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“Eugène Boudin” page 860
au Musée Jacquemart-André, Paris

du 22 mars au 22 juillet 2013



www.musee-jacquemart-andre.com

 

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, le 20 mars 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Eugène Boudin, Marée montante à Deauville, 1894. Huile sur toile, 55 x 80 cm. Québec, Musée national des beaux-arts du Québec, Don de la succession Maurice Duplessis. Restauration effectuée par le Centre de conservation du Québec grâce à une contribution des Amis du Musée national des beaux-arts du Québec ©MNBAQ, photo: Toni Hafkenscheid.
2/  Eugène Boudin, Plage aux environs de Trouville, 1864. Huile sur toile, 67,5 x 104 cm. Toronto, Art Gallery of Ontario, Musée des Beaux-Arts de l’Ontario - Anonymous Gift, 1991, ©2012AGO.
3/  Eugène Boudin, Venise. Le quai des Esclavons le soir, la Douane et la Salute, 1895. Huile sur toile, 46 x 65 cm. Québec, Musée national des beaux-arts du Québec, Don de la succession Maurice Duplessis. Restauration effectuée par le Centre de conservation du Québec. ©MNBAQ, photo : Patrick Altman.


extrait du communiqué de presse

 

Commissariat de l’exposition :
Laurent Manœuvre, Chef du Bureau de la diffusion numérique des collections, à  la Direction générale des patrimoines, Service des musées de France.
Nicolas Sainte Fare Garnot, conservateur du Musée Jacquemart-André

 

Pour la première fois depuis 1899, une institution parisienne organise une exposition rétrospective consacrée à celui que Corot surnomma le « roi des ciels », à travers une soixantaine de peintures, pastels et aquarelles. Eugène Boudin, que Monet considérait comme son maître et comme l’un des précurseurs de l’impressionnisme, a parcouru l’Europe dans une quête toujours renouvelée de la lumière. De sa Normandie natale à Venise, en passant par Anvers, Dunkerque, Berck, la Bretagne, Bordeaux ou la Côte d'Azur, il a su saisir l’atmosphère si particulière de chacun des lieux qu’il a visités.
Eugène Boudin, le « roi des ciels »
Connu pour ses marines et ses scènes de plage, Eugène Boudin (1824-1898) fut l’un des premiers artistes français à poser son chevalet hors de l’atelier pour réaliser des paysages. Dans ses nombreux tableaux, il s’est tout particulièrement attaché au rendu des éléments et des effets atmosphériques. Il a ainsi été l’un des initiateurs d’une vision renouvelée de la nature, précédant dans cette démarche les impressionnistes et son ami Claude Monet, qui écrivait à la fin de sa vie : « Je dois tout À  Boudin ».
Au fil des années, sa palette s’éclaircit et sa touche s’allège pour mieux restituer les reflets du ciel et de l’eau. Où qu’il soit, il peint des paysages en mouvement, dans une subtile harmonie de gris colorés. Véritable “ roi des ciels ”, Eugène Boudin a su transcrire à la perfection des éléments aussi changeants que la lumière, les nuages et les vagues.
Commissaire général de l’exposition, Laurent Manoeuvre réunit, grâce aux prêts de grands musées internationaux, une soixantaine de peintures, aquarelles et dessins qui permettent de suivre Eugène Boudin dans sa quête de la lumière et rendent un merveilleux hommage à cet artiste indissociable de la mer et de ses paysages.
Une exposition inédite avec des prêts exceptionnels
L’art de Boudin a très tôt suscité l’intérêt des amateurs américains. Dès les années 1880, il fait partie des peintres présentés aux États-Unis par le marchand Durand-Ruel. Ainsi, les musées nord-américains possèdent aujourd’hui de nombreuses oeuvres de l’artiste, pour lesquelles il n’existe pas d’équivalent dans d’autres collections publiques en Europe. Grâce aux prêts accordés notamment par la National Gallery de Washington ou le Museum of Fine Arts de Boston, certaines de ses oeuvres seront présentées pour la première fois en France depuis leur achat par des amateurs éclairés américains. Pour cette exposition, le Musée Jacquemart-André a également bénéficié du concours du Museo Thyssen-Bornemisza, du Musée national des beaux-arts du Québec, et tout naturellement du soutien du Musée d’Art moderne André Malraux du Havre et du Musée Eugène Boudin d’Honfleur, qui possèdent les plus grands fonds d’oeuvres de l’artiste en France.

