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“Gérard Garouste” Diane et Acteon
au musée de la Chasse et de la Nature, Paris

du 13 mars au 1er juillet 2018



www.chassenature.org

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 12 mars 2018.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Gérard Garouste, Diane et Actéon, 2015. Huile sur toile. 200 x 260 cm. © Musée de la Chasse et de la Nature / ADAGP, 2018. Cliché : David Bordes.
2/  Gérard Garouste, Le cerf compagnon, 2015. Huile sur toile. 41 x 33 x 1,7 cm. © Musée de la Chasse et de la Nature, Gérard Garouste ADAGP, 2018. DR. Courtesy Galerie Templon, Paris & Bruxelles.
3/  Gérard Garouste, Actéon et les deux ponts, 2017. Huile sur toile. 114 x 146 cm. © Musée de la Chasse et de la Nature, Gérard Garouste / ADAGP, 2018. Cliché : Photo B.Huet-Tutti. Courtesy Galerie Templon, Paris & Bruxelles.

 


texte de Sylvain Silleran, rédacteur pour FranceFineArt.

 

Dans la mythologie grecque, Actéon, chasseur, surprend Diane se baignant parmi ses nymphes. Diane, pour punir ce mortel d'avoir vue une déesse nue le transforme en cerf, le condamnant à se faire dévorer par ses chiens qui ne le reconnaissent plus. A partir de ce récit, Gérard Garouste livre au musée de la chasse et de la nature une série de toiles et de dessins, cherchant dans la Bible, le Talmud ainsi que dans sa propre psyché à tisser un réseau étendu d'interprétations et de significations.

Si la divinité se place au-delà du bien et du mal, l'homme qu'incarne Actéon se définit par son enracinement dans la nature. Il est ocre, fauve, recouvert de fourrure épaisse ou de fines bouclettes claires. Sa peau devient rugueuse, dure, se craquelle en boue séchée, se solidifie en écailles de bois comme l'écorce d'un vieil arbre. Assailli par l'animalité de ses chiens, il y répond en se dédoublant en cerf. Pour illustrer cet univers mythologique, Gérard Garouste rend le temps non linéaire, tout s'y déroule de façon simultanée. Ce n'est pas tant Actéon qui se transforme en cerf mais c'est le cerf en lui qui émerge, engage un combat et finit par vaincre. Cet homme à deux têtes, humain et cerf, est dominé par ses pulsions, il sodomise ses chiens, renvoyant sa sauvagerie à la leur. La vengeance punitive des chiens le dévorant, le mordant là ou il a pêché n'est pas une punition, mais la face obscure de la sexualité, l'instinct de mort attaché irrémédiablement à celui de vie.

Les couleurs sont saturées, tranchées en oppositions: cerfs rouges aux reflets roses sur fond vert d'eau, bleus profonds, ocres de terre ou de sable. L'obscurité est percée d'une lumière éclatante créant le contraste d'un vitrail d'église. Le jour extérieur qui le traverse lui donne vie en en faisant un écran cathodique aveuglant. La peinture est rapide, pressée, vive comme un croquis urgent saisissant une scène qui se déroulerait en direct. Les nuages sont griffés à la brosse sèche. Le pelage des chiens sont un feu dévorant leur silhouette noire d'éclaboussures rouges. Les quelques contours qui définissent les formes et postures des animaux sont obsolètes une fois tracés. Le temps de les achever, la bête a déjà avancé vers sa proie, son mouvement en a flouté les membres, ne laissant de sa position précédente qu'une empreinte fugitive.

Seule la déesse demeure immobile, définie par un volume entier et un trait net. Cette déesse difforme, au découpage un peu cubiste de membres devenus excroissances sexuelles incarne non pas la beauté mais la séduction totale. Toutes ses formes sont des surfaces courbes de projection du désir. Pâle monstre blanc, Diane est déconstruite et reconstruite en un extraordinaire sex toy organique, intégrant dans un corps unique l'entièreté du pouvoir de séduction du féminin. En opposition à cette difformité pleine et immobile, celle d'Actéon est un mouvement sauvage, un conflit ouvert, pulsionnel, la torture du désir et des conséquences de sa réalisation.

En puisant dans les sources mythologiques, Gérard Garouste réalise une œuvre provoquante, démontant l'idée que le transgressif n'appartient qu'à la modernité. Il est fort réjouissant dans cette époque si précautionneuse des sensibilités de chacun de se prendre le coup de poing d'un vieux boxeur.

Sylvain Silleran

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat : Claude d’Anthenaise, conservateur en chef du patrimoine, directeur du musée de la Chasse et de la Nature



Peintre, graveur et sculpteur, Gérard Garouste (né en 1946) s’inspire souvent des grands textes de référence. La Bible, le Talmud, ou dans un registre plus littéraire, le Don Quichotte de Cervantès, servent d’alibi à ses complexes jeux plastiques où l’audace des formes et des couleurs s’affranchit des contraintes de vraisemblance.

À la demande du musée de la Chasse et de la Nature, Gérard Garouste s’est intéressé au mythe de Diane et Actéon, l’un des plus beaux qu’ait relatés le poète latin Ovide (43 av. J.C. – 17 ap. J.C.) dans ses Métamorphoses : Actéon, chasseur insatiable, s’étant aventuré dans un bois à la recherche de la fraicheur, surprend la déesse Diane alors qu’elle se baigne nue avec ses suivantes. Lui, simple mortel, ose porter un regard de désir sur la divinité qui se venge en lui jetant un sort. Soudain transformé en cerf, il devient la proie de ses propres chiens qui le mettent à mort.

Le mythe qui traite du regard, du désir et de la capture, avait tout pour séduire Gérard Garouste. Aussi, ne se contentant pas de satisfaire la com­mande du musée de la Chasse et de la Nature, celui-ci a multiplié les études, les dessins et les toiles sur ce thème. Singulièrement, la déesse Diane y ressemble à l’épouse du peintre tandis que ce dernier prête ses traits à l’infortuné chasseur. Pour l’exposition, toutes les oeuvres ainsi produites sont réunies autour du tableau peint pour le musée. Elles entrent en résonance avec les oeuvres anciennes illustrant ce thème au sein des collections permanentes.



Saison Garouste à Paris :

Du 15 mars au 10 mai, la galerie Templon présentera Zeugma, une exposition personnelle de Gérard Garouste réunissant une trentaine d’oeuvres inédites.
https://www.templon.com/new/artist.php?la=fr&artist_id=70

L’artiste exposera aux Beaux-Arts de Paris dans Zeugma. Le grand œuvre drolatique. Ses Indiennes, ses Ellipses et La Dive BacBuc, installations monumentales et dispositifs théâtraux, y seront réunis pour la première fois du 15 mars au 15 avril - Cour vitrée du Palais des études. www.beauxartsparis.fr