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“Le Thé” Histoires d'une boisson millénaire  
au Musée Guimet, Paris

du 3 octobre 2012 au 7 janvier 2013



http://www.guimet.fr

© Anne-Frédérique Fer, le 11 octobre 2012.

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légendes de gauche à droite
1/  Ryônyû, (1756 – 1838), Bol chawan, Raku 9° génération. Cachet sur le côté, Raku rouge, Japon, XIX° siècle. H. 9,5cm ; D. 12,7cm. EO 2960. © Musée Guimet, Paris, Dist. RMNGrand Palais / Benjamin Soligny / Raphaël Chipault.
2/  La vente de thé, intérieur d'un magasin hantise. Encre et couleurs sur papier, Chine, Ecole de Canton vers 1820. ref : 202.10.37 - musée Dobrée, Nantes.
3/  Trois figurines féminines préparant le thé, Terre cuite engobée peinte Chine, première moitié du VII° siècle. H. 13cm, H.12,2cm, H. 10,5cm. MA 4680, MA 4681, MA 4682. © RMN-Grand Palais (musée Guimet, Paris) / Thierry Ollivier.

extrait du communiqué de presse :



Président du musée Guimet : Olivier de Bernon
Commissaire de l’exposition : Jean-Paul Desroches, Conservateur général, section Chine

Né en Chine, le thé est devenu au cours des siècles une boisson universelle et la plus populaire au monde. Cette grande exposition d’automne au musée Guimet se propose de raconter les moments forts de l’histoire du thé, son expansion sur tout le continent asiatique, ses cultures et usages ainsi que les enjeux commerciaux qu’il suscita. Ce dérivé du camélia prospérait à l’état sauvage en Chine du Sud-Ouest et fut cultivé sous forme d’arbuste aux alentours de notre ère. La boisson extraite de ses feuilles entra progressivement dans les moeurs pour gagner toute l’Asie orientale.

Au cours des deux millénaires de son histoire, sa consommation passera par trois phases :
. l’âge du thé bouilli sous les Tang (618-907),
. l’âge du thé battu sous les Song (960- 1279),
. l’âge du thé infusé sous les Ming (1368-1644).
« L’âge du thé bouilli » correspond aujourd’hui à un mode de préparation en voie d’extinction, excepté en Mongolie et au Tibet où ce bouillon est consommé mêlé à du lait ou du beurre et relevé avec des épices.
« L’âge du thé battu » est une mousse qui demeure aujourd’hui l’apanage du Japon avec notamment le chanoyu ou cérémonie du thé. Née dans le contexte de monastères bouddhiques autour du VIIe siècle en Chine et en Corée, cette pratique rituelle est exportée dans l’archipel nippon qui l’élèvera au rang d’une liturgie.
« L’âge du thé infusé » apparaît dans le milieu lettré chinois. C’est un mode de préparation qui exalte les saveurs subtiles des feuilles de thé et bientôt, sous les Qing (1644- 1911), naît le gongfucha : une vaisselle raffinée et une gestuelle codifiée permettent d’obtenir une gamme très large d’arômes. Cette pratique est encore en usage de nos jours.

Le thé : Une histoire universelle (Jean-Paul Desroches) - extrait

S’il est un sujet que le musée Guimet se devait de traiter c’est bien le thé. En effet, au même titre que le bouddhisme, le thé fait pleinement corps avec l’Asie. Ami de la méditation, il garde le coeur paisible tout en donnant des ailes à l’imagination. Vecteur identitaire et fédérateur de tout l’Extrême-Orient, il est appelé à connaître au fil des siècles une extraordinaire diffusion, au point d’être aujourd’hui, après l’eau, la boisson la plus bue dans le monde.
Jean-Paul Desroches, extraits de l’album de l’exposition

