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“Le Rêve des formes” Art, Science, etc.
au Palais de Tokyo, Paris

du 14 juin au 10 septembre 2017



www.palaisdetokyo.com

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 12 juin 2017.

2175_Reve2175_Reve2175_ReveLégendes de gauche à droite :
1/  Annick Lesne et Julien MozziconacciHuman Genomics I, 2017. Courtesy Annick Lesne et Julien Mozziconacci.
2/  Damien Cadio, Chewing Gum à l’aluminium, 2012. Huile sur toile, 24 x 30 cm. Collection privée, Belgique. Courtesy de l’artiste & Galerie Eva Hober, Paris.
3/  Julian Charrière, Polygon II, 2015. Photographie noir et blanc, double exposition sur papier baryte, strates thermonucléaires, 150 x 180 cm. Courtesy Galerie Bugada & Cargnel (Paris). Photo : Julian Charrière. © ADAGP, Paris 2017.

 


2175_Reve audio
Interview de Claire Moulène, co-commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 12 juin 2017, durée 9'27". © FranceFineArt.

 


Dans le cadre du Prix Swiss Life à 4 mains,
SMITH & Antonin-Tri Hoang ont réalisé le projet “Saturnium”,
un conte fantastique où les artistes rendent hommage à Marie Curie et ses découvertes...


2175_Reve audio
Interview de SMITH & Antonin-Tri Hoang, lauréat de la 2e édition Prix Swiss Life à 4 mains,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 15 juin 2017, durée 9'56". © FranceFineArt.

 

Pour plus d'information sur le Prix Swiss Life à 4 mains,
retrouvez l'interview
de Anne-Marie Lasry-Weiller,
directrice et porte-parole de la Fondation Swiss Life.

http://www.francefineart.com/index.php/chroniques/14-agenda/agenda-news/2276-115-chronique-anne-frederique-fer


extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat :
Alain Fleischer, directeur du Fresnoy – Studio national des arts contemporains
et Claire Moulène, commissaire au Palais de Tokyo




Avec Francis Alÿs, Hicham Berrada & Sylvain Courrech du Pont & Simon de Dreuille, Michel Blazy, Juliette Bonneviot, Dora Budor, Damien Cadio, Julian Charrière, Sylvie Chartrand, Clément Cogitore, Hugo Deverchère, Bertrand Dezoteux, Mimosa Echard, Alain Fleischer, Fabien Giraud & Raphaël Siboni, Bruno Gironcoli, Spiros Hadjidjanos, Patrick Jouin, Ryoichi Kurokawa, Annick Lesne & Julien Mozziconacci, Adrien Missika, Jean-Luc Moulène, Marie-Jeanne Musiol, Katja Novitskova, Jonathan Pêpe & Thibaut Rostagnat & David Chavalarias, Olivier Perriquet & Jean-Paul Delahaye, Arnaud Petit, Jean-François Peyret & Alain Prochiantz, Gaëtan Robillard, Gwendal Sartre, SMITH & Antonin-Tri Hoang, Anicka Yi


« Tout se déforme, même l’informe » Victor Hugo, Les Travailleurs de la mer, 1866

Conçue sur une proposition du Fresnoy – Studio national des arts contemporains, à l’occasion de son vingtième anniversaire en 2017, l’exposition « Le Rêve des formes » explore le dialogue ininterrompu, mais truffé d’accidents, entre art et sciences. Comment artistes et scientifiques parviennent-ils aujourd’hui à des solutions plastiques inédites, qui contribuent à réinventer la géométrie de la pensée, en dehors des territoires familiers ?

L’exposition entend questionner les points de rencontre entre la recherche en art et la recherche scientifique en réunissant des artistes contemporains et des scientifiques autour de la manière dont ceux-ci repensent, aujourd’hui, leur rapport au vivant, et s’interrogent sur les formes que peut prendre la matière, inanimée ou vivante, à l’échelle de l’infiniment petit ou de l’infiniment grand.

Sans prétendre dresser un panorama exhaustif de l’immensité de ce territoire qui réunit les arts et les sciences dures, « Le Rêve des formes » aborde certaines des questions soulevées récemment par l’entrée dans l’Anthropocène. Il apparait aujourd’hui que le rapport au vivant semble se loger, d’une part, dans la redécouverte d’un écosystème complexe où l’homme n’est qu’une espèce parmi d’autres ; d’autre part dans l’anticipation d’un monde à venir où l’humain serait petit à petit dépassé, voire remplacé, par les machines qu’il a lui-même créées.

Conçue comme un paysage imaginaire, avec de nombreuses oeuvres produites pour l’occasion, « Le Rêve des formes » se déroule en deux temps, les oeuvres de Fabien Giraud et Raphaël Siboni marquant un tournant au sein de ce cheminement : la plasticité du vivant et sa faculté extraordinaire à se métamorphoser, situées au coeur de la première partie du parcours, faisant place à une seconde partie laissant apercevoir un monde posthumain peuplé de formes mutantes.

