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“La Joconde nue” article 2733
au Domaine de Chantilly

du 1er juin au 6 octobre 2019



www.domainedechantilly.com

 

© Anne-Frédérique Fer, voyage et présentation presse, le 29 mai 2019.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Atelier de Léonard de Vinci, La Joconde nue. Chantilly, musée Condé, DE-32. © RMN-Grand Palais domaine de Chantilly-Michel Urtado18-542566
2/  Clouet, A Lady in her bath. © National Gallery of Art, Washington.
3/  Carlo Antonio Procaccini, La nuda di Leonardo. © Academia Carrara, Bergame.

 


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Interview de Mathieu Deldicque,
conservateur du patrimoine au musée Condé et co-commissaire de l'exposition,

par Anne-Frédérique Fer, au Domaine de Chantilly, le 29 mai 2019, durée 7'25". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

commissariat :
Mathieu Deldicque, conservateur du patrimoine au musée Condé.
Vincent Delieuvin, conservateur en chef au département des Peintures du musée du Louvre, en charge de l’art italien du XVIe siècle.
Guillaume Kazerouni, responsable des collections anciennes (peintures et dessins) du musée des Beaux-Arts de Rennes.




Le 500e anniversaire de la mort de Léonard de Vinci est l’occasion de célébrer, au Domaine de Chantilly, le génie de cet artiste en présentant une exposition inédite dédiée à l’une de ses oeuvres phares, quoique méconnue et énigmatique : la Joconde nue.

Le musée Condé de Chantilly conserve un carton (c’est-à-dire un dessin piqué servant à reporter une composition sur un panneau) de grande taille représentant une femme nue à mi-corps adoptant en grande partie la pose de la célébrissime Joconde conservée au musée du Louvre : connu sous le nom de Joconde nue, ce chef-d’oeuvre n’en finit pas d’interroger.

Grâce à des prêts internationaux très ambitieux, l’exposition qui s’étend du 1er juin au 6 octobre 2019 tente de percer une partie du mystère de cette véritable icône.



La naissance d’un genre : autour de Simonetta Vespucci

La composition de la Joconde nue inventée par Léonard de Vinci correspond à des recherches en germe dans les milieux néoplatoniciens de la Florence des années 1480 que le maître avait connus. En témoignent les portraits de Simonetta Vespucci, beauté fatale prématurément décédée qui fut l’objet de l’amour platonique de Julien de Médicis. Botticelli et Piero di Cosimo la représentèrent nue et donnèrent naissance à un sujet pictural à part entière, aux multiples significations et à la croisée des genres. Pour ces artistes, et parallèlement ceux de Venise (on admirera notamment le fameux Portrait de femme de Bartolomeo Veneto conservé au Städel Museum de Francfort), le portrait féminin dénudé devint l’archétype de la beauté universelle et idéale.


Léonard de Vinci et la Joconde nue

Le coeur de l’exposition sera consacré au prestigieux carton de Chantilly dit de la Joconde nue, acquis fort cher par le duc d’Aumale en 1862. Conçu sur le schéma de la Joconde du Louvre avec laquelle il partage des dimensions à peu près similaires, ce chef-d’oeuvre sur papier fait de charbon de bois et de rehauts de blanc de plomb est le support d’une polysémie digne de l’esprit fécond de Léonard de Vinci : sans être le reflet d’un modèle précis, cette Joconde érotique représente vraisemblablement pour l’artiste l’idée de la beauté idéale, renvoyant à l’antique.

Les analyses de laboratoire ont permis de montrer que le carton de Chantilly servit de poncif pour des tableaux créés au sein de l’atelier du maître italien. Pour la première fois, ceux-ci seront exceptionnellement réunis. Nombre des élèves et suiveurs de Léonard ont en effet repris cette composition, s’en sont inspirés ou en ont transformé le sens. Ce sera l’occasion unique de rassembler plusieurs répliques, de les comparer au carton de Chantilly et entre elles.


Qui a créé la Joconde nue de Chantilly ? Le résultat des analyses scientifiques enfin dévoilé !

Une étude de laboratoire a été réalisée au Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France (C2RMF), à Paris, à l’automne 2017. Elle a permis d’étudier de façon entièrement nouvelle la technique d’exécution de cette oeuvre ainsi que l’histoire de ses altérations, grâce à un important dossier d’imagerie scientifique (photographies en lumière directe, dans l’infrarouge, sous fluorescence d’ultraviolets, réflectographie infrarouge), à une série d’analyses non invasives et à une étude attentive de la surface sous loupe binoculaire.

À la manière d’une enquête policière, et dans un mode immersif, le visiteur prendra connaissance des résultats des analyses scientifiques et saura enfin qui a pu réaliser ce fameux dessin.

Les analyses menées sur le chef-d’oeuvre de Chantilly permettent en effet aujourd’hui d’affirmer que ce carton a été exécuté dans l’atelier de Léonard de Vinci, et avec de grandes chances par l’artiste lui-même !


