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“Plus jamais seul” Hervé Di Rosa et les arts modestes
à la maison rouge, Paris

du 22 octobre 2016 au 22 janvier 2017



www.lamaisonrouge.org

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 21 octobre 2016.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Hervé Di Rosa, Tienda del Senor Maguey, 2000. Acrylique sur toile, 220 x 246 cm. © Adagp / Pierre Schwartz.
2/  Hervé Di Rosa, El manto grande, 2013. Acrylique sur bois, 60,5 x 121 x 7 cm. Collection Antoine de Galbert. © Adagp / Pierre Schwartz.

 


texte de Sylvain Silleran, rédacteur pour FranceFineArt.

 

Ce n'est pas seulement le travail de Hervé Di Rosa qui est exposé à la Maison Rouge, mais son univers, fait de voyages, de rencontres, de partage. Les œuvres de l'artiste se mélangent à des centaines d'objets glanés ici et là, jusque sur des étagères colorées où tout se confond dans un anonymat festif. Au visiteur de retrouver les sculptures de Di Rosa dans un grand jeu de 'où est Charlie ?'

Des robots top models, des dieux hindous, des masques, des catcheurs mexicains et des madones-cyclopes aux trois yeux superposés peuplent un monde de comics, de films de série B, une science fiction vernaculaire mâtinée de folklore religieux. Sur cette planète s'opère la réunification entre l'artiste et ses influences, la séparation entre celui-ci et le monde se voit effacée. La création n'est pas tant un acte isolé mais une interaction constante, consistant à dévorer le monde pour le nourrir à son tour. Une pièce dédiée au Musée International des Arts Modestes, ou MIAM, créé par l'artiste, retrace le long des murs couleurs arc-en-ciel les diverses expositions qui y ont été hébergées. S'y côtoient un piano à tricoter de Michel Gondry, un élément du décor de l'émission Groland, des Shadoks, un crustacé extra-terrestre géant, un poster de cinéma peint à la main du Ghana...

Le travail de Hervé Di Rosa étourdit comme un numéro de cirque, son sourire ironique prend parfois l'allure d'un rictus inquiétant. Mais la générosité réconfortante qui s'en dégage finit toujours par apaiser, en désamorçant la gravité du discours par une dernière pirouette espiègle.

Lors de ses voyages, l'artiste rencontre peintres, sculpteurs et artisans locaux, travaille avec eux et s'approprie cultures et techniques locales. Ses tableaux africains sont inspirés de l'art de l'enseigne peinte. Au Vietnam, il réalise un paravent laqué où son personnage se perd dans une jungle d'animaux de nacre et de coquilles d'œuf. En Bulgarie, son icône dorée est une ville attaquée par des aliens ricanants dans leur vaisseau spatial. Toutes les techniques populaires sont explorées : images faites en sequins et perles, tissages ronds en fils téléphoniques, tissus découpés.

Une impressionnante collection de jouets et figurines, embouteillages de voitures, d'avions ou de soucoupes volantes devient au fil des salles une gigantesque armée de personnages de bandes dessinées. Cette masse presque liquide, multicolore comme une coulée de lave pop, semble échappée des grandes toiles où combattent super héros et mutants dans une grande parade guerrière de carnaval.

Puis le calme se fait au fond d'un océan psychédélique. Poissons, pieuvres, crevettes et baleines d'acrylique aux sourires dentifricés dialoguent avec leurs homologues, de chair et d'arêtes ceux-ci, évoluant dans le doux ronflement d'un aquarium.

Une réplique de l'atelier de Di Rosa présente ses innombrables publications. Des fauteuils dans un angle, un téléviseur diffusant des dessins animés créent une ambiance d'intimité. Les murs disparaissent sous des rayonnages montant jusqu'au plafond, remplis de livres, de bandes dessinées. Des piles de magazines, des empilements de boîtes remplies de figurines submergent le travail de l'artiste sous une cacophonie de fanfare. L'œuvre de Hervé Di Rosa devient alors modeste, comme son appellation l'indique, elle s'intègre dans le flux incessant des cultures populaires, ne souhaitant pas dominer mais jouer, ensemble.

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

Plus jamais seul, Hervé Di Rosa et les arts modestes, poursuit le cycle des expositions de La maison rouge consacré aux collections privées. Après Arnulf Rainer en 2005 et Jean-Jacques Lebel en 2010, la fondation invite pour la troisième fois un artiste à mettre en regard son travail avec les oeuvres et objets qu’il a collectés.

Figure incontournable de la scène artistique et acteur majeur de la Figuration libre, Hervé Di Rosa (né à Sète en 1959) s’est engagé à partir des années 1980 dans la reconnaissance de l’art modeste qu’il définit lui-même comme « proche de l’art populaire, de l’art primitif, de l’art brut mais ne s’y réduit pas. Il est autant composé d’objets manufacturés que d’objets uniques, pour la plupart sans grande valeur marchande mais à forte plus-value émotionnelle. Les amateurs se retrouvent au-delà du regard critique, de la notion du bon ou du mauvais goût, de la rigueur esthétique, dans un sentiment de bonheur éphémère et spontané, aux parfums de souvenirs d’enfance et de plaisirs simples et non théorisés ». En 2000, il fonde à Sète le MIAM (Musée International des Arts Modestes) qu’il préside depuis et dans lequel il dévoile exposition après exposition les multiples facettes de cet art modeste.

L’exposition de La maison rouge, qui couvre les développements du travail d’Hervé Di Rosa depuis le début des années 1980, met en évidence la place centrale de cet art qui l’accompagne dans sa démarche.

Si la peinture de Matisse, Picabia ou Dubuffet a pu l’intéresser et l’inspirer, les références à la bande-dessinée, aux fanzines et aux dessins animés, ont elles aussi imprégné son travail. Ce recours à une imagerie colorée et illustrative, et la reprise des codes de la bande dessinée, le feront connaître du grand public, avec ses compagnons d’alors, Robert Combas, François Boisrond et Rémi Blanchard, comme les tenants de la Figuration libre. Grand amateur de BD, Hervé Di Rosa possède une bibliothèque de plusieurs milliers de titres. Ces ouvrages et les figurines qui en sont dérivées et qu’il collectionne, tapissent littéralement les murs de son atelier parisien.

Chez Hervé Di Rosa la pratique artistique est aussi indissociable du voyage et, des oeuvres, objets d’art et savoir-faire qu’il rencontre ou collecte lors de ses périples. Il s’en nourrit, élabore de nouvelles techniques et produit de nouvelles formes : peinture à la tempera et à la feuille d’or à Sofia en Bulgarie, bas-reliefs en bois et bronze à la cire perdue à Foumban au Cameroun, peintures sur bois à Kumasi au Ghana, arbres de vie au Mexique, laque au Vietnam… L’exposition présente une sélection de ces réalisations et les associe pour certaines aux productions dont elles sont issues.

Au-delà de son caractère rétrospectif, le parcours de l’exposition s’attache ainsi à faire découvrir les multiples collections entreprises par Hervé Di Rosa et témoigne de leur rôle capital dans son travail.