 

 

LE PARCOURS DE L’EXPOSITION
Proposant une vision renouvelée de la nature, Eugène Boudin va, au fil des oeuvres et des années, s’attacher à transcrire dans ses tableaux les subtils reflets du ciel et de l’eau. Tout au long de sa carrière, il va poursuivre une quête, celle de “ cette chose si difficile à aborder : la lumière “. Se dégage ainsi une grande poésie de l’oeuvre d’un des tout premiers peintres de plein air. Pour mieux retracer les promenades et voyages de cet artiste, cette exposition propose un parcours À la fois thématique et géographique.

Salle 1 – Honfleur, les premières années
Rien ne semblait prédestiner Eugène Boudin (1824-1898) À devenir peintre. Issu d’une modeste famille normande, Eugène Boudin devient commis chez un papetier-imprimeur avant de fonder sa propre papeterie en 1844. C’est là qu’il rencontre des peintres comme Millet (1814-1875) et Troyon (1810- 1865) et qu’il développe son goût de l’art. À la suite de ses clients artistes, il décide de quitter “ un métier solide pour prendre le pinceau “.
Né À Honfleur et ayant grandi au Havre, Eugène Boudin commence par peindre sa région natale de Normandie. C’est là, face au ciel changeant de l’estuaire de la Seine, qu’il traduit en peinture les “ simples beautés de la nature “, influencé dans sa démarche par Corot et les peintres de l’École de Barbizon. Suivant leur exemple, Eugène Boudin travaille sur le motif, mais plutôt que de représenter le paysage dans une relative intemporalité, il s’attache À reproduire sur sa toile des effets lumineux aussi variés que fugitifs.
Au cours de cette période d’apprentissage difficile mais fertile en découvertes, Eugène Boudin n’acquiert pas seulement une maturité technique. Il explore divers sujets (paysage, marine, troupeaux), qu’il traite avec une liberté croissante. En juillet 1854, Eugène Boudin s’installe À la ferme Saint-Siméon, auberge populaire et bon marché, où il entraîne ses amis, Courbet (1819-1877) et le jeune Monet (1840- 1926), qu’il convertit à la peinture au cours de l’été 1858.

Salle 2 – Deauville et Trouville, premier regard sur les plages mondaines
Dans les années 1860, à l’heure où se développe la mode des bains de mer, Eugène Boudin est l’un des premiers artistes à représenter des élégantes sur les plages normandes. Lui qui aime particulièrement séjourner à Trouville assiste au développement rapide de Deauville, station balnéaire lancée par le demi-frère de Napoléon III, le duc de Morny.
Dans ses Scènes de plages, plutôt que de céder à la facilité d’une peinture anecdotique, Eugène Boudin cherche à mettre en valeur le caractère vaporeux des vêtements et l’évanescence des nuages. Il privilégie là aussi l’étude sur nature et considère ses vues de plages comme “ une reproduction assez sincère du monde de [son] époque “. Grâce À une technique extrêmement allusive, Eugène Boudin restitue parfaitement l’impression de plein air.
Pour aboutir à ces compositions peuplées de nombreuses figures, dans lesquelles un ciel immense domine de vastes étendues de sable, Eugène Boudin réalise d’innombrables études sur le motif. Il traduit l’atmosphère embuée du bord de mer en de subtils pastels, tandis que l’aquarelle lui permet de représenter le papillotement des couleurs sur les plages. Les artistes d’avant-garde comprennent vite l’intérêt de ce nouveau thème et du traitement qu’en fait Eugène Boudin. Manet, Monet, et même Degas, s’en inspireront.