La Joconde nue dans la France de la Renaissance

La Joconde nue fut très tôt connue en France, par le biais d’un original ou d’une copie. Après Joos van Cleve, François Clouet, fils du portraitiste de François Ier, s’en inspira pour sa Dame au bain (Washington, National Gallery of Art), une composition promise à un brillant avenir, placée aux confins du portrait d’accouchée, de l’allégorie de la fécondité ou de l’amour et de la peinture de genre Le motif connut de notables évolutions dans la France de la deuxième moitié du XVIe siècle grâce à la production en série de tableaux autrefois attribués à la seconde école de Fontainebleau. Dames au bain ou à la toilette, femmes entre les deux âges, portraits des maîtresses d’Henri IV (dont le célèbre tableau du Louvre, Femmes au bain, dit aussi Gabrielle d’Estrées et sa soeur la duchesse de Villars) sont en quelque sorte les filles de la Joconde nue. Les femmes nues devenues des dames nues, baignant dans un univers courtois, sont alors liées à l’iconographie du printemps, de la fertilité, de la fécondité. Rapportées au thème du bain et de la maternité, voire à la galanterie, elles sont les héroïnes d’un véritable genre pictural éminemment français qui s’est épanoui jusque dans première moitié du XVIIe siècle et qui annonce la scène de genre.

En se penchant sur une oeuvre emblématique et oubliée de Léonard de Vinci, l’exposition du Domaine de Chantilly rendra hommage à l’une des inventions les plus passionnantes du maître, tout en offrant une véritable enquête d’histoire de l’art, entre la France et l’Italie de la Renaissance.






Au même moment au Domaine de Chantilly

Clouet. Le miroir des dames
Les femmes de la Renaissance à l’honneur au Domaine de Chantilly.
au Cabinet d’arts graphiques du musée Condé
du 1er juin au 6 octobre 2019

Commissariat : Mathieu Deldicque, conservateur du patrimoine au musée Condé



Le musée Condé conserve un fonds graphique unique au monde, 366 portraits dessinés par les deux plus grands portraitistes de la Renaissance française, Jean et François Clouet, et leurs ateliers. Parmi eux figurent de délicates feuilles consacrées à des modèles féminins, célèbres dames de la Renaissance (comme Renée de France, Eléonore de Habsbourg ou Diane de Poitiers) ou belles inconnues. En contrepoint de l’exposition « La Joconde nue » où il sera notamment question de la réception de cette composition de Léonard de Vinci chez François Clouet, le cabinet d’arts graphiques du musée Condé accueillera la première exposition exclusivement dédiée aux « crayons » féminins des Clouet.

« Une cour sans dames c’est un jardin sans aucunes belles fleurs. » Brantôme

Les portraits aux deux ou trois crayons de Jean (le père) et François (le fils) Clouet ont immortalisé la fastueuse cour des Valois. Ils étaient exclusivement les fruits de commandes royales, passées par François Ier, Henri II et Catherine de Médicis : poser pour ces artistes, c’était se voir reconnaître une place éminente au sein de la cour. Éléments indispensables d’une civilisation de cour, les nobles dames prétendaient à une représentation officielle, au même titre que leurs époux. Il s’agissait de fixer leur noblesse et d’inscrire, par leur introduction dans le cénacle des personnages portraiturés, leur appartenance à une société curiale qui fixait alors ses règles. Les portraits dessinés des Clouet participèrent de l’affirmation du statut et du rang des femmes, au sein d’un univers où leur place grandissait. Si Jean Clouet concentrait son métier sur les cheveux, la coiffure et la ressemblance du visage de ses modèles, l’habit et le corps gagnèrent en importance chez François. L’exposition permettra de se pencher sur l’histoire du costume et des bijoux féminins (comme l’introduction de la mode espagnole et portugaise à la cour de François Ier entre 1530 et 1536, à la faveur du mariage du roi avec Eléonore de Habsbourg), mais sur celle des usages sociaux des vêtements chez les dames de la Renaissance.


Catherine de Médicis et les portraits de ses dames
La collection de portraits dessinés du musée Condé provient en grande partie d’un fonds constitué par une grande dame de la Renaissance, Catherine de Médicis. La reine, férue des crayons des Clouet, a en effet créé l’une des premières collections d’arts graphiques connues. Entourée d’une cour féminine brillante (loin de l’image romantique de l’escadron volant !), elle aimait paraître en compagnie de ses dames qui faisaient sa fierté. Souveraine dans le domaine de la représentation féminine, elle récompensait la fidélité de celles-ci en commandant leur portrait, véritable marque d’amitié. Ces dessins, dus à François Clouet, ne reflétaient plus uniquement la beauté ou la piété de leur modèle, mais aussi leur rang, leur esprit, grâce à des visages plus individualités et des regards plus aiguisés. Les somptueuses mises des comparses de la reine, reproduites dans tous leurs détails, prirent une ampleur inégalée jusqu’ici.

Une sélection d’une quarantaine de feuilles remarquables, issues des collections du musée Condé, permettra de brosser une histoire du portrait féminin dans la France du XVIe siècle, avant l’effroi des guerres de religion.