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“Performing Books #2 : Hannah Darabi” Rue enghelab, la révolution par les livres. Iran 1979/1983
au Bal, Paris

du 9 janvier au 11 février 2019



www.le-bal.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse par Hannah Darabi et Chowra Makaremi, le 9 janvier 2019.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Hannah Darabi, Reconstructions 3 : « Cleaning up » the opposition, 1980-1983, 2018.
2/  Hannah Darabi, Reconstructions 4 : War, 1980-1988, 2018.
3/  La révolution de la lumière, ouvrage collectif, 1981

 


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Interview de Hannah Darabi, artiste photographe et collectionneuse,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 9 janvier 2019, durée 30'44". © FranceFineArt.
(à gauche Chowra Makaremi, à droite Hannah Darabi)

 


extrait du communiqué de presse :

 

conceptrice du projet PERFORMING BOOKS  : Emilie Lauriola, responsable de la librairie du BAL
commissaires de l'exposition  : Hannah Darabi et Chowra Makaremi




PERFORMING BOOKS, format exploratoire, à l’initiative du BAL Books, présente chaque année en janvier une collection de livres réunie par un artiste, un chercheur ou un amateur autour d’une thématique précise. Débats, performances, workshops, concerts : en activant la collection pour se confronter aux questionnements qu’elle suscite, LE BAL se transformera en laboratoire de recherche autour du livre. Le livre en tant que geste politique est ici le vecteur d’une réflexion critique sur notre société.


“Le titre Rue enghelab renvoie à cette rue de Téhéran qui concentre un nombre important de librairies et de maisons d’édition. Le mot « enghelab », qui en persan signifie « révolution », fut choisi pour désigner cette rue peu après les événements de 1979.” — Hannah Darabi

A l'occasion du 40ème anniversaire de la révolution iranienne, LE BAL présentera le projet de l'artiste Hannah Darabi autour de sa collection de livres photographiques et politiques. Publiés entre 1979 et 1983, courte période de relative liberté d’expression correspondant à la fin du régime du Shah et aux débuts du gouvernement islamique, ces livres témoignent d’une ébullition politique intense. Cette période, fondamentale pour comprendre l’histoire de ce pays au 21ème siècle, est décryptée par Chowra Makaremi, anthropologue et chercheuse au CNRS.

Afin de proposer une autre lecture de cette collection, Hannah Darabi fera dialoguer ses livres avec un travail artistique personnel composé de photographies contemporaines de sa ville natale, Téhéran, et des images-documents existants tels que des photos de famille, des images de médias ou des cartes postales.






L’exposition : Une histoire politique des livres


“Les livres, outils de résistance intellectuelle, sont aussi la trace du pouvoir répressif contre lequel ils luttent. ”— Chowra Makaremi

« La période de tumultes mais aussi de fragilité du pouvoir, comprise entre la fin du règne du shah, en 1977, et la solidification de l’État post révolutionnaire en 1983, offre dans l’histoire contemporaine iranienne un contexte unique de liberté dans la production et la diffusion des livres. En des temps où les technologies audiovisuelles n’ont en rien la souplesse, la facilité d’usage et de diffusion d’aujourd’hui, ces ouvrages vont devenir des acteurs majeurs de la scène politique et sociale. Cette période à cheval entre deux régimes nous invite à regarder la société iranienne en nous affranchissant de la césure nette de la révolution qui marque l’histoire de ce pays.

Loin des lectures a posteriori de l’histoire, ce moment d’incertitude, où tout perd de son évidence (la chute prochaine du shah, la nature de la République islamique à venir), est un laboratoire où s'expérimentent de nouvelles façons d’articuler activités artistique, intellectuelle et politique. Cette activité foisonnante et anarchique brise toutes les règles éditoriales et riposte à la censure en même temps qu’elle rend matériellement palpable le climat politique étouffant par l’amateurisme et le bricolage auxquels elle accule les opposants.

