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“DALI”  page 753   
au Centre Pompidou, Paris

du 21 novembre 2012 au 25 mars 2013



http://www.centrepompidou.fr

 

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, présentation de l'exposition par les quatre commissaires, le 19 novembre 2012.

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légendes de gauche à droite
1/  SALVADOR DALÍ, Le Grand Masturbateur, 1929. Huile sur toile - 110x150 cm. Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia. © Salvador Dalí, Fundació Gala-Salvador Dalí / Adagp, Paris 2012.
2/  BRASSAÏ, Dalí et Gala dans son appartement de Paris, 1932. Droits d’image de Gala et Salvador Dalí réservés. Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres, 2012.
3/  SALVADOR DALÍ, Autoportrait au cou de Raphaël, vers 1921. Huile sur toile - 40,5x53 cm. Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres. © Salvador Dalí, Fundació Gala-Salvador Dalí / Adagp, Figueres, Paris, 2012.


texte de Audrey Parvais, rédactrice pour FranceFineArt :

 

Trente ans après une première rétrospective, le Centre Pompidou réalise en collaboration avec le musée Reina Sofia une grande exposition consacrée à Salvador Dalí. Exceptionnelle par son importance, celle-ci présente non seulement dessins et peintures de cette icône de l'art moderne mais aussi toutes les autres formes d'expression artistique, et elles sont nombreuses, sur lesquelles il s'est penché dans le cours de sa carrière : sculptures, installations, films et interventions télévisées, écrits... Caractérisée par un choix d'œuvres prestigieux, elle se permet aussi de mettre en avant des productions que l'on a encore rarement eu l'occasion de voir exposées ainsi.

Une exposition foisonnante, à l'image de l'artiste
D'une incroyable abondance, cette rétrospective se divise en sept sections, dans un déroulement nécessairement chronologique, qui permettent de mieux appréhender les évolutions artistiques mais aussi idéologiques de Dalí. Ainsi la première section est-elle dévolue à ses débuts (les années 1920), lumineux et encore très influencés par le cubisme. Un grand espace est bien sûr dédié à la période surréaliste de sa carrière, avec des œuvres célèbres comme Le grand masturbateur (1929) ou les montres molles du tableau Persistance de la mémoire (1931), ainsi qu'à la méthode paranoïaque-critique qu'il a lui-même fondée, illustrée par son interprétation délirante de L'Angélus (1857), de Jean-François Millet. À partir des années 1940, l'exposition se déploie brusquement. Installations stéréoscopiques et écrans sur lesquels sont projetés films et interventions télévisées dans lesquels Dalí se met en scène dévorent l'espace central tandis que les œuvres inspirées par les conflits du milieu du siècle (Prémonition de la guerre civile, 1936) côtoient sur les murs les tableaux blasphématoires d'une période marquée par un retour à la religion, nouvel instrument de provocation. Enfin, toute une pièce transversale est consacrée à l'obsession de Dalí pour le cinéma, ce média des masses qui lui paraissait si plein de possibilités, avec présentation d'extraits de films (Le chien andalou, 1929) ou de projets de ballets.

Un artiste inclassable
Le parti pris de cette rétrospective, qui, loin de se cantonner à sa période surréaliste, montre toutes les facettes d'un auteur étonnamment prolifique, est d'éclairer son œuvre en s'attardant sur sa personnalité. Les tournants et les revirements que l'on observe tout au long de sa carrière trouvent ainsi leur explication dans les événements et les idées qui ont durablement marqué sa vie, que ce soient sa rencontre avec les surréalistes et sa future femme Gala dans les années 1920 ou son intérêt pour les sciences et les nouvelles technologies. L'image qui nous est donnée de Dalí est celle d'un artiste polyvalent, touche-à-tout et curieux de tout, d'un intellectuel aussi, comme en témoigne l'exposition de ses nombreux écrits. Perpétuellement à la recherche de formes artistiques inédites capables de faire entrer l'onirisme et l'irrationnel dans le monde quotidien, il ne cesse d'expérimenter de nouveaux moyens d'expression et de transgression. Ses interventions filmées, où il se met en scène avec un plaisir évident, ainsi que ses installations éphémères font de lui un performeur et un artiste plasticien avant l'heure. Le visiteur qui parcourt l'exposition entre par un œuf dans lequel est accroché une photographie de Halsman représentant Dalí en position fœtale et ressort par une pièce symbolisant le cerveau de l'artiste. Entre-temps, il a découvert un artiste complet et un personnage hors du commun, initiateur d'une véritable révolution culturelle.

