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“La Rivière m’a dit”
Le Plateau, Frac Île-de-France, Paris

du 24 janvier au 14 avril 2019



www.fraciledefrance.com

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 23 janvier 2019.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Melanie Bonajo, Night Soil #3 / Nocturnal Gardening, 2016. Collection frac île-de-france. © Melanie Bonajo.
2/  Charlotte Cherici, POURQUOI TORDU ? , 2018. Collection frac île-de-france. © Charlotte Cherici.
3/  Nashashibi / Skaer, Why Are You Angry ? , 2017. Collection frac île-de-france. © Nashashibi / Skaer.

 


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Interview de Xavier Franceschi, directeur du Plateau - Frac Île-de-France et commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 23 janvier 2019, durée 8'53". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissaire : Xavier Franceschi, directeur du Plateau - Frac Île-de-France



Avec Melanie Bonajo, Charlotte Cherici, Nashashibi/Skaer, Ben Rivers, Ben Russell, Margaret Salmon.

Qu’il s’agisse d’un étrange voyage à Tahiti sur les traces de Gauguin, du portrait d’un solitaire reclus au milieu des bois philosophant sur l’origine et le destin de l’humanité, de l’apprentissage en pleine forêt de la faune par des enfants, d’une scène confinant au mythe montrant un groupe d’hommes, de femmes et d’enfants se baignant dans une rivière, des portraits de quatre femmes engagées dans des formes de vie à rebours des conventions établies, ou bien des enregistrements et visions de séances de guérison en Amazonie péruvienne, l’exposition La Rivière m’a dit donne à voir une série d’oeuvres au sein desquelles la nature, de diverses manières, occupe une place primordiale.

Aborder la question de la nature nous place inévitablement dans une perspective plus que sombre. Le désastre écologique annoncé devient jour après jour une réalité plus insupportable, alors que l’homme ne parvient toujours pas à redéfinir son rapport vital au monde.

Sans que l’exposition et les oeuvres elles-mêmes adoptent nécessairement des partis pris ouvertement politiques et écologiques, La Rivière m’a dit propose un parcours qui, s’il est teinté de nostalgie et semble se faire l’écho d’un paradis perdu, semble indiquer d’autres voies possibles.

Composée exclusivement de vidéos pour la plupart issues de la collection, La Rivière m’a dit se déroule comme un long poème visuel dans les espaces plongés dans le noir du Plateau : un paradis perdu ou bien, plus positivement, un espace providentiel de vraie régénérescence.



Extraits du journal

“ – Dès le départ, on éprouve une étrange sensation. Nous sommes entre passé et présent, ou plutôt entre visions du passé et visions du présent… Le film – c’est bien d’un film dont il s’agit, en 16 mm : là-aussi on se démarque du support numérique bien contemporain –, passant régulièrement du noir et blanc à la couleur, semble jouer de ce caractère pour le moins équivoque, intemporel… C’est un film récent ?
– Oui, il date de 2017. Mais effectivement, le film se fonde en partie sur le rapport potentiellement ambigu entre l’image que l’on peut encore se faire, en Occident, de Tahiti – c’est bien là que le film a été tourné – et sa réalité aujourd’hui. Le début du film est à ce titre assez éloquent : on part du plan fixe d’un étonnant palmier – en réalité un « ravenala » (« arbre » en malgache) – qui peut évoquer ces magnifiques parures et autres coiffes traditionnelles d’Amérique du sud ou de Nouvelle-Guinée (...)
– Ce qui s’ensuit est plus troublant encore… Nous assistons à une scène en intérieur où deux jeunes femmes prennent tour à tour la pose pour finir par composer une sorte de tableau vivant (...)
– C’est d’autant plus troublant que nous avons une forte impression de déjà-vu…
– C’est vrai…
– Et pour cause : le tableau vivant en question est une reconstitution fidèle d’un tableau de Gauguin intitulé Manao Tupapau et peint en 1892. (...) Un peu plus loin, c’est Arearea novarina ino (1894) qui est évoqué et surtout, pièce qui donne son titre au film, on peut percevoir Why are you angry (No te aha oe riri) (1896) à travers une scène en extérieur où l’on voit un ensemble de femmes rassemblées devant une maison.
– Pourquoi ces reconstitutions ?
– C’est l’un des objets du film, du voyage, j’allais même dire. (...)
– Du coup, le film serait le rêve du rêve que Gauguin a eu de Tahiti ?
– En quelque sorte. Et cela même si le médium utilisé – le film, donc – se conçoit, se rêve (…) comme enregistreur du réel…
(...)
– J’ai bien compris que l’une des choses qui peut relier l’ensemble des films proposés dans cette exposition est le rapport qu’on peut entretenir avec la nature. Ici, ça semble évident. On nous présente une série d’oiseaux, puis on nous propose un plan virevoltant sur des arbres, des frondaisons. Mais quel est le but de la manoeuvre ?
– Je ne suis pas sûr qu’il y ait un but en particulier. Le film adopte clairement un registre documentaire, voire scientifique au début avec cette présentation d’oiseaux dont on donne le nom en voix off avec des enfants
– ça fait inventaire, nomenclature d’une faune donnée –, puis on bascule dans un autre registre que l’on pourra dire poétique pour aller vite, qui du coup donne un statut assez singulier à l’ensemble. (...)
– Doit-on y voir une métaphore de l’emprise néfaste de l’homme sur la nature ?
– Je ne le pense pas, pas de façon aussi littérale ; même si on ne peut ne pas y penser et l’évoquer. Je crois qu’il s’agit réellement – dans un premier temps, donc – de faire connaître à des enfants une série d’oiseaux habitant à proximité, dans les bois environnants. En parallèle, l’auteur a produit un autre film beaucoup plus long fondé sur un principe simple et précis : s’immerger avec des enfants pendant plusieurs jours dans la forêt – nous sommes en Écosse – pour qu’ils aient un contact direct avec la nature et notamment la faune et la flore qui y vit. Ça s’appelle Églantine, du nom de la fille de l’artiste qui participa à l’expérience. Là aussi, sur cette base et ce rapport direct au réel, l’oeuvre bascule ensuite dans une sorte de fiction…
(...) ”