La boulimie de lecture atteste du mouvement double et parfois ambivalent qui anime une génération : le désir d’ouverture au monde extérieur et le désir d’affirmer une identité iranienne « moderne » indépendante des impérialismes.

Ces quelques années occupent une place à part dans l’histoire éditoriale du pays. Jamais le livre ne fut et ne sera aussi libre que durant cette période. Et pourtant, au même moment, le livre devient peu à peu un instrument de propagande politique, et l’édition le laboratoire où s’expérimentent toutes les formes de diffusion d’émotions, d’idéologies et d’opinions. Après la révolution, la propagande du nouveau régime accorde une place plus importante que jamais à l’iconographie. L’image, omniprésente, en couleur, devient le fer de lance de la construction idéologique. » — Chowra Makaremi


L'exposition s'achèvera le lundi 11 février, date d’anniversaire de la révolution iranienne, par une journée de débats et de conférences coordonnée par Chowra Makaremi, autour de la violence d’État, et sera accompagnée d’un livre co-édité par LE BAL et Spector Books avec les contributions d’Hannah Darabi et de Chowra Makaremi. “Il y quarante ans, la révolution de 1979 transformait l’Iran en un immense laboratoire politique, bousculant les idées reçues sur la révolution (qui la fait ? comment ? au nom de quoi ?) et marquant l’apparition d’un fait marquant de notre monde contemporain, l’islam politique. Il s’agit de revenir sur cet événement en sondant ce qu’il est devenu, mais aussi ce qu’il n’est jamais devenu : Quelle en fut l’expérience ? Qui en furent les acteurs ? Quelles en restent les mémoires ? Quel paradigme ce retour au plus près de l’événement nous offre-t-il pour comprendre d’autres mouvements aujourd’hui et leurs devenirs, de l’Egypte à la Syrie ? ”






Biographies :


Hannah Darabi


« Née en 1981, au début de la guerre Irak-Iran, une période saturée de propagande islamique, j’ai grandi dans un contexte de récits contradictoires concernant cette révolution – une histoire officielle versus des micro histoires qui la mettaient continuellement en cause mais qui étaient trop fragmentées pour pouvoir s’y substituer » — Hannah Darabi

Artiste photographe iranienne née en 1981 à Téhéran, Hannah Darabi a étudié à la Faculté des Beaux-Arts de Téhéran, puis à l'Université Paris VIII Saint-Denis. Aujourd'hui installée à Paris, son pays d’origine reste le sujet principal de la plupart de ses séries photographiques. Afin de faire apparaître la situation politique et les conditions économiques singulières de ce pays, elle crée des séries dans lesquelles ses photographies interagissent avec d'autres matériaux, tels que du texte, des images d'archives ou des objets.

Parmi les différentes formes de représentation qu'elle explore, le livre d'artiste occupe une place privilégiée. Ses livres font partie de collections publiques et privées, tels que le Museum of Modern Art (Library and Archives) New York, la Bibliothèque Kandinsky (Centre Pompidou, Paris), la BNF (Bibliothèque nationale de France) et la Bibliothèque royale de Belgique (Bruxelles).


Chowra Makaremi
Chowra Makaremi est anthropologue et chercheuse au CNRS. Ses travaux portent sur les formes juridiques et ordinaires de la violence d'Etat et l’expérience qu’en font les sujets, notamment en situation d’exil. Ils explorent différentes formes d’écriture, notamment le récit narratif et le cinéma documentaire. Son livre Le Cahier d’Aziz (Gallimard, 2011), inspiré des mémoires de son grand-père Aziz Zarei, retrace une histoire minoritaire de la révolution iranienne à travers ses épisodes de répression collective et de massacres. Il s'attache notamment aux dispositifs d’invisibilités mis en place par le pouvoir et aux pratiques intergénérationnelles de souvenir qui y répondent au sein de la société.