contact rubrique Agenda Culturel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

“Dessiner le quotidien” La Hollande au Siècle d’or
au Louvre - Rotonde Sully, Paris

du 16 mars au 12 juin 2017



www.louvre.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage, le 15 mars 2017.

2111_Dessiner-quotidien2111_Dessiner-quotidien2111_Dessiner-quotidienLégendes de gauche à droite :
1/  Cornelis Dusart, La Marchande d’oublies. Plume et encre brune, lavis brun. 34 x 26 cm. Beaux-Arts de Paris. © Beaux-Arts de Paris, Dist. RMN-Grand Palais / image Beaux-arts de Paris.
2/  Hendrick Avercamp, Scène d’hiver. Gouache et aquarelle. 19,2 x 32,1 cm. Paris, Beaux-Arts de Paris. © Beaux-Arts de Paris, Dist. RMN-Grand Palais / image Beaux-arts de Paris.
3/  Rembrandt, Femme à la fenêtre. Plume et encre brune, lavis brun. 29,5 x 16,44 cm. Paris, musée du Louvre, département des Arts graphiques. © RMN-Grand Palais (musée du Louvre) / Gérard Blot.

 


2111_Dessiner-quotidien audio
Interview de Emmanuelle Brugerolles et Olivia Savatier, commissaires de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 15 mars 2017, durée 10'38". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaires de l’exposition :
Emmanuelle Brugerolles, conservateur général du patrimoine en charge des dessins, Beaux-Arts de Paris
Olivia Savatier Sjöholm, conservateur du patrimoine, département des Arts graphiques, musée du Louvre.




Conçue en contrepoint de l’exposition « Vermeer et les maîtres de la peinture de genre » (présentée au Louvre du 22 février au 22 mai 2017) et organisée en partenariat avec les Beaux-Arts de Paris, l’exposition explore le foisonnement des motifs tirés de la vie quotidienne dans la production graphique des artistes hollandais du Siècle d’or –  qu’ils soient peintres de genre, paysagistes, portraitistes ou même peintres d’histoire. Ces représentations du quotidien participent de la construction visuelle et identitaire de la jeune République hollandaise.

La sélection d’une centaine de feuilles issues des collections publiques françaises –  de Rembrandt, Van Goyen, Van Ostade ou encore Buytewech  – rend compte de la grande diversité mais aussi de la codification des sujets mettant en scène le quotidien hollandais du XVIIe siècle (vie domestique, petits métiers, divertissements, scènes militaires ou paysannes…). Elle met en lumière la complexité de leur rapport au réel, entre observation et reconstruction, impression d’instantané et conventions de représentation.



L’exposition se déploie autour de deux mondes distincts :

- Le monde des villes : les artistes puisent dans leur environnement urbain des motifs qu’ils saisissent sur le vif ou peu après l’observation. Rembrandt est un pionnier de cette nouvelle pratique, dessinant les personnes de son entourage mais aussi des mendiants croisés dans les rues d’Amsterdam. Outre les scènes de rues, les dessins présentés ici permettent de découvrir les intérieurs urbains, lieux de divertissement mais aussi d’une vie domestique érigée par la religion protestante en temple de la vertu. En marge de ce monde citadin, l’univers militaire donne lieu à des représentations spécifiques qui remportent un grand succès.

- Le monde rural : la ville de Haarlem est le principal foyer du « genre paysan » avec pour chef de file Adriaen van Ostade, suivi de ses nombreux élèves. Dans l’oeuvre de ces talentueux dessinateurs, les ruraux sont réduits à des « types » traditionnels : le paysan, le colporteur, le musicien ambulant… Ils apparaissent comme des êtres mal dégrossis, s’adonnant à la boisson, au tabac et au jeu. Le milieu du XVIIe siècle marque toutefois un tournant dans l’évocation des mœurs paysannes. Les scènes d’auberge deviennent paisibles et joyeuses tandis que les intérieurs domestiques célèbrent la vertueuse simplicité de leur existence.



Parcours de l’exposition

Introduction

Dans les Provinces-Unies en guerre pour leur indépendance, les représentations de la vie quotidienne revêtent un enjeu particulier, celui de la construction identitaire, par l’image, de la jeune nation hollandaise. La centaine de dessins des collections publiques françaises présentée ici dresse le portrait d’un pays aux multiples facettes, du monde des villes à celui des campagnes, des plaisirs triviaux des tavernes à la quiétude des intérieurs domestiques, des mendiants errants aux joyeuses scènes de patinage et de kermesse… Entre impressions instantanées et conventions de représentation, ces dessins relèvent d’une observation sur le motif mais aussi d’un patient travail de reconstruction au sein de l’atelier, pour l’élaboration de compositions destinées à un marché de l’art florissant.


1.Le monde des villes
La Hollande est au 17e siècle l’une des régions les plus urbanisées d’Europe. Plus de la moitié de la population réside en ville. Les cités, de taille moyenne, sont nombreuses et proches les unes des autres. Les artistes puisent dans leur environnement urbain des motifs qu’ils saisissent sur le vif ou retranscrivent peu de temps après les avoir observés. Dès le début de sa carrière, Rembrandt, qui s’affirme comme un pionnier de cette nouvelle pratique, dessine les personnes de son entourage mais aussi des mendiants croisés dans les rues d’Amsterdam. À l’opposé de ces vagabonds, les jeunes gens élégants retiennent quant à eux l’intérêt des dessinateurs haarlémois autour de Willem Buytewech. Ces différentes classes sociales se rencontrent à l’occasion des jours de fête ou de marché ou encore des jeux de patinage sur les lacs et les rivières gelés, comme en témoignent les scènes d’Hendrick Avercamp.

