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“Design en Afrique” s’asseoir, se coucher et rêver    
au Musée Dapper, Paris

du 10 octobre 2012 au 14 juillet 2013



http://www.dapper.com.fr

 

 

© Anne-Frédérique Fer, le 22 octobre 2012.

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légendes de gauche à droite
1/ CAMEROUN, Jules-bertrand Wokam, Tabouret Tombouctou, 2005, 
Wengé massif sculpté et poli à la main, 
H. : 40 cm, 
Collection particulière, 
© archives musée Dapper et Hugues Dubois.
2/ BURKINA FASO, Alassane Drabo, Cadre d’union, 2005,
 Bois et métal
, H. : 157 cm
, Collection de la Biennale d’art africain contemporain, Dakar
, © archives musée Dapper et Dominique Cohas.
3/ FRANCE / MALI, Cheick Diallo, Fauteuil Chekou, 2006, 
Métal et cuir, 
H. : 75 cm, Collection particulière, © archives musée Dapper et Dominique Cohas.



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interview de Christiane Falgayrettes-Leveau, par Pierre Normann Granier, le 22 octobre 2012, à Paris. © Samuel Hense, © FranceFineArt



 


extrait du communiqué de presse :


Commissaire : Christiane Falgayrettes-Leveau

Designers présentés :
Kossi Assou, Nicolas Sawolo Cissé, Issa Diabaté, Cheick Diallo, Alassane Drabo, Balthazar Faye, Iviart Izamba, Ousmane Mbaye, Vincent Niamien, Antonio Pépin Et Christian Ndong Menzamet, Jules-Bertrand Wokam.

 

L’exposition Design en Afrique dévoile un univers voué principalement à des objets supportant le corps. Leur conception est marquée par une créativité en prise directe avec les attitudes, les mouvements, mais aussi avec les symboles de la décoration. Formes et fonctions dialoguent pour le confort des uns et le prestige des autres.
Au-delà du temps et des frontières géographiques, les objets se transforment. Un siège, un appuie-tête, dont la réalisation nécessite souvent plusieurs journées de labeur afin de respecter les étapes successives de la taille du bois et l’inscription des motifs décoratifs, sont fréquemment remplacés par des pièces de mobilier contemporain.
Certes, les créateurs d’origine africaine appliquent en toute liberté leurs réflexions, leurs techniques, et l’inspiration de quelques-uns d’entre eux s’approche – volontairement / involontairement – des formes ancrées dans le répertoire des arts traditionnels.
L’environnement immédiat est plus qu’une source d’inspiration pour les designers. Ces derniers, utilisant largement la récupération, n’hésitent pas à travailler avec des artisans locaux, fondeurs et soudeurs. Non seulement ils bénéficient de leurs connaissances, mais ils contribuent aussi à mettre en lumière des savoir faire qui se transmettent de génération en génération. En recyclant matériaux et produits manufacturés, les artistes affirment un style, mais également un regard et une prise de conscience sur l’environnement urbain.
Design en Afrique, l’exposition et l’ouvrage, ne vise nullement la confrontation de l’ancien et du nouveau, mais essaie de montrer combien les besoins du quotidien stimulent depuis toujours la créativité.
L’art du design, ouvert à des pratiques – telle que l’installation – réservées jusqu’alors à d’autres modes d’expressions plastiques, favorise ainsi l’émergence d’esthétiques nouvelles qui entretiennent souvent un dialogue original avec les cultures traditionnelles.

