contact rubrique Agenda Culturel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

“Morgane Tschiember” Six soleils
au MAC/VAL, musée d'art contemporain du Val-de-Marne, Vitry-sur-Seine

du 17 septembre 2016 au 5 mars 2017



www.macval.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage, le 16 septembre 2016.

1971_Morgane-Tschiember1971_Morgane-Tschiember1971_Morgane-Tschiember

Légendes de gauche à droite :
1/  Morgane Tschiember, Running Bond 4 (détail), 2009. Parpaings, mortier, pigments. 700 X 240 X 10 cm. © ADAGP. Courtesy galerie Loevenbruck. Vue de l’exposition, «Sculpteurs de trottoirs, Autour de l’oeuvre de Raymond Hains», Centre d’Art le Quartier, Quimper, 2009. Tous droits réservés.
2/  Morgane Tschiember, Rolls, 2012. Inox, peinture à l’huile et acrylique. 80 x 200 x 50 cm. Collection Les Abattoirs - Frac Midi Pyrenées, Toulouse. © ADAGP. Courtesy galerie Loevenbruck, Paris. Photo Fabrice Gousset.
3/  Morgane Tschiember, Swing 2012. Acier et peintures laquées. 8 x 11 x 20 m. Courtesy galerie Loevenbruck, Paris. © ADAGP. Courtesy galerie Loevenbruck, Paris / CRAC Languedoc-Roussilon, Sète. Photo Marc Domage.

 


1971_Morgane-Tschiember audio
Interview de Morgane Tschiember,
par Anne-Frédérique Fer, à Vitry-sur-Seine, le 16 septembre 2016, durée 11'04". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat : Alexia Fabre , Conservatrice en chef



Pour la rentrée, le MAC VAL invite l’artiste Morgane Tschiember à occuper la Nef du musée, à imaginer un environnement immersif pour une expérience de la matière (du sable, donnant la brique et le verre), de la couleur (oscillant dans l’ombre et la lumière), du mouvement (celui de l’air, des corps) et enfin, surtout de l’espace, révélé notamment par la bande sonore composée par Fred Léonard pour accompagner le mouvement du visiteur.

Suivant un processus de travail empirique, Morgane Tschiember modèle le musée pour en révéler les qualités intrinsèques (lumière, espace, circulation) et ouvrir en son sein un espace de perception visuelle et physique sous forme d’une installation monumentale prétexte à la déambulation. Nourrie de philosophie, et notamment de la pensée de Jacques Derrida ou encore de René Descartes, dont l’essai Les Météores lui a inspiré le titre de l’exposition, Morgane Tschiember s’intéresse aux glissements opérés entre la physique et la métaphysique, entre les phénomènes naturels et leurs interprétations infinies élaborées par l’être humain pour les comprendre.

Morgane Tschiember est artiste, sculpteur mais aussi peintre, presque à son corps défendant. Elle est beaucoup de choses et c’est pour cela que son oeuvre et sa force vitale impressionnent et nous entraînent. Elle n’a peur de rien, elle prend à bras le corps les matériaux, les formes, les espaces et les couleurs. Invitée à créer une oeuvre dans l’impressionnant volume de la Nef du MAC VAL, Morgane Tschiember a désiré rendre à l’espace sa vérité, sa lumière et sa réverbération, avant de se lancer dans un projet d’invention de formes et d’occupation de l’espace. C’est une salle d’exposition que nous sommes souvent tentés d’éteindre, pour neutraliser son immensité et le mettre ainsi à notre mesure, parfois à la faveur d’oeuvres nocturnes. C’est justement cette respiration, la révélation de cette vastitude que Morgane souhaite prendre, dévoiler et rendre à la lumière et au public ! Situées plein ouest, les baies vitrées inondent l’espace de soleil, le rendant ainsi changeant, perméable aux variations de la lumière, sensible aux heures du jour, aux saisons et au cycle du temps. C’est dans le désir de nouer un lien à la vie que réside l’oeuvre de Morgane Tschiember, « Six soleils ». […]

Elle a « inventé » un matériau, un matériau de l’industrie, ni encore reconnu ni validé par le monde de l’art : du sable aggloméré, du temps sédimenté, des particules du sol, de la Terre en poussière. […] Elle en fait des murs, qui serpentent et s’élèvent, cherchant un itinéraire comme une ville qui s’étend, aussi haut que possible. On voit à travers. Cachées, masquées, retirées derrière les moucharabiehs, des générations de femmes n’ont vu le monde qu’en détails et en morceaux, découpés par le dessin de marbre, de plâtre ou de bois. Leur vision était tronquée, limitée, réduite à ce que l’architecture des hommes leur laissait comme espace - de vision. […]

OEuvre éphémère par essence, les murs tomberont, mais l’oeuvre survivra, riche de ses promesses à venir et de sa force vitale, dans la mémoire et les souvenirs de ceux qui auront vécu, « cette pure intensité tactile qu’est la lumière en flots sur notre visage offert – notre visage vu par elle comme par une mère qui nous enfante »1.

Si le travail de sculpteur de Morgane Tschiember est profondément ancré dans la matière, dans ce qui existe, ce qui se touche, se façonne, se fabrique ou se manipule, son oeuvre est aussi empreinte de ce qui la dépasse, d’une dimension spirituelle qui irrigue sa culture personnelle comme sa nature. […]

Depuis les origines de son travail entamé dès ses études aux Beaux-arts de Quimper puis de Paris, elle fait image de la matière, de la forme et de la couleur. La photographie l’attire mais c’est la troisième dimension qui l’emporte car y réside le véritable rapport au monde, fait de matière, de tentatives, d’expériences, de mouvement, de vérification de sa présence même au présent, dans l’instant.

En construisant des murs, en tordant des tôles, en dansant devant les toiles d’Ellsworth Kelly2, en chauffant l’acier ou encore en coulant le béton, Morgane est présente dans ce corps à corps avec l’espace-temps par la chorégraphie de ses gestes et de ses déplacements comme par la dimension spirituelle de chacun de ces rituels de fabrication des oeuvres.


1. Didi-Huberman, Georges, Phasmes, essais sur l’apparition, « Celui qui inventa le verbe « photographier », Tome 1, Paris, éditions de Minuit, 1998, p.54
2. Three Movements, Happening. New York, Museum of Modern Art – 2009