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“L’Afrique des routes” article 2069
au musée du quai Branly, Paris

du 31 janvier au 12 novembre 2017



www.quaibranly.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 30 janvier 2017.

2069_Afrique2069_Afrique2069_AfriqueLégendes de gauche à droite :
1/  Binoche et Giquello, Statue féminine, Côte d'Ivoire, Ethnie : Attié. Bois dur, or, laiton, corail, verre, noix de coco, fibres végétales, coton, 44 cm. © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Claude Germain.
2/  Anonyme, Photographie prise lors de l’"Exposition soudanaise" au Champs de Mars en 1895. Des spectateurs observent un groupe de trois personnes assis près d'un mur. Tirage sur papier aristotype, 13 x 18 cm, France. © musée du quai Branly - Jacques Chirac.
3/  Masque cimier, Guinée, Ethnie : Baga (population). Oiseau fiché ds socle rond, portant sur son dos, deux petits oiseaux semblables, deux femmes et un homme vêtu à l'européenne, les mains posées sur une petite Nimba. Bois dur polychromé, noir (enduit résineux), ocre rouge foncé, blanc, bleu indigo ; haut 60,5 cm ; larg 23,5 cm ; long 37 cm. Bois polychrome, 34,5 x 28 x 44 cm, 2245 g. © musée du quai Branly - Jacques Chirac, photo Patrick Gries.

 


2069_Afrique audio
Interview de Catherine Coquery-Vidrovitch, commissaire associée de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 30 janvier 2017, durée 16'15". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat :
Gaëlle Beaujean, Responsable des collections Afrique au musée du quai Branly - Jacques Chirac
Conseillère scientifique :
Catherine Coquery-Vidrovitch, historienne spécialiste de l'Afrique et professeur émérite à l'Université Paris Diderot Paris 7




Aux origines de l’humanité, l’Afrique a constamment échangé avec les autres continents. Elle n’a pas seulement fourni sa force de travail, son or et ses matières premières depuis des millénaires, mais aussi ses savoir-faire et ses cultures constamment remodelés. Son histoire est inscrite dans les dynamiques mondiales. Panorama d’un continent au carrefour des mondes, à contre-courant des idées reçues.

L’Afrique, un continent sans Histoire ? Si les a priori ont la vie dure, les faits, eux, sont indéniables : les Africains n’ont jamais vécu dans l’isolement. Longtemps ignorés, les échanges panafricains et extra-africains ont pourtant débuté voici des millénaires, bien avant l’arrivée des premiers navires portugais au 15e siècle, la colonisation et les indépendances.

En témoignent les quelques 300 sculptures, pièces d’orfèvreries ou d’ivoire, peintures et autre œuvres présentées dans l’exposition l’Afrique des routes. Inédite par son ampleur et la diversité des champs qu’elle aborde, l’Afrique des routes entend montrer que l’histoire de l’Afrique s’inscrit dans le temps universel depuis la Préhistoire a laissé de nombreuses traces. Du cinquième millénaire avant notre ère à nos jours, celle-ci évoque les routes fluviales, terrestres ou maritimes qui ont contribué à la circulation et aux contacts des hommes, des matériaux et des œuvres. De l’art rupestre du Sahara aux porcelaines chinoises de Madagascar, des cultes et rituels candomblé d’Amérique du sud aux œuvres contemporaines métissées du Nigérian Yinka Shonibare MBE, c’est le portrait d’un continent au cœur de l’histoire qui est ici dressé.




Parcours de l’exposition

L’Afrique a une Histoire.
Le problème idéologique auquel l’Occident est confronté renvoie à une définition obsolète mais néanmoins enracinée qui fait de l’écriture le point de rupture avec la préhistoire. Or le terme Histoire vient du mot grec enquête, et l’historien Marc Bloch a confirmé depuis longtemps qu’en histoire, tout est source. Cette histoire est la plus vieille du monde. Les spécialistes s’accordent aujourd’hui pour situer les origines de l’être humain en Afrique, au sud du Sahara. L’exposition met en lumière la circulation des cultures africaines au fil de l’histoire, à l’intérieur mais aussi vers l’extérieur du continent. Elle évoque différentes formes de routes : celles des villes, du commerce, des religions, des formes, de la colonisation et des objets. Non seulement les Africains ont constamment circulé dans leur continent, mais hommes et idées n’ont cessé d’échanger avec le reste du monde. Il n’a guère existé en Afrique d’isolat humain total. Contrairement aux idées reçus, l’Afrique a toujours été un continent ouvert.

1. Les routes et moyens de transports
Les routes terrestres, fluviales et maritimes ont naturellement favorisé des déplacements migratoires et des alliances transformants les cultures, diffusant les idées, les savoirs mais aussi les arts depuis des milliers d’années.

