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“Félix Fénéon 1861-1944” Les arts lointains
au musée du quai Branly - Jacques Chirac, Paris

du 28 mai au 29 septembre 2019



www.quaibranly.fr

 

© Anne-Frédérique Fer, présentation presse, le 27 mai 2019.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Walker Evans, Figure : Detail, 1935. N° inventaire  : PA000037_47. Tirage sur papier baryté monté sur carton, 25,9 x 31,4 cm. © musée du quai Branly - Jacques Chirac. © Walker Evans Archive, The Metropolitan Museum of Art.
2/  Maximilien Luce, Félix Fénéon, 1901. Huile sur toile, 45,5 x 39 cm. © RMN - Grand Palais - Adrien Didierjean.
3/  Hache ostensoir, Nouvelle Calédonie, 19ème siècle. Bois, pierre, fibre, noix de coco et coquillage, 53 × 23 cm (diamètre pierre). Collection particulière, anc. coll. Félix Fénéon. © Sotheby’s / Nicolas Dubois.

 


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Interview de Isabelle Cahn,
conservatrice générale des peintures au musée d’Orsay et co-commissaire de l'exposition,

par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 27 mai 2019, durée 10'14". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaires de l’exposition :
Isabelle Cahn, conservateur général des peintures, musée d’Orsay
Philippe Peltier, ancien responsable de l’Unité patrimoniale Océanie – Insulinde au musée du quai Branly – Jacques Chirac
Au Museum of Modern Art, New York, le commissariat est assuré par Starr Figura, conservatrice, et Anna Blaha, assistante curatoriale du département des dessins et estampes du Museum of Modern Art, New York




Critique d’art, éditeur, directeur de galerie, collectionneur de peintures et d’arts « lointains », Félix Fénéon – figure centrale du monde intellectuel et artistique au tournant du 20e siècle – défend une vision décloisonnée de la création. Le musée du quai Branly – Jacques Chirac, les musées d’Orsay et de l’Orangerie, The Museum of Modern Art, New York rendent pour la première fois hommage à sa personnalité hors du commun avec une exposition conçue tel un portrait en deux chapitres.

Le premier chapitre, exposé au musée du quai Branly – Jacques Chirac, revient sur les choix de Félix Fénéon en tant que collectionneur et sur la constitution de sa collection remarquable, comptant un nombre considérable de peintures et l’un des plus importants ensembles d’arts extra-européens de son époque.

Le second chapitre présenté au musée de l’Orangerie, à l’automne prochain, évoque les convictions anarchistes de Félix Fénéon et son action en faveur des artistes à travers ses critiques, expositions et acquisitions. Promoteur du Néoimpressionnisme, Fénéon a défendu avec passion un art nouveau à travers les oeuvres de ses amis pointillistes, Seurat et Signac en particulier. Il fut également un membre actif du cercle de La Revue blanche avant de s’engager, en 1906, aux côtés des Fauves et des Futuristes à l’époque où il était directeur artistique de la galerie Bernheim-Jeune.

De la révélation des arts non-européens à la publication des Illuminations de Rimbaud en passant par la défense des symbolistes et l’émergence d’un nouvel ordre esthétique, cette exposition en deux temps célèbre la sensibilité moderne de Félix Fénéon, à la fois passeur et découvreur.

En 2020, The Museum of Modern Art, New York présentera une synthèse de ces deux expositions.

Au musée du quai Branly – Jacques Chirac, les oeuvres africaines et océaniennes montrées en regard de toiles contemporaines de certains artistes qu’il a défendus retracent l’histoire de sa collection et son rôle décisif dans l’évolution du regard porté sur les arts extra-européens. Auteur d’une enquête sur les « arts lointains », publiée en 1920 dans Le Bulletin de la vie artistique, Félix Fénéon oeuvre pour la reconnaissance des arts non-occidentaux en questionnant le statut de ces sculptures et objets. « Seront-ils admis au Louvre ? » s’interroge-t-il alors dans un article perçu aujourd’hui comme l’un des textes fondateurs du musée du quai Branly – Jacques Chirac, près d’un siècle avant le manifeste de Jacques Kerchache*.

Au travers d’une sélection d’oeuvres majeures qu’il a aimées, défendues et collectionnées tout au long de sa vie, l’exposition révèle l’importance de la collection de Fénéon. Le parcours qui s’ouvre sur un portrait par Maximilien Luce, présente les multiples facettes de l’homme, à la fois critique, directeur de La Revue blanche, éditeur. La première section, « L’Afrique noire et ses amateurs », permet au visiteur de comprendre dans quel contexte historique et culturel Félix Fénéon a constitué sa collection. Le visiteur découvre autour de figures artistiques et littéraires de l’époque comme le marchand d’art Paul Guillaume, l’artiste Lucie Cousturier ou d’autres amis de Félix Fénéon, la passion croissante pour « l’art nègre » dans les années 1920. La seconde section évoque plus précisément l’engagement de Félix Fénéon pour les arts extra-européens au travers de l’enquête publiée dans Le Bulletin de la vie artistique et de sa participation, par des prêts généreux, aux grandes expositions d’art primitif dans l’entre-deux guerre. Enfin, la troisième séquence de l’exposition offre un panorama de la collection de Fénéon, qui en son temps apparu rapidement comme incontournable.

Des statues africaines anthropomorphes et féminines aux Poseuse de Seurat, la proximité des oeuvres permet un dialogue entre des techniques, époques et origines différentes. L’exposition rend compte du regard visionnaire de Félix Fénéon – dépourvu de frontières. Fidèle à ce regard près d’un siècle plus tard, le musée du quai Branly – Jacques Chirac lui rend hommage.