Travail et vie domestique
Les scènes de la vie domestique apparaissent dans l’oeuvre graphique de Rembrandt dès les années 1630, avant de devenir un leitmotiv de l’art hollandais dans la seconde moitié du siècle. Les figures sont souvent placées à la jonction entre l’espace public et l’espace privé, au moment où prend forme le concept de l’univers domestique comme lieu de l’intimité. À l’intérieur des demeures urbaines, une pièce est parfois consacrée au travail du chef de famille, qu’il relève d’une profession intellectuelle, artisanale ou artistique. Le rôle de la femme est de soigner et éduquer les enfants et de superviser le travail des servantes.

Divertissements
Les intérieurs urbains sont aussi le théâtre d’un certain nombre de divertissements. Ceux de la jeunesse dorée hollandaise, qui se réunit dans de riches demeures pour converser ou faire de la musique, sont raffinés et galants, comme dans les oeuvres de Caspar Netscher. Ils contrastent avec les plaisirs plus triviaux offerts dans les tavernes ou les maisons closes, souvent évoqués par les artistes hollandais à la suite des caravagesques d’Utrecht, tel Honthorst.

Le Monde Militaire
Dans un pays en conflit permanent, contre l’Espagne jusqu’en 1648, puis contre l’Angleterre et la France, les scènes militaires font l’objet d’un marché florissant. Elles représentent tous les aspects du quotidien des soldats et des officiers : l’entraînement, les longs jours d’attente entre les combats et les moments qui précèdent ou qui suivent immédiatement ceux-ci. Palamedesz ou Ter Borch se sont spécialisés dans ce type de scènes, appelées corps de garde.


2.Le monde rural
Parmi les peintres de genre hollandais du 17e siècle, un certain nombre se spécialise dans la représentation du monde paysan. Ils sont, pour une grande part, actifs à Haarlem où Van Ostade et ses élèves, en particulier son frère Isaac, Cornelis Dusart et Cornelis Bega, développent leurs talents dans ce domaine, aussi bien en peinture qu’en dessin. Les villes d’Amsterdam, de Rotterdam et de La Haye assistent également à l’essor de ce type de productions. Les ruraux y sont représentés comme des êtres mal dégrossis, incapables de contrôler leurs vils instincts et, pour cette raison, s’adonnant à la boisson, au tabac et au jeu. Cette satire des moeurs paysannes était destinée à amuser une clientèle essentiellement urbaine tout en lui tendant un miroir inversé. Conscients de se distinguer par leur éducation et leur civilité, les citadins se voyaient ainsi confortés dans leur sentiment de supériorité sociale.

Le monde rural au travail
Le monde rural dépeint dans les oeuvres présentées ici n’est pas uniquement paysan. Dans les Pays-Bas du Nord au 17e siècle, une part croissante de la population vit de travaux non agricoles, comme la pêche, le transport des marchandises et des passagers ou la construction navale. Ces multiples activités sont mieux décrites par les paysagistes – qui sillonnent les campagnes pour dessiner d’après nature – que par les peintres de genre. Ces derniers perpétuent des conventions de représentation qui individualisent des figures rurales réduites à des « types » : le paysan, le colporteur, le musicien ambulant…

Marginaux et indigents
En marge de la société rurale se développe une population itinérante, composée de colporteurs, de musiciens ambulants, de bohémiens et autres vagabonds. Vivant dans une grande précarité, ils sont chassés des villes et parcourent les campagnes, offrant leurs menus services et se livrant à la mendicité. Souvent représentés par les artistes hollandais du Siècle d’or, ils fascinent autant qu’ils terrifient. Ils apparaissent parfois comme d’inquiétants personnages, aux postures outrées et aux visages grimaçants. Figures incontournables des kermesses et des foires, ils en assurent le caractère pittoresque et dynamique.

Vie domestique
À la fin des années 1640, un nouveau thème apparaît chez les peintres de genre, celui de la célébration de la vie domestique et familiale. Adriaen van Ostade, suivi de près par Cornelis Visscher, est l’un des premiers à explorer ces sujets, avant même leur floraison dans la peinture de genre bourgeoise. Leurs oeuvres marquent alors un tournant dans la représentation des paysans, louant la vertueuse simplicité de leur vie domestique.

Scènes d’auberge
Actif à Haarlem dans la seconde moitié des années 1620, le Flamand Adriaen Brouwer renouvelle le genre paysan en transposant dans l’univers des tavernes les scènes de débauche empruntées aux kermesses de Pieter Bruegel. Il est suivi dans cette voie par Adriaen van Ostade et ses élèves. À partir du milieu du siècle, si les paysans sont toujours traités comme des « types » caricaturaux, leur comportement s’assagit et leur existence apparaît comme insouciante et joyeuse. Ces changements accompagnent un mouvement plus vaste d’idéalisation de la vie rurale dans la littérature et dans le mode de vie des élites, qui acquièrent des résidences d’été à la campagne.