« [En Afrique,] il existe du design et des designers dans des lieux et des contextes aux réalités fort diverses. Cette activité s’invente au quotidien et sur place, grâce à des créateurs engagés. De quelle manière les designers africains se situent-ils, entre ergonomie, culture, contexte et marché, entre art, innovation et relooking des objets du quotidien ? L’Afrique s’inscrit avec difficulté dans les deux secteurs principaux du design, la production industrielle de basse qualité et le design industriel de haute technologie. Des marchés locaux au pouvoir d’achat très faible, une industrie clairsemée, un déficit important de circulation et de moyens de communication, une très forte présence de produits venus d’Asie en sont les causes. Le modèle occidental de bien-être basé sur la consommation et alimenté par l’obsolescence programmée et le flux incessant de nouveautés ne convient pas. »
Joëlle Busca

 

Regards modernes sur les formes traditionnelles
Pour nourrir leur réflexion, de nombreux artistes choisissent de revisiter la vie quotidienne dans les sociétés d’Afrique subsaharienne tout en tenant compte des sollicitations du monde actuel.
En 1990, deux designers gabonais, Christian Ndong Menzamet – né en 1959 – et Antonio Pépin – né en 1956 –, ont créé une bibliothèque appelée « ngil ». La partie supérieure du meuble est dotée de grands yeux cylindriques évidés, et des cornes imposantes surmontent la tête.
Autrefois, chez les Fang, le ngil, mot désignant la société secrète et le masque lui-même, constituait un instrument de justice. Le visage dissimulé, des initiés parcouraient les villages pour traquer les individus supposés avoir commis entre autres des actes de sorcellerie. Christian Ndong Menzamet et Antonio Pépin ont donné libre cours à leur imagination, puisque ce n’est nullement la typologie « classique » du masque ngil qui les a inspirés, celui-ci ayant de petits yeux et pas de cornes. S’il évoque un archétype, le mot « ngil » renvoie ici bien plus à l’univers traditionnel où le sacré est, aujourd’hui encore, porteur de valeurs. La démarche des artistes, d’une part se nourrit du contexte culturel de leur pays, et, d’autre part, met en oeuvre des techniques modernes, tels le thermoformage et la découpe du bois au laser.
Né en 1956 en Côte d’Ivoire, Vincent Niamien, qui a fait ses études à l’École des beaux-arts d’Abidjan et a poursuivi sa formation aux Arts décoratifs de Nice, a lui aussi regardé les objets profanes et sacrés de son village natal. Sa famille est dépositaire de savoir-faire traditionnels, car son père sculptait des masques et sa mère était potière. Niamien précise que « sie », nom baule donné à l’une de ses plus belles créations, doit être traduit par « géniteur », et qu’il a souhaité ainsi rendre hommage au sien. L’élégant Fauteuil Sie, qui a obtenu le Grand prix du design à la Biennale d’art africain contemporain de Dakar, Dak’Art 1996, présente une assise très basse, comme il est d’usage dans le mobilier traditionnel africain, et un haut dossier composé de deux parties élancées. Faites de séries limitées, les créations de Niamien, marquées par des formes légères, s’inscrivent dans un registre contemporain.
Un autre artiste, Kossi Assou, né en 1958 et vivant aujourd’hui au Togo, se distingue par son attachement à des valeurs traditionnelles, tout en maintenant indépendante sa créativité. Sa démarche et son inspiration intègrent des matériaux environnants sans que le procédé de récupération ne nuise à son style dépouillé. La simplicité apparente des objets créés par Kossi Assou, à l’instar du lit composé d’une grande plaque de métal et de deux éléments en bois, dont l’un est un rondin faisant office d’appuie-tête, indique la volonté d’aller à l’essentiel : éviter le décoratif, l’anecdote, polir la matière pour mieux révéler les formes épurées.
Traditionnellement, en Côte d’Ivoire – pays d’origine de Kossi Assou –, on ne porte guère d’attention particulière à sa couche sauf pour le dernier sommeil. Chez les Senufo, il était d’usage d’exposer la dépouille d’un notable sur un lit en bois réservé à cet effet. La pièce, particulièrement imposante, était certainement destinée à un chef important. Dans la partie supérieure est intégré un appuie-tête, mais, en général, ce dernier est utilisé seul, posé à même le sol ou sur une natte.