* Les chefs-d’oeuvre du monde entier naissent libres et égaux, Jacques Kerchache, 1990






Portrait(s) de Fénéon
La vie de Félix Fénéon est à l’image du personnage : à multiples facettes. Anarchiste, directeur de revues, marchand d’art, collectionneur, témoin des avantgardes de la fin du 19e siècle et de la première moitié du 20e siècle, Fénéon a défendu une vision décloisonnée de la création au moment du basculement de l’art vers la modernité.Comme nombre de ses amis peintres, il côtoie les milieux anarchistes. Attaché aux idées libertaires, il refuse les contraintes et défend pendant toute sa vie les formes nouvelles d’expression et les idées politiques les plus progressistes. Découvreur de talents littéraires et artistiques, il s’engage en faveur d’un art nouveau. En témoigne son appui aux écrivains symbolistes, sa défense de la peinture postimpressionniste de Seurat, Signac ou Matisse.Félix Fénéon est également un grand collectionneur. Qui d’ailleurs, mieux que sa collection, dit sa lucidité face aux révolutions esthétiques ? Aux murs de son appartement figurent des oeuvres de Manet, Bonnard, Vuillard, Modigliani, Masson et Ernst. Les tableaux disparaissent petit à petit derrière des sculptures des pays « lointains » - l’un des plus importants ensembles d’arts d’Afrique et d’Océanie de l’époque - et dont il est probablement l’un des tout premiers admirateurs et collectionneurs. Auteur en 1920 du plaidoyer « Seront-ils admis au Louvre ? », il interroge le statut de ces arts et oeuvre pour leur reconnaissance.

L’Afrique noire et ses amateurs
Dans les premières années du 20e siècle, l’art africain – tantôt perçu comme une étrangeté « exotique », tantôt réduit à des objets célébrant des « idoles locales » – commence peu à peu à être considéré. Cette reconnaissance est l’un des faits majeurs de la modernité. Le public découvre notamment cette production à l’occasion des expositions universelles et coloniales organisées avant la Première Guerre mondiale. Les musées d’ethnographie destinés à présenter et étudier « l’histoire des moeurs et des coutumes des peuples de tous les âges », les premières expositions d’art africain en 1912, en Allemagne, en 1914 à New York dans la galerie d’Alfred Stieglitz, ou encore en 1919, à Paris, dans celle de Paul Guillaume, vont également oeuvrer à la reconnaissance de cet art. Si les collectionneurs de sculptures africaines sont rares avant 1914, les oeuvres suscitent néanmoins et de plus en plus un vif intérêt esthétique chez certains artistes et collectionneurs. Parmi les premiers amateurs, se trouvent deux amis proches de Fénéon : les poètes Charles Vignier et Guillaume Apollinaire, ainsi que Jos Hessel, qui fut un temps directeur de la galerie Bernheim-Jeune.

Fénéon collectionneur
Outre les oeuvres impressionnistes, post-impressionnistes et modernes qu’il rassemble au cours de sa vie, Fénéon acquiert donc près de 500 sculptures africaines et océaniennes. Faute de témoignage, la date exacte à laquelle il achète ses premières oeuvres reste mystérieuse. Sa connivence avec les premiers amateurs, artistes et collectionneurs, laissent supposer qu’il a probablement acquis des pièces avant la Première Guerre mondiale. Fénéon fut ainsi parmi les premiers à s’intéresser à l’art africain. Au début des années 1920, sa collection est déjà renommée. Des peintres étrangers et des amateurs demandent à la voir. Défenseur d’une vision décloisonnée de la création, il contribue à la reconnaissance des arts non-occidentaux, notamment par des prêts généreux aux grandes expositions d’arts africains dans l’entre-deux guerre.

La collection
Parmi les très nombreuses oeuvres d’« art lointains », se trouvent des masques en bois peint, des statuettes, des cuillères, des haches, des coupes, des reliquaires ou encore des bois de lit de Madagascar. La collection de Fénéon, à l’image du personnage, frappe par son éclectisme. Elle comprend ainsi des objets africains rares ou atypiques comme une sculpture Bijogo, un masque Janus du Congo belge, une étonnante sculpture Baga ou un masque de Tanzanie. Certaines régions ne sont représentées que par quelques pièces. Ainsi le Cameroun, Madagascar (avec huit bois de lit historiés) ou le Togo. Objets rares, atypiques … et même du quotidien : Fénéon emprunte des chemins inattendus lorsqu’il acquiert un étonnant ensemble de poulies de métier à tisser. Présentés aux Arts Décoratifs en 1923, elles surprennent spécialistes et visiteurs. Trois pays sont majoritairement représentés : la Côte d’Ivoire, le Congo français et le Gabon français. Plus étrange, au regard des goûts de l’époque, la collection compte très peu de pièces du Soudan français. Un seul objet, une coupe, illustre l’art des Indiens d’Amérique et quelques-uns seulement, en raison de leur rareté, proviennent d’Océanie, dernier domaine auquel Fénéon s’intéresse. Fénéon rédige, probablement au début des années 1930, un catalogue exhaustif de sa collection. Chaque pièce fait l’objet d’une notice. Certaines de ces notices sont de simples descriptions, d’autres sont des remarques teintées d’humour : « Rompant avec l’impassibilité qui est de rigueur dans l’art nègre, l’homme nu ici catalogué, exprime sans détour combien ses tatouages, sa coiffure et sa barbe l’enchantent. ». Lors de sa vente en 1947, la collection regroupe plus de 400 pièces. Ce chiffre impressionnant ne rend probablement pas compte de tous les objets acquis par Fénéon au fil des ans. Comme tout collectionneur, il a vendu quelques objets et a aussi généreusement offert à ses amis de nombreuses sculptures d’art africain.