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“David De Beyter” Build and Destroy
au Centre Photographique d’Île-de-France, Pontault-Combault

du 9 octobre au 18 décembre 2016 (prolongée du 4 au 15 janvier 2017)



www.cpif.net

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse avec David De Beyter, le 7 octobre 2016.

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Légendes de gauche à droite :
1/  David De Beyter, Just a good crash (film still), no limit, 2015. © David De Beyter.
2/  David De Beyter, Auto Sculpture I, tirage argentique, 120x150 cm, 2015. © David De Beyter.
3/  David De Beyter, Just a good crash (film still), last time. © David De Beyter.

 


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Interview de David De Beyter,
par Anne-Frédérique Fer, à Pontault-Combault, le 7 octobre 2016, durée 10'10". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

L’exposition

C’est à une déambulation dans une installation immersive que David De Beyter invite le visiteur qui, au gré de son parcours, approche par fragments un univers où le son de la tôle froissée, le crépitement du feu, l’éclat des flammes ou encore le brouillage des écrans de fumée viennent interroger une certaine fascination pour la catastrophe et la destruction.

Ce projet s’appuie sur le « Big Bangers », une pratique populaire de destruction de voitures mise en oeuvre par des communautés que l’on retrouve dans le Nord de la France, en Belgique et au Royaume-Uni.

Celle-ci consiste à provoquer des chocs violents de véhicules, de «good crash», dont l’unique gain/motivation serait le spectacle de la destruction et la contemplation de son résidu, l’épave, ou selon le terme des amateurs de cette communauté une «auto-sculpture».

David De Beyter est un jeune artiste, dont la recherche, très informée par l’histoire de l’art, est centrée sur la question du paysage. Son approche, ses points de vue et la grande précision technique de ses photographies confèrent à ces réalités un caractère fantastique et énigmatique.

Au-delà de la transfiguration du paysage par cette pratique, c’est au geste et à sa portée, que David de Beyter s’intéresse. L’artiste mène une véritable enquête esthétique et anthropologique, en questionnant les enjeux à l’oeuvre dans cette expérience de la destruction et les traces que ses amateurs produisent et conservent.

Elargissant son emploi de la photographie au film, au fanzine et à la sculpture, David de Beyter propose avec Build and Destroy, une lecture éclatée d’une pratique culturelle singulière, une hypothèse de représentation qui se ferait l’écho d’une société qui produit ses propres ruines.

L’exposition au CPIF, qui synthétise les deux volets présentés précédemment au BBB centre d’art (Toulouse) et au Centre d’art Image/Imatge (Orthez), présente un ensemble de séquences filmiques, de photographies, d’objets-traces ou monuments, d’assemblages de documents, dont plusieurs inédites … s’offrent comme autant d’éclats d’un choc provoqué.




Le projet par David De Beyter

Big Bangers ou pratique populaire de la destruction

Ma première rencontre avec l’auto-cross eut lieu lors d’une déambulation photographique en septembre 2012 sur le territoire des Flandres, française et belge. Attaché depuis longtemps à ce paysage où se côtoient collines et plaines, et qui me renvoie à l’imaginaire de la peinture du romantisme allemand mais aussi aux tableaux de la peinture flamande, de Joachim Patinir à Pieter Breughel, en passant par Jérôme Bosch, je cherchais alors une façon de traiter de ces paysages dans mon travail personnel.

Il s’est offert à mes yeux ce jour-là, non loin de Kemmel en Belgique, une scène atypique, tout droit sortie d’un fantasme. Une voiture tournait à toute vitesse dans un champ, à proximité de la route, sans but apparent. Elle y creusait le sol en formant un cercle infini. Hypnotique, ce mouvement circulaire tombait pour moi dans le registre du Land Art, comme une intervention volontaire sur le paysage, la volonté d’inscrire une trace, un tracé même, de sculpter dans la matière même du paysage. Ce geste sculptural semblait réunir des notions qui habitent ma recherche artistique depuis toujours, et notamment la manière dont l’homme investit le territoire qu’il habite et construit des paysages.

L’auto-cross, et par la suite le« Big Bangers »,se sont très vite imposés à moi comme motif principal pour aborder ce territoire, un point de bascule entre deux imaginaires à la fois proches et lointains, celui de la peinture flamande avec sa représentation du désordre et du chaos, et celui des films d’anticipation mettant en scène l’apocalypse, ou une vision chaotique du futur, comme« Blade Runner »,ou « Terminator ».

L’auto-cross est une pratique amateur de courses de voitures, dans laquelle les chocs entre concurrents sont permis et même recherchés. Ce sport populaire a donné naissance à des pratiques indépendantes, où des passionnés se retrouvent dans des champs, notamment sur le territoire des Flandres, comme pour un combat clandestin.

Le « Big Bangers », dérivé de l’auto-cross, est plus encadré, car se pratiquant, en Belgique en tout cas, sur un circuit privé (situé à Ploegsteert). Mais le « Big Bangers » est aussi beaucoup plus violent. Il n’y a en soit d’autre but que la destruction atteignant son paroxysme lors des sessions «Unlimited Bangers». Même en compétition, ce sport amateur n’engendre aucun gain pour les participants. L’enjeu pourrait se résumer en une phrase, celle annotée sur le capot d’une Jaguar que j’ai récupérée. «Not for a trophy but a good crash».

Le « Big bangers » est aussi une communauté que j’ai depuis progressivement intégrée. Chacun pratique l’auto-cross à sa façon, certains se servant parfois des champs et des plaines comme lieu d’entraînement. La fréquentation des membres de cette communauté m’a permis de comprendre que le « Big bangers » est une philosophie de vie dédiée au spectacle de la destruction.




Démarche de l’artiste

Le travail artistique de David De Beyter se situe à la croisée de la sculpture et de l’image. Ancré principalement dans une recherche photographique sur la représentation du paysage, celui-ci tend aujourd’hui à s’ouvrir par l’utilisation de la vidéo, de l’installation et de la sculpture vers un questionnement sur l’archive et l’histoire, et sur les limites qui se posent entre architecture-sculpture et paysage.

Par une forme d’historiographie centrée sur le paysage et l’architecture, sa pratique s’attache à construire un répertoire de formes. A la fois référencées et fantasmées, suspendues entre réalité et fiction, celles-ci convoquent entre autre l’imaginaire scientifique et utopique, celui de la guerre froide, mais aussi de la peinture flamande et du romantisme allemand.

L’architecture y est envisagée comme une composante formelle du paysage, issue d’une réflexion historique et théorique sur les rapports qu’entretiennent l’habitat et le paysage.

Les paysages que David De Beyter saisit ou qu’il construit, se révèlent souvent silencieux. L’épuration visuelle de ses photographies accentue le caractère à la fois élémentaire et primitif de ses sujets, qui entretiennent par leur situation ou leur histoire un lien étroit avec la forme de l’utopie.