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“Country Life” Chefs-d’oeuvre de la collection Mellon du Virginia Museum of Fine Arts
au musée de la Chasse et de la Nature, Paris

du 4 septembre au 2 décembre 2018



www.chassenature.org

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 3 septembre 2018.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Eugène Delacroix (1798-1863), Cheval bai-brun à l'attache, vers 1823. Huile sur toile, 52,1 x 72,1 cm. © The Paul Mellon Collection, Virginia Museum of Fine Arts.
2/  James Ward (1769-1859), Portrait de la parlinière Granadillo et de son poulain Skyscraper, appartenant à T. Crook, 1809. Huile sur toile, 70,8 x 90,8 cm. © The Paul Mellon Collection, Virginia Museum of Fine Arts.
3/  Edgar Degas (1734-1917), Jockey en bleu sur un cheval alezan, vers 1889. Huile sur bois, 26 x 20,6 cm. © The Paul Mellon Collection, Virginia Museum of Fine Arts.

 


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Interview de Claude d'Anthenaise, conservateur en chef du patrimoine,
directeur du musée de la Chasse et de la Nature, et co-commissaire de l’exposition,

par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 3 septembre 2018, durée 18'10". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat :
Claude d'Anthenaise, conservateur en chef du patrimoine, directeur du musée de la Chasse et de la Nature
Karen Chastagnol, conservateur adjoint au musée de la Chasse et de la Nature.




Fidèle à la vocation de la Fondation François Sommer, le musée de la Chasse et de la Nature explore les différents aspects de la relation que l’homme entretient avec l’animal et l’espace naturel. À sa manière l’art rend compte de l’évolution de notre écosystème en traduisant et en orientant la perception des générations successives d’observateurs et de créateurs.

L’exposition Country Life – Chefs-d’oeuvre de la collection Mellon du VMFA revient sur un moment de la civilisation occidentale, lié à la Révolution industrielle et l’essor des classes bourgeoises, qui tend à faire de la campagne un lieu voué à la villégiature. Selon le modèle de la country life, issu de la culture britannique, la terre, l’animal domestique – et en particulier le cheval – voient leur valeur productive associée à une valeur récréative. La campagne devient un espace de loisir pour toute une classe sociale généralement issue des villes et entretenant la nostalgie d’une ruralité idéalisée.

En Angleterre, dès la fin du XVIIIe siècle, les sports équestres connaissent un remarquable développement (courses, chasses à courre). Paradoxalement, cela coïncide avec le moment où l’industrie naissante tend à imposer la victoire des chevaux-vapeur sur leurs compétiteurs animaux. Un genre artistique, particulièrement bien représenté dans l’école anglaise, la sporting painting reflète cet engouement du groupe social dominant. Celui-ci va essaimer son modèle culturel vers les autres nations occidentales au gré du courant d’anglophilie qui caractérise le XIXe siècle. De ce côté-ci de la Manche, les peintres français, impressionnistes notamment, témoignent d’un autre aspect de la vie à la campagne. Ils révèlent comment, à proximité des villes, l’espace rural est investi par la petite bourgeoisie qui s’y adonne aux loisirs de plein air prônés par les théories hygiénistes.

Poursuivant la tradition familiale, le milliardaire et amateur d’art Paul Mellon (1907-1999) a collectionné avec passion. De manière symptomatique, les oeuvres qu’il a rassemblées traduisent son attachement à un mode de vie en voie d’extinction. Certes, Mellon est lié à la tradition anglaise par sa mère, mais son héritage paternel l’assimile au monde de l’industrie et de la finance américain. Doté d’immenses moyens et voué à une vie sociale dans le milieu des affaires, il fait le choix d’une certaine ruralité. Avec Bunny, son épouse, ils vont s’appliquer à transposer au coeur de la campagne de Virginie le mode de vie des gentlemen farmers. Dans leur domaine d’Oak Spring, Bunny donne libre cours à son goût pour le jardinage tandis que Paul élève des chevaux de course. Saturant les murs du cottage, leur collection de peintures illustre cette relation rêvée à la nature, aux antipodes de l’agriculture industrielle qui, au même moment, transforme radicalement le paysage rural.

Exceptionnellement, les chefs-d’oeuvre qu’ils ont ainsi rassemblés et qui ont été légués au Virginia Museum of Fine Arts, se retrouvent au musée de la Chasse et de la Nature. Ils peuvent être appréciés dans une perspective d’histoire de l’art. Mais ils témoignent également de l’éveil dans la culture occidentale d’une nouvelle sensibilité à la nature consécutivement au développement industriel et à l’urbanisation.






Parcours de l’exposition :


La sélection des 41 oeuvres présentées retrace la passion des Mellon pour les chevaux, les sports équestres, les divertissements et l’art de vivre en plein air.

Le parcours s’articule autour des oeuvres de nombreux artistes majeurs. Du British art du XIXe siècle au post-impressionnisme, de Géricault à Delacroix, de Stubbs à Degas, en passant par les paysages de Monet, Caillebotte ou Bonnard, l’exposition révèle entre autre l’intérêt de ces remarquables collectionneurs pour l’anglomanie et la peinture impressionniste.