Salle 3 – Entre ciel et mer, les « beautés météorologiques »
Eugène Boudin, qui travaille essentiellement d’après nature, multiplie les études de ciel, dont il décrit les variations au fil des heures et des saisons. Les séries de pastels qu’il réalise sont autant de “ beautés météorologiques “, comme aime à les appeler Charles Baudelaire qui est très tôt séduit par l’art d’Eugène Boudin.
Dans son compte rendu du Salon de 1859, le poète se plaît à décrire ces “ études au pastel improvisées en face du ciel et de la mer […] si fidèlement croquées d’après ce qu’il y a de plus inconstant, de plus insaisissable dans sa forme et dans sa couleur, d’après des vagues et des nuages “.
Ces mots de Baudelaire, dont la réputation est alors sulfureuse, contribueront à introduire Eugène Boudin dans le panthéon des artistes de la modernité. Degas, amateur exigeant de dessin s'il en fut, achètera deux pastels à la vente après la mort d’Eugène Boudin.

Salles 4 et 5 – Le « roi des ciels »
À partir de 1870, Eugène Boudin délaisse les scènes de plage car il reçoit de nombreuses commandes de marines. Il va donc voyager régulièrement, à la recherche de nouveaux motifs, et poursuivre ses pérégrinations, en France, en Belgique et aux Pays-Bas.
De la Bretagne à Bordeaux, de Rotterdam à Dunkerque, Eugène Boudin découvre de nouveaux paysages et restitue admirablement les variations de la lumière sur l’eau. Toujours sensible à la poésie des grands voiliers, il se plaît à les figurer sur fond de ciels immenses et chargés de nuages, dans des peintures généralement caractérisées par une subtile harmonie de gris.
Dans ses tableaux, il donne toujours une place prépondérante au ciel et en restitue les infimes variations par sa touche vibrante et transparente. Des oeuvres qu’il réalise au cours de ses différents voyages, Eugène Boudin dira ainsi : “ Peut-être aussi trouvera-t-on dans mes études du ciel un côté de la grande nature céleste qui n'a jamais été ni plus ni mieux exploré par mes prédécesseurs “. Eugène Boudin s’impose en effet comme le maître incontesté des représentations de ciels. Remarqué par Baudelaire et Dumas-fils dès les années 1850, ce talent particulier lui vaut d’être loué par des artistes fins connaisseurs du sujet, comme Courbet ou Corot, qui aurait été le premier à donner à Eugène Boudin le titre de “ roi des ciels “.

Salle 6 – Bords de mer, une vision poétique du quotidien
Eugène Boudin n’est pas seulement un peintre de paysages : il aime à traiter une grande variété de sujets qu’il découvre au fil de ses voyages et qui lui permettent d’expérimenter de nouvelles approches picturales. Ainsi, après avoir représenté les élégantes des plages normandes, il s’attache aux figures de la vie quotidienne des bords de mer : pêcheurs, laveuses...
C’est la découverte de la Bretagne dans la deuxième moitié des années 1860 qui va amener Eugène Boudin à explorer de nouveaux horizons picturaux. Au cours de ce séjour, Eugène Boudin est captivé par les effets lumineux des “ chaumières aux fortes ombres “. Les paysages bretons lui permettent également de travailler une large gamme de tons gris, dans des compositions qu’il anime de quelques notes de couleurs, d’une remarquable intensité.
De tous les sites du nord de la France, Berck est sans doute l’un de ceux qu’Eugène Boudin préfère. Il en peint les différents aspects, la plage, les dunes, les chalets et surtout la vie des pêcheurs. En dépit de l’immensité du lieu, il y exécute des oeuvres d’une remarquable intimité, ou` transparaît une certaine tendresse. Berck constitue ainsi un contrepoint à Deauville, plage mondaine par excellence.
Mais il n’est pas une année où Eugène Boudin n’aura passé une partie de l’été en Normandie. Son lieu de prédilection est Trouville, qui lui offre de nombreux sujets à représenter : pêcheurs, laveuses, marchés… Si Eugène Boudin aime “ laisser à [sa] peinture (…) l‘aspect de l‘esquisse “, les exigences de ses clients l’amènent à réaliser des compositions plus finies. La démarche d’Eugène Boudin est sous-tendue par cette recherche d’équilibre entre deux exigences apparemment incompatibles et sa peinture résulte d’un compromis entre ses goûts personnels et les contraintes commerciales.