Audrey Parvais

 


 

 

extrait du communiqué de presse :

 

Commissaire général :
Jean-Hubert Martin, ancien directeur du Musée national d’art moderne

Commissaires :

Montse Aguer, directrice du Centre d’Estudis Dalinians de la Fundació Gala-Salvador Dalí.  
Jean-Michel Bouhours, conservateur au Musée national d’art moderne / Centre de création industrielle. Spécialiste de cinéma expérimental, ancien directeur du Nouveau Musée de Monaco.
Thierry Dufrêne, professeur d’histoire de l’art contemporain à l’université Paris Ouest Nanterre, adjoint au directeur général de l’INHA

Scénographie :
Laurence Le Bris, architecte / scénographe, assistée par Valentina Dodi en collaboration avec Oscar Tusquets, architecte / designer

 

Le Centre Pompidou rend hommage à l’un des créateurs les plus complexes et prolifiques du XXème siècle : Salvador Dalí. Plus de trente ans après la rétrospective que l’institution lui avait consacrée en 1979-1980, cette exposition demeure à ce jour le plus grand succès de fréquentation de son histoire.
Dalí est à la fois l’une des figures magistrales de l’histoire de l’art moderne et l’une des plus populaires. Il est aussi l’un des artistes les plus controversés, souvent dénoncé pour son cabotinage, son goût de l’argent (on le surnomma « Avida Dollars ») et ses prises de position politiques provocatrices.
C’est à la fois toute la force de son oeuvre et toute la part qu’y tient sa personnalité, dans ses traits de génie comme dans ses outrances, que cette exposition, inédite, se propose d’aborder frontalement.
Plus de deux cents oeuvres (peintures, sculptures, dessins…) sont présentées dans un parcours conçu en sections chrono-thématiques : le dialogue entre l’oeil et le cerveau du peintre et du spectateur ; Dalí, pionnier de la performance, auteur d’oeuvres éphémères, manipulateur des médias considérant l’art comme un fait global de communication ; l’interrogation de la figure (persona) de l’artiste face à la tradition.
Dalí « promène » constamment le spectateur entre deux infinis, de l’infiniment petit à l’infiniment grand, contraction et dilatation qui se polarisent : la précision minutieuse flamande (référence  à Vermeer) et le baroque spectaculaire de la peinture ancienne qu’il met à l’oeuvre dans son « musée-théâtre » de Figueres. Cette oscillation se fonde sur un questionnement général  de l’identité dans lequel le monde est double : son frère mort, appelé également Salvador,  le couple rêve-réalité, l’hermaphrodisme…
Cet entre-deux est aussi un moment de l’histoire et d’une génération : entre-deux-guerres, montée des totalitarismes, affrontements idéologiques, migrations, scènes artistiques croisées (Paris / Barcelone / New York).
Parmi les chefs-d’oeuvres exposés, on peut admirer quelques grandes icônes - La Persistance de la mémoire (Montres molles), 1931, Le Grand masturbateur, 1929, Le spectre du Sex appeal, 1934 ou encore L’Énigme sans fin, 1938 - et découvrir une centaine d’oeuvres sur papier, des objets, des projets pour le théâtre ou le cinéma, des films, des photographies et des extraits d’émissions de télévision qui rendent compte de l’activité intense de « l’homme de spectacle » qu’est aussi Dalí.
La rétrospective retrace l’ensemble de l’oeuvre et éclaire le personnage de Dalí à travers un choix exceptionnel d’oeuvres majeures grâce à une collaboration très étroite nouée avec le Museo Nacional Reina Sofía de Madrid, qui présentera l’exposition du 23 avril au 2 septembre 2013,  et une participation conjointe de la Fundació Gala-Salvador Dalí, Figueres, et du Dalí Museum,  Saint Petersburg, Floride.
L’exposition montre également les innombrables oeuvres éphémères, réalisées par Dalí devant  une assistance ou une caméra, qui font de lui un précurseur de la performance et du happening.

 

 

LE PARCOURS DE L’EXPOSITION

Le visiteur entre dans l’univers dalinien par un oeuf. Il est confronté à l’origine, au monde de la naissance et de la fertilité, au foetus, à l’oeuf, à l’oignon.

1. L’ultralocal et l’universel
Les lieux, la famille, le catalanisme : le territoire de l’enfance est vécu comme un lieu quasi magique. Les rochers, les cyprès, la plaine de l’Ampurdan, la mer, la lumière et les ombres de l’autre côté des Pyrénées sont omniprésents dans la peinture et dans la pensée de Dalí. C’est le lieu, également, de la famille où se fondent les mythes de la personnalité double et de Guillaume Tell.

