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“Zbigniew Dłubak” Héritier des avant-gardes
à la Fondation Henri Cartier-Bresson, Paris

du 17 janvier au 29 avril 2018



www.henricartierbresson.org

exb.fr/fr/home/335-dlubak-un-heritier-des-avant-gardes.html
(Zbigniew Dłubak - Un héritier des avant-gardes par Karolina Ziebinska-Lewandowska)

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 16 janvier 2018.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Zbigniew Dłubak, De la série Existences, 1959-1966. © Armelle Dłubak / Archeology of Photography Foundation, Varsovie.
2/  Zbigniew Dłubak, Sans titre, vers 1946. © Armelle Dłubak / Archeology of Photography Foundation, Varsovie.
3/  Zbigniew Dłubak, Sans titre, vers 1970. © Armelle Dłubak / Archeology of Photography Foundation, Varsovie.

 


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Interview de Karolina Ziebinska-Lewandowska, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 16 janvier 2018, durée 16'34". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissariat : Karolina Ziebinska-Lewandowska, conservatrice au Centre Pompidou



« Je ne suis intéressé par aucun effet de style, qu’il soit issu de l’art moderne ou du conceptualisme. J’utilise pour matériaux des formes, des idées, des couleurs, des mots, des photographies, des actions, etc., de la manière qui correspond le mieux à mon art, pour créer un signe vide dans le contexte de la réalité dans laquelle je vis. » Zbigniew Dłubak

Du 17 janvier au 29 avril 2018, la Fondation Henri Cartier-Bresson présente Zbigniew Dłubak - Héritier des avant-gardes. Zbigniew Dłubak (1921-2005) a été, après-guerre, l’un des acteurs du profond changement de la scène artistique polonaise. Grand expérimentateur des formes photographiques, il fut également peintre, théoricien de l’art, enseignant et éditeur de la revue Fotografia pendant plus de vingt ans. Il y a introduit une critique photographique solide et une manière interdisciplinaire de penser le medium. Il jouissait, en Pologne, d’une certaine notoriété de son vivant. Plusieurs expositions monographiques lui furent consacrées, et ses oeuvres majeures sont représentées dans les collections publiques polonaises.

Si Dłubak se fit d’abord connaître en tant que photographe, il aspirait initialement à devenir peintre, sans cesse à la recherche de matériaux pour dessiner durant la guerre. Très actif dans ces deux domaines traditionnellement séparés il a beaucoup influencé le décloisonnement des formes artistiques. Il défendait également le droit de la photographie à exister en tant que discipline à part entière.

Ses premières expériences photographiques laissent transparaître une diversité d’inspirations caractéristiques des pratiques d’avant-guerre, issues des traditions constructivistes et surréalistes. Fasciné par la linguistique, Dłubak s’orientent ensuite vers les mécanismes d’une approche systématique puis vers la disparition des signes.

Le travail effectué par la Fondation Archeologia Fotografii où ses archives ont été déposées, permet d'apporter de nouveaux regards sur l'oeuvre. Dans la continuité des démarches de relecture cette exposition se propose de mettre en lumière les similitudes et les complémentarités entre photographie et peinture dans son travail. Elle est centrée sur deux périodes décisives de la vie de l’artiste : l’année 1948 qui marque le début de sa carrière et l’inscrit au sein de l’avant-garde, et les années 1970, qui symbolisent sa position ambigüe vis-à-vis de l’art conceptuel. La sélection permet de présenter oeuvres iconiques et photographies inédites.

Le commissariat de l’exposition est assuré par Karolina Ziebinska-Lewandowska, spécialiste de l’oeuvre de Dłubak. L’exposition est accompagnée d’un ouvrage publié aux Éditions Xavier Barral sous la direction de Karolina Ziebinska-Lewandowska et qui propose une sélection d’images élargie, un essai d’Éric de Chassey ainsi qu'une introduction et sept textes de la commissaire. L’exposition est organisée en collaboration avec la Fondation Archeologia Fotografii de Varsovie qui détient les archives de l'artiste et L’Institut Adam Mickiewicz, sous le label « Culture.pl », dans le cadre du programme international POLSKA 100 qui accompagne le centenaire de l’indépendance de la Pologne.

