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“Michel Journiac” L’action Photographique
à la Maison Européenne de la Photographie, Paris

du 20 avril au 18 juin 2017



www.mep-fr.org

 

© Anne-Frédérique Fer, visite de l'exposition avec Françoise Docquiert et Pascal Hoël, le 18 avril 2017.

2135_Michel-Journiac2135_Michel-Journiac2135_Michel-JourniacLégendes de gauche à droite :
1/ Michel Journiac, Icône du temps présent. L’offrande, 1985. Emulsion gélatino-argentique sur toile, gouache blanche et dorure. © Michel Journiac / ADAGP. Collection Maison Européenne de la Photographie, Paris.
2/ Michel Journiac, L’inceste, N°1 : fils-fille-amante / filsgarçon-amant / fils-voyeur, 1975. Issu d’un polyptique de neuf photomontages. Tirages gélatino-argentiques sur carton. © Michel Journiac / ADAGP. Collection Maison Européenne de la Photographie, Paris.
3/ Michel Journiac, Rituel du sang. Rencontre de l’homme / Rencontre de la femme, 1976. Transfert photographique et technique mixte sur toile. © Michel Journiac / ADAGP. Courtesy Galerie Christophe Gaillard.

 


2135_Michel-Journiac audio
Interview de Françoise Docquiert, co-commissaire de l'exposition
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 18 avril 2017, durée 19'06". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaires de l’exposition : Françoise Docquiert et Pascal Hoël
conseiller : Jacques Miège




« Toute création naît de la distance, de la marge et nous renvoie à ceux qui ont renié les dogmes ou les morales subies, les idéologies reconnues, dans l’engagement du vécu… Prendre les moyens même du réel, piéger le signifié en constat de signifiant, faire de l’objet, du donné sociologique et du corps, le langage de la création. Refuser la pratique des chiens de garde de la bourgeoisie et tenter de créer leur propre pratique signifiante, aborder le projet d’une nouvelle sémantique, au delà des codes imposés et des ratiocinations sur une toile usée jusqu’à la corde. Dresser à l’aide d’un vocabulaire commun à tous, la présence interrogative d’une révolte née du sang, qui par-delà les censures, ayant prise sur l’aujourd’hui, pourrait être la première approche d’une révolution culturelle. » Michel Journiac “De la censure à la révolution culturelle” paru dans arTitudes, Mars 1972.



Personnage clé de la scène artistique des années 1970 et 1980, artiste et enseignant, initiateur, notamment avec Gina Pane et Vito Acconci, de l’art corporel en France, Michel Journiac, disparu en 1995 à l’âge de soixante ans, est aujourd’hui reconnu comme une source d’inspiration pour de nombreux artistes.

L’exposition réunit plus d’une centaine d’oeuvres originales réalisées entre 1969 et 1994, et recouvre les grandes thématiques de l’artiste : les Pièges, les Rituels, les Contrats et les Icônes.

Les pratiques de Michel Journiac se tournent essentiellement vers le corps et plus particulièrement le sien qu’il nomme « une viande consciente socialisée ». Poésie, Installations, photographies, sculptures, performances parodiant des rituels religieux ou sociaux, il s’interrogeait sur les jeux d’identité et remettait en question la morale, la sexualité ou le sacré.

Messe pour un corps, 1969, Hommage à Freud, 1972, Piège pour un travesti, 1972, 24H de la vie d’une femme, 1974, L’inceste, 1975, Le vierge Mère, 1983, Les icônes du temps présent, 1988, Rituel de transmutation du corps souffrant au corps transfiguré, 1994… Ses oeuvres constituent un vocabulaire critique, un alphabet nouveau énonçant une mise en accusation sociologique régissant l’acte artistique. Dans une approche qui délaisse l’esthétique, il écrit une nouvelle histoire de l’art résolument subversive.

C’est par la photographie qu’il conserve en grande partie les traces de ces actions. Journiac la veut active et agissante. Dans toutes ses pièces, l’action photographique devient une sorte de parachèvement de la démarche laissée en suspens. Les séries fonctionnent comme un tout et permettent un archivage plastique et complet de l’acte créateur. Sa photographie pose alors les questions du vouloir, de la décision, de l’exposition et du rapport à l’autre, le plus souvent, avec une dialectique de la revendication.

Journiac en est l’initiateur, le prétexte, l’instrument. Au départ un projet : mettre en situation des situations bousculant les codes de la bienséance de l’époque - l’inceste, l’homosexualité, le travestissement, le voyeurisme - tout en s’attachant à des sujets de la vie ordinaire: la famille, la femme au foyer ou la religion. Les clichés n’opèrent plus simplement comme des repères structurants mais au contraire, comme des éléments perturbateurs. La mort, la perte, l’absence s’inscrivent en permanence dans ses images à travers ce dessaisissement du sujet. Ses photographies font revivre le corps, l’authentifient, lui redonnent un sens politique en y infiltrant même une mémoire collective des marges.

Revendiquant la singularité de sa démarche, Journiac se veut responsable et actif de l’existence dans l’image de ceux devant qui il s’est trouvé quand il a appuyé sur le déclencheur. Mais est-ce Journiac qui déclenche le cliché ? La plupart du temps non. Il est bien le metteur en scène des images qu’il fabrique dans la totalité de leur contenu, il en endosse la responsabilité mais il n’a que faire de l’exécutant. Le preneur de vue est secondaire. Ainsi la question de l’auteur est déplacée vers celle de l’acteur.

De même, ses titres vont à l’essentiel des images, rien de superflu : les Substituts, Hommage à Freud, L’inceste, 24h de la vie d’une femme, Rituel du sang, Rituel pour un autre, Rituel pour un mort… Journiac énonce simplement ses intentions, laissant à l’image sa force originelle.

Prophétique, son oeuvre dégage une véritable énergie poétique, privilégiant l’écart, l’affût, le saut de côté, motivée par un état d’esprit totalement émancipé et libre. Elle apparaît aujourd’hui comme contemporaine, tant sa démarche et ses oeuvres vibrent encore dans le quotidien qui est le nôtre.


Un livre, publié aux éditions Xavier Barral, accompagne l’exposition.