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“Le spectre du surréalisme” Une exposition du 40e anniversaire du Centre Pompidou
à l’atelier des forges, Les Rencontres de la photographie, Arles

du 3 juillet au 24 septembre 2017



www.rencontres-arles.com

 

© Anne-Frédérique Fer, visite de l'exposition avec Karolina Ziebinska-Lewandowska, le 4 juillet 2017.

2199_Spectre2199_Spectre2199_SpectreLégendes de gauche à droite :
1/  Couverture Le Spectre du surréalisme aux éditions Textuel. © Éditions Textuel 2017. Agnès Geoffray, de la série Métamorphoses, 2014-2016. Centre Pompidou, MNAMCCI/ Courtesy of the artist/ © droits réservés.
2/  Hans Bellmer, La Poupée, vers 1935-1936. Avec l’aimable autorisation de l’Adagp, Paris.
3/  Eva Kot’átková, de la série Not How People Move, But What Moves Them, 2013. Centre Pompidou, MNAMCCI/ Courtesy of the artist and Hunt Kastner Gallery/ © droits réservés.

 


2199_Spectre audio
Interview de Karolina Ziebinska-Lewandowska, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Arles, le 4 juillet 2017, durée 15'58". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire de l’exposition : Karolina Ziebinska-Lewandowska.



Avec Eleanor Antin, Hans Bellmer, Jacques-André Boiffard, Brassaï, Claude Cahun, Mohamed Camara, Henri Cartier-Bresson, Evelyne Coutas, Marcel Duchamp, Germaine Dulac, Peter Fischli et David Weiss, Michel François, Agnès Geoffray, Aneta Grzeszykowska, Hirofumi Isoya, Lukas Jasansky et Martin Polak, Ulla Jokisalo, Július Koller, Eva Kot’átková, Jiří Kovanda, Roger Livet, Dora Maar, René Magritte, Anna Maria Maiolino, Nicole Metayer, Karel Miler, Otto Muehl, Gabriel Orozco, Jean Painlevé, Man Ray, Sophie Ristelhueber, Alix Cléo Roubaud, Armando Salas Portugal, Cindy Sherman, Taryn Simon, Dayanita Singh, Alina Szapocznikow, Georges Tony Stoll, Maurice Tabard, Patrick Tosani, Raoul Ubac, Hannah Villiger, Nancy Wilson-Pajic, Erwin Wurm.

Le Centre Pompidou fête ses 40 ans en 2017 partout en France. Pour partager cette célébration avec les plus larges publics, il propose un programme inédit d’expositions, de prêts exceptionnels, de manifestations et d’événements pendant toute l’année.

C'est dans ce cadre que s'inscrit l'exposition Le Spectre du surréalisme. Car le surréalisme est toujours vivant, même s’il mène une vie parfois souterraine – c’est le constat qu’on peut faire en observant la photographie contemporaine ou, plus largement, celle de l’après 1945. Conçue à partir des collections photographiques du Centre Pompidou, l’exposition revient sur quelques-uns des thèmes qui sont nés de la rencontre du surréalisme et de la photographie. Elle montre comment les artistes de l’après-guerre ont puisé dans la sensibilité surréaliste et illustre la façon dont ils ont adapté à leurs fins le rapport des surréalistes à la réalité, poursuivant l’abolissement des règles artistiques et poussant jusqu’au bout le jeu de l’absurde, tout en mettant l'accent sur les enjeux politiques contemporains. Par-delà la continuité chronologique, l’exposition fait dialoguer entre eux des projets artistiques en apparence lointains mais qui résultent de stratégies très proches.

Karolina Ziebinska-Lewandowska

Publication : Damarice Amao et Karolina Ziebinska-Lewandowska, Le Spectre du surréalisme, éditions Textuel, 2017.





Extrait du catalogue – Introduction de Damarice Amao et Karolina Ziebinska-Lewandowska - Le Spectre du surréalisme, éditions Textuel, 2017

Se manifeste dans la photographie actuelle un phénomène que nous avons ici choisi d’appeler « la survivance du surréalisme », c’est-à-dire la persistance de thèmes et de méthodes issus des expériences menées au sein du mouvement né dans les années 1920. C’est le même goût pour l’irrationnel et la même quête de formes photographiques inédites, capables de faire apparaître ce qui se cache derrière le rideau de la réalité, qui servent aujourd’hui à contrer, ou peut-être plus simplement à raconter, les inquiétudes de notre époque. Pour mieux comprendre cette réactivation de la sensibilité surréaliste dans la photographie contemporaine, il est nécessaire de regarder en arrière, d’éclairer ce qui constitue cet héritage surréaliste et d’étudier la façon dont il a nourri les artistes au fil des décennies.

La rencontre du surréalisme avec la photographie se joue, des années 1920 aux années 1940, sur deux registres différents. Elle naît, d’abord, de l’omniprésence du photographique dans la vie quotidienne. Les artistes réunis autour d’André Breton sont parmi les premiers à puiser dans les usages populaires de la photographie, qu’ils s’approprient à leurs fins sans questionner ni analyser les qualités spécifiques du médium. Elle fait partie des instruments mis à la disposition de l’artiste, qui l’utilise en fonction de sa situation et de ses besoins, comme le voyageur choisit le vélo ou le train selon la distance qu’il souhaite parcourir : il est, en somme, un « usager » de la photographie. Parmi les oeuvres représentatives de ce rapport pratique à l’outil, les portraits réalisés par les surréalistes dans les photomatons et les foires, les clichés produits pour garder une trace de leurs activités, de même que les images en tous genres collectionnées par le groupe, telles que les cartes postales, les photographies de presse ou encore les vues documentaires d’Eugène Atget. De ces usages quotidiens se distingue une autre pratique, plus nettement « photographique » et ancrée davantage dans la matérialité et la technicité du médium. Si l’on s’en tient à la métaphore des moyens de transport, les représentants de cette seconde approche peuvent être décrits comme des mécaniciens amateurs qui, fascinés par la machine, s’essayent à la bricoler, à tester et à améliorer ses performances pour aboutir à de nouvelles formes et de nouveaux résultats. Autrement dit, il s’agit d’un rapport expérimental à l’outil photographique – à l’optique et à la chimie du médium – qui donne lieu à de nouvelles images. On trouve dans cette catégorie les photogrammes, les superpositions de négatifs, les solarisations, les brûlages ou encore les photocollages. Ces expériences diffèrent de celles menées à la même époque par les constructivistes. Le surréalisme n’est pas un laboratoire où le photographe suit un protocole précis et teste l’outil avec en tête un résultat déjà bien défini. Les membres du groupe mobilisent sans discrimination toutes les techniques pour en faire surgir des images d’une autre réalité, différente de celle à laquelle notre oeil nous a habitués.

Ainsi, à la question « la photographie surréaliste existe-t-elle ? », la quasi-totalité des spécialistes du mouvement et du médium répondent aujourd’hui qu’une telle catégorie n’existe pas, du moins dans une acception strictement formelle. Face à l’hétérogénéité des productions de l’avant-garde – des photogrammes de Man Ray aux images anonymes peuplant les revues surréalistes, en passant par les photomontages de Dora Maar ou le gros plan d’orteil de Jacques-André Boiffard –, définir une unité stylistique du mouvement a toujours relevé de la gageure et peut-être même de l’inutile…[…]