« Le rôle social de l’art consiste à introduire dans la conscience humaine le facteur de négation, il permet de remettre en question la rigidité des schémas et des conventions dans le rendu de la réalité. L’art même est évolution, c’est l’introduction de tout nouveau moyen d’expression.» Zbigniew Dłubak





Extrait de l'ouvrage aux Editions Xavier Barral : Zbigniew Dłubak - Un héritier des avant-gardes par Karolina Ziebinska-Lewandowska - extraits de "1970 : l’art du concept (non) assimilé"


L’année 1970 voit se dérouler deux événements traditionnellement considérés par l’historiographie polonaise comme des manifestations phares de l’art conceptuel : le symposium Wrocław ’70 et le Świdwin-Osieki ’70 (Rencontres d’Osieki en plein air). Il serait bien sûr illusoire de réduire l’apparition de l’art conceptuel en Pologne à cette seule année, le processus étant bien plus complexe, comme l’ont démontré notamment Piotr Piotrowski et Luiza Nader. Toutefois, s’y référer contribue à éclairer l’oeuvre et l’engagement de Zbigniew Dłubak dans ces années-là. Ces deux rencontres, organisées grâce à une collaboration étroite entre administrations locales et milieux artistiques, ont rassemblé artistes et critiques d’art, représentant divers courants expérimentaux de l’art polonais. Le symposium de Wrocław avait pour ambition d’attirer des spectateurs peu habitués à l’art expérimental. L’idée première, justifiant la participation de structures départementales, était d’inscrire l’art contemporain dans l’espace public, en particulier dans les quartiers HLM, les squares et les terrains vagues de banlieue. […]

L’année 1970 marque enfin pour Dłubak le début d’une série à laquelle il consacrera les huit années suivantes : Systèmes – Gesticulations. Parfaitement conforme, de prime abord, aux codes de l’art conceptuel, la série indique en réalité une rupture entre Dłubak et le conceptualisme. Bien qu’il conçoive l’activité théorique comme partie intégrante de sa pratique artistique, il était persuadé de la nécessité de préserver une fonction de médiation dans l’objet artistique. Pourquoi donc Zbigniew Dłubak, un des fervents protagonistes de l’essor du conceptualisme en Pologne, s’est-il finalement écarté du mouvement ?

Ses écrits permettent d’avancer quelques éléments de réponse. En 1977, tandis que la mouvance était encore très vive, il écrivait : « L’art conceptuel, dans son aspiration à la purification totale, a créé une liste d’interdictions concernant les moyens d’enregistrement et de transmission. [...] Mais le conceptualisme a tout de suite élaboré la morphologie de ses propres moyens [d’expression] et s’est figé en elle.1 » Dans un manuscrit (non daté) il ajoutait : « Les sources des échecs du conceptualisme : une interprétation de l’art erronée (les faux modèles de l’art ancien) ; une sous-estimation de la lutte contre l’esthétisme dans la première moitié du XXe siècle ; trop d’attention portée aux moyens d’enregistrement des idées ; une foi non justifiée en l’existence de l’idée en dehors de son enregistrement ; la croyance en l’avènement d’une nouvelle époque de l’art à travers le choix d’une autre matière pour la réalisation des idées.2 » Lui aussi dépendait de cette nouvelle morphologie, mais il essayait néanmoins de conserver son autonomie. S’il ne croyait pas en l’annihilation de l’objet artistique, c’est parce que l’oeuvre d’art était pour lui le résultat d’une rencontre. L’objet permettait d’engager le dialogue social.


1 Uwagi o sztuce i fotografii [Les remarques à propos de l’art et de la photographie], 1977, Fotografia, no 8, 1969
2 Texte sans titre, repris dans Teoria sztuki Zbigniewa Dłubaka [Théorie de l’art de Zbigniew Dłubak], Magdalena Ziółkowska (dir.), Varsovie, Fundacja Archeologia Fotografii, 2013, p. 145