contact rubrique Agenda Culturel : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

“Picasso 1932” Année érotique
au Musée national Picasso, Paris

du 10 octobre 2017 au 11 février 2018



www.museepicassoparis.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 9 octobre 2017.

2255_Picasso-19322255_Picasso-19322255_Picasso-1932Légendes de gauche à droite :
1/  Pablo Picasso, Le Rêve (collection particulière), 1932. Huile sur toile. Collection privée de Steven Cohen. © Christie’s Images / Bridgeman Images. © Succession Picasso 2017.
2/  Pablo Picasso, Nu couché (MP142), 4 Avril 1932, Boisgeloup. Huile sur toile. Paris, musée national Picasso – Paris Photo. © RMN-Grand Palais (musée national Picasso - Paris) / René-Gabriel Ojéda. © Succession Picasso - Gestion droits d'auteur.
3/  Pablo Picasso, La Lecture (MP137), 2 Janvier 1932, Boisgeloup. Huile sur toile. Paris, musée national Picasso – Paris. Photo © RMN-Grand Palais (musée national Picasso - Paris) / Mathieu Rabeau. © Succession Picasso - Gestion droits d'auteur.

 


2255_Picasso-1932 audio
Interview de Laurence Madeline, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 9 octobre 2017, durée 11'46". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaires
Laurence Madeline, conservatrice en chef du patrimoine
Virginie Perdrisot, conservatrice au Musée national Picasso-Paris




Picasso 1932. Année érotique est la première exposition dédiée à une année de création entière chez Picasso, allant du 1er janvier au 31 décembre d’une même année. L’exposition présentera des chefs-d’oeuvre essentiels dans la carrière de Picasso comme Le Rêve (huile sur toile, collection particulière) et de nombreux documents d’archives replaçant les créations de cette année dans leur contexte.

Cet événement, organisé en partenariat avec la Tate Modern de Londres, fait le pari d’inviter le visiteur à suivre au quotidien, dans un parcours rigoureusement chronologique, la production d’une année particulièrement riche. Il questionnera la célèbre formule de l’artiste selon laquelle « l’œuvre que l’on fait est une façon de tenir son journal », qui sous-entend l’idée d’une coïncidence entre vie et création.

Parmi les jalons de cette année exceptionnelle se trouvent les séries des baigneuses et les portraits et compositions colorées autour de la figure de Marie-Thérèse Walter, posant la question du rapport au surréalisme. En parallèle de ces oeuvres sensuelles et érotiques, l’artiste revient au thème de la Crucifixion, tandis que Brassaï réalise en décembre un reportage photographique dans son atelier de Boisgeloup. 1932 voit également la « muséification » de l’oeuvre de Picasso à travers l’organisation des rétrospectives à la galerie Georges Petit à Paris et au Kunsthaus de Zurich qui exposent, pour la première fois depuis 1911, le peintre espagnol au public et aux critiques. L’année est enfin marquée par la parution du premier volume du Catalogue raisonné de l’oeuvre de Pablo Picasso, publié par Christian Zervos, qui place l’auteur des Demoiselles d’Avignon dans une exploration de son propre travail.





1932 : Année érotique

Du 2 janvier au 14 mars, Picasso peint une suite fascinante de vingt-cinq toiles d’un érotisme débridé.

Préparant sa rétrospective à la Galerie Georges Petit, il travaille dans une tension érotique sans précédent. Toutes les formes de ses compositions possèdent une image « cachée », mais aisément identifiable : pénis, testicules, pubis. Un sein n’est pas seulement un sein, c’est aussi un phallus, un fruit n’est pas un fruit, c’est un sein, les cordes d’une guitare dessinent un pubis…

Peint le 24 janvier, Le Rêve s’intègre dans cette série. La scène se tient ici dans un décor d’intérieur (celui de l’appartement de rue de La Boétie), reconnaissable à son papier peint à losanges et ses moulures, dont la couleur verte se prolonge sur le corps de Marie-Thérèse Walter, modèle du tableau. Partagé en deux couleurs rose et verte, le visage de Marie-Thérèse est à la fois vu de face et de profil, la partie supérieure révélant un pénis étrangement naturaliste.

