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“Lorna Simpson” article 960
au Jeu de Paume, Paris

du 28 mai au 1er septembre 2013



jeudepaume.org

 

 

© Anne-Frédérique Fer, vernissage presse, présentation par Lorna Simpson et Joan Simon, le 27 mai 2013.

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Légendes de gauche à droite :
1/  Lorna Simpson, Chess, 2013 [Échecs]. Installation vidéo HD avec trois projections noir et blanc, son, 10’25” (en boucle). Composition et interprétation par Jason Moran. Courtesy l’artiste, Salon 94, New York, et Galerie Nathalie Obadia, Paris/Bruxelles. © Lorna Simpson.
2/  Lorna Simpson, Cloudscape, 2004 [Paysage nuageux]. Photogramme tiré de la projection vidéo, noir et blanc, son, 3’ (en boucle). Centre national des arts plastiques, achat en 2005 © Lorna Simpson/Centre national des arts plastiques. Photo : courtesy l’artiste, Salon 94, New York, et Galerie Nathalie Obadia, Paris/Bruxelles.

 


960 Lorna Simpson
Interview de Joan Simon, commissaire de l'exposition,
par Anne-Frédérique Fer, à Paris, le 27 mai 2013, durée 5'05". © FranceFineArt.

 


extrait du communiqué de presse :

 

Commissaires : Joan Simon

 

Qu’elle réalise des images fixes ou des images en mouvement, Lorna Simpson (née en 1960) se sert de l’appareil de prises de vue comme d’un catalyseur pour interroger l’identité et le genre, les genres et l’histoire, la race et la classe sociale, le fait et la fiction, le souvenir et le sens des choses. Par ces images qu’elle crée (inséparables des textes qu’elle écrit pour les accompagner), par les sons qu’elle choisit pour ses vidéos, par sa façon de mettre en regard des photographies anciennes et la réinterprétation qu’elle en donne, elle remet en question, nuance ou repense les présupposés sur la « vérité » photographique. Le Jeu de Paume présente la première grande exposition consacrée à Lorna Simpson en Europe, exposition qui commence par ses premiers photo-textes créés dans les années 1980 et se termine avec sa dernière installation vidéo, Chess (2013) [Échecs] présentée ici pour la première fois. Lorna Simpson vit et travaille à Brooklyn, à New York.

Pour certaines oeuvres présentées dans cette exposition, Simpson s’appuie sur des techniques photographiques traditionnelles – le tirage gélatino-argentique par exemple – qu’elle combine, dans une synthèse intime, à des textes à caractère oral (Salle 1). Pour d’autres, en revanche, elle crée des associations nouvelles : c’est le cas des sérigraphies sur feutre, dont les images et les écrits qui les accompagnent font penser au film noir (Salle 2), d’une installation vidéo sur trois canaux, qui repose sur des photographies historiques et sur d’autres qu’elle-même a réalisées jadis (Salle 3), des constellations de Photomaton récupérés, associés à des dessins qui en isolent certains détails, ou encore des photographies anciennes associées à celles qu’elle-même remet en scène (Salle 4) ; c’est le cas enfin d’une vidéo sur la performance et sur le thème du déroulement du temps et de son inversion (Salle 5).
Le parcours de l’exposition met en évidence des tournants dans l’oeuvre de l’artiste, mais aussi des continuités thématiques et iconographiques. Les oeuvres les plus anciennes exposées ici sont les photo-textes performatifs et protocinématographiques, qui commencent avec Gestures/Reenactments [Gestes vécus/Gestes rejoués], (1985), titre qui exprime bien par ses deux volets la dimension visuelle et verbale du travail de Simpson, tout en illustrant de façon paradigmatique ce que sera sa pratique conceptuelle durant les trois décennies suivantes. Simpson apparaît en personne – ce qui rare dans son oeuvre – dans deux pièces exposées ici, intimement liées : la saga photographique 1957-2009 (2009), Salle 4, pour laquelle l’artiste joue des scènes reprises de photographies anciennes, et la vidéo Chess [Échecs], (2013), où elle introduit des scènes inspirées de ces mêmes photographies.

 

À propos de l’exposition par Joan Simon
Que Lorna Simpson se soit souvent décrite comme attentive à ce qui se voit aussi bien qu’à ce qui s’entend constitue un indice précieux pour comprendre sa démarche et les thèmes qu’elle aborde. Ses premiers travaux (1978-1980) – des photographies en noir et blanc dans la veine de la street photography – montrent des gestes témoignant d’une intimité entre les sujets photographiés, l’artiste enregistrant non pas tant un moment décisif dans l’interaction entre les personnages que celui de leur entrée en relation. Certaines de ces images semblent capter un échange de regard ou des pauses dans une conversation ; d’autres nous font entrevoir une occasion particulière, un moment ritualisé facilement identifiable à une robe de communiante ou de mariée : le silence devient alors palpable, ce qui se dit entre personnes étant hors de portée de notre ouïe.

Lorsque, à partir de 1985, Lorna Simpson commence à mettre en scène ses images et à leur adjoindre des textes, la proximité se fait plus grande. L’artiste nous autorise à voir un corps noir, soigneusement cadré, que le geste et la blancheur du vêtement rendent abstrait, tout en nous permettant de lire une série de commentaires en forme de discours rapporté, qui réorientent la représentation et lui donnent une complexité supplémentaire. Si l’image elle-même enregistre le geste, le récit, quant à lui, fige l’image dans un présent immuable doté d’une mémoire, d’un passé. Le premier montage photo-texte, réalisé en 1985, s’intitule Gestures/Reenactments [Gestes vécus/Gestes rejoués](titre qui fut aussi celui de la toute première exposition de l’artiste, la même année) ; de fait, toute l’oeuvre de Lorna Simpson semble construite sur la juxtaposition du geste et de sa reprise – du sens qui surgit, de l’écart entre les deux, de sa résonance. Dans l’espace ouvert par cet écart, le spectateur/lecteur est invité à pénétrer, à condition d’assentir à des vérités inaliénables : reconnaître que voir n’est pas nécessairement croire ; que ce que nous voyons peut être modifié non seulement par nos expériences propres et nos présupposés individuels, mais aussi, et de façon essentielle, par ce que nous entendons.