Salle 7 – « Je dois tout à Boudin » (lettre de Claude Monet à Gustave Geffroy, Giverny, 8 mai 1920)
De chaque lieu qu’il visite, Eugène Boudin peint plusieurs déclinaisons, qui varient selon les heures du jour, les saisons ou les marées. C’est par goût qu’il procède ainsi, mais aussi pour répondre aux exigences des amateurs, qui le sollicitent pour peindre un corpus relativement restreint de sujets. Le rendu de la lumière reste sa principale préoccupation et ses tableaux témoignent de ses recherches sans cesse renouvelées dans ce domaine.
Son goût pour l’étude de la lumière amène ainsi Eugène Boudin à mettre très tôt en oeuvre le principe de la “ série “. Cette approche novatrice préfigure celle que systématisera par la suite Monet, dont la série des cathédrales de Rouen a été réalisée dix ans après les études de la cathédrale d’Abbeville par Eugène Boudin. Il existe une réelle filiation entre les deux peintres et Monet déclarera d’ailleurs, bien après la mort de son prédécesseur : “ je considère Eugène Boudin comme mon maître “.
C’est ainsi que le Clocher de Sainte-Catherine du Musée Boudin d’Honfleur a longtemps été attribué à Monet, malgré sa très grande proximité avec le tableau “ frère “ d’Eugène Boudin conservé à l’University of Michigan Museum of Art. La confrontation exceptionnelle de ces deux oeuvres, rendue possible par l’exposition, lève le doute et montre qu’elles sont très vraisemblablement toutes deux de la main d’Eugène Boudin.

Salle 8 – La lumière du Sud et les derniers voyages
À la fin de sa vie, après la lumière argentée des régions septentrionales, Eugène Boudin se laisse séduire par “ la clarté des ciels “ sur la Côte d’Azur. Ses séjours ont un effet libérateur sur sa peinture. Le climat est en effet assez agréable pour lui permettre de finir ses oeuvres sur nature et, devant le motif, sa touche retrouve toute sa souplesse. “ Les yeux fascinés par [la] lumière intense “ du Midi, il peint dans des tons d’un extrême raffinement des paysages où la mer et le ciel semblent se mêler en une seule immensité.
Il se sait maintenant en pleine possession de ses moyens, mais il n’ignore pas que ses années sont comptées. Aussi, en 1895, il part pour Venise. Il y découvre une “ atmosphère unique au monde, [des] horizons aux tons perlés “. Il y surprend “ des gris incomparables de finesse et de légèreté “ et développe ces tonalités qui donnent une vibration particulière à ses dernières oeuvres.
En 1896, Eugène Boudin écrit : “ Le voyage à Venise aura été mon chant du cygne “. Toutefois, en 1897, bien que déjà très affaibli, il entreprend un périple sur les lieux qu’il a aimés, Honfleur et la Bretagne. Il y esquisse de nombreux tableaux, telle cette vue de la pointe du Raz dont la composition inhabituelle est un hommage à la série de peintures exécutées par Monet à Belle-Île, en 1886. Conscient de vivre la fin d’une époque, Eugène Boudin s’inspire à son tour des oeuvres de celui qui lui avait écrit en 1892 : “ je n'ai pas oublié que c'est vous qui, le premier, m'avez appris à voir et à comprendre “.