2. Les villes, jalons de routes
Routes et réseaux impliquent des centres urbains, sièges du pouvoir et de l’appareil d’État, aussi restreint fut-il. Les villes sont autant de jalons pour le commerce local, régional, interafricain voire international, terrestre et maritime. Chacun des grands tournants de l’histoire a permis la succession de types urbains particuliers : ancienneté des échanges interrégionaux (Djenne Jeno, Zimbabwe, Mbanza-Kongo), pénétration de l’Islam (Djenné, Tombouctou), concurrences indienne, arabe, et européenne (dans les villes swahili), découverte portugaise (Luanda), traites négrières (forts côtiers), conquête coloniale (Dakar, Nairobi)… – produisant jusqu’à nos jours des syncrétismes culturels en mouvement (Johannesburg), recomposés par les Africains acteurs de leur propre histoire.

3. Les routes commerciales
Depuis des millénaires, l’Afrique a commercé avec le reste du monde, recevant parfois, envoyant beaucoup. Les Africains ont toujours eu besoin de sel, échangé contre le fer et l’or. Les perles sont arrivées d’Orient depuis bien avant notre ère, et de Venise depuis le 15e siècle. L’ivoire Africain fut importé depuis l’Antiquité jusqu’en Occident ; les Chinois et les Indiens en ont fait grand usage. Le cuivre d’Afrique centrale a circulé, et plus encore l’or, recherché par le monde depuis l’Antiquité. Ces métaux, et ces objets – perles, manilles, coquillages (cauris), tissus artisanaux, ont servi de monnaie depuis toujours, des pièces d’or et d’argent ont frappées et servent d’ornements et de bijoux aujourd’hui.

4. Les routes spirituelles et relieuses
Les religions du terroir ont un fond commun : l’exigence d’intercesseurs – ancêtres, devins et sorciers – pour se concilier le monde surnaturel. Les esclaves ont exporté ces croyances aux Amériques. L’Afrique a aussi adopté les nouveautés offertes par les monothéismes : judaïsme et christianisme des origines ont laissé leur trace, les Arabes ont ensuite apporté l’Islam par le nord et par l’est dès le 9e siècle. Les religions du livre se sont massivement implantées depuis le 19e siècle. Ces options religieuses ont pu cohabiter pacifiquement jusque récemment malgré un certain nombre de heurts.

5. Les routes esthétiques
La forme et l’esthétique de cet ensemble d’œuvres révèlent différents type de routes : linguistique, migratoire ou encore technologique. Les poteaux funéraires en bois lient des cultures d’Afrique orientale à celles de l’Asie de l’Océan Indien. Les masques reflètent des pratiques communes au groupe linguistique nigéro-congolais, qui s’étend d’Afrique de l’ouest jusqu’aux bantous d’Afrique centrale et orientale. Les arts du métal au Nigeria renvoient aux connaissances de la forge partagées depuis plusieurs millénaires et qui impliquent les routes du fer, de l’étain, du zinc et du cuivre. Les sceptres et les cannes sculptés en bois concluent cette partie. Ces œuvres de prestige rassemblent des cultures qui, bien que réparties sur une distance de 2000 kilomètres, présentent un mythe historique commun.

6. Les routes coloniales
Du bateau à vapeur, au milieu du 19e siècle, au chemin de fer et aux pistes carrossables à la fin du 19e sicle, puis à l’avion au 20e siècle, les nouveaux modes de communication pénètrent de larges portions de territoires, auparavant peu concernées. En 1869, l’ouverture du canal de Suez accélère les rotations maritimes. L’exportation de matières premières nécessaires à l’industrie européenne compense la perte du marché esclavagiste : oléagineux tropicaux (arachides, huile de palme, coprah), clou de girofle, gomme arabique et bois de teinture utiles au textile. Des minerais précieux sont extraits au cœur de l’Afrique australe et centrale : diamant, or, cuivre. En échange, les produits manufacturés ruinent l’artisanat local, mais procurent aussi de nouveaux matériaux que les artisans incorporent avec créativité.

7. La nation des artistes
La connaissance de l’art africain a enrichi l’imaginaire et le vocabulaire des artistes modernes occidentaux. Inversement, des images, des objets et des enseignements artistiques partirent vers l’Afrique. De nouvelles techniques furent transmises, comme la peinture sur toile, la lithographie ou la photographie. À l’ère de la globalisation, en Afrique ou ailleurs, les artistes appartiennent à une même nation, s’exprimant dans le langage semblable mais chacun peut affirmer sa singularité. Des œuvres modernes et contemporaines, d’artistes africains et européens, nous invitent ici à sentir des formes et ds intentions confluentes.