albert, Mikhaïl Roshal, Viktor Skersis ou Vadim Zakharov.

Concomitant du conceptualisme moscovite, le Sots art, inventé par le duo Komar et Melamid, détourne dans une veine pop les codes de la propagande soviétique. À la différence des artistes pop, confrontés à la surabondance de biens de consommations, Alexandre Kosolapov, Boris Orlov ou Leonid Sokov démythologisent l’environnement idéologique de la société soviétique. Courant fécond dont certains des protagonistes émigrent dès les années 1970, le Sots art marque fortement l’esthétique des années de la perestroïka, animant l’oeuvre de différents artistes à l’instar de Grisha Bruskin.

Au milieu des années 1980, l’avènement de la perestroïka provoque un véritable bouillonnement créatif, imprégné d’une culture underground, émanant de différents squats. Un fort pressentiment de liberté enivre alors les jeunes artistes : Sergei Anufriev, Andreï Filippov, Yuri Leiderman, Pavel Pepperstein ou le groupe Pertsy à Moscou, Sergei Bougaev-Afrika, Oleg Kotelnikov, Vladislav Mamyshev-Monroe ou Timur Novikov à Leningrad.

La fin de la décennie est marquée par la légitimation de cet art né dans les marges. Les mécanismes du marché de l’art, encore inexistant, commencent à se mettre en place : en 1988, une première vente aux enchères organisée par Sotheby’s à Moscou, donne une valeur tangible à l’art non officiel. Très rapidement, les frontières avec l’art officiel disparaissent. Une nouvelle génération d’artistes s’affirme, incluant AES+F, Dmitri Gutov, Valéry Koshlyakov ou Oleg Kulik. À partir des années 2000, l’art contemporain s’institutionnalise et intègre peu à peu la culture nationale.

Initiative inédite imaginée avec la Vladimir Potanin Foundation, ce projet dépasse le cadre d’une simple exposition. Signe fort d’un engagement pérenne du Musée national d’art moderne, les oeuvres rassemblées rejoignent les collections nationales. Elles y complètent des fonds modernes de référence – Kandinsky, Larionov ou Gontcharova – ainsi que plusieurs œuvres contemporaines majeures acquises depuis les années 1980 grâce à la passion des conservateurs du Centre Pompidou. Ce nouvel ensemble permettra au musée de partager avec un large public, en France et à l’étranger, la connaissance d’une histoire dont il est trop fréquemment pensé qu’elle s’est arrêtée à la fin des années 1920. Intégrées à une collection contemporaine résolument internationale, ces oeuvres venues d’URSS et de Russie dialogueront avec des formes artistiques de tous horizons, ouvrant de nouvelles perspectives pour l’étude et la recherche.

Cet enrichissement significatif des collections donnera enfin à de nombreux artistes russes installés à Paris à partir des années 1970, comme Erik Bulatov, Igor Shelkovsky, Oscar Rabin, Eduard Steinberg ou Vladimir Yankilevsky, toute leur place au sein de l’institution.

Le Musée national d’art moderne tient à remercier très chaleureusement la Vladimir Potanin Foundation, dont il partage la volonté de permettre l’accès à la culture et la diffusion des connaissances. Le Centre Pompidou espère que la coopération engagée dans le cadre de ce projet, qui se poursuivra à l’avenir, scellera le début d’une amitié durable. Il souhaite également rendre un hommage appuyé à l’ensemble des donateurs, notamment Ekaterina et Vladimir Semenikhin et la Tsukanov Family Foundation, qui démontrent de façon exemplaire les vertus d’un effort collectif tendu vers la défense des artistes et de leurs oeuvres. Les organisateurs du projet remercient enfin les équipes du Multimedia Art Museum de Moscou pour l’aide significative apportée à sa réalisation.

Cette présentation des oeuvres nouvellement acquises est inscrite au programme de l’année franco russe du tourisme culturel et s’accompagne d’un cycle de conférences et de projections qui se déploiera de septembre 2016 jusqu’en janvier 2017.


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Archives FranceFineArt.com :
Retrouvez l’article de “cher(e)s ami(e)s” présentation des collections contemporaines

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