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“Robert Frank” Sidelines
à l’ Espace Van Gogh, Les Rencontres de la photographie, Arles

du 2 juillet au 23 septembre 2018



www.rencontres-arles.com

 

© Anne-Frédérique Fer, visite de l'exposition, le 7 juillet 2018.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Robert Frank, Bus-Stop, Detroit, 1955. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Collection Fotostiftung Schweiz.
2/  Couverture Les Américains (nouvelle édition) de Robert Frank, Delpire, 2018.
3/  Robert Frank, New York City, 1950. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Collection Fotostiftung Schweiz.

 


texte de Julie-Marie Duro, rédactrice pour FranceFineArt.

 

A première vue, il pourrait sembler difficile d’exposer les travaux de Robert Frank qui a, pour beaucoup de photographes, façonné une manière de regarder les États-Unis, voire la photographie tout court. Alors, comment apporter un regard neuf sur l’auteur d’un des ouvrages les plus connus et les plus étudiés en école d’art ? Bien entendu, certains pourraient simplement argumenter que les œuvres de Robert Frank se suffisent à elles-mêmes, qu’elles sont indémodables et qu’on ne se lassera jamais de les regarder. Ayant visité moi-même l’exposition presque chaque jour, je ne pourrai les contredire. D’autant plus que les tirages présentés à l’espace Van Gogh sont d’une qualité exceptionnelle ! Mais exposer un maitre reste un défi de taille qu’il ne faut pas négliger. Martin Gasser, commissaire de l’exposition et conservateur de la Fondation Suisse pour la Photographie, se propose dès lors de mettre en perspective un travail dont on pourrait croire – faussement – ne plus rien avoir à découvrir.

Martin Gasser fait le choix de mettre en lumière Les américains avec de nombreuses séries antérieures réalisées par Robert Frank lors de ses voyages aux États-Unis et en Europe. Ces images moins connues, nous permettent de comprendre et de suivre au travers des années comment le regard de l’artiste s’affirme progressivement. En outre, des images jusqu’alors inédites prises au moments de la réalisation des Américains s’entremêlent sur les cimaises aux images désormais cultes. De plus, le documentaire vidéo, L’Amérique dans le viseur, réalisé par Laura Israël, donne à voir les coulisses de l’artiste et rend un statut humain, tangible, à une figure déjà historique.

A la mise en perspective interne au travail de l’artiste suisso-américain s’ajoute une perspective thématique à l’Amérique dans la photographie voulue par Sam Stourdzé et qui nous pousse à interroger l’attrait que ce continent semble continuellement exercer tout autant que l’inépuisable de ses représentations. L’exposition de Robert Frank fait directement écho au travail de Raymond Depardon exposé dans le même espace, mais également à l’ensemble des projets portant un regard neuf sur l’Amérique et dont nous retiendrons tout particulièrement le travail de la photographe française Laura Henno.

Julie-Marie Duro

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire de l’exposition : Martin Gasser.



Robert Frank, l’un des photographes les plus importants et influents au monde, n’a cessé de questionner et de réinventer l’image photographique et d’explorer le potentiel narratif des séquences photographiques. Il y a soixante ans, en 1958, Robert Delpire publiait à Paris la première édition de son livre fondateur Les Américains. Ce qui constitue sans doute l’ouvrage le plus influent de l’histoire de la photographie ne fut cependant pas un coup de génie spontané. L’exposition Sidelines retrace d’une part l’évolution du style expressif de l’artiste et sa recherche sans concession d’une vérité subjective avant 1958, avec des séries de photographies réalisées dans son pays natal, en Europe et en Amérique du Sud. De l’autre, elle met l’accent sur des photographies quasi inconnues jusqu’à présent, réalisées dans les années 1950 alors que Robert Frank voyageait à travers les États-Unis pour son projet Les Américains. Ces images, qui restèrent non publiées pour des raisons éditoriales, sont aujourd’hui replacées dans leur contexte et présentées avec un petit groupe des célèbres clichés du livre qui choqua le monde à sa parution.


Publication : Les Américains (nouvelle édition), Delpire, 2018 avec l’introduction de Jack Kerouac (nouvelle traduction de Brice Matthieussent).






En 1955, Robert Frank sillonne les États-Unis. Appareil photo à la main, il immortalise les instants de vie des Américains qu’il croise sur sa route : une serveuse dans un diner, un homme tatoué en train de faire la sieste, des ouvriers au travail, un cireur de chaussures, des fêtards, des amoureux, des motards, la route elle-même… Il ne s’agit pas d’un reportage mais d’un ensemble de notes prises sur le vif : Robert Frank fait naître une nouvelle iconographie où des visages anonymes s’amalgament au bord de routes tristes, dans les excroissances urbaines ou les vides d’un territoire démesuré. Les lieux et les visages pris à la volée sont souvent flous, la composition est parfois décentrée. La fréquence et la profondeur des noirs creusent les images, leur conférant un pouvoir d’abstraction.

Pour la première fois en 1958, une sélection de 84 photographies en noir et blanc est publiée par Robert Delpire… dans l’indifférence générale. Jugé triste, pervers, voire subversif à l’époque, le livre devient progressivement un classique de la photographie. 60 ans après sa première publication, l’ouvrage, toujours très actuel, reparaît dans une édition revue et corrigée par Robert Frank lui-même. Couverture, format, papier et traitement des photographies ont été modifiés et se rapprochent de l’édition américaine.

Robert Frank, né à Zurich en 1924, quitte la Suisse en 1947 et s’installe aux États-Unis. Puis ses multiples voyages le conduisent en Amérique du Sud, en Espagne, en Angleterre et à Paris. Photographe majeur dans les années 1950 et 1960, il se consacre ensuite au cinéma expérimental avant de revenir progressivement à la photographie dans les années 1970.