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“Vagues de renouveau” Estampes japonaises modernes 1900-1960
à la Fondation Custodia, Paris

du 6 octobre 2018 au 6 janvier 2019



www.fondationcustodia.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 5 octobre 2018.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Itō Shinsui (1898-1972), Femme se noircissant les sourcils, 1928. Gravure sur bois en couleurs, 28,2 × 40,2 cm. Collection Elise Wessels – Nihon no hanga, Amsterdam.
2/  Yamamoto Kanae (1882-1946), Sur le pont, 1912. Gravure sur bois en couleurs, 17,5 × 16,8 cm. Collection Elise Wessels – Nihon no hanga, Amsterdam.
3/  Sakamoto Hanjirō (1882-1969), Vue du port de Kami, Genkainada, 1918. Gravure sur bois en couleurs, 18,1 × 25 cm. Collection Elise Wessels – Nihon no hanga, Amsterdam.

 


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Interview de Elise Wessels, collectionneuse et directrice du Musée Nihon no hanga à Amsterdam,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 5 octobre 2018, durée 19'12". © FranceFineArt.com.
(avec l'aimable traduction de Marie-Noëlle Grison)

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat :
Elise Wessels, collectionneur
Chris Uhlenbeck et Maureen de Vries, conservateurs du Musée Nihon no hanga à Amsterdam
Ger Luijten, directeur de la Fondation Custodia




Pour célébrer l’année du Japon en France, la Fondation Custodia accueille à l’automne 2018 une importante rétrospective présentant les estampes japonaises de la première moitié du XXe siècle.

Vagues de renouveau. Estampes japonaises modernes 1900-1960 est une occasion exceptionnelle de découvrir, pour l’une des toutes premières fois en France, les créations des artistes témoins de la modernisation du Japon du XXe siècle. Elle explorera l’intérêt des courants artistiques shin hanga et sōsaku hanga à travers plus de 200 œuvres d’une cinquantaine d’artistes.

Les estampes exposées proviennent du musée Nihon no hanga à Amsterdam qui regroupe la collection qu’Elise Wessels a constituée au cours des 25 dernières années. Les estampes qui y sont conservées offrent un aperçu exhaustif de la création artistique japonaise au XXe siècle. L’intégralité de cette collection est une donation promise au Rijksmuseum d’Amsterdam dans quelques années.



Le renouveau de l’estampe japonaise au XXe siècle

Dès la fin du XIXe siècle, l’estampe traditionnelle japonaise (ukiyo-e) avait dû faire face à une crise sans précédent. Le contexte culturel de production était en train de changer. On ne publiait plus d’estampes se référant à Yoshiwara, le quartier des plaisirs du vieil Edo (l’actuelle Tōkyō), et le lien entre l’estampe et les représentations quotidiennes de théâtre disparaissait progressivement. Il n’y avait plus d’intérêt non plus à dépeindre les temps héroïques des samouraïs. La tendance était désormais à la modernité et les estampes existaient pour leur beauté propre. En parallèle, le marché occidental avait évolué, et les éditeurs entendaient vendre leurs œuvres à une clientèle américaine. Ils imprimaient donc des catalogues en anglais et organisaient des expositions aux Etats-Unis. Le succès fut immédiat au début du XXe siècle : les estampes de maîtres tels que Hokusai, Utamaro et Hiroshige furent surpassées en valeur par celles d’artistes contemporains, qui étaient vendues aux enchères, principalement à New York.

L’introduction de nouveaux procédés de reproduction, tels que la lithographie puis les presses rotatives, permettait dorénavant à un éditeur de réaliser des tirages importants dans des délais très courts. Par ailleurs, les estampes classiques avaient été acquises par les collectionneurs étrangers en quantités telles que les belles impressions des XVIIIe et XIXe siècles étaient devenues une rareté au Japon. Et les artistes japonais eux-mêmes, partis en nombre étudier en Europe et aux Etats-Unis, y avaient découvert une approche très différente que celle en vigueur dans leur pays concernant le rôle de l’artiste dans le processus de création de l’œuvre gravée.