2. De la Residencia de « Estudiantes » aux voies du surréalisme
Résidence des étudiants (fin 1922-1926). La rencontre de Garcia Lorca et de Luis Buñuel. Le Dalí encore provincial est confronté à « La génération de 27 » réunissant poètes, écrivains, peintres et cinéastes. Dalí s’inspire de plus en plus de l’avant-garde qu’il avait déjà découverte à Figueres. Peu à peu, il découvre  la peinture surréaliste par les revues et les expositions et construit un monde pictural à la fois nourri  de Joan Miró, Yves Tanguy, Hans Arp ou Max Ernst et de l’imaginaire collectif développé à la Residencia (Putrefactos).

3. Le surréalisme et la méthode paranoïaque-critique
L’accomplissement de la sexualité de Dalí lié à sa rencontre avec Gala Éluard, s’accompagne d’un tournant dans sa carrière avec les expositions à Paris (Camille Goemans, Pierre Colle…), son adhésion  au surréalisme et les premières oeuvres blasphématoires. Ce mouvement historique est émaillé de transgressions daliniennes : révolte contre l’autorité du père, crise d’identité, allusions à la coprophagie. La méthode paranoïaque-critique transforme et subvertit le monde. Dalí propose de substituer  à l’automatisme passif du surréalisme (le dessin automatique, les cadavres exquis, les frottages, etc...) une méthode active fondée sur le délire d’interprétation paranoïaque. La méthode dalinienne anticipe de quelques années la publication de la thèse de Jacques Lacan sur la paranoïa. Sur un régime de visibilité qui lui est propre et qu’il théorise, Dalí développe les images doubles, chefs-d’oeuvre d’ambiguïté visuelle.
L’Angélus de Millet : exemple paradigmatique de la méthode paranoïaque-critique. Dalí se fait historien d’art et part à la recherche de la vérification scientifique de son interprétation délirante de cette oeuvre. Avec le concours du musée d’Orsay qui a consenti le prêt exceptionnel du tableau de Jean-François Millet, L’Angélus, 1857-1859.

4. Mythes et histoire
Les dictateurs Hitler, Franco, Lénine : fascination ou critique ? Ne sont pas occultés les rapports troubles qu’entretient Dalí avec les détenteurs du pouvoir absolu, figures à ses yeux désirables et objets de projection. «Cannibalisme» : Dalí, artiste non engagé, traite l’histoire qui s’écrit avec la grille de la méthode  paranoïaque-critique. La guerre civile dans son pays d’origine l’éloigne durablement de cette réalité ;  il se réfugie dans l’interprétation délirante des personnages ou de leurs attributs : le « dos dodu » d’Hitler, les moustaches de Lénine….

5. Théâtralité
Après Un Chien Andalou, 1929, et L’Âge d’or, 1930, des projets cinématographiques expérimentaux non réalisés (Babaouo, Marx Brothers Giraffes, Moontide…) Dalí est sollicité par le cinéma hollywoodien  (La Maison du Dr Edwardes de Hitchcock, Destino pour Disney). Invité à réaliser les décors et costumes  de ballets (Bacchanale, Tristan Fou…) par la Compagnie des Ballets russes, Dalí ne néglige aucun média contemporain : photographie, télévision, événements dans des grands magasins ou autres lieux publics  où il démontre sa capacité exceptionnelle d’improvisation.

6. Science, mystique et théorie
Mystique et théorie : la fin de la seconde guerre mondiale dans l’apocalypse nucléaire d’Hiroshima et Nagasaki, transforme profondément la peinture de Dalí. Les secrets de la matière dévoilés par les travaux d’Einstein et d’Heisenberg sont chez Dalí une véritable révélation. Dieu est dans les atomes ou les neutrinos, même si l’artiste confesse que sa foi reste une incertitude. Dalí s’identifie au mystique saint Jean de la Croix tout en se nourrissant des théories scientifiques d’Heisenberg (Principe d’incertitude), de la cybernétique de Norbert Wiener, dans une tentative apocryphe de fusion de la religion et de la science.

7. Autoréférence et grandes machines
L’atomique Assomption : le peintre mystique ressuscite un baroque spectaculaire aux perspectives vertigineuses. Dalí, marquis de Púbol se compte désormais parmi les Grands d’Espagne : Vélasquez, Picasso, et la figure du toréador.

Sortie de l’exposition par le cerveau : on est entré corps, on sort esprit. Une évocation matérielle des circonvolutions du cerveau de Dalí.