L'accrochage insiste sur l’oeuvre d’un peintre anglais majeur, George Stubbs (1724-1806). C’est ce dernier qui donna ses lettres de noblesse au sporting art. Ses portraits de chevaux constituent l’un des points d’orgue de cette présentation.

L’exposition s’organise de manière thématique. Elle consacre ses différentes sections à la représentation du paysage et aux scènes de loisirs de plein air, aux portraits de chevaux et de leurs lads, à la représentation de scènes de chasse ou encore à celle des courses :
− Les paysages de Monet, Dufy, Morisot, van Dongen et Caillebotte
− Les portraits de chevaux avec les tableaux de Wootton, Stubbs, Delacroix
− La chasse avec les oeuvres de René Princeteau et Benjamin Marshall
− Les courses sont évoquées par les tableaux d’Edgar Degas, Bonnard, Munnings et Géricault

Un dernier espace vient clore l'exposition. Il est consacré aux maquettes qui ont été réalisées par Antoine Platteau, directeur de la Décoration de la maison Hermès, et Georgi Stanishev pour la conception de la scénographie du lieu.

Voulant créer un écrin pour la collection de sporting art réunie par Paul Mellon, Antoine Platteau choisit d'imaginer une écurie évoquant celle que le milliardaire avait fait construire dans son domaine d’Oak Spring. Complètement métamorphosée, la salle d’exposition temporaire du musée de la Chasse et de la Nature se voit ainsi pourvue d’un vestibule ainsi que de stalles et de boxes où les chevaux peints par Stubbs, Delacroix ou Degas viennent prendre place parmi les accessoires équestres.

La succession d’espaces intimes ainsi réalisée permet de regrouper les oeuvres par thèmes : chevaux et lads, courses, chasses, loisirs de plein air, paysages. En les découvrant les uns après les autres, le visiteur se voit ainsi proposer une sorte de promenade : ce que pourrait être un dimanche à la campagne, mais dans une campagne très civilisée à la manière de celle que les Mellon avaient façonnée autour de leur cottage virginien.






Biographie du couple Mellon


Paul Mellon (1907-1999) fut l’un des plus grands collectionneurs d’art et mécènes du XXe siècle. Fils unique d’Andrew Mellon, magnat de l’industrie et de la finance américaines, Paul développe un goût précoce pour la campagne et la culture anglaises découvertes au gré de ses visites estivales à sa famille maternelle.

Étudiant à l’université de Cambridge, dans l’insouciance des années d’avant-guerre, il s’y adonne aux plaisirs de la country life, développant un goût obsessionnel pour le cheval. Il fréquente avec délectation les courses de chevaux et le foxhunting (chasse à courre du renard). C’est encore à cette époque que se développe sa vocation de collectionneur. Il commence en bibliophile avec l’acquisition d’ouvrages rares traitant de thèmes liés aux sports équestres. Puis viendra l’achat des premières toiles célébrant l’élégance équine, peintes par Ben Marshall (1768-1835) ou George Stubbs (1724-1806), tandis qu’il commande son portrait à cheval à Sir Alfred James Munnings (1878-1959). Cette inclination pour l’école anglaise et le sporting art sera confortée par l’historien d’art Basil Taylor quand il conseillera Paul Mellon pour ses achats. Cavalier émérite (il pratiquera l’équitation jusqu’à un âge avancé), Mellon se passionne également pour l’élevage de chevaux de course. En 1971, Mill Reef, le meilleur cheval de son écurie, vient couronner cette carrière d’éleveur en remportant presque tous les prix, du fameux derby d’Epsom à celui de l’arc de Triomphe.

Son goût de la vie à la campagne incite Paul Mellon à renoncer à la conduite des affaires familiales pour aller vivre au milieu des champs. Veuf en 1946, il se remarie deux ans plus tard. Bunny (Rachel Lambert Lloyd, 1910-2014), sa nouvelle épouse, partage ce vif sentiment pour la Country Life. Mais elle l’aborde en botaniste et en paysagiste. Le grand intérêt qu’elle porte à la peinture française, notamment impressionniste, ainsi qu’à l’art américain, influencera désormais l’évolution de la collection. Au coeur d’un vaste domaine, la construction du cottage d’Oak Spring Farm permet aux Mellon de transposer en Virginie le modèle de vie rêvé de la gentry britannique. Paul et Bunny y jouent aux gentlemen farmers. L’élégante écurie destinée aux coursiers de Paul, le jardin où Bunny poursuit ses expériences horticoles, accompagnent une maison d’un aspect extérieur modeste, mais dont les murs disparaissent derrière les chefs-d’oeuvre issus des écoles française, anglaise ou américaine et célébrant les plaisirs de la villégiature.

sComme son père avait commencé de le faire, Paul voudra que cette collection exceptionnelle vienne enrichir les musées américains. La National Gallery de Washington, avec le don de plus de mille oeuvres, mais également l’université de Yale et le Virginia Museum of Fine Arts (VMFA) sont les heureux bénéficiaires de cette générosité. Dès 1963, ce dernier avait accueilli une exposition consacrée au sporting art britannique dans la collection de Paul Mellon. Cette exposition qui sera reprise par la Royal Academy de Londres incite le public à réévaluer un genre et une école qui étaient encore jugés secondaires. Il redécouvre George Stubbs dont Mellon est le plus grand collectionneur.