Shin hanga, la « nouvelle estampe »

Au début du XXe siècle, deux mouvements virent le jour au Japon, qui représentent chacun une réponse différente à cette nouvelle donne, et qui nous laissent aujourd’hui un double héritage d’une diversité fascinante. L’imprimeur Watanabe Shōzaburō (1885-1962), s’inquiétant de la fuite des estampes vers l’étranger ainsi que de la perte des connaissances techniques nécessaires à la production d’œuvres de qualité, se mit à la recherche d’artistes capables de relancer la gravure et de créer un style neuf, tout en conservant la division traditionnelle du travail, c’est-à-dire la collaboration entre quatre personnes, l’artiste, le graveur, l’imprimeur et l’éditeur. Le mouvement inspiré par Watanabe est appelé shin hanga, ou « nouvelle estampe ». La thématique de ces « nouvelles estampes » reprit les catégories traditionnelles avec les paysages, portraits de femmes et d’acteurs, fleurs et oiseaux, mais dans des styles innovants.

Le mouvement shin hanga est représenté dans l’exposition avec Kawase Hasui (1883-1957), Kasamatsu Shirō (1898-1991) ou encore Yoshida Hiroshi (1876-1950) et leurs paysages baignés par la lumière du soleil levant ou, a contrario, subissant les assauts de lourdes averses de pluie ou de neige. Hashiguchi Goyō (1880-1921), Itō Shinsui (1898-1972) ou Torii Kotondo (1900-1976), se sont spécialisés dans les portraits de femmes d’une grande beauté, légèrement rêveuses, tandis que d’autres encore, et plus particulièrement Kobayakawa Kiyoshi (1889-1948), se sont attachés à la création d’estampes représentant des moka (« filles modernes »), femmes indépendantes et soucieuses de suivre les codes de la mode occidentale.


Sōsaku hanga, « l’estampe créative »

S’inspirant de pratiques occidentales et cherchant à rehausser le statut de la gravure, les partisans du courant sōsaku hanga voulurent rendre à l’artiste le contrôle de toutes les étapes de la réalisation de ses œuvres, sans intervention d’artisans spécialisés comme le graveur ou l’imprimeur. Ainsi, la marque du ciseau sur le bloc de bois devint l’expression de la personnalité de l’artiste, comme l’était le trait de pinceau du calligraphe ou du peintre sur le papier. En comparaison avec les estampes de shin hanga, le résultat est souvent plus brut, empreint d’un sentiment de spontanéité, d’impromptu, voire d’inachevé.

Contrairement aux estampes shin hanga qui attiraient des acheteurs étrangers, celles du courant sōsaku étaient vendues à un public essentiellement japonais, par souscription ou lors d’expositions.

Les sōsaku hanga sont représentés dans l’exposition par certaines des plus belles créations de l’artiste Yamamoto Kanae (1882-1946), qui passa plusieurs années en France à étudier la peinture occidentale et à réaliser des estampes tout à fait exceptionnelles des paysages et des habitants de la Bretagne.

Onchi Kōshirō (1891-1955), figure de proue de ce mouvement, était résolument attaché à l’idée que l’artiste devait graver lui-même ses planches. Ses portraits poignants de femmes et ses paysages urbains frôlant l’abstraction figurent parmi les estampes emblématiques de l’expression artistique japonaise du XXe siècle et sont en outre d’une grande rareté.

Par ailleurs, l’exposition accordera une place importante aux artistes qui ont dépeint la réémergence du Tōkyō moderne après les ravages causés par le grand tremblement de terre du Kantō, en 1923. À travers ces œuvres, on voit ainsi s’ériger des bâtiments d’inspiration occidentale et on assiste à la transformation d’une ville qui se modernise.