Il s’agit d’évoquer la dimension universelle du thé, la boisson la plus populaire du monde. Né en Chine, il entre dans les moeurs au début de notre ère et va gagner l’Asie orientale, le Moyen-Orient, l’Europe et l’Amérique. Au cours des deux millénaires de son histoire, sa consommation passera par trois phases : l’âge du thé bouilli sous les Tang (618-907), l’âge du thé battu sous les Song (960- 1279), l’âge du thé infusé sous les Ming (1368- 1644). L’exposition d’automne du musée Guimet se propose d’en relater ces moments forts, associant plusieurs institutions qui contribuent à enrichir le propos : le musée national du Palais à Taipei, le musée des Arts Décoratifs, le musée du quai Branly, la Bibliothèque nationale de France, le musée des beaux-arts de Rennes, le musée Thomas Dobrée de Nantes, etc., ainsi que de nombreux collectionneurs privés. Elle s’inscrit dans le sillage de l’exposition « Les séductions du palais - cuisiner et manger en Chine» qui a ouvert en juin dernier au musée du quai Branly, retraçant les traditions culinaires de l’Empire du Milieu. Focalisant principalement sur cette boisson essentielle de la culture chinoise, l’exposition du musée Guimet Le Thé - Histoires d’une boisson millénaire ne se limite pas aux seuls pays d’Asie et à leurs traditions, mais envisage leur impact dans l’histoire universelle.

L’esprit du thé
La Tonne de thé de l’artiste chinois Ai Weiwei, placée en préambule, évoque l’emprise de ce phénomène, tout en questionnant le monde contemporain. Un court-métrage du cinéaste francovietnamien Tran Anh Hung, réalisateur de l’ « Odeur de la papaye verte » explicite l’esprit du thé par la voix de Tseng Yu-hui, l’un de ses plus grands maîtres. Cet expert nous livre les saveurs, les odeurs, les parfums, les sensations qui émanent des meilleurs thés. Des peintures, des calligraphies et des livres rares introduisent à son approche botanique et illustrent sa culture.
Très tôt, en Extrême-Orient, le thé et le vin vont constituer deux sources d’inspiration littéraire. Ils s’opposent terme à terme, l’un conduisant à l’éveil et l’autre à l’ivresse. Cette contradiction est mise en scène dans un manuscrit célèbre du Xe siècle, le « Chajiu lun 茶酒論», une joute oratoire fictive entre ces deux personnages que sont le thé et le vin. A la fin d texte, apparaît une troisième figure, l’eau, qui parvient à apaiser le débat. En regard de ce manuscrit, sont placées des céramiques et des peintures, rappelant cette confrontation mémorable.

Les routes du thé
Le rayonnement des Qing permet au thé et à la porcelaine de devenir deux enjeux commerciaux majeurs précurseurs de la mondialisation. Un florilège de théières matérialise cette diffusion internationale au cours des XVIIe, XVIIe et XIXe siècles. Qu’ils s’agissent des samovars de la cour de Russie, des théières des cours mogholes, persanes ou européennes, les créateurs vont faire preuve d’une inventivité sans limite. Sèvres en France, Wedgwood en Angleterre, Meissen en Prusse, deviennent les fournisseurs des grandes maisons royales. Bientôt l’Asie, l’Europe et l’Amérique sont emportés à cette aventure commerciale des temps modernes, où les intérêts nationaux vont se jouer sur les océans, redessinant la carte du monde. Des pièces issues du naufrage du « Griffin », un vaisseau de la Compagnie anglaise des Indes provenant du Guangdong coulé le 20 janvier 1761 au large des Philippines, témoignent de ce destin tragique. La guerre d’Indépendance des Etats-Unis (1775-1783) est attisée à la suite de l’incident de la Boston Tea Party le 16 décembre 1773. Considérant les taxes sur le thé comme injustes, les colons américains prennent la décision de jeter la cargaison de 342 caisses à la mer. Au siècle suivant, l’Angleterre, en contrepartie du thé chinois, importe illégalement l’opium indien. Dès 1838, Lin Zexu 林則徐, commissaire impérial du Guangdong, décide de mettre un terme à ce commerce illicite. L’année suivante, le 3 juin, 200 000 caisses d’opium sont saisies et détruites, provoquant une représailles des Britanniques à l’origine des Guerres de l’opium (1840,1856). Après plusieurs tentatives infructueuses pour concurrencer le monopole du thé chinois, l’Angleterre parvient à percer le secret de fabrication du thé en 1848, grâce au botaniste Robert Fortune. Fruit de cet espionnage industriel, en Inde, sur les contreforts de l’Himalaya, à Darjeeling, la culture du thé est introduite à grande échelle. Dès 1887, les importations de thé indien vers l’Angleterre devanceront celles de thé chinois. Aujourd’hui, la Chine produit 29% du thé, l’Inde 25%, le Sri Lanka 9%, le Japon 3%.