Picasso pousse à son comble l’érotisation de la figure, devenue incarnation de la sexualité. En proie au rêve, la figure passive de Marie-Thérèse est le lieu de projection des désirs érotiques du peintre “veilleur de sommeil”. Selon les mots de Leo Steinberg, les “observateurs de sommeil matérialisent des pensées dans lesquelles la forme, le désir, l’art et la vie se recoupent” 1.

Dans Le Rêve, la femme endormie devient le sujet de la métamorphose d'une tête en organes sexuels. L’osmose est ainsi totale entre sexualité et créativité, l’acte sexuel et l’acte de création devenant des métaphores interchangeables.

Daniel-Henry Kahnweiler, lorsqu’il découvre ces tableaux écrit qu’ils sont “d’un érotisme de géant” “d’un satyre qui viendrait de tuer une femme”. Cette tension retombe lorsque que Picasso considère qu’il possède assez de nouveaux tableaux pour sidérer les visiteurs de sa rétrospective. Comme si la pulsion sexuelle était le moteur de son processus créatif.


1.Leo Steinberg, “Les veilleurs de sommeil” , dans Trois études sur Picasso, traduction française, Paris, Editions Carré, 1996, p. 9-49.



Une année de la vie de Picasso

Grâce à plus de 110 tableaux, dessins, gravures et sculptures, grâce également à une centaine de documents, l’exposition Picasso 1932 (10 octobre 2017-11 février 2018) suit, jour après jour Picasso dans son processus créatif et la vie quotidienne de l’artiste qui vient d’avoir cinquante ans et jouit, depuis quelques années déjà, d’une reconnaissance aussi controversée qu’absolue.

Suivant une chronologie stricte, le parcours révèle la prodigieuse poussée créatrice des premières semaines de l’année, jusqu’au mois d’avril. Nous voyons ainsi Picasso préparer sa première rétrospective inaugurée le 16 juin à la galerie Georges Petit à Paris. Il entend prouver, grâce à celle-ci, qu’il est le plus grand peintre de son temps, il veut montrer que ses nouveaux tableaux sont aussi importants que son oeuvre passé, presque unanimement apprécié et prisé par les collectionneurs, il impose le renouvèlement de la peinture de son temps.

Passé cet événement intense et décisif, l’exposition témoigne du relâchement relatif que traverse l’oeuvre de Picasso. Ses tableaux sont plus petits, apaisés, les dessins sont idylliques.

Jusqu’à ce que se dessine, au coeur de l’été, une nouvelle quête artistique. La baigneuse en est l’héroïne et nous pouvons suivre ses aventures et ses surprenantes métamorphoses jusqu’à l’automne où surgit un nouveau thème, le Sauvetage, qui synthétise les recherches de l’année, les multiples sources de son inspiration et de sa réflexion pleine de rebonds.

Les documents appuient ce mouvement général. Picasso bouge, entre Paris, son château de Boisgeloup, la côte normande. Il passe quelques jours en Suisse, avec sa femme et son fils, pour l’ouverture de la seconde étape de sa rétrospective. Il va au cinéma, assiste à un match de boxe, visite les expositions de ses collègues artistes, ou celle de Manet. Il rencontre ses amis… Ses oeuvres sont sollicitées au Japon, à New York, à Venise, en Espagne, les propositions et les requêtes affluent. Il veille à l’organisation de ses rétrospectives, à la publication du premier volume du catalogue de son oeuvre et au numéro spécial que lui consacre la revue Cahiers d’art.

Du 1er janvier au 31 décembre, l’exposition reconstitue le portrait d’un artiste qui maîtrise son oeuvre et sa vie.