L’exposition fait ainsi pousser des fantômes, prospérer des semis, fructifier des organismes protubérants, sédimenter des surfaces en germination. Ce jardin monstrueux est peuplé de formes exogènes et familières nées dans le giron de la biologie, des mathématiques, des neurosciences ou de la physique. Des formes qui entrent en collision avec les images et les objets, les alchimies et les greffes opérées par une vingtaine d’artistes au cours de ces dernières années

En amont de la tenue de l’exposition « Le Rêve des formes » au Palais de Tokyo, un groupe de recherche a réuni au Fresnoy des artistes (Hicham Berrada, Julien Clauss, Daniel Dobbels, Emmanuel Guez, Arnaud Petit, Olivier Perriquet, Jonathan Pêpe, Jean-François Peyret, Smith) et des scientifiques issus de différents champs (Ada Ackerman, David Chavalarias, Joseph Cohen, Jean-Paul Delahaye, Annick Lesne, Alain Prochiantz, Jean-Philippe Uzan, Raphael Zagury-Orly), afin d’explorer collectivement la question de « l’incertitude des formes ». Leurs échanges nourrissent l’exposition et préfigurent le colloque qui sera organisé les 5, 6 et 7 septembre 2017 au Collège de France, à l’invitation de son administrateur général, le neurobiologiste Alain Prochiantz, et dont les débats seront retransmis en direct au Palais de Tokyo le 6 septembre.

« Le Rêve des formes » est une collaboration entre le Palais de Tokyo et Le Fresnoy - Studio national des arts contemporains (Tourcoing), à l’occasion de son vingtième anniversaire. Elle s’inscrit dans le sillage de l’exposition « Dans la nuit, des images » organisée par Le Fresnoy à l’occasion de ses dix ans au Grand Palais (Paris, 2008).





La vie des formes


« Toute vie s’engage dans des formes, toutes sortes de formes, l’on ne peut préjuger de leur sens et il faut donc s’y rendre vraiment attentif, sans savoir d’emblée ce qui s’y joue ni ce qu’elles voudront dire. » Marielle Macé, Styles. Critique de nos formes de vie, éd. Gallimard, 2016

La plasticité du vivant, sa faculté extraordinaire à se métamorphoser, est au coeur du premier chapitre de l’exposition. Les oeuvres y vivent leur vie, se contaminent, flirtent avec le temps long des mondes animal, végétal et minéral ; elles composent un paysage dense et proliférant très peuplé mais entièrement vidé de toute présence humaine.

Le nouvel horizon des artistes réunis ici n’est plus tant la recherche d’une alternative technologique à la disparition programmée de l’espèce humaine, qu’une « promenade dans des mondes inconnus » (pour reprendre l’expression de Jacob von Uexküll dans son ouvrage culte, Mondes animaux et monde humain).

Encapsulés dans des caissons lumineux suspendus, les amphibiens hollywoodiens récupérés par Dora Budor, en provenance du tournage de la scène biblique finale, mémorable, du film « Magnolia » de Paul Thomas Anderson (1999), accueillent les visiteurs à l’entrée de l’exposition. Ces formes de vie primitives font écho au caryotype humain formalisé par les biologistes Annick Lesne et Julien Mozziconacci, permettant une visualisation de la structure tridimensionnelle des 23 chromosomes humains. Au sein d’un vaste espace, des espèces animales, végétales et non identifiées introduites par Anicka Yi, Mimosa Echard, Michel Blazy, Adrien Missika, Marie-Jeanne Musiol ou Katja Novitskova, cohabitent avec les formes auto-organisées, entretenues par leur propre dynamique, mobilisées par les oeuvres d’Hicham Berrada, de Francis Alÿs, de Gaëtan Robillard.

Deux épisodes de la série de films « The Unmanned » des artistes Fabien Giraud et Raphaël Siboni marquent un tournant dans le parcours de l’exposition. « 1997-The Brute Force » (2014) révèle la scène d’un théâtre laissée vacante après la défaite du joueur d’échecs Garry Kasparov contre la machine IBM Deep Blue. Une caméra tournoyante scrute mécaniquement l’espace évidé. De deux manières, à deux échelles différentes, elle montre un espace dont le référent (l’étalon-homme) est désormais absent et, par là même, livré à la démesure d’un monde sans échelle propre. « 1759 - The Great Divide » (2017) applique les mêmes mouvements à une scène toute autre, se déroulant en 1759 dans les salons de l’Observatoire de Paris alors que la comète de Halley passe à proximité de la terre, validant ainsi la prédiction mathématisée de son retour par les astronomes de l’Observatoire qui en avait calculé la trajectoire exacte. « La trajectoire d’indifférence qui relie les deux épisodes est la suivante : la progressive transformation d’un objet de la pensée (la comète de Halley en 1759) en une pensée devenue objet (l’intelligence artificielle d’IBM en 1997). »


Plis, intersections et tangentes

Indexé sur un monde post-humain, le second chapitre de l’exposition est hanté par des êtres mutants, des créatures hybrides mi-homme, mi-machine et des formes altérées par la contamination, que celle-ci soit radioactive comme avec Smith, Antonin Tri-Hoang et Julian Charrière, ou hormonale et endocrinologue chez Juliette Bonneviot. En regard, les modèles mathématiques conservés à l’Institut Poincaré et mis en musique et en mots par le compositeur Arnaud Petit et le mathématicien Jean-Philippe Uzan apparaissent comme des points de fuite. Les oeuvres de Bertrand Dezoteux, Sylvie Chartrand, David Chavalarias, Jonathan Pêpe et Thibaut Rostagnat évoquent quant à elles des formes algorithmiques nées de la puissance émancipatrice des machines et des outils prothétiques dont l’homme s’est progressivement doté. La figure du singe, double humain, étoilée et constellée par le neuroscientifique Alain Prochiantz et le metteur en scène Jean-François Peyret, conclue le parcours. Un chapitre final qui nous renvoie à ce que l’historien de l’art Thomas Schlesser a appelé « l’univers sans l’homme ».